La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/09/2022 | FRANCE | N°19/04874

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 15 septembre 2022, 19/04874


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 15 SEPTEMBRE 2022









N° RG 19/04874 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LG3I







SA FINANCO



c/



[K], [L] [J] épouse [Z]

[C], [H] [Z]

[I] [G]



























Nature de la décision : AU FOND



























Grosse délivrée le : 15 SEPTEMBRE 2022



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 juillet 2019 par le Tribunal d'Instance de BORDEAUX ( RG : 11-16-2062) suivant déclaration d'appel du 06 septembre 2019





APPELANTE :



SA FINANCO agissant en la personne de son représentant légal domicilié...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 15 SEPTEMBRE 2022

N° RG 19/04874 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LG3I

SA FINANCO

c/

[K], [L] [J] épouse [Z]

[C], [H] [Z]

[I] [G]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le : 15 SEPTEMBRE 2022

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 juillet 2019 par le Tribunal d'Instance de BORDEAUX ( RG : 11-16-2062) suivant déclaration d'appel du 06 septembre 2019

APPELANTE :

SA FINANCO agissant en la personne de son représentant légal domicilié en

cette qualité au siège335 [Adresse 6]

Représentée par Me Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Me Jean-Pierre HAUSSMANN de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOËT, avocat au barreau D'ESSONNE

INTIMÉS :

[K], [L] [J] épouse [Z]

née le [Date naissance 3] 1959 à DIJELLI

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

[C], [H] [Z]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 5]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Josiane MOREL-FAURY, avocat au barreau de BORDEAUX et assistés par Me Annick BATBARE, avocat au barreau de BORDEAUX

[I] [G] es qualité de liquidateur de la société REV'SOLAIRE pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, [Adresse 4]

Non représenté, assigné à personne

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 juin 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Sylvie HERAS DE PEDRO, conseiller,

Greffier lors des débats : Séléna BONNET

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Suivant bon de commande signé le 17 avril 2013, M. [C] [Z] et Mme [K] [J] épouse [Z] (ci-après dénommés les époux [Z]) ont fait l'acquisition auprès de la société Rev'Solaire d'une centrale photovoltaïque domestique en intégration de toiture et de ses accessoires pour un montant total de 24 200 euros.

Suivant offre de prêt du 17 avril 2013, les époux [Z], pour financer cette installation, ont signé un contrat de crédit auprès de la SA Financo d'un montant de 24 200 euros, remboursable en 144 mensualités d'un montant de 250,13 euros chacune, après un différé d'amortissement de 450 jours, au taux effectif global de 5,96 % l'an.

Le 6 juin 2013, la société Rev'Solaire a émis une facture pour un montant de 24 200 euros.

Le 10 juin 2013, la SA Financo a libéré les fonds au profit de la société Rev'Solaire pour un montant de 24 200 euros.

Par lettre du 12 juin 2013, la SA Financo a notifié aux époux [Z] la prise d'effet de leurs obligations à son égard.

A compter de septembre 2014, la SA Financo soutient que les époux [Z] n'ont plus réglé les échéances du prêt.

Par lettre du 12 février 2015, la SA Financo a prononcé la déchéance du terme et l'exigibilité immédiate des sommes dues.

Par lettre du 24 mars 2015, la SA Financo a renouvelé sa demande de paiement des sommes restant dues, en vain.

Par actes d'huissier des 25 mai et 8 juin 2016, la SA Financo a fait assigner les époux [Z] devant le tribunal d'instance de Bordeaux aux fins notamment de les voir condamner à payer la somme de 28 155,87 euros outre les intérêts au taux de 5,52 % à compter du 12 février 2015.

Par acte du 20 février 2017, les époux [Z] ont fait assigner en intervention forcée Maître [I] [G], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Rev-Solaire.

