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15/01/2013 | FRANCE | N°11/00558

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 15 janvier 2013, 11/00558


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00558.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 02 Février 2011, enregistrée sous le no 09/ 00419
ARRÊT DU 15 Janvier 2013

APPELANTE :

Madame Céline X...... 72510 ST JEAN DE LA MOTTE

représentée par Maître Virginie CONTE, substituant Maître Alain PIGEAU (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIME :

Monsieur Alain Y...... 72000 LE MANS

représenté

par Maître Luc LALANNE (SCP), avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions ...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00558.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 02 Février 2011, enregistrée sous le no 09/ 00419
ARRÊT DU 15 Janvier 2013

APPELANTE :

Madame Céline X...... 72510 ST JEAN DE LA MOTTE

représentée par Maître Virginie CONTE, substituant Maître Alain PIGEAU (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIME :

Monsieur Alain Y...... 72000 LE MANS

représenté par Maître Luc LALANNE (SCP), avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Novembre 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Anne DUFAU, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 15 Janvier 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Mme Céline X... a été embauchée selon contrat de travail du 24 septembre 2006, à effet au 3 octobre 2006, en qualité de coiffeuse pour dames, en contrat à durée indéterminée à temps plein, par M. Y... qui exploite un salon de coiffure mixte au... au Mans.
L'entreprise applique la convention collective nationale de la coiffure.
Le contrat de travail contenait une clause de non concurrence.
Mme X... a, les 15 septembre 2008 et 13 octobre 2008, questionné l'inspection du travail sur les règles légales applicables en matière de congés payés, d'heures supplémentaires et de formation et Mme Z..., contrôleur du travail, lui a répondu par écrit du 21 octobre 2008.
Le 16 mars 2009, Mme X... a adressé à son employeur un courrier dans lequel elle s'est plaint de devoir prendre ses congés en janvier et en mars, périodes de fermeture du salon imposées par celui-ci, et de perdre ainsi la possibilité d'avoir des congés en été.
Le 17 mars 2009, l'employeur lui a remis en main propre une convocation pour un " entretien ", fixé au 30 mars 2009.
Le 31 mars 2009, M. Y... a remis à Mme X..., toujours en main propre, une nouvelle convocation pour un entretien préalable à un éventuel licenciement économique, fixé au 6 avril 2009.
Mme X... a été licenciée pour motif économique par lettre du 11 avril 2009.
Elle a, le 21 avril 2009, adhéré à la convention de reclassement personnalisé, puis a adressé le 28 avril 2009 à son employeur, un courrier recommandé avec accusé de réception dans lequel elle a indiqué : " je conteste le motif invoqué, manque d'activité en coiffure dames car j'ai été embauchée en tant que coiffeuse et... je suis apte à coiffer aussi bien les hommes que les femmes " ;
Elle a le 1er juillet 2009 ? saisi le conseil de prud'hommes du Mans auquel elle a demandé, toute tentative de conciliation étant restée vaine, de condamner M. Y... à lui payer les sommes de :-1535 € au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement,-3684 € de dommages-intérêts au titre de la clause de non concurrence,-4605 € à titre de dommages-intérêts du fait du non respect de la prise des congés payés,-12 280 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-1000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme X... a demandé au conseil de prud'hommes, de dire que les créances salariales produiront intérêts au taux légal à compter de sa saisine, et de condamner M. Y... aux dépens de l'instance.
Par jugement du 2 février 2011 le conseil de prud'hommes du Mans a condamné M. Y... à payer à Mme X... les sommes de :-750 € au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement,-1 105, 20 € au titre de la clause de non concurrence,-2300 € à titre de dommages-intérêts du fait du non respect des règles légales sur la prise des congés payés,-350 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Le conseil de prud'hommes a débouté Mme X... de ses autres demandes, dit que les sommes accordées pour créances indemnitaires porteront intérêt au taux légal à compter du prononcé du jugement, ordonné l'exécution provisoire, débouté M. Y... de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, et condamné ce dernier aux dépens.
Le jugement a été notifié le 4 février 2011 à M. Y..., et le 7 février 2011 à Mme X..., qui en a fait appel par lettre postée le 24 février 2011.
L'appel a porté sur l'ensembles des chefs de jugement.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 16 mars 2012, reprises et soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, Mme X... demande à la cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il lui a alloué un complément de 1105, 20 € au titre de la clause de non concurrence,- de l'infirmer pour le surplus et de condamner M. Y... à lui verser les sommes de : ¤ 1535 € au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement, ¤ 4605 € à titre de dommages-intérêts du fait du non respect de la prise des congés payés dans les règles légales et conventionnelles, ¤ 12 280 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ¤ 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme X... demande à la cour de dire que les créances salariales seront assorties des intérêts au taux légal à compter du jour de la saisine du conseil de prud'hommes, et de condamner M. Y... aux dépens.
