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29/09/2022 | FRANCE | N°19/11918

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-3, 29 septembre 2022, 19/11918


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3



ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2022



N° 2022/281













Rôle N° RG 19/11918 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEUV2







[G] [B]





C/



Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES P ROVENCE



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Ronny KTORZA

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Me Gilles MATHIEU





















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 17 Juin 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/04809.





APPELANT



Monsieur [G] [B]

né le [Date naissance 3] 1973 à [Localité 4],

demeurant [...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3

ARRÊT AU FOND

DU 29 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/281

Rôle N° RG 19/11918 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEUV2

[G] [B]

C/

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES P ROVENCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Ronny KTORZA

Me Gilles MATHIEU

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 17 Juin 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/04809.

APPELANT

Monsieur [G] [B]

né le [Date naissance 3] 1973 à [Localité 4],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Ronny KTORZA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL ALPES PROVENCE, représentée par son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Gilles MATHIEU de la SELARL MATHIEU DABOT & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Charlotte MIQUEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise PETEL, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Valérie GERARD, Président de chambre

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Septembre 2022

Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Selon offre du 30 juillet 2011, acceptée le 31 août 2011, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence a consenti à M. [G] [B] un prêt, destiné à financer l'acquisition d'un appartement à [Localité 5], d'un montant de 92.426 euros, remboursable en 240 mensualités, au taux de 4 %, le taux effectif global mentionné dans l'acte étant de 4,313 % l'an.

Suivant offre d'avenant émise le 7 août 2015, acceptée le 1er septembre 2015, le prêt a été réaménagé, le capital restant dû, d'un montant de 79.627,14 euros, devant être amorti, sur la durée résiduelle de 193 mois, au taux de 2,2700 %, le taux effectif global indiqué dans l'acte étant de 2,66% l'an.

Entre-temps, par exploit du 29 juillet 2015, M. [G] [B] a fait assigner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence, aux fins notamment de voir prononcer la nullité des intérêts contractuels et en conséquence la déchéance de la banque du droit aux intérêts contractuels, devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence.

Par jugement du 17 juin 2019, ce tribunal a :

- débouté M. [G] [B] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné M. [G] [B] à verser à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [G] [B] aux dépens de l'instance.

Suivant déclaration du 22 juillet 2019, M. [G] [B] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées et notifiées le 25 mars 2022, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, l'appelant demande à la cour de :

- constater l'absence de mention du taux et de la durée de la période dans les offres de prêt,

- constater que le taux effectif global annoncé par la banque est, en réalité, erroné,

par conséquent,

- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il l'a débouté de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence de sa demande indemnitaire pour procédure abusive,

- prononcer, à titre principal, l'annulation de la stipulation d'intérêts et la substitution du taux légal au taux conventionnel à compter de l'offre de prêt et, à titre subsidiaire, la déchéance totale du droit aux intérêts conventionnels de la banque,

- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il l'a condamné à verser à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de l'instance,

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence à lui verser la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives déposées et notifiées le 7 janvier 2022, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 17 juin 2019 rendu par le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,

statuant à nouveau,

- déclarer M. [B] irrecevable en son action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels,

à titre liminaire :

- constater que M. [B] fonde son action sur le seul fait de l'absence de mention du taux de période et de la durée de période et que le calcul du TEG de l'offre de prêt serait réalisé sur 360 jours,

- constater que M. [B] ne rapporte pas la preuve du caractère erroné du TEG mentionné dans l'offre de prêt à plus d'une décimale,

- dire que M. [B] est défaillant dans la preuve de son action, qui n'est dès lors pas fondée,

- débouter M. [B] de ses demandes, fins et conclusions,

à titre principal :

- dire que le contrat de prêt mentionne la durée de la période conformément aux dispositions de l'article R.313-1 du code de la consommation,

- dire qu'il n'existe pas de sanction applicable en l'absence de mention du taux de période et que M. [B] ne rapporte pas la preuve d'un préjudice,

- dire que le prétendu calcul sur 360 jours n'a aucune conséquence sur la validité du taux effectif global mentionné et calculé par la banque, puisque le taux effectif global a été calculé sur des périodes de 12 mois,