Par jugement du 12 novembre 2018, le tribunal d'instance de Bordeaux a :

- dit que ce sont les dispositions du code de la consommation qui doivent s'appliquer au présent litige,

- dit en conséquence que le tribunal d'instance est compétent pour statuer sur le litige des parties,

- dit que les demandes en annulation des contrats de vente et de prêt formulées par les défendeurs ne sont pas atteintes par la prescription,

- débouté les époux [Z] de leur demande en nullité des contrats de vente et de prêt au titre du non-respect des prescriptions de l'article L. 121-23 du code de la consommation, au titre de l'irrégularité de la facture émise en violation de l'article L. 441-3 du code de commerce, au titre de l'absence de souscription d'une assurance de garantie décennale, au titre de l'absence de prérogative du démarcheur en violation des dispositions d'ordre public de l'article L. 311-8 du code de la consommation et au titre de l'existence d'un dol,

- invité la société SA Financo à produire les originaux de ces pièces 1 d), 4 et 5, correspondant à l'autorisation de prélèvement en date du 6 juin 2013, la demande de financement en date du 6 juin 2013 et le procès-verbal de réception non daté,

- invité les époux [Z] à tirer toutes les conséquences sur le fait que le manquement éventuel par la société SA Financo à son obligation de délivrance des fonds au profit du vendeur ne saurait être analysé comme une cause de nullité du contrat car n'affectant pas la formation du contrat,

- réservé les demandes des parties,

- réservé les dépens,

- renvoyé l'affaire à la mise en état.

Par jugement réputé contradictoire du 12 juillet 2019, le tribunal d'instance de Bordeaux a :

- constaté qu'aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions écrites, les époux [Z] n'ont pas sollicité la résolution du contrat de vente,

- débouté les époux [Z] en conséquence de leurs prétentions tendant à obtenir le rejet de la demande de restitution des fonds prêtés au profit de la SA Financo, au motif de l'absence de finalité des travaux par la société Rev'Solaire,

- débouté les époux [Z] de leur demande tendant à prononcer la nullité du contrat de crédit au motif du faux par fausse signature en écriture privée,

- débouté les époux [Z] de leur demande en restitution des sommes versées par eux au titre duremboursement du prêt souscrit auprès de la SA Financo,

- constaté l'absence de notification régulière de la déchéance du terme concernant le remboursement du prêt consenti le 17 avril 2013 par la SA Financo aux époux [Z],

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts,

- condamné solidairement les époux [Z] à verser à la SA Financo la somme de 1 977,03 euros avec intérêts au taux légal dispensé de la majoration de cinq points prévu à l'article L.313-3 du code monétaire et financier, à compter du 18 février 2015 pour Mme [K] [J] épouse [Z] et du 24 mars 2015 pour M. [C] [Z], date de la réception des mises en demeure adressée à chacun d'eux,

- déclaré irrecevable la SA Financo en ses demandes en paiement au titre des échéances échues postérieurement au 24 août 2018 et au capital à échoir,

- débouté les époux [Z] de leur demande tendant à condamner la SA Financo à procéder à la radiation de l'inscription au fichier FICP/Banque de France,

- rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les époux [Z] aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.

La SA Financo a relevé appel de ce jugement par déclaration du 6 septembre 2019.

Par conclusions déposées le 5 août 2020, elle demande à la cour de :

- voir dire et juger les époux [Z] prescrits, irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions,

- voir dire et juger la SA Financo recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

Y faisant droit,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a jugé que la déchéance du terme n'était pas acquise à la SA Financo et en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- voir dire et juger n'y avoir lieu à nullité ou résolution des conventions pour quelque cause que ce soit,

- voir dire et juger qu'en matière commerciale ou de droit commun, la nullité ou la résolution du contrat de vente n'aurait aucun effet sur le contrat de crédit,

- voir dire et juger que la SA Financo n'a commis aucune faute à quelque titre que ce soit,

En conséquence,

- condamner solidairement les époux [Z] à payer à la SA Financo la somme de 28 155,87 euros, au taux contractuel de 5,52 % l'an à compter du 12 février 2015 et subsidiairement à compter du 2 octobre 2019,

A titre subsidiaire, si la cour venait à prononcer la nullité ou la résolution du contrat de crédit par suite de la nullité ou de la résolution du contrat de vente,

- voir dire et juger que la SA Financo n'a commis aucune faute à quelque titre que ce soit,

- voir dire et juger que la notion de préjudice relève de l'appréciation souveraine des juges du fond,

