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20/05/2022 | FRANCE | N°18/18122

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 20 mai 2022, 18/18122


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1



ARRÊT AU FOND

DU 20 MAI 2022



N° 2022/197



Rôle N° RG 18/18122 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDLEF







[P] [Y]





C/





SA BERGER LEVRAULT













Copie exécutoire délivrée

le :



20 MAI 2022



à :



Me Juliette HUA de l'AARPI OLLIER JEAN MICHEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Christine CASABIANCA, avoc

at au barreau D'AIX-EN-PROVENCE



+Copie Pôle Emploi PACA



































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'AIX EN PROVENCE en date du 18 Octobre 2018 enregistré au répertoire géné...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

ARRÊT AU FOND

DU 20 MAI 2022

N° 2022/197

Rôle N° RG 18/18122 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDLEF

[P] [Y]

C/

SA BERGER LEVRAULT

Copie exécutoire délivrée

le :

20 MAI 2022

à :

Me Juliette HUA de l'AARPI OLLIER JEAN MICHEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Christine CASABIANCA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

+Copie Pôle Emploi PACA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'AIX EN PROVENCE en date du 18 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 14/01338.

APPELANT

Monsieur [P] [Y], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Juliette HUA de l'AARPI OLLIER JEAN MICHEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SA BERGER LEVRAULT, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Christine CASABIANCA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle CASINI, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Mme Emmanuelle CASINI, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2022

Signé par Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Monsieur [Y] a été embauché par la société BERGER LEVRAULT le 26 août 2013 en qualité de formateur, pour une rémunération brute mensuelle de 2 400 euros bruts. Ses fonctions consistaient à se déplacer sur le site des clients de la société, dont l'activité est celle de l'édition de logiciels et de leurs services associés à destination de l'administration publique et de la santé, pour assurer leur formation à l'utilisation de ces logiciels.

Monsieur [Y], néophyte dans le domaine informatique, a reçu une formation théorique du 27 août au 11 octobre 2013 sur divers logiciels de la gamme dédiée essentiellement à la paye et la comptabilité ainsi qu'à l'outil N4DS (déclaration dématérialisée des données sociales) et une formation théorique, consistant à des interventions en doublon jusqu'au 29 novembre 2013.

Monsieur [Y] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement le 24 mars 2014 et licencié par lettre recommandée du 8 avril 2014 pour insuffisance professionnelle.

Il a été dispensé d'effectuer son préavis, celui-ci étant d'une durée de 3 mois en application d'un accord négocié au sein de l'entreprise.

Monsieur [E] [Y] a saisi le conseil de prud'hommes d'Aix en Provence afin de solliciter des dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Suivant jugement de départage du 18 octobre 2018, le conseil de prud'hommes a dit que le licenciement de Monsieur [Y] reposait sur une cause réelle et sérieuse, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

Monsieur [Y] a relevé appel de cette décision.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 13/02/2019, il demande à la cour :

d'INFIRMER le Jugement rendu par le Juge départiteur le 18 octobre 2018

En conséquence,

CONSTATER que la lettre de licenciement est insuffisamment motivée ;

CONSTATER que l'employeur a manqué à son obligation d'adaptation du salarié à son emploi en ce que la formation dispensée était manifestement lacunaire et n'a pas permis au salarié d'être opérationnel;

CONSTATER que la Société BERGER LEVRAULT ne démontre pas une quelconque insuffisance professionnelle ;

DIRE que le licenciement dont Monsieur [Y] a fait l'objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNER la Société BERGER LEVRAULT au paiement des sommes suivantes :

-28.800,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

-10.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

-2.000 euros au titre de l'article 700 CPC ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.

Par conclusions notifiées le 17 avril 2019 par voie électronique, la société BERGER LEVRAULT demande à la Cour de :

CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement dont appel

DIRE que le licenciement de Monsieur [Y] repose sur une cause réelle et sérieuse.

LE DEBOUTER en conséquence de l'ensemble de ses prétentions.