Mme X... soutient que son employeur, dès le début de la relation de travail, s'est montré peu respectueux de la législation du travail, notamment en matière de congés payés ; qu'elle ne pouvait prendre ses congés que pendant les périodes " creuses " de l'année, ou lorsque M. Y... fermait le salon pour des raisons relevant de sa vie personnelle, c'est-à-dire par fractionnement, essentiellement de novembre à mars, mais pas en été ; que sa situation de mère de famille divorcée, et élevant deux enfants, n'a jamais été prise en compte, et que cela a engendré pour elle des frais de garde.
Quant à son licenciement, elle soutient que le motif économique invoqué par l'employeur est fictif, M. Y... souhaitant en réalité se séparer d'elle à cause de ses revendications en matière de prise des congés ; que l'activité de coiffure dames n'avait pas diminué de façon significative au cours des derniers mois ; que la comptabilité de M. Y... n'était pas tenue avec rigueur et que les pièces qu'il produit à ce titre ne sont pas, de ce fait, convaincantes de l'existence d'une cause économique réelle et sérieuse ; qu'elle aurait pu être reclassée, par affectation à l'activité coiffure hommes, pour laquelle elle a été formée.
Elle soutient que la procédure de licenciement économique est irrégulière, puisque la convocation à l'entretien préalable lui a été remise en mains propres le 31 mars 2009 pour un entretien au 6 avril 2009, et que le délai minimal de cinq jours ouvrables exigé par le code du travail, entre cette remise et l'entretien préalable, n'a donc pas été respecté.
Quant à la clause de non concurrence, Mme X... soutient que M. Y... ne l'a pas levée au moment du licenciement, et qu'aux termes de l'article 7. 2. 4. de la convention collective nationale de la coiffure, il doit lui être versé la somme de 2210, 40 € ; qu'elle a perçu en cours de procédure un montant de 1105, 20 € et que le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il condamne M. Y... à lui verser un solde de 1105, 20 €.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 8 août 2012, reprises et soutenues oralement à l'audience devant la cour, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Alain Y... demande à la cour de :
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement pour motif économique de Mme X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, et de débouter celle-ci de toute demande indemnitaire,
- Infirmer le jugement entrepris :
¤ s'agissant du montant de la contrepartie pécuniaire de la clause de non concurrence, et de condamner Mme X... à lui rembourser la somme de 1105. 20 € indûment perçue,
¤ s'agissant des dommages et intérêts alloués à Mme X... au titre de ses congés payés, et de la condamner à lui rembourser la somme de 2300 € qui lui a été versée en exécution du jugement,
¤ s'agissant de l'irrégularité de procédure, et de limiter à l'euro symbolique le montant des dommages et intérêts susceptibles d'être alloués à Mme X...,
- Condamner Madame X... à lui payer une indemnité de 1500 € au visa de l'article 700 du code de procédure civile.
M. Y... rappelle qu'il exerce une activité de coiffure depuis 1968 et qu'il s'est installé au Mans en 1999 ; que ce sont les ennuis de santé de son épouse, qui travaillait avec lui, qui l'ont conduit à engager une salariée.
M. Y... soutient que le licenciement a bien un motif économique, et qu'il en justifie en produisant une situation comptable arrêtée au 31 décembre 2008, qui montre un résultat négatif de 2176 €, et un compte de résultat au 30 mars 2009, qui est aussi négatif de 3857 € ; qu'il lui était impossible de reclasser Mme X..., qui était sa seule salariée.
ll ne discute pas l'irrégularité de procédure résultant du non respect du délai légal de cinq jours entre la remise de la convocation à l'entretien préalable et la tenue de celui-ci, mais soutient que cela n'a pas causé de préjudice à Mme X..., qui a été assistée lors de cet entretien.
Quant aux congés payés, M. Y... soutient que le système " dérogatoire " de prise des congés payés qu'il a instauré dans son salon de coiffure a été très avantageux pour la salariée puisqu'elle a bénéficié, du 1er octobre 2006 au licenciement, de 17 jours et demi de congés payés supplémentaires par rapport au nombre de jours acquis ; que le fractionnement des congés était rendu nécessaire par le fait qu'il ne pouvait laisser à Mme X... la responsabilité du salon de coiffure lorsque lui-même était en congés, et qu'il y avait d'autre part des périodes de creux d'activité, essentiellement en janvier et mars.
M. Y... soutient, quant à la contrepartie pécuniaire à la non levée de la clause de non concurrence, que l'article 7. 2. 4. de la convention collective énonce ses modalités de calcul, qui sont : 6 % du salaire mensuel brut (1535 €) x 12 mois = 1105, 20 € brut ; il observe avoir réglé ce montant à Mme X... le 14 octobre 2010, et soutient que le conseil de prud'hommes a commis une erreur en retenant une période de 24 mois et non de 12 mois.

