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15/09/2022 | FRANCE | N°19/04913

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 15 septembre 2022, 19/04913


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 15 SEPTEMBRE 2022









N° RG 19/04913 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LG7K







[G] [J]

[X] [J]

[O] [J]



c/



SCI HAUTS DE [Adresse 9]



























Nature de la décision : AU FOND



























Grosse délivrée le : 15 SEPTEMBRE 2022



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 22 juillet 2019 par le Tribunal d'Instance de PERIGUEUX ( RG : 11-18-621) suivant déclaration d'appel du 11 septembre 2019





APPELANTS :



[G] [J]

née le [Date naissance 1] 1937

de nationalité Française,

demeurant...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 15 SEPTEMBRE 2022

N° RG 19/04913 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LG7K

[G] [J]

[X] [J]

[O] [J]

c/

SCI HAUTS DE [Adresse 9]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le : 15 SEPTEMBRE 2022

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 22 juillet 2019 par le Tribunal d'Instance de PERIGUEUX ( RG : 11-18-621) suivant déclaration d'appel du 11 septembre 2019

APPELANTS :

[G] [J]

née le [Date naissance 1] 1937

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 8]

[X] [J]

né le [Date naissance 3] 1966

de nationalité Française

demeurant [Adresse 7]

[O] [J]

né le [Date naissance 2] 1964

de nationalité Française, demeurant [Adresse 9]

Représentés par Me Bénédicte LAGARDE-COUDERT de la SELAS NUNEZ-LAGARDE COUDERT-MARTINS DA SILVA, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉE :

SCI HAUTS DE [Adresse 9] prise en la personne de ses co-gérants Madame [P] [A] et Monsieur [K] [A] domiciliés en cette qualité audit siège social. [Adresse 9]

Représentée par Me Gérald GRAND, avocat au barreau de PERIGUEUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 juin 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Sylvie HERAS DE PEDRO, conseiller,

Greffier lors des débats : Séléna BONNET

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Mme [G] [J], M. [X] [J] et M. [O] [J] sont propriétaires d'un immeuble d'habitation mis en location, situé à [Localité 6] (24), sur une parcelle cadastrée section AP n°[Cadastre 5], contiguë à la parcelle cadastrée AP n°[Cadastre 4] appartenant à la SCI Hauts de [Adresse 9].

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 décembre 2017, reçue le 15 décembre 2017, les consorts [J] ont mis la SCI Hauts de [Adresse 9] en demeure de supprimer un tas de matières fermentescibles et du matériel agricole déposés à l'entrée de la maison du logement des consorts [J].

Par acte sous seing privé du 24 janvier 2018, à effect rétroactif au 1er janvier 2018, la SCI Hauts de [Adresse 9] a conclu avec M. [M] [A] un contrat de fermage, portant notamment sur la parcelle cadastrée section AP n°[Cadastre 4].

Par procès-verbal d'huissier du 12 avril 2018, Maître [D] [W], huissier de justice, a constaté l'entreposage de déchets à proximité immédiate de la parcelle des consorts [J].

Par acte d'huissier du 9 juillet 2018, les consorts [J] ont fait assigner la SCI Hauts de [Adresse 9] devant le tribunal d'instance de Périgueux aux fins notamment de cessation du trouble anormal de voisinage.

Par jugement contradictoire du 22 juillet 2019, le tribunal d'instance de Périgueux a :

- déclaré recevable l'action intentée par les consorts [J] à l'encontre de la SCI les Hauts de [Adresse 9],

- débouté les consorts [J] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamné les consorts [J] à payer à la SCI les Hauts de Pianguad la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les consorts [J] aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Les consorts [J] ont relevé appel de ce jugement par déclaration du 11 septembre 2019.

Par conclusions déposées le 22 mai 2020, ils demandent à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondé l'appel interjeté par les consorts [J] à l'encontre du jugement rendu le 22 juillet 2019 par le tribunal d'instance de Périgueux et, y faire droit,

- en revanche, dire et juger irrecevable et non fondé l'appel incident formé par la SCI les Hauts de [Adresse 9] et, l'en débouter,

En conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'action des consorts [J],

- en revanche, réformer le jugement en toutes ses autres dispositions,

Et, statuant à nouveau,

- constater que la SCI les Hauts de [Adresse 9] s'est rendue coupable d'un trouble anormal de voisinage en entreposant le tas de matières fermentescibles pendant deux ans et le matériel agricole devant l'entrée de la maison des consorts [J], obstruant la vue et créant une gêne olfactive,

- condamner la SCI les Hauts de [Adresse 9] à payer des dommages et intérêts aux consorts [J] à hauteur de 3 000 euros en raison du préjudice subi,