- dire que M. [B] ne démontre pas que le taux effectif global est erroné à la hausse ou à la baisse de 0,1 point du taux effectif global indiqué par elle,

- dire que le taux effectif global mentionné dans le contrat de prêt est parfaitement exact,

de surcroît,

- dire que M. [B] s'est empressé d'agir à son encontre sur le seul fondement que l'offre de prêt ne mentionne pas le taux de période,

- dire que cette procédure est abusive,

- condamner M. [B] à lui régler la somme de 5.000 euros,

- condamner M. [B] à lui régler la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

à titre subsidiaire :

- dire que la sanction d'un TEG erroné mentionné dans l'offre de prêt est la déchéance facultative du droit aux intérêts dont la loi laisse à la discrétion du juge tant l'application que la détermination de l'étendue,

- dire que M. [B] ne rapporte pas la preuve d'avoir refusé, lors de la souscription du contrat, une autre offre qui aurait été plus intéressante,

- débouter M. [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, en l'absence de préjudice subi,

- prononcer la compensation entre les sommes dues par M. [B] au titre du prêt et les sommes pour lesquelles elle serait éventuellement condamnée,

- dire que si les demandes de M. [B] sont jugées recevables, elles ne le sont qu'à hauteur de 3,52 euros,

' rejeter la demande d'exécution sous astreinte formulée par M. [B].

MOTIFS

Sur l'omission de la durée et du taux de la période :

Exposant que la banque a omis de mentionner la durée et le taux de la période dans l'offre de prêt, l'appelant fait grief au tribunal d'avoir considéré que l'absence de ces mentions ne pouvait donner lieu à sanction.

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence réplique que le taux effectif global et la durée de la période sont parfaitement mentionnés dans l'offre de prêt, que celle-ci respecte donc les dispositions de l'article R.313-1, devenu R.314-2 et R.314-3, du code de la consommation, qu'il est à la portée de tous de diviser le taux annuel par le nombre de périodes, que l'absence de mention du taux de période ne saurait dès lors être sanctionnée, aucune sanction n'étant d'ailleurs prévue par le législateur dans le cas d'une telle omission.

Sur ce, si l'offre acceptée par M. [G] [B] le 31 août 2011 indique le taux effectif global du prêt, « 4,313 % l'an», et sa périodicité, « mensuelle », elle ne précise effectivement pas le taux de période.

Ceci étant, si, aux termes de l'article R.313-1 du code précité dans sa version applicable au présent litige, le taux de période doit être expressément communiqué à l'emprunteur, les conséquences d'un éventuel défaut de communication, au demeurant sans incidence sur la détermination du taux effectif global, ne sont pas prévues.

En l'absence d'un texte, la nullité ne saurait être encourue, et, s'agissant de la déchéance du prêteur du droit aux intérêts, sanction spécifique prescrite par les dispositions alors en vigueur de l'article L.312-33 du code de la consommation, elle n'a pas vocation à s'appliquer, le taux de période ne figurant pas parmi les mentions obligatoires de l'offre de prêt.

Le jugement est donc confirmé de ce chef.

Sur le calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours :

Faisant valoir que le calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours n'est pas admissible à l'égard des emprunteurs consommateurs tels que lui, M. [G] [B] expose qu'en l'espèce, l'intimée ne nie pas véritablement que le calcul des intérêts ait été effectué sur la base de cette année dite lombarde, que le premier juge, qui avait également admis cette thèse, « ratifiée » par l'expert dont il produit le rapport, a pourtant considéré que la différence de calcul mise en évidence par ce dernier serait inférieure à une décimale et donc anodine, que le jugement doit en conséquence être infirmé en ce qu'il a rejeté sa demande de nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels.