MOTIFS DE LA DÉCISION

sur la clause de non concurrence :
Si le contrat de travail signé le 24 septembre 2006 par Mme X... ne fixe pas de délai de renonciation par l'employeur à la clause de non concurrence énoncée en son article III, l'article 7. 2. 4. de la convention collective nationale de la coiffure, appliquée par l'entreprise de M. Y..., prévoit : " L'employeur pourra renoncer à l'application de la clause de non-concurrence, se libérant ainsi du versement de la contrepartie financière. Cette renonciation devra être notifiée au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception dans les 15 jours qui suivent la notification de la rupture du contrat ".

Il est acquis que M. Y... n'a pas adressé de courrier recommandé à sa salariée pour lui notifier la levée de la clause contractuelle de non concurrence, et qu'il est en conséquence tenu de lui verser la contrepartie financière de cette clause. L'article susvisé de la convention collective établit le mode de calcul de la contrepartie financière, en précisant que celle-ci peut être :- soit versée mensuellement durant l'exécution du contrat de travail et jusqu'au départ effectif du salarié de l'entreprise, à raison de 4 % du salaire minimum conventionnel correspondant au coefficient de l'intéressé, et ce versement mensuel doit alors faire l'objet d'une ligne distincte sur le bulletin de paie,

- soit versée mensuellement au salarié à compter de son départ effectif et pendant " la période d'interdiction prévue par la clause ", à raison de 6 % du salaire minimum conventionnel correspondant au coefficient de l'intéressé. Le contrat de travail de Mme X... ne vise pas de période d'interdiction de concurrence et l'article 7. 2. 4. auquel il faut se référer dès lors, indique que cette durée ne peut excéder 12 mois. Les bulletins de paie ne portent aucune mention de versements mensuels au titre de la clause de non concurrence. La contrepartie financière de la clause doit donc être calculée pour 12 mois, contrairement aux 24 mois retenus par les premiers juges et elle s'établit à la somme de : 12 mois X 1535 € X 6 % = 1105, 20 €. M. Y... justifie avoir versé cette somme de 1105, 20 € à Mme X... en cours de procédure, par chèque du 28 septembre 2010. Par voie d'infirmation du jugement, Mme X... est en conséquence déboutée de sa demande de complément de paiement.

