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03/12/2018 | FRANCE | N°17/08163

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 03 décembre 2018, 17/08163


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 03 DECEMBRE 2018

hg



N° 2018/ 899













N° RG 17/08163 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAOEK







SA SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT R URAL PROVENCE ALPES COTE D'AZUR (SAFER)





C/



Jean-Louis X...

André X...



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Y...

Me Z...



























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 06 Avril 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01589.





APPELANTE



SA SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT R...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 03 DECEMBRE 2018

hg

N° 2018/ 899

N° RG 17/08163 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAOEK

SA SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT R URAL PROVENCE ALPES COTE D'AZUR (SAFER)

C/

Jean-Louis X...

André X...

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Y...

Me Z...

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TARASCON en date du 06 Avril 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01589.

APPELANTE

SA SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL PROVENCE ALPES COTE D'AZUR (SAFER) Prise en la personne de son Directeur Général Délégué en exercice

RCS Manosque, sise [...]

représentée et assistée par Me Julien Y... de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

INTIMES

Monsieur Jean-Louis X...

demeurant [...]

représenté et assisté par Me Sophie Z... de la SCP Z..., avocat au barreau de TARASCON, plaidant

Monsieur André X...

demeurant [...]

représenté et assisté par Me Julien Y... de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Octobre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GIAMI, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Madame Laure BOURREL, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Sophie LEONARDI, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Priscilla BOSIO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Décembre 2018.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Décembre 2018

Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Priscilla BOSIO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte sous seings privés du 30 avril 2014, André X... a mis à disposition de la SAFER, au visa de l'article L142-6 du code rural, les parcelles cadastrées à Eyragues, lieudit «les Chavannes» section [...] et [...], lieudit Mas X... section [...], [...], [...], [...], [...] et [...] pour une superficie totale de 5ha 12a 6ca.

Par acte du 24 septembre 2015, Jean Louis X... a fait assigner la SAFER et son père, André X... devant le tribunal de grande instance de Tarascon en sollicitant, au visa de l'article 595 alinéa 4 du code civil de voir:

-dire et juger que André X... en sa qualité d'usufruitier n'a pas recueilli son consentement en qualité de nu propriétaire lors de la signature de la mise à disposition du fonds rural selon convention en date du 30 avril 2014

-prononcer la nullité de la convention signée le 30 avril 2014 entre André X... et la SAFER avec toute conséquence que de droit

-ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir

-déclarer le présent jugement à intervenir commun à la SAFER

-condamner André X... à payer la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la SCP Cardonnel-Z....

Par jugement du tribunal de grande instance de Tarascon en date du 6 avril 2017, il a été statué en ces termes:

«Prononce la nullité de la convention signée le 30/04/2014 entre M André X... et la SAFER pour les parcelles [...], [...] , [...], [...], [...], [...] ainsi que l'avenant à cette convention sur les mêmes parcelles,

ordonne l'expulsion de la SAFER et de tous occupants de son chef,

déclare le présent jugement commun à la SAFER,

déboute M André X... de toutes ses demandes,

condamne M André X... à payer à M Jean Louis X... la somme de 1 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,

condamne M André X... aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP Cardonnel Z...,

ordonne l'exécution provisoire du présent jugement».

Le 26 avril 2017, la SAFER a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et signifiées le 28 novembre 2017 auxquelles il convient de se référer, la SAFER entend voir, au visa des articles 595 du code civil et L142-6 du code rural et de la pêche maritime:

- réformer le jugement,

- rejeter les prétentions de Jean Louis X...

- condamner Jean Louis X... à lui payer 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et signifiées le 28 novembre 2017 auxquelles il convient de se référer, André X... sollicite, au visa des articles 595 du code civil et 142-6 du code rural et de la pêche maritime:

à titre principal :

-de dire bonnes et valables les conventions de mise à disposition conclues avec la SAFER ainsi que leurs actes subséquents.

-dès lors réformer le jugement entrepris

à titre subsidiaire :

-l'autoriser à passer de telles conventions.

