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15/09/2022 | FRANCE | N°19/04880

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 15 septembre 2022, 19/04880


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 15 SEPTEMBRE 2022









N° RG 19/04880 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LG4G







SA FCT CASH



c/



[Y] [E]



S.A.R.L. BGD CONSEILS

S.A.R.L. EKIP

























Nature de la décision : AU FOND
















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Grosse délivrée le : 15 SEPTEMBRE 2022



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 15 mai 2019 par le Tribunal d'Instance de LIBOURNE (RG : 11-18-0374) suivant déclaration d'appel du 09 septembre 2019





APPELANTE :



SA FCT CASH représentée par la société GTI ASSET MANAGEMENT agissant en la pe...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 15 SEPTEMBRE 2022

N° RG 19/04880 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LG4G

SA FCT CASH

c/

[Y] [E]

S.A.R.L. BGD CONSEILS

S.A.R.L. EKIP

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le : 15 SEPTEMBRE 2022

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 15 mai 2019 par le Tribunal d'Instance de LIBOURNE (RG : 11-18-0374) suivant déclaration d'appel du 09 septembre 2019

APPELANTE :

SA FCT CASH représentée par la société GTI ASSET MANAGEMENT agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social29/[Adresse 2]

Représentée par Me Marc DUFRANC de la SCP AVOCAGIR, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Me Louis THEVENOT de la SELARL SELARL LT AVOCAT, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉ :

[Y] [E]

né le 11 Mars 1960 à [Localité 5]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 3]

Représenté par Me Arnaud LATAILLADE de la SCP LATAILLADE-BREDIN, avocat au barreau de LIBOURNE

INTERVENANTES :

S.A.R.L. BGD CONSEILS agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 4]

SELARL EKIP représentée par Me [J] [N], commissaire à l'exécution du plan, domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]

Représentées par Me Anne-sophie VERDIER de la SELARL MAÎTRE ANNE-SOPHIE VERDIER, avocat au barreau de BORDEAUX et assistéespar Me Fabienne BARNECHE de la SELARL FABIENNE BARNECHE, avocat au barreau de PAU

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 juin 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Sylvie HERAS DE PEDRO, conseiller,

Greffier lors des débats : Séléna BONNET

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le FCT CASH est un fonds de titrisation représenté par la SA GTI Asset Management (ci après, « le FCT CASH »), société réglementée par l'autorité des marchés financiers. La SARL BGD Conseils est une société créée en 2009, dont l'objet est la fourniture de produits destinés à l'agriculture et à la viticulture, ainsi que des services de conseil.

Selon un 'contrat de cession et de gestion' conclu le 26 octobre 2015, la société BGD Conseils a cédé au FCT CASH un ensemble de créances commerciales en contrepartie d'un financement fondé sur le modèle de la titrisation.

Suivant bordereau de cession de créances du 19 avril 2016, la SARL BGD Conseils a notamment cédé à la SA FCT CASH les créances commerciales qu'elle détenait à l'encontre de M. [E], exploitant agricole, pour un montant total de 4 023,90 euros.

Par jugement du 4 avril 2017, le tribunal de commerce de Pau a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SARL BGD Conseils et la SELARL [J] [N], devenue la SELARL Ekip, a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.

Par actes d'huissier des 28 juin et 5 juillet 2018, la SA FCT CASH, représentée par la société GTI Asset Management, a fait assigner M. [E] en paiement.

Par acte d'huissier du 13 novembre 2018, M. [E] a fait assigner la SELARL [J] [N], devenue la SELARL Ekip, ès qualité de mandataire judiciaire de la SARL BGD Conseils aux fins de voir constater que dans la mesure où il a réglé les sommes dues directement entre les mains de la société BGD Conseils, la demande en paiement de la SA FCT CASH doit être dirigée à l'encontre de cette dernière.

Ces deux procédures ont fait l'objet d'une jonction.

Par jugement contradictoire du 15 mai 2019, le tribunal d'instance de Libourne a :

- débouté la société GTI Asset Management agissant pour le compte de la SA FCT CASH de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société GTI Asset Management à verser à M. [E] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté l'ensemble des parties pour le surplus de leurs demandes,

- condamné la société GTI Asset Management aux entiers dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a estimé que M. [E] avait réglé ses factures en toute bonne foi directement à son fournisseur BGD Conseils et que la demande du FCT CASH reposait en fait sur un manquement de BGD à son devoir d'information envers les clients.