Sur la demande de M. Y... en restitution de la somme de 1105, 20 euros :
Le présent arrêt, infirmatif sur ce point, emporte de plein droit obligation de restitution et constitue le titre exécutoire ouvrant droit pour M. Y... à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, les sommes devant être restituées portant intérêt au taux légal à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur la demande de restitution formée par M. Y....

Sur la rupture du contrat de travail :
Mme X... soutient que la cause de son licenciement n'est pas économique mais résulte de ce qu'elle a émis des réclamations au titre de la prise des congés, ce qui a déplu à son employeur et l'a incité à se séparer d'elle.

Il appartient au juge, lorsque le salarié le requiert, de vérifier quelle est la cause exacte du licenciement.
Mme X... ne produit aucune pièce établissant que le motif du licenciement soit inhérent à sa personne et non économique ; le fait que l'employeur lui ait remis une première convocation à un " entretien " le 17 mars 2009, soit le lendemain de la réception par lui d'un courrier de sa salariée comportant une demande en matière de prise des congés, ne fait pas apparaître la réalité d'un tel motif.

La cour doit en conséquence vérifier l'existence de la cause réelle et sérieuse économique invoquée par M. Y....
Le licenciement pour motif économique de Mme X... a eu lieu à titre conservatoire le 11 avril 2009, puisqu'elle a accepté la convention de reclassement personnalisé.

Lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisé, l'employeur doit en énoncer le motif économique, soit dans le document écrit d'information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposée par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit encore, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié de la proposition de convention, dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation.

L'acceptation par la salariée de la convention de reclassement personnalisé, qui entraîne une rupture du contrat de travail réputée intervenue d'un commun accord, ne la prive pas de la possibilité de contester la validité du motif économique invoqué.

Elle ne la prive pas non plus de la possibilité de contester l'exécution par l'employeur de son obligation de reclassement préalable, qui continue à s'imposer à lui.
L'article L. 1233-3 du code du travail indique que " constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ".
La jurisprudence a ajouté aux motifs légaux celui de la réorganisation décidée par l'employeur afin de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise et celui de la cessation d'activité.

Un licenciement pour motif économique ne peut, par ailleurs, intervenir, précise l'article L. 1233-4 du code du travail, que " lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ".
Les dispositions combinées de cet article L. 1233-3 et de l'article L. 1233-16 du même code font obligation à l'employeur de motiver la lettre de licenciement.
La lettre de licenciement du 11 avril 2009 est ainsi libellée : " Madame, A la suite de notre entretien du 6 Avril 2009, nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique, suivant l'article L 1224-2 du code du travail : 1 manque d'activités en coiffure dames au poste que vous occupez. 2 en quoi ces motifs entraînent la nécessité de procéder au licenciement et indiquent qu'aucune solution de reclassement n'a été trouvée. Vous bénéficiez en cas d'une activité renaissante, d'une priorité de réembauchage durant un délai d'un an à compter de la rupture du contrat, également vous avez droit en matière de DIF, la possibilité de déposer votre demande à bénéficier d'une action de compétences de validation des acquis ou de formation pendant le préavis (voir fiche programme accompagnant votre lettre). La date d'expiration de la convention de reclassement personnalisé est le 21 AVRIL en cas de refus, cette lettre constitue la notification de (son) licenciement. La présentation de cette lettre recommandée fixe le point de départ de votre préavis d'une durée de 2 mois. "

Cette lettre de licenciement est fondée sur des faits précis et matériellement vérifiables, et il appartient à la cour de rechercher l'existence de difficultés économiques résultant du manque d'activité invoqué.

