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13/09/2013 | FRANCE | N°12/01312

France | France, Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 13 septembre 2013, 12/01312


ARRET N°

HB/I.HIL/IH



COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2013



CHAMBRE SOCIALE





Contradictoire

Audience publique

du 04 Juin 2013

N° de rôle : 12/01312



S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE LURE

en date du 09 mai 2012

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution





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PARTIES EN CAUSE :





Monsieur [N] [K], demeurant [Adresse 2]



APPELANT



COMPARANT EN PERSONNE, assisté par Me Bruno GRACIANO, avocat au barreau de BESANCON et d...

ARRET N°

HB/I.HIL/IH

COUR D'APPEL DE BESANCON

- 172 501 116 00013 -

ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2013

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 04 Juin 2013

N° de rôle : 12/01312

S/appel d'une décision

du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE LURE

en date du 09 mai 2012

Code affaire : 80A

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

[N] [K]

C/

FONDATION ARC EN CIEL

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [N] [K], demeurant [Adresse 2]

APPELANT

COMPARANT EN PERSONNE, assisté par Me Bruno GRACIANO, avocat au barreau de BESANCON et de Me Philippe LYON , avocat au barreau de NANCY

ET :

FONDATION ARC EN CIEL, ayant son siège social [Adresse 1] ' en présence du directeur, Monsieur [W]

INTIMEE

REPRESENTEE par Me Pascale BORGEOT, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats du 04 Juin 2013:

CONSEILLERS RAPPORTEURS : Monsieur Jean DEGLISE, Président de chambre, en présence de Madame Hélène BOUCON, Conseiller, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, en l'absence d'opposition des parties

GREFFIER : Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES

lors du délibéré :

Monsieur Jean DEGLISE, Président de chambre, et Madame Hélène BOUCON, Conseiller, ont rendu compte conformément à l'article 945-1 du code de procédure civile à Madame Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Conseiller

Les parties ont été avisées de ce que l'arrêt serait rendu le 30 août 2013 et prorogé au 13 septembre 2013 par mise à disposition au greffe.

**************

Monsieur [N] [K] a été engagé le 3 novembre 2004 par la Fondation Arc-en-Ciel, en contrat à durée indéterminée à temps plein, en qualité de médecin spécialiste en cardiologie, sous réserve de son inscription à l'ordre des médecins en cette qualité dans les deux ans suivant sa date d'embauche.

Il a été affecté à l'antenne de soins ambulatoires d'[Localité 1] (Haute-Saône) du centre de réadaptation cardiologique et pneumologique de Franche-Comté géré par la Fondation.

Le 6 septembre 2010, il a été licencié aux motifs qu'il résultait d'un courrier du 26 juillet 2010 de l'agence régionale de santé de Franche-Comté qu'il n'avait pas la qualification nécessaire pour exercer la profession de médecin spécialiste en cardiologie en France et d'un courrier en date du 12 août 2010 du conseil départemental de l'Ordre des médecins de la Haute-Saône qu'il n'était inscrit à aucun tableau d'aucun ordre en France, et que le non-respect des exigences légales posées par l'article L 4111-1 du code de la santé publique, rendait impossible le maintien de son contrat de travail.

La rupture de son contrat de travail est intervenue le 7 mars 2011, à l'issue du préavis conventionnel de six mois, qui n'a été ni exécuté ni rémunéré.

Contestant la légitimité de son licenciement, Monsieur [N] [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Lure le 7 octobre 2010 aux fins d'obtenir paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soutenant essentiellement qu'il occupait un emploi de praticien attaché associé, statut dérogatoire aux dispositions de l'article L 4111-1 du code de la santé publique, prévu par les dispositions de l'article 60 de la loi du 27 juillet 1999, de sorte que son absence d'inscription à l'ordre des médecins ne pouvait constituer un motif de licenciement.

Par jugement en date du 9 mai 2012 le conseil l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné aux dépens, après avoir retenu qu'il résultait des documents contractuels et des bulletins de salaire, des conditions d'exercice des fonctions de Monsieur [N] [K], et des propres déclarations de celui-ci qu'il exerçait en qualité de médecin spécialiste en cardiologie et était rémunéré comme tel, et non pas en qualité de praticien attaché associé, placé sous la responsabilité directe d'un chef de service hospitalier, que par voie de conséquence son absence d'inscription à l'ordre des médecins rendait impossible la poursuite de son contrat de travail.

Monsieur [N] [K] a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 11 juin 2012.

