La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2014 | FRANCE | N°13/00802

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 13 octobre 2014, 13/00802


VF-MJB
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 275 DU TREIZE OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 13/ 00802
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre en date du 5 février 2013- Section Industrie
APPELANTE
SARL CONSTRUCTIC 8 rue du Dr Cabre97100 BASSE TERRE Représentée par Maître Jean-nicolas GONAND (Toque 83) substitué par Maître NAEJUS, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Jean Kenol Y...... 97129 LAMENTIN Représenté par Monsieur NIBERON (Délégué syndical ouvrier)


COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 8 Septembre 2014, en audience publique, de...

VF-MJB
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 275 DU TREIZE OCTOBRE DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 13/ 00802
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre en date du 5 février 2013- Section Industrie
APPELANTE
SARL CONSTRUCTIC 8 rue du Dr Cabre97100 BASSE TERRE Représentée par Maître Jean-nicolas GONAND (Toque 83) substitué par Maître NAEJUS, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Jean Kenol Y...... 97129 LAMENTIN Représenté par Monsieur NIBERON (Délégué syndical ouvrier)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 8 Septembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Françoise Gaudin, conseiller, Madame Marie-josée Bolnet, conseiller, qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 13 octobre 2014
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Francillette, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Valérie Francillette, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat verbal du 1er février 2010, M. Jean Kenol Y...a été embauché par la SARL CONSTRUCTIC en qualité d'ouvrier pour travailler sur un chantier à situé à Terre de Haut, aux îles des Saintes.
Pour se rendre à son travail, celui-ci quitte son domicile situé au lamentin le lundi matin à 4 heures 30 pour prendre le bateau à l'embarcadère de Trois-Rivières à 8 heures 30.
A cet endroit, M. Y...rencontre M. A..., gérant de la SARL CONSTRUCTIC, ou M. Z..., responsable du chantier, pour la remise du ticket du transport maritime.
M. Y...a travaillé sur ce chantier régulièrement tout le mois de février sans aucune difficulté.
Le principe de la remise du titre de transport a bien fonctionné jusqu'au vendredi 07 mai 2010 à la suite duquel M. Y...n'a pas reçu le dit ticket pour se rendre sur son lieu de travail le lundi suivant.
Sans aucune information précise de son employeur sur sa situation et n'ayant pas reçu son salaire d'avril, M. Y...saisissait, dès le 10 mai 2010, le conseil de prud'hommes de Basse-Terre en sa formation de référé pour obtenir ce qu'il estimait lui être dû.
Par ordonnance du 1er juin 2010, le juge des référés lui a accordé la somme de 1497, 34 euros au titre du salaire d'avril 2010 en ordonnant à l'employeur la remise du bulletin de paye de ce mois, a rejeté le surplus de demandes et a renvoyé les parties à se pourvoir, si elles le souhaitent, devant le juge du fond.
Par requête enregistrée le 27 juillet 2010, M. Y...saisissait le conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins d'obtenir au fond paiement du solde de ce qu'il avait réclamé au juge des référés.
Par jugement contradictoire du 05 février 2013, la juridiction prud'homale a condamné la société CONSTRUCTIC au paiement des sommes suivantes :-2 000 ¿ euros pour rupture abusive du contrat de travail,-1497, 34 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,-998 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-499, 29 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,-500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée le 10 avril 2013, la SARL CONSTRUCTIC a interjeté appel de cette décision.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par conclusions écrites, développées oralement à l'audience du 08 septembre 2014, la société CONSTRUCTIC, représentée, demande à la cour de :- dire et juger tant recevable que bien-fondé son appel,- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 5 février 2013,- statuer à nouveau et dire que la rupture du contrat de travail est à l'initiative du salarié qui a démissionné,- débouter M. Y...de l'ensemble de ses demandes,- condamner celui-ci au paiement de la somme de 1200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

