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15/02/2011 | FRANCE | N°10/00533

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 15 février 2011, 10/00533


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale MBB/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00533.
Jugement Conseil de Prud'hommes d'ANGERS, du 10 Février 2010, enregistrée sous le no F 09/ 00572

ARRÊT DU 15 Février 2011

APPELANTES :
Maître Odile X...- Y..., ès-qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de l'Association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard ...49002 ANGERS CEDEX 01

L'A. G. S. représentée par le C. G. E. A. DE RENNES Immeuble Le Magister 4 cours Raphaël Binet 35069 R

ENNES CEDEX

représentées par Maître Aurélien TOUZET, substituant Maître André FOLLEN, avoc...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale MBB/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00533.
Jugement Conseil de Prud'hommes d'ANGERS, du 10 Février 2010, enregistrée sous le no F 09/ 00572

ARRÊT DU 15 Février 2011

APPELANTES :
Maître Odile X...- Y..., ès-qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de l'Association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard ...49002 ANGERS CEDEX 01

L'A. G. S. représentée par le C. G. E. A. DE RENNES Immeuble Le Magister 4 cours Raphaël Binet 35069 RENNES CEDEX

représentées par Maître Aurélien TOUZET, substituant Maître André FOLLEN, avocat au barreau d'ANGERS

INTIME :

Monsieur Jean-Luc Z... ... 49170 CHAMPTOCE SUR LOIRE

présent, assisté de Maître Vincent MAUREL, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Décembre 2010, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Bernard BRETON, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseur Madame Anne DUFAU, assesseur

qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Sylvie LE GALL,

ARRÊT : du 15 Février 2011 contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame BRETON, président, et par Madame TIJOU, adjoint administratif faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur Jean-Luc Z... a été engagé en qualité de directeur du centre de formation des maisons familiales rurales de Cantenay Epinard à compter du 24 août 1992, par l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard ; il a été licencié pour inaptitude physique et insuffisance professionnelle le 6 septembre 2008.
Monsieur Jean-Luc Z... a contesté ce licenciement devant le conseil de prud'hommes d'Angers le 27 octobre 2008.
Par jugement du 10 février 2010, le conseil de prud'hommes d'Angers, retenant que l'association de Cantenay Epinard avait manqué à son obligation de reclassement, a jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et fixé au passif de la liquidation judiciaire de l'association de Cantenay Epinard la créance de monsieur Jean-Luc Z... dans les conditions suivantes : 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse-10 890 euros à titre d'indemnité de préavis-1 089 euros à titre de congés payés y afférents-3 630 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier et 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; il a ordonné, sous astreinte, à maître X...- Y..., ès qualités de mandataire liquidateur, de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard le remboursement des indemnités de chômage versées à monsieur Jean-Luc Z..., déclaré les condamnations opposables à l'association pour la gestion du régime de garantie des créances, condamné maître X...- Y... ès qualités, aux dépens.
Maître X...- Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard a formé appel contre ce jugement.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions oralement soutenues à l'audience, maître X...- Y..., en sa qualités de mandataire liquidateur de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard, demande à la cour de réformer le jugement, de débouter monsieur Jean-Luc Z... de ses demandes et de le condamner à lui payer 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Il relève que le licenciement a nécessairement une cause réelle et sérieuse, puisque monsieur Jean-Luc Z... a été déclaré médicalement inapte à exercer toute fonction au sein de l'association ; Il prétend que l'allégation de harcèlement moral par monsieur Jean-Luc Z... n'est démontrée par aucun élément de preuve, les certificats médicaux du médecin du travail, de son médecin traitant et de son psychiatre ne pouvant rapporter une telle preuve ; Il conteste l'existence d'un groupe des maisons familiales rurales de Cantenay Epinard, associations gérées par la loi de 1901 qui ne constituent qu'un réseau exerçant la même activité et se trouvent en totale indépendance juridique et économique les unes par rapport aux autres.
Il prétend que l'insuffisance professionnelle de monsieur Jean-Luc Z... se trouve démontrée par les lettres de messieurs G... et H..., et la lettre collective adressée au président de l'association le 24 avril 2008 par l'ensemble du personnel.
À titre subsidiaire, il fait valoir que le montant des dommages et intérêts qui pourraient être alloués à monsieur Jean-Luc Z... ne peut être supérieur à 35 000 euros et que la somme accordée au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement est disproportionnée.
Par conclusions oralement soutenues à l'audience, l'association pour la gestion du régime de garantie des créances demande à la cour de juger que le licenciement est justifié par l'inaptitude médicalement constatée et par l'insuffisance professionnelle de monsieur Jean-Luc Z... ; elle conclut au débouté de monsieur Jean-Luc Z... et réclame 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; elle rappelle, à titre de subsidiaire, les limites légales de sa garantie.
Par conclusions reprises oralement à l'audience monsieur Z... demande à la cour de :
1) Déclarer irrecevable et mal fondé l'appel interjeté par Me Odile X... Y... ès qualités de liquidateur de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay-Epinard et l'AGS CGEA de Rennes,
2) Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé irrégulier et sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur Z...,
3) Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné que les créances suivantes figurent sur le relevé des créances salariales de Monsieur Jean-Luc Z... dans le cadre de la liquidation judiciaire de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay-Epinard :- à titre d'indemnité de préavis, la somme de 10. 890, 00 €,- à titre de congés payés y afférents, la somme de 1. 089, 00 €,- à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier, la somme de 3. 630, 00 €,- au titre des frais irrépétibles (article 700 du Code de Procédure Civile), la somme de 1. 500, 00 €,