-débouter Jean-Louis X... de ses prétentions,

-le condamner à 2 500 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe et signifiées le 5 janvier 2018 auxquelles il convient de se référer, Jean-Louis X... entend voir:

- constater qu'il est nu-propriétaire des parcelles [...] et [...],

- dire et juger que les parcelles [...] et [...] n'ont pas à être exclues de la demande de nullité de la convention au motif qu'il n'en serait pas nu-propriétaire,

- réformer le jugement sur ce point et prononcer la nullité de la convention également pour les parcelles [...] et [...],

- confirmer le jugement pour le surplus,

Vu l'article 595 alinéa 4 du code civil,

- prononcer la nullité de la convention signée le 30 avril 2014 entre André X... et la SAFER et de son avenant avec toute conséquence que de droit

- dire et juger que André X... en sa qualité d'usufruitier n'a pas recueilli son consentement lors de la signature de la mise à disposition du fonds rural selon convention en date du 30 avril 2014 et de son avenant

- déclarer l'arrêt à intervenir commun à la SAFER

- débouter la SAFER et André X... de toutes leurs prétentions

- condamner la SAFER et André X... à payer la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la SCP Cardonnel- Z... sous ses affirmation de droit.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 octobre 2018.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la qualité de nu propriétaire de Jean-Louis X...:

Il ressort de l'acte de donation partage du 23 juillet 2001 que Jean-Louis X... est notamment nu-propriétaire des parcelles cadastrées à Eyragues, lieudit «les Chavannes» section [...] et [...], lieudit Mas X... section [...], [...], [...], [...], [...] et [...].

C'est donc à tort que le premier juge a considéré qu'il ne justifiait pas de cette qualité pour les parcelles cadastrées à Eyragues, lieudit «les Chavannes» section [...] et [...], et qu'il ne pouvait demander la nullité de la convention relativement à ces parcelles.

Sur la demande en nullité de la convention du 30 avril 2014 :

Il ressort des dispositions des articles 595 alinéa 4 du code civil et L142-6 du code rural et de la pêche maritime, dans sa version applicable lors de l'adoption de la convention que:

«L'usufruitier ne peut, sans le concours du nu-propriétaire, donner à bail un fonds rural... A défaut d'accord du nu-propriétaire, l'usufruitier peut être autorisé par justice à passer seul cet acte.»

«Tout propriétaire peut, par convention, mettre à la disposition d'une société d'aménagement foncier et d'établissement rural, en vue de leur aménagement parcellaire ou de leur mise en valeur agricole, pour autant que cette dernière soit effectuée par des agriculteurs, conformément au but fixé par les articles L. 141-1 à L. 141-5, des immeubles ruraux libres de location. Ces conventions sont dérogatoires aux dispositions de l'article L. 411-1. Leur durée ne peut excéder trois ans. Toutefois, pour une superficie inférieure à deux fois la surface minimum d'installation, cette durée peut être portée à six ans, renouvelable une seule fois.

La durée des conventions est de six ans au maximum, renouvelable une fois, pour les immeubles ruraux situés dans les périmètres de protection et d'aménagement des espaces naturels et agricoles délimités en application de l'article L. 143-2 du code de l'urbanisme, ainsi que pour les conventions portant sur la mise à disposition, pour un usage de pâturage extensif saisonnier, d'immeubles ruraux situés dans les communes mentionnées à l'article L. 113-2 du présent code.

A cet effet, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural consent des baux qui ne sont soumis aux règles résultant du statut du fermage que pour ce qui concerne le prix. Ces baux déterminent, au moment de leur conclusion, les améliorations que le preneur s'engage à apporter au fonds et les indemnités qu'il percevra à l'expiration du bail.

A l'expiration de ce bail, lorsque celui-ci excède une durée de six ans, le propriétaire ne peut donner à bail dans les conditions de l'article L. 411-1 le bien ayant fait l'objet de la convention ci-dessus sans l'avoir préalablement proposé dans les mêmes conditions au preneur en place».