La situation comptable arrêtée au 31 décembre 2007 mentionne des " produits d'exploitation ", d'un montant de 41 207 € et celle du 1er mars 2008, de 42 366 €.
Ces documents ne distinguent pas les produits d'exploitation " coiffure dames " et " coiffure hommes ", et ne permettent pas d'observer si l'activité coiffure dames a diminué sur la période considérée.
D'autre part, et en tout état de cause, aucun manque d'activité constitutif de difficultés économiques n'est caractérisé, puisque les produits d'exploitation ont augmenté, entre l'exercice 2007 et l'exercice 2008.
Il apparaît encore à la lecture de ces pièces que le coût salarial de l'emploi de Mme X... a été de 16 560 € en 2007, et de 17 640 € en 2008, avec un résultat bénéficiaire de 4576 € en 2007, alors que les produits d'exploitation ont été inférieurs à ceux comptabilisés en 2008.
Le résultat négatif de 2008 apparaît comme résultant exclusivement des " autres charges externes ", qui sont passées de 14 496 € en 2007, à 19 418 € en 2008.
Ces charges entraînent également le déficit de 3857 € constaté au 30 mars 2009.
La nature de ces charges n'est pas donnée par l'employeur.
Par voie d'infirmation du jugement, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le moyen tenant au reclassement, la rupture du contrat de travail de Mme X... est dite sans cause réelle et sérieuse.
L'entreprise employant habituellement moins de 11 salariés, Mme X..., par application des dispositions de l'article L1235-5 du code du travail, peut prétendre du fait de la rupture abusive à une indemnité correspondant au préjudice subi, qu'il appartient au juge d'évaluer.
Mme X... avait 39 ans au moment de la rupture et une ancienneté de 2 ans et 6 mois dans l'entreprise ; elle est mère de deux enfants dont elle a la garde ; elle ne donne aucune indication sur sa situation professionnelle actuelle.
La cour trouve en la cause les éléments nécessaires pour lui allouer, à titre de dommages-intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse, la somme de 9000 €, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Sur l'irrégularité de la procédure de licenciement :
Aux termes de l'article L1233-11 du code du travail, applicable à l ‘ espèce, l'employeur qui envisage de procéder à un licenciement pour motif économique, qu'il s'agisse d'un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de 10 salariés dans une même période de trente jours convoque, avant toute décision, le ou les intéressés à un entretien préalable ; la convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en mains propres de la lettre de convocation.
Il est acquis qu'une première lettre de convocation, irrégulière comme n'indiquant pas l'objet de l'entretien, a été remise à Mme X... le 17 mars 2009, puis une seconde lettre le 31 mars 2009, dans laquelle l'employeur précisait cette fois qu'il envisageait une mesure de licenciement économique, portant les mentions visées par l'article L1233-13 du code du travail, sans que soit respecté cependant un délai minimal de cinq jours ouvrables entre la remise et la tenue de l'entretien.
La salariée ne peut renoncer à ce délai, et le non respect de la procédure sur ce point, peu important qu'elle ait été assistée lors de l'entretien préalable, constitue une irrégularité qui entraîne pour elle nécessairement un préjudice, dont la cour évalue le montant, en considération des éléments de la cause, à la somme de 500 €.
Cette indemnité peut être cumulée avec celle réparant l'absence de cause réelle et sérieuse de la rupture.
sur les congés payés :
Il est de principe que les congés, destinés à permettre aux salariés de se reposer de leurs travaux, ne peuvent leur être antérieurs.
Ils ne peuvent donc pas être donnés avant leur acquisition par un travail effectif.
L'article L3141-12 du code du travail permet, une fois qu'ils sont acquis, de les prendre " dés l'ouverture des droits ", soit avant l'ouverture de la période légale ou conventionnelle de prise des congés, qui comprend en tous les cas la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année.
Le code du travail énonce encore :- article L3141-17 : " La durée des congés pouvant être pris en une seule fois ne peut excéder 24 jours ouvrables ".- article L3141-18 : " Lorsque le congé ne dépasse pas 12 jours ouvrables, il doit être continu. Lorsque le congé principal est d'une durée supérieure à 12 jours ouvrables et au plus égale à 24 jours ouvrables, il peut être fractionné par l'employeur avec l'accord du salarié. Dans ce cas, une des fractions est au moins égale à 12 jours ouvrables continus compris entre deux jours de repos hebdomadaire ".- article L3141-19 : " Lorsque le congé est fractionné, la fraction d'au moins douze jours ouvrables continus est attribuée pendant la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année ".