- condamner la SCI les Hauts de [Adresse 9] à payer une indemnité de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions déposées le 11 mars 2020 comportant appel incident, la SCI Hauts de [Adresse 9] demande à la cour de :

- déclarer recevable mais mal fondé l'appel élevé par les consorts [J] à l'encontre du jugement rendu par le tribunal d'instance de Périgueux le 22 juillet 2019,

- déclarer recevable et fondé l'appel incident élevé par la SCI les Hauts de [Adresse 9] en ce que le tribunal d'instance de Périgueux a déclaré recevables les réclamations des consorts [J] par le jugement dont appel,

- réformer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Périgueux le 22 juillet 2019 en ce qu'il a déclaré recevable les réclamations des consorts [J] à l'encontre de la SCI les Hauts de [Adresse 9],

Statuant à nouveau,

- déclarer irrecevables les réclamations formulées par les consorts [J] à l'encontre de la SCI les Hauts de [Adresse 9] pour les causes sus-énoncées,

- les en débouter,

- les condamner reconventionnellement au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Subsidiairement si la cour estimait devoir écarter l'appel incident formulé par la concluante,

- débouter les consorts [J] de leur appel et de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions pour les causes sus-énoncées,

- confirmer en ce cas le jugement rendu en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- condamner les appelants reconventionnellement au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 2 juin 2022 et l'affaire fixée à l'audience du 16 juin 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'action des consorts [J]

La SCI les Hauts de [Adresse 9] fait grief au premier juge d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité ou intérêt à agir des consorts [J] à son encontre. Elle soutient en effet que ces derniers ne rapportent pas la preuve de la présence de matières fermentescibles avant la conclusion du bail à ferme, le constat d'huissier étant postérieur et qu'elle ne dispose plus de la libre disposition de la parcelle depuis la conclusion dudit bail.

Selon l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L'article 31 du même code dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. L'article 32 précise qu'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

En l'espèce, le tribunal doit être approuvé lorsqu'il rappelle que celui qui prétend subir un trouble du voisinage peut en demander réparation tant à l'auteur des troubles qu'au propriétaire de l'immeuble d'où provient le trouble, ce dernier, responsable de plein droit, ne pouvant s'exonérer que par la force majeure.

Il n'est pas contesté que la SCI les Hauts de [Adresse 9] est propriétaire de la parcelle sur laquelle sont entreposés l'amas de matières litigieux et le matériel agricole à l'origine du trouble anormal de voisinage invoqué par les consorts [J].

Dès lors c'est à juste titre que, considérant que la date à laquelle ce dépôt est intervenu est sans incidence tout comme le fait que la SCI les Hauts de [Adresse 9] n'ait plus la libre disposition de sa parcelle, le tribunal a retenu que les consorts [J] étaient recevables à agir aussi bien contre le locataire de la parcelle que contre son propriétaire, étant précisé qu'ils présentent en outre un intérêt personnel à agir en réparation d'un éventuel trouble qui les priverait de la possibilité de louer leur maison.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le trouble anormal du voisinage

Comme justement rappelé par le premier juge, il appartient aux juridictions du fond d'apprécier si les troubles invoqués excèdent les inconvénients normaux du voisinage compte tenu de l'environnement local, caractérisé par le mode de vie et d'activité du secteur concerné.

En l'espèce, les débats d'appel et les pièces soumises à la cour n'apportent aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l'exacte appréciation par le premier juge qui a considéré, au vu des constatations dressées par l'huissier de justice le 12 avril 2018 et des photographies versées aux débats, que :

- la preuve du caractère fermentescible des matières entreposées n'est pas rapportée,

- l'existence d'une gêne olfactive générée par le tax litigieux n'est pas démontrée,

- l'amas de matières litigieux et le matériel agricole sont situés à l'extérieur et à plusieurs dizaines de mètres de la maison d'habitation des consorts [J] et n'obstruent pas la vue de ces derniers ou de leurs locataires.

C'est également à bon droit que rappelant que les consorts [J] sont propriétaires de parcelles situées en pleine campagne à proximité immédiate d'exploitations agricoles, le premier juge a retenu que la présence de végétaux et de matériel agricole aux abords de leur propriété constitue un inconvénient normal du voisinage au regard de l'environnement local.

Faute de preuve d'un trouble anormal de voisinage, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les consorts [J] de leurs demandes.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Les appelants supporteront la charge des dépens d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les consorts [J] seront condamnés in solidum à payer à la SCI les Hauts de [Adresse 9] la somme de 1.200 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement,

Y ajoutant,

Condamne in solidum Mme [G] [J], M. [X] [J] et M. [O] [J] à payer à la SCI les Hauts de [Adresse 9] la somme de 1.200 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme [G] [J], M. [X] [J] et M. [O] [J] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE , président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/04913
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;19.04913 ?
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