Par l'acte du 30 avril 2014, André X... a mis à disposition de la SAFER, au visa de l'article L142-6 du code rural, les parcelles cadastrées à Eyragues, lieudit «les Chavannes» section [...] et [...], lieudit Mas X... section [...], [...], [...], [...], [...] et [...] pour une superficie totale de 5ha 12a 6ca.

Par avenant non daté, des modifications relatives aux parcelles louées, (parcelles [...], [...] et [...] exclues et superficie louée réduite à 4ha1a 11 ca) au montant de la redevance annuelle, au terme de la location désormais fixé au 31 juillet 2019 et à certaines conditions particulières ont été convenues.

Bien que cette convention établie au visa de l'article L142-6 du code rural déroge aux dispositions de l'article L 411-1 du code rural, elle a été conclue pour une durée de plus de cinq ans au prix d'une redevance annuelle de 1 000 € ramenée à 800 €, étant même précisé qu'en cas de décès d'André X..., la convention se poursuivrait jusqu'à son terme.

La nature de cette convention n'est pas assimilable à une convention d'occupation précaire qui peut être consentie sans accord du nu-propriétaire puisqu'elle ne correspond pas à celles définies par l'article L411-2 du code rural, a une durée minimale de six ans et consacre des droits de préférence à la SAFER en cas de vente.

Elle s'analyse clairement en un bail sur un fonds rural qui nécessitait donc l'accord du

nu-propriétaire évoqué par l'article 595 alinéa 4 du code civil.

Faute d'avoir été consentis avec l'accord de Jean-Louis X..., la convention conclue le 30 avril 2014 entre André X..., usufruitier et la SAFER, ainsi que son avenant doivent être annulées, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur la demande d'autorisation de passer les conventions:

Si l'article 595 alinéa 4 du code civil prévoit qu'à défaut d'accord du nu-propriétaire, l'usufruitier peut être autorisé par justice à passer seul cet acte, cette autorisation ne peut être donnée à posteriori pour régulariser des actes annulés.

L'argument invoqué de l'information donnée à Jean Louis X... par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 avril 2014 sur la passation de la convention litigieuse et de son absence d'opposition pendant un an, ne peut valoir l'autorisation requise de sa part pour la conclure, ni justifier de formuler la demande d'autorisation seulement dans le cadre de l'instance en contestation des conventions annulables, dès lors qu'aucun accord express du nu-propriétaire n'avait été recueilli.

Le jugement ayant rejeté cette demande sera donc confirmé.

Sur les demandes dirigées contre la SAFER:

Le jugement ayant ordonné l'expulsion de la SAFER et de tous occupants de son chef doit être confirmé, s'agissant d'une conséquence de l'annulation de la convention de mise à disposition des terres.

Le présent arrêt est nécessairement commun à la SAFER, partie au procès et à la convention annulée.

Sur les dépens et frais irrépétibles:

André X... et la SAFER succombant à l'instance et la SAFER succombant en son appel, ils seront condamnés par moitié chacun aux dépens avec distraction pour ceux d'appel dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

La SAFER sera en outre condamnée à payer 2 000 euros à Jean-Louis X... en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il ne sera pas mis à la charge d'André X... d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Jean-Louis X....

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a exclu les parcelles cadastrées à Eyragues, lieudit «les Chavannes» section [...] et [...] de la demande en nullité de la convention et en ce qu'il a condamné André X... à payer la somme de 1000 € (à Jean-Louis X...) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que la nullité de la convention conclue entre André X... et la SAFER le 30 avril 2014 et de son avenant porte également sur les parcelles cadastrées à Eyragues, lieudit «les Chavannes» section [...] et [...], et non seulement sur les parcelles cadastrées lieudit Mas X... section [...], [...], [...], [...], [...] et [...],

Condamne la SAFER et André X..., pour moitié chacun, aux dépens avec distraction pour ceux d'appel dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la SAFER à payer 2 000 euros à Jean-Louis X... en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile de Jean-Louis X... dirigée contre André X....

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 17/08163
Date de la décision : 03/12/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°17/08163 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-03;17.08163 ?
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