Il demande à la cour d'infirmer celui-ci et statuant à nouveau, de déclarer abusive la rupture de son contrat de travail et de condamner en conséquence la Fondation Arc-en-Ciel à lui payer les sommes suivantes :

- 33 226,44 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 3322,64 € brut à titre de congés payés sur préavis,

- 130 000 € à titre de dommages et intérêts,

- 5 660 € au titre du droit individuel à la formation,

- 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il maintient qu'il relevait du statut dérogatoire des praticiens attachés associés prévu par les dispositions de l'article 60 de la loi du 27 juillet 1999, lesquelles prévoient qu'ils peuvent être recrutés non seulement par des établissements publics de santé, mais également par des 'établissements de santé privés participant au service public hospitalier' ; que tel était le cas de l'établissement auquel il était affecté ; qu'un certificat de travail a été établi par le directeur de celui-ci le 12 mars 2007 faisant état d'un emploi de praticien attaché associé ; que plusieurs recrutements sont intervenus au sein de l'établissement dans les mêmes conditions ; qu'enfin ce statut lui a été reconnu par le tribunal correctionnel de Vesoul dans un jugement en date du 15 mars 2012 le relaxant des poursuites engagées à son encontre à la requête du conseil de l'ordre des médecins pour exercice illégal de la médecine.

Il fait état par ailleurs de ce qu'il n'a pas été indemnisé au titre de son droit individuel à la formation s'élevant à un total de 116,55 heures et réclame à ce titre 5 660 €.

La Fondation Arc-en-Ciel conclut à titre principal au rejet de l'appel, et à la confirmation du jugement, sollicitant la condamnation de Monsieur [N] [K] à lui verser une indemnité de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle maintient qu'elle a été contrainte de rompre le contrat de travail de Monsieur [N] [K] dans la mesure où celui-ci ne remplissait pas les conditions cumulatives exigées par l'article L 4111-1 du code de la santé publique pour exercer la profession de médecin, parmi lesquelles celle d'être inscrit à un tableau de l'ordre des médecins.

Elle conteste avoir engagé celui-ci dans la cadre du statut dérogatoire des praticiens attachés associés, lequel ne peut s'appliquer qu'à des médecins étrangers recrutés par des établissements publics de santé, dans les strictes conditions prévues par le décret 2003-769 du 1er août 2003, et n'autorise ceux-ci à participer à l'activité du service hospitalier que sous la responsabilité du chef de service ou de l'un de ses collaborateurs.

Elle maintient que Monsieur [N] [K] a été engagé en qualité de médecin spécialiste de plein exercice, et rémunéré comme tel sur la base du coefficient 1037, conformément aux dispositions de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation à but non lucratif du 31 octobre 1951 ; que contrairement à l'obligation qui lui a été faite dans le contrat de travail de requérir son inscription à l'ordre des médecins, il n'a effectué aucune démarche en ce sens et a pratiqué la médecine sans avoir le statut de médecin tout en se présentant comme tel et percevant la rémunération afférente.

Elle ajoute que ni les certificats de travail ni le jugement de relaxe du 12 mars 2012, lui reconnaissant le statut de 'praticien attaché associé' ne peuvent lier la cour quant à la nature exacte de l'emploi occupé par Monsieur [N] [K], au regard des conditions d'exercice réelles et de la rémunération de l'intéressé.

A titre subsidiaire, au cas où la cour estimerait que l'appelant avait le statut de praticien attaché associé, dispensé d'inscription à l'ordre des médecins, elle conclut à la réduction du montant des indemnités de rupture et dommages et intérêts alloués, conformément aux dispositions réglementaires régissant la rémunération des praticiens attachés associés, et la compensation de celles-ci avec les sommes indûment versées par elle depuis 2004 à titre de salaires et d'indemnité conventionnelle de licenciement en considération de la qualité de médecin de l'intéressé.

La cour entend se référer pour un plus ample exposé des moyens des parties à leurs conclusions écrites, visées au greffe le 25 mars 2013 (Monsieur [N] [K]) et le 30 mai 2013 (Fondation Arc-en-Ciel) développées oralement à l'audience par leurs conseils.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes du contrat de travail écrit régularisé le 10 novembre 2004, qui fait la loi des parties, Monsieur [N] [K] a été engagé en qualité de médecin spécialiste en cardiologie à temps plein, sous réserve de son inscription à l'ordre des médecins en cette qualité dans les deux ans suivant sa date d'embauche et sa rémunération a été fixée sur la base du coefficient conventionnel 1037 correspondant à la qualification de médecin spécialiste à temps plein.

L'article 8 du contrat stipule qu'il 'exercera son activité médicale en toute indépendance professionnelle dans les locaux mis à sa disposition'.

Il est établi et non contesté qu'il exerçait au sein de l'antenne de soins ambulatoires d'[Localité 1] une activité de médecin de plein exercice, étant donné qu'il était selon ses dires le seul médecin référent du service et que l'établissement principal du centre de réadaptation cardiologique et pneumologique de Franche-Comté était situé à [Localité 2] (Jura) à près de 200 kilomètres de l'antenne d'[Localité 1].

Les conditions d'exercice ne correspondent en aucune façon à celles des praticiens attachés associés, lesquels ne participent à l'activité du service hospitalier que sous la responsabilité directe du chef de service ou de l'un de ses collaborateurs.