- voir dire et juger que les époux [Z] ne justifient d'aucun préjudice,

En conséquence,

- condamner solidairement les époux [Z] à rembourser à la SA Financo le capital emprunté d'un montant de 24 200 euros, au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

A titre infiniment subsidiaire, si la Cour venait à juger que la déchéance du terme n'était pas acquise à la SA Financo,

- constater les manquements graves et réitérés des emprunteurs à leur obligation de remboursement des échéances,

- prononcer la résolution judiciaire du contrat de crédit sur le fondement de l'article 1184 du code civil, devenu les articles 1224 à 1229 du même code,

En conséquence,

- condamner solidairement les époux [Z] à rembourser à la SA Financo le capital emprunté d'un montant de 24 200 euros, au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

En tout état de cause,

- condamner solidairement les époux [Z] à payer à la SA Financo une indemnité d'un montant de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement les époux [Z] aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 31 mai 2022 comportant appel incident, les époux [Z] demandent à la cour de :

- dire et juger la SA Financo mal fondée en son appel et la débouter de toutes ses demandes,

- dire et juger les époux [Z] bien fondés en leurs prétentions,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- débouté les époux [Z] en conséquence de leurs prétentions tendant à obtenir le rejet de la demande de restitution des fonds prêtés au profit de la SA Financo, au motif de l'absence de finalité des travaux par la société Rev'Solaire,

- débouté les époux [Z] de leur demande tendant à prononcer la nullité du contrat de crédit au motif du faux par fausse signature en écriture privée,

- débouté les époux [Z] de leur demande en restitution des sommes versées par eux au titre du remboumement du prêt souscrit auprès de la SA Financo,

- débouté les époux [Z] de leur demande tendant à condamner la SA Financo à procéder à la radiation de l'inscription au fichier FICP/Banque de France,

- rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les époux [Z] aux entiers dépens,

Sur les demandes reconventionnelles formées par les époux [Z],

A titre principal,

- juger recevable et bien fondée l'exception de faux soulevée par les époux [Z],

- juger applicables au cas d'espèce les dispositions d'ordre public du code de la consommation,

- juger l'action engagée par la SA Financo irrecevable et mal fondée en l'état, faute d'une créance liquide et exigible et l'enjoindre à mieux se pourvoir,

- débouter la SA Financo de toute demande de restitution des fonds au motif que la date de la transaction est écrite par le démarcheur en lieu et place du consommateur,

- débouter la SA Financo de toute demande de restitution des fonds au motif que l'autorisation de prélèvement automatique a été signée par le consommateur durant la période de rétractation,

- débouter la SA Financo de toute demande de restitution des fonds au motif de l'absence de l'information précontractuelle attachée au contrat de crédit,

- débouter la SA Financo de toute demande de restitution des fonds au motif de la violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation qui précisent les mentions obligatoires devant figurer sur le contrat de vente à peine de nullité,

- débouter la SA Financo de sa demande de restitution des fonds au motif que les travaux n'étaient pas finalisés à la date du décaissement des fonds,

- débouter la SA Financo de sa demande de restitution des fonds au motif de l'irrégularité de l'attestation de fin de travaux qui ne précise en rien la prestation accomplie mais qui, néanmoins, a déclenché le décaissement des fonds de la banque au profit de la société venderesse,

- débouter la SA Financo de sa demande de restitution des fonds au motif de l'absence de l'information essentielle sur le contrat de vente de la productivité de l'installation ce qui conduit à une perte financière inacceptable de 42 638 euros,

- juger que la SA Financo a commis des fautes causant directement un préjudice matériel, financier et moral aux époux [Z] la privant de tout droit à restitution de créance,

A titre subsidiaire,

- prononcer la déchéance des intérêts du crédit en l'absence de prérogative du démarcheur en violation des dispositions d'ordre public du code de la consommation,

- prononcer la déchéance des intérêts du crédit en l'absence de la vérification du fichier FICP de la Banque de France par le prêteur,

- juger qu'aucun acte n'a couvert les nullités relatives ; à défaut prononcer la nullité absolue au bénéfice de Mme [K] [J] épouse [Z],

En tout état de cause,

- condamner la SA Financo à restituer les sommes perçues du montant arrêté à la somme de 2 419 euros (somme à parfaire à l'arrêt) dans le délai de 1 mois suivant la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration dudit délai,

- ordonner à la SA Financo de procéder à la radiation de l'inscription au fichier FICP/Banque de France dans le délai de 15 jours suivant la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration dudit délai,

- condamner la SA Financo à verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel et de première instance,

- juger qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir et en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire, en application des dispositions légales devront être supportées par la SA Financo, en plus de l'indemnité mise à sa charge.

