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03/05/2024 | FRANCE | N°21/05202

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 1ère chambre civile, 03 mai 2024, 21/05202


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



1ère CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 03 MAI 2024









N° RG 21/05202 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MKC7









S.A.S.U. AVANTIM AQUITAINE



c/



[J], [Y] [X]

























Nature de la décision : AU FOND


























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Grosse délivrée le :



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Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 juillet 2021 par le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX (chambre : 7, RG : 19/10940) suivant déclaration d'appel du 17 septembre 2021





APPELANTE :



S.A.S.U. AVANTIM AQUITAINE, Société par actions simplifiée à associé unique, au capital de 530.000,00 eu...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

1ère CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 03 MAI 2024

N° RG 21/05202 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MKC7

S.A.S.U. AVANTIM AQUITAINE

c/

[J], [Y] [X]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 juillet 2021 par le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX (chambre : 7, RG : 19/10940) suivant déclaration d'appel du 17 septembre 2021

APPELANTE :

S.A.S.U. AVANTIM AQUITAINE, Société par actions simplifiée à associé unique, au capital de 530.000,00 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de BORDEAUX sous le numéro 493 691 620, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités au siège social sis [Adresse 3]

représentée par Maître MISCHLER substituant Maître Fernando SILVA de la SAS DELTA AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

[J], [Y] [X]

née le 21 Avril 1973 à [Localité 5] ([Localité 2])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître PILLET substituant Maître Louis COULAUD de la SELARL COULAUD-PILLET, avocats postulants au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Bruno NOINSKI de la SARL AGIL'IT BRETAGNE, avocat plaidant au barreau de LORIENT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 février 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Emmanuel BREARD, Conseiller, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Paule POIREL

Conseiller : M. Emmanuel BREARD

Conseiller : M. Roland POTEE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier : Madame Véronique SAIGE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le 17 février 2006, par contrat de vente en état futur d'achèvement, Mme [X] est devenue propriétaire d'un appartement au sein de la Résidence [Adresse 4], lot 3746, appartement D11.

Le 2 mai 2016, elle a confié la gestion de son appartement par mandat au promoteur, la société Avantim.

L'appartement a été loué sans discontinuité du 1er septembre 2006 au 1er mars 2019. Le 27 février 2019, au départ du dernier locataire, un état des lieux a été établi avec la société Avantim et de désordres affectant le carrelage ont été relevés, ce que Mme [X] a fait constater par huissier.

Une expertise amiable à caractère contradictoire en présence d'une représentante de la société Avantim a été organisée. Devant les conclusions de l'expert et refusant la proposition de la société Avantim consistant à lui confier un mandat de vente assorti de conditions favorables, Mme [X] lui a fait délivrer assignation le 26 novembre 2019, aux fins d'obtenir le paiement de diverses sommes à titres de dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire du 23 juillet 2021 le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- déclaré que la demande de Mme [X] est recevable et bien fondée,

- condamné la Société Avantim à payer à Mme [X] la somme de 10 029,39 euros en réparation des dommages matériels qu'elle a subis en raison de la faute de la Société Avantim,

- déboute Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts tant au titre de son impossibilité de relouer que des frais de déplacement qu'elle aurait engagés,

- condamné la Société Avantim à payer à Mme [X] la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Société Avantim aux entiers dépens de l'instance en ce inclus les frais d'expertise amiable, et les frais d'huissier,

- ordonné l'exécution provisoire.

La SASU Avantim Aquitaine a relevé appel de ce jugement par déclaration du 17 septembre 2021, en ce qu'il a :

- déclaré que la demande de Mme [X] est recevable et bien fondée,

- condamné la Société Avantim à payer à Mme [X] la somme de 10 029,39 euros en réparation des dommages matériels qu'elle a subis en raison de la faute de la Société Avantim,

- condamné la Société Avantim à payer à Mme [X] la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Société Avantim aux entiers dépens de l'instance en ce inclus les frais d'expertise amiable, et les frais d'huissier.

Par dernières conclusions déposées le 18 mai 2022, la société Avantim Aquitaine demande à la cour de :

- déclarer la Société Avantim Aquitaine recevable et bien fondée en son appel,

En conséquence,

- infirmer le jugement rendu le 23 juillet 2021 en ce qu'il a condamné la Société Avantim au paiement de la somme de 10 029,39 euros au titre du préjudice matériel, présenté comme subit par Mme [X],

- infirmer le jugement rendu le 23 juillet 2021 en ce qu'il a condamné la Société Avantim au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- confirmer le jugement rendu le 23 juillet 2021 en ce qu'il a débouté Mme [X] de ses demandes au titre de la perte de revenus locatifs et des frais de déplacement,

Statuant de nouveau,

- débouter Mme [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Mme [X] au paiement d'une somme de 5 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [X] aux entiers dépens.