Il résulte en tout état de cause des dispositions du code de la santé publique que le statut dérogatoire de praticien attaché associé régi par le décret n° 2003-769 du 1er août 2003 est un statut de droit public qui ne peut concerner que des médecins recrutés par les établissements publics de santé et que s'il est exact que les établissements privés participant au service public hospitalier, ce qui est le cas du centre de réadaptation cardiologique et pneumologique, peuvent faire appel à des praticiens hospitaliers, ce ne peut être que dans les conditions prévues par les statuts de ces praticiens, et par la voie d'une convention de détachement.

Le recrutement direct d'un praticien par un établissement privé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée régi par le code du travail et les dispositions conventionnelles applicables à l'établissement de santé, est exclusif de ce statut dérogatoire et ne permet pas au médecin recruté de se soustraire à son obligation d'inscription au conseil de l'ordre des médecins.

La délivrance de certificats de travail en 2005 à 2007, attestant d'un emploi de 'praticien attaché associé', en contradiction avec les termes du contrat de travail et les dispositions impératives en vigueur, ne saurait conférer à Monsieur [N] [K] une quelconque immunité et imposer à l'employeur de poursuivre l'exécution de son contrat de travail dans des conditions irrégulières, l'exposant à des sanctions civiles et pénales, dès lors que les autorités sanitaires et médicales ont été informées de la situation.

De même le jugement rendu le 15 mars 2012 par le tribunal correctionnel de Vesoul, relaxant Monsieur [N] [K] des poursuites engagées à son encontre pour exercice illégal de la médecine au motif que celui-ci aurait été employé en réalité en qualité de médecin attaché associé, emportant dispense d'inscription au tableau de l'ordre des médecins, ne saurait emporter la conviction de la cour, étant observé d'une part que ce jugement n'a pas de caractère définitif, ayant fait l'objet d'un appel de la partie civile (CPAM), d'autre part que les mises en garde adressées à la Fondation Arc-en-Ciel par l'Agence régionale de santé et par le conseil de l'ordre des médecins de Haute-Saône, concernaient non seulement l'absence d'inscription au conseil de l'ordre de Monsieur [N] [K] mais également le défaut de la qualification nécessaire de celui-ci pour exercer les fonctions de médecin spécialiste en cardiologie et qu'en l'état des pièces communiquées aux débats, la possession de diplômes ou d'attestations de formations en cardiologie lui permettant d'exercer au sein d'une unité spécialisée comme l'antenne de soins ambulatoires d'Héricourt, en l'absence d'un chef de service sur place en situation d'intervenir en cas de difficultés, n'est pas justifiée.

Il apparaît dans ces conditions que l'employeur était fondé à considérer que le maintien du contrat de travail était susceptible de l'exposer à des sanctions civiles et pénales de nature à lui faire perdre sa qualité d'établissement participant au service public hospitalier et à menacer sa pérennité, et était de ce fait impossible.

Le licenciement était donc bien fondé sur une cause réelle et sérieuse, et l'exécution du préavis impossible, en l'absence de toute possibilité de régularisation de l'absence d'inscription au conseil de l'ordre, Monsieur [N] [K] n'ayant pas satisfait aux épreuves de contrôle qui lui auraient permis d'obtenir une autorisation d'exercer la profession de médecin en France, telles que prévues par l'article 60 de la loi du 27 juillet 1999.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté ses demandes en paiement d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts.

Sa demande en paiement d'une indemnité au titre du droit individuel à la formation n'apparaît pas davantage fondée.

Il résulte en effet des documents produits par l'employeur que Monsieur [N] [K] a sollicité au cours de son préavis le financement d'une action de formation à hauteur de ses droits acquis et non utilisés en matière de droit individuel à la formation, s'élevant à 116,55 heures, que sa demande a été acceptée par l'organisme financeur, l'Unifaf à hauteur de 1 098 € par courrier du 18 novembre 2010.

Aucune faute ne peut être reprochée à l'employeur qui a instruit le dossier et transmis celui-ci dans les délais.

Le fait que le salarié n'ait pas donné suite à sa demande de formation, ne crée aucune obligation à la charge de l'employeur d'indemniser le salarié de la perte de ses droits (cf. Art L 6323-17 du code du travail).

Le jugement sera donc également confirmé sur ce point.

Monsieur [N] [K] qui succombe sur l'appel en supportera les dépens.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 en faveur de l'intimée.

P A R C E S M O T I F S

La cour, chambre sociale, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Dit l'appel recevable mais non fondé ;

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lure le 9 mai 2012 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [N] [K] aux dépens d'appel ;

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la Fondation Arc en Ciel.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le treize septembre deux mille treize et signé par Madame Hélène BOUCON, conseiller, en remplacement du président de chambre empêché, et Mademoiselle Ghyslaine MAROLLES, greffier.

LE GREFFIER,LE CONSEILLER,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Besançon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/01312
Date de la décision : 13/09/2013

Références :

Cour d'appel de Besançon 03, arrêt n°12/01312 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-13;12.01312 ?
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