LE CONDAMNER au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux éventuels dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée suivant ordonnance du 3 février 2022.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur le bien fondé du licenciement

Monsieur [E] [Y] soutient en premier lieu que la lettre de licenciement en date du 8 avril 2014 a été rédigée dans des termes très imprécis, non explicites, non objectifs et invérifiables. Il indique en second lieu qu'alors qu'il n'était pas qualifié en informatique lors de son recrutement et n'avait exercé qu'en qualité de 'formateur comptable', il lui a été reproché une insuffisance professionnelle, moins de 7 mois après son intégration, sans lui laisser la chance de s'améliorer et en lui dispensant une formation insuffisante et inadéquate. A ce titre, il expose qu'il a été formé sur 5 logiciels au lieu de 3 ; que sa formation n'a été que 'parcellaire' ; qu'ayant alerté à plusieurs reprises sur ses difficultés, il n'a pas reçu l'aide escomptée de ses supérieurs hierarchiques et l'employeur a pris le risque de l'envoyer seul sur le terrain en connaissance de cause. Enfin, il estime que la société BERGER LEVRAULT ne démontre pas son insuffisance professionnelle, étant encore en formation lorsqu'il a été évalué en octobre 2013, ayant perçu une prime de résultat en février 2014 et l'employeur ne produisant qu'un seul courrier d'un client insatisfait, l'EPADH PROTESTANT de [Localité 3], rédigé plus de 3 mois après son intervention.

La société BERGER LEVRAULT fait valoir que la lettre de licenciement faisant état de griefs matériellement vérifiables, est parfaitement motivée. Elle rapelle que Monsieur [E] [Y], néophite en informatique mais dont la qualification de 'formateur en comptabilité- gestion' était adaptée au poste, a bénéficié d'une période de 3 mois entièrement dédiée à la formation théorique et pratique, avant d'intervenir sur site de manière autonome.

Elle estime avoir rempli son obligation d'adaptation en lui dispensant, ainsi qu'aux autres salariés recrutés, une formation complète sur les logiciels concernés avec l'appui de sa hiérarchie et de ses collègues. Elle soutient que son formateur a relevé le 10 septembre et le 8 octobre 2013, ''un faible niveau en comptabilité' et 'des difficultés' et que son responsable a noté, lors d'intervention sur le terrain en doublon le 9 janvier 2014, 'des explications confuses et un niveau très très bas' ; que la prime reçue était simplement destinée à compenser l'absence d'objectif pour l'année 2013 ; que plusieurs clients (EPADH les Terrasses de Caroux et la Maison Protestante de [Localité 3]) se sont plaints des interventions réalisées sur site en décembre 2013 ; qu'au vu des difficultés rencontrées, il a été affecté en support client à distance, sans donner toutefois satisfaction ; qu'il est établi que ses compétences étaient manifestement insuffisantes pour être maintenu dans son poste.

***

Il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige. Il forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l'espèce, la lettre recommandée adressée à Monsieur [Y] le 8 avril 2014 est ainsi libellée :

« Nous sommes au regret de vous informer, par la présente, que nous avons décidé de procéder à votre licenciement pour motif personnel, en regard des insuffisances constatées dans le cadre de la réalisation de vos missions et de vos difficultés à mettre en application les données nécessaires dans ce cadre dont les répercussions portent préjudice aux attentes de nos clients en termes de formation sur nos produits sur les départements dans lesquels vous intervenez.

Il apparait que malgré l'accompagnement spécifique dont vous avez bénéficié pendant 3 mois les difficultés perdurent et ne vous permettent pas d'intervenir en clientèle pour réaliser les prestations commandées de manière conforme.

Certains clients manifestent désormais leur insatisfaction. Nous vous avons affecté, en regard de ces difficultés, sur des missions de support à distance, nécessitant un niveau d'autonomie qui nous paraissait plus adapté. Vos interventions dans ce cadre ont généré de trop nombreuses erreurs de manipulation.

Compte tenu de ce qui précède et des insuffisances que nous avons constatées il ne nous est plus possible de vous maintenir à votre poste sans prendre le risque de porter atteinte à notre activité commerciale (')».

Aux termes des dispositions de l'article L1232-6 du code du travail, dans sa version applicable au jour du licenciement, la lettre de licenciement doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur. Le ou les griefs doivent être suffisamment précis pour être matériellement vérifiables.

En l'espèce, la société BERGER LEVRAULT invoque des insuffisances constatées dans le cadre de la réalisation des missions de Monsieur [Y], des difficultés ne permettant pas au salarié d'intervenir en clientèle pour réaliser les prestations commandées, des erreurs de manipulation lors de son affectation sur des missions de support à distance, le tout entrainant une insatisfaction des clients.

La cour constate qu'il s'agit de griefs suffisamment précis et identifiables pour être matériellement vérifiables et que la motivation de la lettre de licenciement répond ainsi aux exigences légales.

Le motif du licenciement invoqué par l'employeur est l'insuffisance professionnelle de Monsieur [Y] dans la réalisation de ses missions, malgré trois mois de formation dispensée en interne.