Maître [I] [G], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Rev'Solaire, n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel et les conclusions d'appelante et d'intimés lui ont été régulièrement signifiées.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 2 juin 2022 et l'affaire fixée à l'audience du 16 juin 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Au préalable, les nombreux dire et juger figurant au dispositif des conclusions des parties ne constituent pas des prétentions au sens du code de procédure civile mais tout au plus le récapitulatif des moyens articulés.

Il sera également rappelé que dans son jugement du 12 novembre 2018, le tribunal a définitivement jugé que les dispositions du code de la consommation étaient applicables au présent litige et débouté les époux [Z] de leur demande en nullité des contrats de vente et de prêt. Sont dès lors sans objet les longs développements des parties sur ces points.

Sur la demande principale en paiement de la société Financo

Au soutien de sa demande en paiement, la société Financo fait valoir que les échéances du prêt sont demeurées impayées à compter de septembre 2014 et qu'elle a prononcé la déchéance du terme du contrat de crédit selon mises en demeure des 12 février et 24 mars 2015.

Les époux [Z] opposent l'absence de notification régulière de la déchéance du terme.

Les débats d'appel et les pièces soumises à la cour n'apportent aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l'exacte appréciation du premier juge qui, considérant que la banque ne justifiait pas avoir adressé préalablement aux époux [Z] une mise en demeure restée sans effet précisant le montant des échéances de retard impayées et le délai dont pouvait disposer l'emprunteur pour empêcher la déchéance du terme, a jugé que la déchéance du terme n'était pas acquise, étant observé qu'aucune disposition contractuelle liant les parties ne dispensait de manière claire et non équivoque le prêteur de cette formalité.

Sur la demande subsidiaire en résolution judiciaire formée par la société Financo

Aux termes de l'ancien article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

En l'espèce, il n'est pas contesté que les époux [Z] ont cessé de payer les échéances du prêt, ce qui caractérise un manquement grave à leur obligation de remboursement justifiant le prononcé de la résolution judiciaire du contrat.

Les parties doivent être remises en leur état antérieur, et la résolution du contrat de crédit emporte obligation pour les emprunteurs de restituer le capital qui a été versé pour leur compte entre les mains du vendeur-installateur, et pour le prêteur l'obligation de restituer les échéances versées.

Les époux [Z] invoquent toutefois la faute du prêteur à qui ils reprochent d'avoir délivré les fonds empruntés sur la base d'une fausse attestation de livraison alors que la société Rev'Solaire n'aurait pas exécuté intégralement la prestation commandée. Ils sollicitent en conséquence le débouté de la société Financo de sa demande en restitution des fonds empruntés.

La société Financo fait valoir qu'elle a libéré les fonds sur présentation d'une attestation de livraison/demande de financement et d'un procès-verbal de réception sans réserve, signés par les emprunteurs.

Il résulte des articles L. 311-31 du code de la consommation (devenu L. 312-48) et L. 311-32 (devenu L. 312-55) que les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de l'exécution de la prestation de services qui doit être complète, et que le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s'assurer que celui-ci a exécuté son obligation commet une faute qui le prive de la possibilité de se prévaloir, à l'égard de l'emprunteur, des effets de la résolution du contrat de prêt.

La société Financo, spécialiste des crédits pour l'équipement de l'habitat en énergie renouvelable, et qui connaissait nécessairement le caractère complexe des prestations à la charge d'un installateur de panneaux photovoltaïques, ne pouvait débloquer le montant du capital prêté qu'après avoir vérifié avec sérieux que le vendeur avait exécuté son obligation.