La société CONSTRUCTIC soutient qu'elle n'a jamais, ni verbalement, ni aux termes d'une quelconque procédure, manifesté l'intention de rompre le contrat de travail.
Elle explique que le 07 mai 2010, à la suite d'une altercation avec le responsable de chantier, il a été demandé à M. Y...de se rendre le lundi suivant, à savoir le 10 mai, au siège de l'entreprise afin que la direction recueille ses explications sur l'incident ; qu'il était prévu de lui remettre à cette occasion le billet de transport afin de se rendre sur son lieu de travail le jour même dans l'après-midi ; que M. Y...ne s'est pas présenté le lundi à l'entreprise et ne s'est jamais plus présenté à son poste de travail, ni au siège de l'entreprise, ni à l'embarcadère.
Elle fait observer à la cour que la chronologie est importante dans la mesure où M. Y...a saisi dès le 10 mai 2010 le conseil de prud'hommes pour obtenir paiement du salaire d'avril 2010, une indemnité compensatrice de congés payés, une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, une indemnité de préavis, une indemnité de licenciement et des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ; que la nature même de ses demandes laisse penser que la saisine du 10 mai constituait en elle-même une prise d'acte qui révèle une rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié, laquelle produit les effets d'une démission.

Par conclusions notifiées à l'appelante, M. Y..., représenté, demande à la cour de satisfaire ses premières demandes, à savoir :-1497, 34 euros pour non-respect de la procédure de licenciement,-1497, 34 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-1497, 34 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,-2000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice d'humiliation et de non-application de la convention collective,-293, 62 euros pour retenue sur salaire non justifiées (février et mars)-2994, 88 euros pour les mois de mai et juin 2010,-1497, 34 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-747 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,-2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il réclame également la régularisation des fiches de paye sous astreinte de 100 ¿ par jour de retard à compter de la date de la décision à intervenir.
M. Y...fait d'abord observer qu'un certificat de non-appel daté du 6 mai 2013 lui a été remis par les services du greffe, ce qui implique, selon lui, que l'appel interjeté par la société CONSTRUCTIC est hors délai.
Il rappelle ensuite qu'il a été embauché en qualité de maçon le 1er février 2010 par contrat verbal ; qu'il a travaillé sur le chantier des îles des Saintes tout le mois de février sans aucune absence ; que le principe de la remise du ticket pour le transport maritime a toujours bien fonctionné jusqu'au dit vendredi matin ou il n'a reçu aucun ticket pour se rendre le lundi suivant sur le chantier sans aucune information de son employeur ; qu'il a appris tout au plus par ses collègues que celui-ci ne voulait plus de lui sur le chantier à la suite d'un désaccord avec le responsable du chantier concernant le coulage d'une poutre ; que les collègues recevaient leur ticket de transport pour le lundi alors qu'il N'en était rien pour lui ; qu'il a ainsi compris l'humiliation et le licenciement sans autre forme de procès que lui adressait son employeur par la voix du responsable du chantier ; qu'il est resté dans l'attente d'une manifestation de son employeur, ce qui l'a amené effectivement à saisir en premier lieu la formation de référé du conseil de prud'hommes de Basse-Terre pour obtenir paiement de son salaire d'avril 2010 et ensuite le juge du fond pour ses autres demandes.
Il ne reconnaît aucune force probante à l'attestation produite par l'employeur qui est celle du responsable de chantier, celui-ci étant un membre de la famille du gérant de la société CONSTRUCTIC.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la recevabilité de l'appel
Il est établi que la délivrance d'un certificat de non-appel à M. Y...résulte d'une erreur du greffe.
Les conditions de l'article R1461-1 du code du travail ont été respectées en l'espèce, la notification du jugement à la société appelante est intervenue le 15 mars 2013 et la déclaration d'appel a été enregistrée le 10 avril 2013.
L'appel est donc recevable.

Sur la rupture du contrat de travail :

Les premiers juges ont fait une parfaite appréciation des faits en considérant que les éléments d'une démission n'étaient pas réunies au cas présent, la volonté manifeste et non équivoque du salarié de mettre fin au contrat de travail n'étant pas établie.
C'est à juste titre que ceux-ci ont relevé que l'employeur n'a pas fourni au salarié les moyens de se rendre sur son lieu de travail à la suite du différend avec le responsable du chantier et qu'il n'a pas davantage prouvé avoir mis en situation le salarié de s'expliquer sur l'incident. En effet, il aurait été plus pertinent pour l'employeur d'avoir pris la précaution de convoquer le salarié à un entretien.
La cour relève également qu'aucune attestation venant des autres salariés du chantier n'a été produite. Cette absence affaiblit la portée de celle du responsable de chantier.
Le jugement est confirmé sur le principe de la rupture abusive du contrat de travail. L'indemnité réparatrice est revanche fixée à la somme de 1 4 97, 34 euros comme il a été initialement demandé par le salarié qui ne réclamait pas 2 000 euros (erreur des premiers juges).
L'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement est confirmée pour le montant de 1 497, 34 euros.