A ce titre, il appartient à la société BERGER LEVRAULT de démontrer d'une part qu'elle a satisfait à l'obligation d'adaptation du salarié aux missions qui lui étaient confiées en mettant en place une formation adaptée et d'autre part de rapporter la preuve d'une insuffisance professionnelle due à la carence du salarié.

En l'espèce, l'employeur reconnait que Monsieur [Y] a été recruté alors qu'il disposait d'une expérience et d'une qualification de 'formateur en comptabilité et gestion' mais d'aucune expérience spécifique en informatique (cf également CV de l'appelant).

La formation théorique et pratique dispensée en interne par la société BERGER LEVRAULT se devait en conséquence d'être particulièrement complète et qualifiante afin que le salarié puisse valablement exercer les missions de formateur sur les logiciels dédiés.

Il résulte du planning des formations de Monsieur [Y] qu'il a d'abord reçu une formation théorique de 4 semaines du 26 août 2013 au 25 septembre 2013 portant sur cinq logiciels différents qu'il découvrait en intégralité, Medicor, Salarior, Compt'or, Amortiss'or et N4DS.

Si l'employeur verse aux débats le compte-rendu du formateur le 10 septembre 2013 concernant Monsieur [Y] précisant 'garçon sympathique mais des soucis de compréhension' et le compte-rendu du 8 octobre 2013 qui indique qu'il rencontre 'des difficultés', il convient de relativiser ces appréciations au regard de l'absence de qualification informatique antérieure de l'appelant et de l'appréciation générale portée sur les autres participants, le formateur précisant 'je suis surpris du faible niveau en comptabilité pour 4 personnes sur 8. J'ai ressenti de l'inquiétude liée à tous les cursus déjà démarrés (Médicor, Salarior, Comptor)'.

En outre, les comptes rendus de formation établis par Monsieur [Y] les 20, 25, 27 et 28 octobre 2013, à la demande de l'employeur, et non contestés par ce dernier, montrent que le salarié a essentiellement été formé à répondre à des questions pour des utilisateurs réguliers et expérimentés et non à réaliser des démarrages de logiciels pour de nouveaux clients ; que les 'doublons passifs' initialement prévus ne consistaient pas à observer le formateur expérimenté mais consistaient surtout à des ateliers questions-réponses ne lui permettant pas de comprendre le réel travail du formateur ; qu'il a été contraint de s'auto-former depuis son domicile sur les logiciels et qu'aucune formation 'back-office' ne lui a été dispensée.

Le 8 octobre 2013, alors que la formation de 3 mois n'était pas achevée, Monsieur [O], responsable de la société BERGER LEVRAULT, écrivait à ses collaborateurs au sujet du retour de formation des salariés : 'De manière générale ils sont demandeurs de doublons supplémentaires pour Salarior. JE NE PARTAGE PAS. Ils n'ont pas à rougir de leur niveau de compétence (la preuve avec VDES!!!). J'estime que nous pouvons les missionner pour des démarrages de nouveaux clients (pas de révision dans l'immédiat) Il est clair que nous prenons quelques risques avec philippe et [E] ([Y]) ...tentons...'.

L'employeur a donc missionné Monsieur [Y] en intervention clientèle alors même qu'il savait qu'il n'était pas encore opérationnel.

Si Monsieur [O] écrivait à sa hierarchie dans un courriel du 9 janvier 2014 : 'Effectivement il y a eu un Go planif pour la N4DS, [E] ([Y]) a eu le même niveau de formation 'interne' que les autres nouveaux ! J'ai eu l'occasion de faire un doublon actif/passif d'une journée avec [E] et bien que la situation sur le terrain ne soit pas simple, j'ai été plus que déçu de cette journée (explications confuses et niveau très très bas)', il ressort des échanges de mails entre Monsieur [Y] et Monsieur [O] des 12 et 21 novembre 2013 et entre le salarié et Mme [S] et Monsieur [L] entre le 2 décembre 2013 et le 7 février 2014 qu'il a sollicité de l'aide de ses supérieurs hierarchiques à plusieurs reprises, notamment sur le programme Salarior et le programme N4DS, ces derniers ne lui proposant que de les appeler en cas de problème ou de consulter des 'webinaires'.

De même, alors que le salarié l'alertait sur une difficulté de planning, l'employeur a privilégié la planification d'intervention de Monsieur [Y] en clientèle par rapport aux 'doublons actifs' qu'il aurait dû effectuer dans le cadre de sa formation (cf échanges mails de décembre 2013).

Il résulte de ces éléments que l'employeur ne démontre pas avoir dispensé à Monsieur [Y] une formation suffisante et adaptée à la réalisation de ses missions professionnelles, ce qui ne lui a pas permis d'être pleinement opérationnel dans les mois qui ont suivi.