Or, la cour constate que ni l'attestation de livraison ni le procès-verbal de réception n'indiquent si le raccordement au réseau électrique a été effectué alors que le bon de commande mettait cette prestation à la charge du vendeur.

Cette anomalie aurait dû attirer l'attention de l'établissement de crédit afin de procéder à des vérifications complémentaires pour s'assurer de l'exécution de l'intégralité de la commande.

Dès lors, sans qu'il y ait lieu d'aller plus avant dans la discussion des parties, notamment sur l'authenticité des documents susdécrits, il convient de considérer qu'en libérant les fonds sans s'assurer de la parfaite exécution du contrat principal, la banque a commis une faute.

La société Financo oppose cependant l'absence de préjudice subi par les époux [Z] puisque le matériel a été mis en service le 17 décembre 2014, que l'installation fonctionne et produit de l'électricité en vue de sa revente, de sorte qu'ils ne peuvent être exonérés de l'obligation de rembourser le capital prêté.

Il convient de rappeler que le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute (Civ. 1ère, 25 nov. 2020, n°19-14.908).

En l'espèce, si les fonds ont été libérés en juin 2013, date à laquelle les démarches administratives et le raccordement n'étaient pas effectués, il apparaît à la lecture du contrat de crédit et du tableau d'amortissement que les époux [Z] ont bénéficié d'un différé de remboursement de 450 jours. Par ailleurs, les emprunteurs disposent désormais d'une installation photovoltaïque en état de fonctionnement, quand bien même elle ne procurerait pas le rendement escompté.

En conséquence, au regard du préjudice subi par les emprunteurs en lien avec la faute de la banque, au titre de l'absence de disponibilité des sommes employées au paiement des échéances du contrat de crédit et des limitations budgétaires inhérentes, il convient de les condamner à s'acquitter en partie de la créance de restitution du prêteur, à concurrence de 14.000 €.

Réciproquement, la société Financo sera tenue de restituer aux époux [Z] l'ensemble des sommes versées depuis l'origine du contrat.

Sur la demande de radiation de l'inscription au ficher FICP/Banque de France

En application de l'article L. 752-1 du code de la consommation, la société Financo était tenue de déclarer à la Banque de France l'absence de règlement des échéances du prêt à leur terme qui constitue un incident de paiement.

Comme justement rappelé par le premier juge, les dispositions légales précitées subordonnent la levée de ce fichage au paiement intégral des sommes dues au titre du prêt souscrit par les époux [Z] auprès de la société Financo.

Faute d'élément démontrant que ce paiement intégral est intervenu à ce jour, les époux [Z] seront déboutés de leur demande tendant à condamner la société Financo à procéder à la radiation de l'inscription au fichier FICP/Banque de France. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Les parties obtenant partiellement gain de cause en l'espèce, chacune conservera la charge des dépens par elle exposés.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

En l'espèce, il n'y a pas lieu à condamnation sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement du 12 juillet 2019, sauf en ce qu'il a constaté l'absence de notification régulière de la déchéance du terme concernant le remboursement du prêt consenti le 17 avril 2013 par la SA Financo aux époux [Z], débouté les époux [Z] de leur demande tendant à condamner la SA Financo à procéder à la radiation de l'inscription au fichier FICP/Banque de France, rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile, condamné les époux [Z] aux entiers dépens, dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

Statuant à nouveau dans cette limite,

Prononce la résolution du contrat de crédit de 24.200 euros conclu le 17 avril 2013 entre les époux [Z] et la SA Financo,

Dit que la SA Financo a commis une faute en versant la somme de 24.200 euros à la société Rev'Solaire sans s'assurer que celle-ci avait exécuté totalement ses obligations,

Condamne in solidum les époux [Z] à payer à la SA Financo la somme de 14.000 euros au titre de la créance de restitution du prêteur ;

Condamne la SA Financo à restituer aux époux [Z] les sommes versées par eux jusqu'à ce jour correspondant aux échéances de remboursement du prêt payées ;

Y ajoutant, 

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Laisse à la charge de chaque partie les dépens d'appel par elle exposés ;

Déboute les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/04874
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;19.04874 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award