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence répond qu'il convient préalablement de constater que l'appelant procède par voie d'affirmations dans la mesure où, ni les conditions particulières, ni les conditions générales, du contrat de prêt ne permettent d'établir que le calcul du TEG a été effectué sur 360 jours, qu'en tout état de cause, le calcul sur cette base n'a aucune conséquence dès lors que les taux effectifs globaux ont été calculés en mois et non en jours, en conformité avec l'équation figurant à l'annexe à l'article R.313-1 du code de la consommation, qu'en outre, le tableau d'amortissement du 20 septembre 2011 indique à l'emprunteur le montant des échéances mensuelles exactement calculées sur la base d'un mois normalisé, donc correspondant strictement au montant des échéances calculées sur la base d'une année civile, que la seule difficulté possible concerne les intérêts intercalaires, dus sur la première échéance durant la phase de raccordement non déterminable lors de la souscription du prêt, que, cependant, la différence d'intérêts susceptible d'être constatée est alors infime, et l'erreur peu significative, qui ne dépend pas de la volonté du prêteur, n'a aucune conséquence sur le taux conventionnel ou le taux effectif global.

Sur ce, il ne peut qu'être constaté, au vu des écritures de l'appelant et du rapport d'expertise amiable réalisé le 30 janvier 2018 qu'il produit au soutien de ses demandes, qu'il n'est nullement justifié, ni même fait état, de ce que le taux effectif global mentionné dans l'acte de prêt ne serait pas conforme aux dispositions du code de la consommation, et n'aurait notamment pas été calculé selon l'équation figurant à l'annexe de l'article R.313-1.

En effet, selon l'expert pressenti par M. [G] [B], Mme [N] [S], qui rappelle que le taux effectif global retenu par la banque est 4,313 %, le taux effectif global serait, au terme de ses calculs, de 4,31671 % arrondi à 4,317 %.

Ainsi, au regard de la différence obtenue, soit 0,004 %, à supposer que le calcul des intérêts ait été, comme prétendu par l'appelant, effectué sur la base de l'année lombarde et non sur celle de l'année civile, il ressort de ses propres explications que les taux mentionnés dans l'offre ne sauraient être considérés comme erronés au regard des dispositions précitées.

Dès lors, sans qu'il soit besoin de reprendre les développements de la banque et de l'expert quant aux calculs opérés, étant simplement rappelé que l'année civile est définie comme comportant 365 ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés, un mois normalisé comptant 30,41666 jours que l'année soit bissextile ou non, que le calcul des intérêts effectué sur le rapport 30,41666/365, 30/360 ou 1/12 aboutit à un résultat équivalent, chaque période étant considérée, conformément à cette règle, comme égale, et que seule la première échéance dite « brisée » de déblocage du prêt, qui porte sur une période inférieure à un mois, est susceptible d'avoir un effet sur le montant des intérêts, la différence à cet égard, qu'en l'espèce M. [G] [B] ne précise d'ailleurs pas, n'est pas de nature à entraîner les sanctions sollicitées à titre principal ou subsidiaire, nullité ou déchéance, qui ne sont pas ici encourues.

L'appelant est débouté de toutes ses demandes, et le jugement confirmé sur ce point.

Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive :

Au visa de l'article 1240 du code civil, exposant que des centaines de dossiers, actuellement pendants, concernent des actions fondées sur des TEG qui ne sont pas erronés, et reposant sur des rapports amiables totalement stériles, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence fait valoir que l'intention de nuire est évidente puisque l'ensemble de ces procédures porte atteinte à son image.

Rappelant la négociation pour le réaménagement du contrat de prêt sollicitée postérieurement à la présente procédure par M. [G] [B], elle s'estime parfaitement fondée à demander la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 5.000 euros pour procédure abusive.

Cependant, outre qu'elle n'établit pas le préjudice qu'elle invoque, la banque, qui ne saurait en tout état de cause imputer l'ensemble des procédures dont elle fait l'objet à l'appelant, ne démontre pas que celui-ci, de mauvaise foi ou dans l'intention de lui nuire, ait laissé dégénérer en abus son droit d'agir en justice ou d'exercer une voie de recours.

La demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par l'intimée est en conséquence rejetée, et le jugement également confirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Condamne M. [G] [B] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Le condamne aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-3
Numéro d'arrêt : 19/11918
Date de la décision : 29/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-29;19.11918 ?
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