S'agissant de l'insuffisance professionnelle, la société BERGER LEVRAULT, qui invoque dans la lettre de licenciement la plainte de plusieurs clients au sujet des interventions réalisées par Monsieur [E] [Y] et notamment celle de l'EHPAD Les Terrasses de Caroux, ne verse aucune pièce s'agissant de cet établissement.

Le seul courrier produit par l'employeur afin de caractériser l'insuffisance professionnelle émane de L'EHPAD Maison Protestante de [Localité 3] pour une intervention réalisée les 9 et 10 décembre 2013 indiquant que le formateur, par ailleurs non désigné, ne maitrisait pas les fonctions avancées du logiciel Organisator, qu'il a dû appeler ses référents à de multiples reprises et se 'formait en même temps que nous', réalisant des paramètres erronés.

Or force est de constater que ce courrier est daté du 21 mai 2014, soit postérieurement au licenciement et ne peut donc être invoqué par la société BERGER LEVRAULT à l'appui de celui-ci.

En outre, ce seul compte-rendu négatif porte sur une période contemporaine de la fin de formation de Monsieur [Y] qui s'achevait le 29 novembre 2013, à une période où il sollicitait justement un complément de formation.

Il convient enfin de le relativiser au vu d'autres comptes rendus de clients produits par le salarié, notamment celui de L'EHPAD Dame du Bourg de Dignes les Bains en date du 19 décembre 2013 qui relevait 'la qualité du formateur'.

Enfin, la cour constate que l'employeur n'apporte aucun élément permettant de caractériser le grief relatif aux erreurs de manipulations qu'aurait commises Monsieur [Y] lors de son positionnement sur des missions de support à distance.

Il s'ensuit que le licenciement de Monsieur [E] [Y] pour insuffisance professionnelle ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.

La décision du conseil de prud'hommes d'Aix en Provence sera infirmée de ce chef.

Sur les demandes indemnitaires

L'entreprise comptant habituellement plus de 10 salariés mais Monsieur [Y] justifiant d'une ancienneté inférieure à 2 ans, il y a lieu d'appliquer les dispositions de l'article L1235-5 du code du travail, le salarié pouvant prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi, sans application de minima.

Compte tenu de son âge au moment de la rupture du contrat de travail (45 ans), de son ancienneté dans la société (7 mois), de sa qualification, de sa rémunération (2.400 euros brut), de la production d'une attestation de POLE EMPLOI mentionnant son admission à l'ARE (allocation chômage) sur une période de plus de 4 années du 8 juillet 2014 au 31 août 2018, ainsi que des relevés de situation correspondant, il y a lieu de lui allouer la somme de 9.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

S'agissant du préjudice moral sollicité, Monsieur [Y] justifie qu'il exerçait les fonctions de comptable en contrat à durée indéterminée auprès de la société LOXAM, avant d'être recruté par la société BERGER LEVRAULT, qu'il s'est beaucoup investi pour se former à son nouveau poste de formateur, travaillant le soir et le week-end comme en attestent ses comptes rendus de formation, qu'estimant qu'il ne progressait pas assez vite sur l'utilisation des logiciels, ses supérieurs hierarchiques l'ont mis au placard sur un poste en back office pour lequel il n'a pas été formé, lui faisant perdre toute estime de lui, puis l'entreprise l'a licencié sans lui laisser le temps de faire ses preuves ; qu'il a très mal vécu la rupture de son contrat de travail, justifiant avoir dû consulter un médecin et suivre un traitement anxiolytique.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de dire que Monsieur [Y] a subi un préjudice moral du fait du comportement de son employeur et de condamner la société BERGER LEVRAULT, en application de l'article 1382 du code civil, à lui payer la somme de 1.000 euros en réparation de ce préjudice.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'équité commande d'infirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles, de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et d'allouer à ce titre la somme de 1500 euros à Monsieur [E] [Y].

L'employeur, qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance, par infirmation du jugement entrepris, et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et en matière prud'homale,

Infirme le jugement de départage du conseil de prud'hommes d'Aix en Provence en date du 18 octobre 2018 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société BERGER LEVRAULT à payer à Monsieur [E] [Y]

les sommes suivantes :

-9.000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral

Y ajoutant :

Condamne la société BERGER LEVRAULT à payer à Monsieur [E] [Y] une somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [E] LEVRAULT aux dépens de première instance et d'appel,

Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe de la cour au Pôle emploi PACA.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Ghislaine POIRINE faisant fonction


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-1
Numéro d'arrêt : 18/18122
Date de la décision : 20/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-20;18.18122 ?
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