Il ressort de ces textes que le fractionnement des congés, hors la 5ème semaine de congés puisque le congé continu ne peut excéder 24 jours, n'est possible qu'avec l'agrément du salarié.
L'article 13. 1 de la convention collective nationale de la coiffure énonce de la même façon que le congé principal, de 24 jours ouvrables au plus, pourra être fractionné par l'employeur " avec l'agrément du salarié " et ajoute qu'une des fractions, attribuée pendant la période allant du 1er mai au 31 octobre, devra être au minimum de 12 jours ouvrables.
La convention collective et le code du travail posent donc les deux mêmes exigences pour le fractionnement du congé principal, d'une part, l'acceptation du fractionnement par le salarié, et d'autre part, la prise d'un congé d'au moins 12 jours sur la période allant du 1er mai au 31 octobre.
Quant aux congés acquis par Mme X... sur la période allant du 1er octobre 2006 au 31 mai 2007, il ressort des tableaux de celle-ci, comme de ceux de M. Y..., ainsi que des bulletins de salaire, que la salariée a eu 11 jours de congés par anticipation, soit avant le 1er mai 2007, et qu'elle a disposé aussi de 26, 5 jours de congés, par fractionnement, pendant la période normale de prise des congés (du 1er mai 2007 au 31 octobre 2007). Elle a bénéficié pour 2007 de 37, 5 jours de congés, alors qu'elle n'en avait acquis que 20.

Si par application des dispositions de l'article L3141-12 du code du travail, la prise par anticipation de congés acquis est autorisée, l'employeur ne peut cependant imposer celle-ci à son salarié, et doit recueillir son accord, accord dont il doit rapporter la preuve.
M. Y... ne rapporte pas la preuve de cet accord, et n'allègue même pas l'avoir sollicité, tandis que Mme X... a, pour sa part, dans son écrit du 16 mars 2009, rappelé que depuis le début de l'exécution de contrat de travail, la fixation de ses congés avait été réalisée " par l'employeur sans concertation avec l'employée ".
M. Y... justifie le " système de congés payés dérogatoire au droit commun ", organisé au sein de son salon de coiffure, en ce qu'il lui permettait de fermer le salon pendant les mois de moindre activité, soit janvier et mars, et en ce qu'il a profité à Mme X... parce qu'elle a bénéficié de jours de fractionnement, et donc de plus de jours qu'elle n'en avait acquis.
Si en effet, Mme X... a bénéficié pour 2007 de 37, 5 jours de congés, alors qu'elle n'avait acquis que 20 jours, il ne s'agit néanmoins pas là de jours supplémentaires dus au fractionnement du congé, puisque ces jours supplémentaires, légaux, ne peuvent être au plus, aux termes de l'article L3141-9 du code du travail, qu'au nombre de 2 par période de référence.
Le congé par anticipation, qui a été imposé par l'employeur alors que l'accord de la salariée était requis, est réputé dès lors être un supplément de congés accordé par lui.
Il apparaît d'autre part que Mme X... n'a disposé, du 1er mai 2007 au 31 octobre 2007, d'aucune prise de congés de 12 jours, la plus longue ayant été, en août 2007, de 6 jours ; les règles légales et conventionnelles sur le fractionnement des congés ont donc été méconnues par M. Y....
Sur la période allant du 1er juin 2007 au 31 mai 2008, Mme X... a acquis 30 jours de congés, à prendre entre le 1er mai et le 31octobre 2008.
Les pièces versées aux débats montrent que Mme X... n'a pas eu de jour de congé en mai 2008, ni en juin 2008, qu'elle a eu 2 jours de congés en juillet 2008, 4 jours en août 2008, et 2 jours en septembre 2008.
Ses congés lui ont été donnés à raison de 6 jours en novembre 2008, 1 jour en décembre, 12 jours en janvier 2009, et 10 jours en mars 2009.