Selon déclaration du 9 septembre 2019, la SA FCT CASH, représentée par la société GTI Asset Management, a relevé appel de ce jugement à l'encontre de M. [E].

Par acte du 26 février 2020, M. [E] a interjeté appel provoqué et fait assigner en intervention forcée la SARL BGD Conseils.

Par conclusions déposées le 16 mai 2022, la SA FCT CASH, représentée par la société GTI Asset Management, demande à la cour de :

- infirmer la décision rendue le 15 mai 2019 par le tribunal d'instance de Libourne dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- condamner M. [E] à verser à la SA FCT CASH, représenté par la société GTI Asset Management, les sommes de :

* 4 023,90 euros au titre de la facture numéro FCT-M02-2015-1007 du 15 avril 2016 cédée par la SARL BGD Conseils selon bordereau de cession de créances du 19 avril 2016,

* 1 000 euros pour résistance abusive,

* 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions déposées le 31 mai 2022, M. [E] demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel et y ajoutant,

- condamner l'appelant à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire et vu que l'action de la société GTI Asset Management à l'encontre de M. [E] repose en fait sur un manquement de la SARL BGD Conseils au devoir d'une information claire de son client,

- condamner la SARL BGD Conseils à relever indemne M. [E] de toute condamnation,

- condamner la SARL BGD Conseils à payer à M. [E] la somme de 1 500 euros à titre de dommage et intérêts,

- condamner la SARL BGD Conseils à payer à M. [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SARL BGD Conseils aux entiers dépens,

A titre subsidiaire et au cas où M. [Y] [E] serait condamné à payer les sommes réclamées,

- juger que M. [E] sera subrogé dans les droits de la société GTI Asset Management,

- condamner la SARL BGD Conseils à payer à M. [E] la somme de 1 500 euros au titre de dommage et intérêts,

- condamner la SARL BGD Conseils à payer à M. [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SARL BGD Conseils aux entiers dépens,

- condamner l'appelant aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 10 août 2020, la SARL BGD Conseils et la SELARL Ekip demandent à la cour de :

- recevoir la SARL BGD Conseils et la SELARL Ekip en leurs demandes, fins et conclusions,

- faire droit à toutes exceptions de procédure,

- confirmer le jugement rendu le 15 mai 2019 par le tribunal d'instance de Libourne dans l'intégralité de ses dispositions, et dès lors, débouter la société appelante de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- débouter M. [E] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions introduites à l'encontre de la SARL BGD Conseils, demandes irrecevables, et en tout état de cause mal fondées en droit,

- condamner M. [E] à payer à la SARL BGD Conseils la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuer de ce que de droit sur les dépens de première instance et d'appel.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 2 juin 2022 et l'affaire fixée à l'audience du 16 juin 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en paiement du FCT CASH à l'encontre de M. [E]

Aux termes de l'article L. 214-169 IV alinéa 2 du code monétaire et financier dans sa version applicable à l'espèce,

'L'acquisition ou la cession des créances s'effectue par la seule remise d'un bordereau dont les énonciations et le support sont fixés par décret, ou par tout autre mode d'acquisition ou de cession de droit français ou étranger. Elle prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau lors de sa remise, quelle que soit la date de naissance, d'échéance ou d'exigibilité des créances, sans qu'il soit besoin d'autre formalité, et ce quelle que soit la loi applicable aux créances et la loi du pays de résidence des débiteurs.'

L'article D. 214-227 du même code dans sa version applicable à l'espèce dispose que:

'Le bordereau prévu au deuxième alinéa du IV de l'article L. 214-169 comporte les énonciations suivantes :

1° La dénomination " acte de cession de créances " ;

2° La mention du fait que la cession est soumise aux dispositions des articles L. 214-169 à L. 214-175 ;

3° La désignation du cessionnaire ;

4° La désignation et l'individualisation des créances cédées ou les éléments susceptibles d'y pourvoir, par exemple l'indication du débiteur ou du type de débiteurs, des actes ou des types d'actes dont les créances sont ou seront issues, du lieu de paiement, du montant des créances ou de leur évaluation et, s'il y a lieu, de leur échéance.'