Sur les salaires des mois de mai et juin 2010 :

La rupture du contrat de travail étant imputée à l'employeur à partir du 10 mai 2010, le salaire du mois de juin ne pouvait plus être réclamé. Celui du mois de mai n'est dû que pour partie.
Il est attribué à Monsieur PIERRE la somme de 457, 54 euros pour le salaire de mai.

Sur l'indemnité légale de licenciement :

C'est à bon droit qu il a été jugé que l'indemnité légale de licenciement ne pouvait être versée à M. Y..., celui-ci ne justifiant que de trois mois d'ancienneté dans l'entreprise.
Sur le préavis :
Au regard de l'article L. 1234-1 du code du travail et de la convention collective nationale des ouvriers employés dans les entreprises du bâtiment du 1er mars 1996 qui est inscrite sur les trois bulletins de paye délivrés, le salarié qui a moins de six mois d'ancienneté dans l'entreprise, bénéficie d'un préavis de deux semaines et à défaut, d'une indemnité compensatrice calculée à partir de ces deux semaines (article 10-1).
Le jugement est réformé sur ce point et l'indemnité compensatrice de préavis sera fixée à 686, 30 euros.
Sur les congés payés :
L'indemnité compensatrice de congés payés doit alors être fixée à la somme de 513, 88 euros (1 240, 40 + 1355, 58 + 1 398, 97 + 457, 54 + 686, 30 = 5138, 79 : 10) pour les mois de février à mai 2010.
Le jugement est réformé sur ce chef et l'indemnité est accordée à concurrence de 513, 88 euros.

Sur les dommages-intérêts :

Aucun préjudice n'étant étayé et justifié, cette demande est rejetée.

Sur la retenue de salaires en février et mars 2010 et la régularisation des bulletins de paye de ces mois sous astreinte :

La retenue globale de 283, 52 euros apparaissant sur les bulletins de paye de février et mars 2010 (141, 76 euros sur chaque bulletin) et dénoncée par le salarié reste sans explication de la part de l'employeur.
Ces demandes doivent être satisfaites. Il est donc ordonné à la société CONSTRUCTIC la remise de bulletins de février et de mars 2010 conformes au présent arrêt, à savoir sans retenue de 141, 76 euros pour chaque mois concerné, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard prenant effet à l'expiration du mois suivant la notification de l'arrêt.
Il est précisé que la cour se réserve le droit de liquider la dite astreinte.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
L'équité commande d'accorder une indemnité de 100 euros à M. Y...sur le fondement de l'article 700 du code de procédure.
La société CONSTRUCTIC est condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS, la cour, statuant par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable ;
Réforme le jugement du 05 février 2013 sauf en ce qu'il a jugé que la démission n'est pas caractérisée et qu'il a condamné la SARL CONSTRUCTIC au paiement d'une indemnité de 1 497, 34 euros pour non-respect de la procédure de licenciement et d'une indemnité de 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Et statuant à nouveau,
Condamne la SARL CONSTRUCTIC, prise en la personne de son représentant légal, à payer à M. Jean Kenol Y...les sommes suivantes :-1 4 97, 34 euros pour rupture abusive du contrat de travail,-686, 30 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-513, 88 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés de février à mai 2010,-454, 54 euros au titre du salaire du mois de mai 2010,

Ordonne à la société CONSTRUCTIC la remise à M. Y...des bulletins de paye de février et de mars 2010 conformes au présent arrêt, à savoir sans retenue de 141, 76 euros pour chaque mois concerné, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard prenant effet à l'expiration du mois suivant la notification du présent arrêt ;
Précise que la cour se réserve le droit de liquider la dite astreinte ;
Rejette le surplus de demandes ;
Condamne la SARL CONSTRUCTIC à payer à M. Jean Kenol Y...la somme de 100 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SARL CONSTRUCTIC aux dépens ;
Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 13/00802
Date de la décision : 13/10/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2014-10-13;13.00802 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award