M. Y... n'établit pas non plus sur cette période, ni même n'allègue, que Mme X... ait donné son accord au fractionnement de ses congés, et se contente là encore de soutenir que l'organisation mise en place a été avantageuse pour sa salariée quant au nombre de jours pris, ce qui ne se vérifie cependant pas pour les congés 2008.
Ce fractionnement des congés 2008 est encore contraire aux dispositions tant légales que conventionnelles, en ce qu'aucun congé de 12 jours au moins n'apparaît, entre le 1er mai 2008 et le 31 octobre 2008.
Pour établir son préjudice, Mme X... justifie de frais de garde de ses enfants en juillet 2007, alors que le jugement de divorce confie celle-ci au père pour août (2ème période des vacances scolaires les années impaires), pour un montant de 157, 10.
Si M. Y... pouvait en effet fixer le congé principal de sa salariée en août et non en juillet, la fixation des dates de départ en congé du personnel appartenant à l'employeur dans la limite du respect par lui des règles légales et conventionnelles, il devait lui assurer, après avoir obtenu son accord pour le fractionnement, ce qui n'a pas été le cas, un minimum de 12 jours ouvrables consécutifs entre le 1er mai et le 31 octobre 2007.
Les règles tenant au fractionnement des congés n'ont pas plus été respectées par M. Y... pour les congés 2008.
Par voie d'infirmation du jugement la cour trouve en la cause les éléments nécessaires pour évaluer le préjudice subi par Mme X... au titre de la prise des congés payés 2007 et 2008 à la somme de 1500.
Sur les dépens et frais irrépétibles :
Les dispositions du jugement afférentes aux frais irrépétibles de première instance et aux dépens sont confirmées.
Il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme X... les frais non compris dans les dépens et engagés dans l'instance d'appel ; M. Y... est condamné à lui payer en application des dispositions de l'article 700 de code de procédure civile, la somme de 1200 € et doit être débouté de sa propre demande à ce titre.
M. Y... qui succombe à l'instance d'appel doit en payer les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
INFIRME le jugement entrepris sauf en ses dispositions afférentes aux frais irrépétibles et aux dépens, et en ce qu'il a dit que les sommes accordées à titre indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de son prononcé ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
DIT la rupture du contrat de travail de Mme X... pour motif économique sans cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE M. Y... à payer à Mme X... la somme de 9000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture du contrat de travail sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
CONDAMNE M. Y... à payer à Mme X... la somme de 500 € à titre d'indemnité pour irrégularité de la procédure,
CONDAMNE M. Y... à payer à Mme X... la somme de 1500 € à titre de dommages-intérêts du fait du non respect de la prise des congés payés conformément aux dispositions de la loi et de la convention collective ;
DEBOUTE Mme X... de sa demande en paiement d'un complément de 1105, 20 € au titre de la clause de non concurrence ;
CONDAMNE M. Y... à payer à Mme X... la somme de 1200 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et le DEBOUTE de sa demande à ce titre ;
DIT n'y avoir lieu à statuer sur la demande de M. Y... de restitution de sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour ;
CONDAMNE M. Y... aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALL, Catherine LECAPLAIN-MOREL.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00558
Date de la décision : 15/01/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-01-15;11.00558 ?
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