Par dernières conclusions déposées le 22 février 2022, Mme [X] demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu le 23 juillet 2021 en ce qu'il a condamné la société Avantim à verser à Mme [X] à titre de dommages-intérêts la somme de 10 029,39 euros au titre de son préjudice matériel,

- infirmer le jugement pour le surplus,

En conséquence,

- condamner la société Avantim à verser à Mme [X] la somme complémentaire de 1 768,09 euros, au titre des frais exposés (frais d'expertise et constat d'huissier),

- condamner la société Avantim à verser à Mme [X] à titre de dommages-intérêts la somme de 16 000,00 euros au titre de ses préjudices immatériels En toutes hypothèses,

- condamner la société Avantim à verser à Mme [X], la somme de 5 000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Avantim aux entiers dépens.

L'affaire a été fixée à l'audience rapporteur du 19 février 2024.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 5 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I Sur la responsabilité de la société Avantim Aquitaine.

La société appelante, au visa des articles 9 du code de procédure civile, 1353, 1991, 1192 du code civil, rappelle qu'elle est, en sa qualité de syndic, en charge de l'exécution au nom du syndicat des copropriétaires des décisions de l'assemblée générale, de la gestion, de la conservation et de l'entretien de l'immeuble.

Elle avance que les éléments retenus par les premiers juges ne sont pas de nature à caractériser une faute de gestion de sa part en sa qualité de gestionnaire immobilier, alors même qu'il n'a qu'une obligation de moyen dans sa mission.

Elle rappelle que le sinistre en cause consiste en l'apparition de fissures au sol, que seuls quelques appartements de la résidence ont été concernés, que le sinistre n'est pas généralisé et qu'il ne pouvait être anticipé par ses soins.

Elle conteste ne jamais avoir informé l'intimée des désordres, celle-ci ayant été convoquée aux assemblées générales des copropriétaires, auxquelles elle était absente et non représentée, et dont les procès-verbaux lui ont été notifiés ou rendus accessibles en ligne.

Elle en déduit que l'intéressée était informée de la situation, qu'il lui revenait de lui signaler un désordre.

Elle précise avoir exécuté sa mission, car par correspondance du 14 mars 2016, elle a pris attache avec M. [I], le locataire de l'intimée, afin d'être informée de tous désordres qui seraient apparus dans le logement, dans le but de procéder à la déclaration de sinistre s'imposant avant l'expiration du délai de la garantie décennale.

Elle indique au surplus avoir placardé dans la résidence les messages d'information relatifs à la question des fissures du carrelage, mais que le locataire occupant l'appartement objet du présent litige n'a pas donné suite à ses demandes.

Elle souligne ne pas pouvoir de contraindre un occupant de la laisser entrer dans son logement, alors, au surplus, que seules certaines parties de l'immeuble étaient concernées par les fissurations.

Elle dénonce le désintérêt de la part de son adversaire quant à la vie de la copropriété, le fait que le locataire a occupé les lieux concernés pendant une durée de 11 ans sans émettre la moindre doléance et que les malfaçons ne résulte pas de son fait ou de sa gestion.

Elle observe que le procès-verbal du 28 février 2019 et le rapport d'expertise du 6 mars suivant ont été dressé à la demande de la partie adverse, que leur impartialité porte à caution, que les fissures concernées ne présentent aucun caractère de dangerosité et qu'elles n'ont pas empêché le locataire de jouir des lieux pendant 11 ans.

Elle conteste que son courrier en date 19 juin 2019 constitue une reconnaissance d'une faute de sa part en ce qu'il ne fait référence qu'au risque de fissures dans le logement signalé au locataire et ne fait que proposer un geste commercial sur les honoraires dus au titre de la revente de l'appartement concerné.

Elle remarque que Mme [X] s'est abstenue de mentionner la vente de l'appartement suite à son assignation du 16 novembre 2020 moyennant la somme de 264.900 €.

Elle se prévaut de ce qu'en sa qualité de syndic, en application de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, elle n'est pas mandataire des copropriétaires, mais du syndicat de copropriété, ayant au surplus procédé à la déclaration de sinistre concernant les désordres survenus dans les parties communes et faute de preuve que le sinistre trouve sa source dans les parties communes.

En tout état de cause, elle soutient qu'en sa qualité de syndic, elle ne pouvait déclarer un sinistre survenu dans une partie privative, alors même qu'elle n'en avait pas connaissance. De même, elle entend que le débat relatif à l'encaissement d'un chèque bancaire reçu à titre d'indemnisation ressortant du procès-verbal du 30 septembre 2019 concerne une réfection de parties communes, s'est fait en l'absence de son adversaire et qu'elle ne peut produire le dossier du sinistre, ce dernier ayant été transmis à son successeur aux fonctions de syndic.

Sur le montant du préjudice adverse, elle note que l'intimée, suite à la revente de l'appartement, a bénéficié d'une plus-value de 67.138 € tout en ayant conservé l'appartement objet du litige pendant 13 ans. De même, elle relève que si l'expert amiable a préconisé des travaux, notamment de dépose du carrelage et de repose d'un nouveau carrelage, pour un montant total de 28.629,26 €, il n'a été procédé par son adversaire que des travaux de pose d'un parquet et de remise en peinture des murs pour un montant total de 10.029,39 €. Ainsi, elle fait valoir que la pose d'un parquet par-dessus le carrelage existant a suffi à recouvrir les fissures de ce dernier, que celles-ci n'ont pas été traitées en profondeur, que le caractère décennal des désordres porte à caution.