Y ajoutant,
4) Ordonner que les créances suivantes figurent sur le relevé des créances salariales de Monsieur Jean-Luc Z... dans le cadre de la liquidation judiciaire de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay-Epinard,- à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 85. 000, 00 €.- au titre des frais irrépétibles (article 700 du Code de Procédure Civile), la somme de 2. 500, 00 €

Dire que lesdites sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la date de la saisine du conseil,
Dire que les intérêts dus pour une année entière se capitaliseront par application de l'article 1154 du Code civil,
Condamner la Me Odile X... Y... ès qualités de liquidateur de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay-Epinard aux entiers dépens,
5) Déclarer l'arrêt commun et opposable à l'AGS-CGEA.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Le licenciement de monsieur Jean-Luc Z... est motivé par l'inaptitude du salarié à exercer à tout poste dans le Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard, et l'absence de possibilité de reclassement, d'une part, et par l'insuffisance professionnelle de monsieur Jean-Luc Z... d'autre part.
Il ressort des termes du compte rendu d'entretien préalable dressé par monsieur Audouin, conseiller salarié, et de l'attestation qu'il a rédigée le 11 avril 2009, que seule l'inaptitude à tout poste au sein de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard de monsieur Jean-Luc Z... a été abordée au cours de l'entretien préalable, à l'exclusion du second motif de licenciement qui figure dans la lettre de licenciement ; ce grief, qui peut cependant justifier le licenciement, révèle une irrégularité de procédure que le conseil de prud'hommes a, à juste titre, relevée et qui cause à monsieur Jean-Luc Z... un préjudice qui sera réparé par l'allocation de dommages et intérêts dont le montant a été fixé justement par les premiers juges.
L'inaptitude de monsieur Jean-Luc Z... a été déclarée par le médecin du travail aux termes d'une fiche dressée le 7 août 2008 par laquelle il est déclaré inapte à tout poste dans l'entreprise, apte au même poste dans une autre environnement professionnel, avec cette indication qu'un seul avis sera donné compte tenu du fait que la reprise du travail présente un danger sérieux et immédiat.
L'article L. 4624-1 du code du travail ouvre à l'employeur un recours contre cet avis devant l'inspecteur du travail ; ce recours étant la seule manière pour l'employeur de remettre cet avis en cause, et l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard ne l'ayant pas exercé, son bien fondé ne peut plus être discuté.
Le salarié déclaré inapte à son poste, bénéficie, aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail, d'une obligation de reclassement qui doit être recherchée dans le mois de l'avis d'inaptitude ; en l'état de l'avis émis par le médecin du travail, l'employeur devait donc rechercher une possibilité de reclassement au sein du groupe auquel il appartient, parmi les entreprises, dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent une mutation du personnel.
L'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard appartient à un groupe, celui des Maisons Familiales Rurales qui réunit, par le biais d'une association nationale, les associations régionales et les associations départementales, chacune en charge d'un type particulier de formation ; le parcours professionnel de monsieur Jean-Luc Z... démontre que le personnel peut occuper successivement des postes dans les différentes associations ; cette possibilité de permutation, l'unité d'activité tournée vers la formation professionnelle et la communauté d'organisation, de type associatif, caractérisent le groupe au sein duquel l'employeur doit effectuer sa recherche de reclassement.
L'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard ne justifie pas avoir mis en place une démarche sérieuse et loyale auprès des établissements appartenant au groupe des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard pour faire à son salarié des offres de reclassement possibles.
Ce manquement à son obligation de reclassement rend le licenciement pour inaptitude sans cause réelle et sérieuse.