En l'espèce, le FCT CASH justifie d'un bordereau de cession de créance conclu avec la société BGD Conseils le 19 avril 2016, portant notamment sur la créance commerciale détenue à l'encontre de M. [E] au titre d'une facture n° M02-2015-1007 du 15 avril 2016 pour un montant de 4.023,90 euros TTC.

Ce bordereau respecte les conditions de forme prévues par l'article D. 214-227 précité.

La cession de créance est donc opposable à M. [E].

Selon l'article L. 214-72 du code monétaire et financier dans sa version applicable à l'espèce:

'Lorsque des créances sont transférées à l'organisme, leur recouvrement continue d'être assuré par le cédant ou par l'entité qui en était chargée avant leur transfert, dans des conditions définies par une convention passée avec la société de gestion de l'organisme.

Toutefois, tout ou partie du recouvrement peut être confié à une autre entité désignée à cet effet, dès lors que le débiteur en est informé par lettre simple.'

Le FCT CASH justifie avoir délivré cette information à M. [E] par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 août 2016.

En effet, contrairement aux allégations de M. [E], la signature de ce dernier sur l'accusé de réception produit aux débats démontre qu'il a bien reçu ledit courrier le 9 août 2016.

Si le FCT CASH soutient que la notification selon laquelle les paiements devaient être effectués entre ses mains résultait déjà des factures adressées par la société BGD Conseils à M. [E], force est de constater que la mention apposée en bas de ladite facture selon laquelle 'Pour être libératoire, votre règlement doit être effectué directement à l'ordre du FCT CASH-BGD Conseils, cessionnaire de la créance', non seulement n'est accompagnée ni de l'adresse ni du RIB du FTC CASH pour adresser le paiement, mais est aussi de nature prêter à confusion et induire le débiteur en erreur puisque l'ordre proposé du règlement est 'FCT CASH-BGD Conseils'.

Si M. [E] justifie avoir versé la somme de 4.323,90 euros directement entre les mains de la société BGD Conseils au titre de la facture n° M02-2015-1007 du 15 avril 2016, force est de constater que ce paiement est intervenu le 31 mars 2017 alors qu'il avait reçu la lettre du 4 août 2016 lui notifiant expressément la cession de créance et les modalités de recouvrement.

Le paiement entre les mains de la société BGD Conseils ne peut en conséquence être considéré comme libératoire et le FCT CASH est fondé à lui réclamer la somme de 4.323,90 euros. M. [E] sera donc condamné au paiement de cette somme et le jugement infirmé en ce sens.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive

Il est constant que cette résistance ne peut donner lieu à indemnisation que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, le FCT CASH ne rapporte pas la preuve d'une telle faute et sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur la demande en garantie formée par M. [E] contre la société BGD Conseils

M. [E], qui reproche à la société BGD Conseils d'avoir manqué à son devoir d'information, sollicite la condamnation de cette dernière à le relever indemne et à lui payer des dommages et intérêts.

Il sera toutefois rappelé que suivant jugement du 4 avril 2017, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société BGD Conseils par le tribunal de commerce de Pau, la SELARL [J] [N], devenue SELARL EKI'P étant désignée en qualité de mandataire judiciaire. Le tribunal de commerce de Pau a, par jugement du 30 octobre 2018, adopté le plan de redressement présenté par la société BGD Conseils.

Faute de justifier d'une déclaration de créance portant sur un montant de 4.023,90 euros au passif du redressement judiciaire de la société BGD Conseils, la demande de garantie formée par M. [E] doit être déclarée irrecevable en application des dispositions de l'article L. 622-22 du code de commerce.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. M. [E] en supportera donc la charge.

Aucune considération d'équité, eu égard aux circonstances de la cause et à la situation respective des parties, ne justifie qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant de nouveau et y ajoutant,

Condamne M. [Y] [E] à payer à la SA FCT CASH, représentée par la société GTI Asset Management, la somme de 4.023,90 euros au titre de la facture n°M02-2015-1007 du 15 avril 2016,

Déclare irrecevable les demandes formées par M. [Y] [E] à l'encontre de la société BGD Conseils,

Déboute les parties de leurs plus amples demandes,

Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [Y] [E] aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/04880
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;19.04880 ?
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