S'agissant de l'insuffisance professionnelle, il apparaît que ce grief est formulé contre un salarié qui exerce les fonctions de directeur d'établissement depuis 1992, dont l'activité n'a donné lieu à aucun reproche jusqu'à l'année 2007.
Or, il ressort des procès verbaux de réunions du conseil d'administration, qu'en juin 2007 a été créée une nouvelle unité d'enseignement regroupant l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard et l'Institut Rural d'Education et d'Orientation de La Meignane sous la forme d'une association " Pôle Nord Anjou " dans le souci de rationaliser les dépenses ; par décision du 13 juin 2007, le conseil d'administration de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard a nommé monsieur Jean-Luc Z... directeur du pôle Nord Anjou ; c'est dans ce contexte de changement des structures, de recherche d'économies et de redéfinition des missions, que l'insuffisance professionnelle de monsieur Jean-Luc Z... est dénoncée.
Il apparaît, à la lecture des procès verbaux de réunions du conseil d'administration, et notamment de celle du 19 novembre 2007, qu'après que le président de l'association Centre de Formation et Promotion des Maisons Familiales Rurales de Cantenay Epinard ait, le 13 juin 2007, demandé aux directeurs des deux établissements concernés par le regroupement de se positionner sur le poste de direction unique qu'il convenait désormais de pourvoir, le conseil d'administration se pose la question de redéfinir le poste de directeur, en notant, avec un réalisme tardif, que le conseil avait mis en place le pôle sans en avoir défini le fonctionnement ; le même procès verbal relève qu'un accompagnement du directeur aurait dû être fait, d'où il ressort que cet accompagnement n'a pas été effectué.
Il s'en déduit que les difficultés rencontrées par monsieur Jean-Luc Z... pour poursuivre une activité qu'il exerçait depuis 15 ans trouvent leur source dans l'imprévision, l'inorganisation, l'absence de mesures d'accompagnement et de soutien à l'adaptation au nouveau poste dont l'employeur s'est rendu coupable envers son salarié.
Dans ces conditions l'insuffisance professionnelle reprochée à monsieur Jean-Luc Z... ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement.
En application de la convention collective, le préavis dont bénéficie monsieur Z... est de 3 mois ; l'indemnité compensatrice de préavis a été justement fixée à 10 890 euros par le conseil de prud'hommes ; s'y ajoutent les congés payés y afférents.
Pour fixer le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui doit être allouée à monsieur Z..., il convient de tenir compte à la fois de la durée de son activité de directeur de l'établissement et de son parcours professionnel au sein des Maisons Familiales Rurales, mais également des conditions dans lesquelles il y a été mis fin telles qu'elles sont décrites dans le présent arrêt ; en considération de ces éléments l'indemnité doit être fixée à 65 340 euros qui représentent 18 mois de salaires.

L'équité commande de mettre à la charge de l'appelante les frais de procédure engagés par monsieur Z... dans le cadre de l'appel ; l'action ayant été initiée avant la mise en liquidation judiciaire de l'association cette indemnité sera fixée à son passif.

Maître X...- Y..., ès qualités, qui succombe en son appel, en supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
le réformant sur ce point,
FIXE au passif de la liquidation judiciaire de l'association centre de formation et de promotion des Maisons Familiales Rurales, la créance de monsieur Z... pour la somme de 65 340 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
y ajoutant,
Fixe la créance de monsieur Z... au passif de la liquidation judiciaire de l'association centre de formation et de promotion des Maisons Familiales Rurales à la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
ORDONNE la capitalisation des sommes dues dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
RAPPELLE que la garantie de l'association pour la gestion du régime de garantie des créances intervient dans les limites prévues par la loi,
CONDAMNE maître X...- Y..., ès qualités, aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Annick TIJOU Marie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00533
Date de la décision : 15/02/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-02-15;10.00533 ?
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