Elle en tire comme conséquence qu'il ne lui appartient pas de supporter ces travaux, le préjudice adverse ne pouvant s'apparenter qu'en une perte de chance, celui qu'elle n'ait pas déclaré le sinistre à l'assureur dommage ouvrage, sans qu'il soit démontré qu'elle ait eu mandat pour déclarer un sinistre dont elle dit qu'elle ignorait l'existence ou qu'une indemnisation par cet assureur serait intervenue.

Elle considère qu'il est impossible de lui imputer le sinistre, l'indemnisation étant hypothétique, qu'elle n'a pas à prendre en charge le coût de l'expertise amiable en l'absence de faute de sa part, de suivi des préconisations de ce sachant, ni celui du procès-verbal de sortie des lieux loués en ce qu'il incombe par moitié au preneur et au bailleur, ni qu'il ait existé de perte de revenu locatif jusqu'à la réalisation des travaux de remise en état du fait de la volonté adverse de vendre l'appartement dès le départ du locataire des lieux loués.

De plus, elle dénonce l'absence de justificatifs au soutien de la demande de dommages et intérêts au titre des frais de déplacement nécessaires pour le suivi du litige.

S'agissant de l'indemnisation de ses préjudices, Mme [X] entend qu'il lui soit alloué non seulement la somme de 10.029,39 € accordée par la décision attaquée, mais également d'autres qui lui ont été refusés par les premiers juges.

Pour cela, elle rappelle que les travaux de réparation ont été effectués au vu de l'accord des acquéreurs de l'appartement et suite à un réagréage du sol sur lequel a été posé un parquet.

Elle estime en outre avoir été contrainte d'engager de multiples frais pour faire valoir ses droits lors du présent litige, sollicitant leur remboursement, en particulier ceux découlant de l'expertise amiable et du procès-verbal de constat, disant que si l'appelante avait rempli sa mission, elle aurait pu bénéficier d'une prise en charge par l'assureur dommage ouvrage et n'aurait pas eu à exposer ces frais.

Elle rappelle que l'expertise constitue un constat technique effectué contradictoirement et que l'intervention de l'huissier a été réalisée au lendemain de l'état des lieux de sortie.

Elle sollicite à ce titre la somme de 1.768,09 €.

Sur la question des préjudices immatériels, elle avance que l'appartement s'est trouvé impropre à sa destination jusqu'à la réalisation des travaux, ainsi que cela résulte de l'avis de l'expert amiable qui fait référence à un danger pour les occupants. Estimant n'avoir pu bénéficier du logement pendant 8 mois, elle indique avoir subi une perte locative d'un montant de 6.000 €, à raison d'un loyer mensuel de 750 €, soulignant qu'elle aurait pu vendre son bien occupé et que cette question est indépendante de la valeur du bien vendu. De même, elle réitère sa demande au titre des frais de déplacement qu'elle estime toujours à un montant de 10.000 €.

***

En vertu de l'article 1991 alinéa 1er du code civil, le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.

L'article 1992 du code civil prévoit que ' Le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion.

Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu'à celui qui reçoit un salaire'.

L'article 1993 du même code ajoute que 'Tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant'.

La cour constate en premier lieu que la société Avantim Aquitaine, en sa qualité de gestionnaire de l'appartement de Mme [X] suite au mandat de gestion en date du 2 mai 2006, avait l'obligation d'entretenir le logement loué en l'état de servir, notamment en faisant exécuter tous travaux d'entretien courant, en ce compris la remise en peinture, l'embellissement, les revêtements de sol et les équipements de l'appartement dans la limite d'un montant de dépenses n'excédant pas trois mois de loyer hors charges, ce notamment lors du départ du locataire, en vue d'assurer au mieux la relocation dans les meilleurs délais (pièce 2 de l'intimée, page 3, point 13).

Il appartenait également au mandataire (point 21 du même contrat, même page) de 'Faire toutes diligences vis-à-vis de l'assureur, ou du promoteur, ou de tiers si ces personnes ont consentis des garanties locatives au mandant, et agir par délégation du bénéficiaire. Il est bien rappelé que Avantim n'intervient qu'en qualité de mandataire'.

Il résulte de ces éléments qu'il revenait(, de par la mission confiée par la mandante,) à l'appelante non seulement de s'assurer du bon état de l'habitation louée, mais également de faire exécuter les travaux relatifs aux revêtements de sol.

S'il est exact que la société Avantim Aquitaine ne pouvait contraindre le locataire à lui faire part de l'état des lieux loués, il lui appartenait néanmoins, au titre de son obligation de moyen, de mettre en oeuvre tout moyen à sa disposition pour s'assurer du bon état des lieux.

Or, s'il est versé aux débats par la société appelante un courrier adressé à l'occupant des lieux loué en date du 14 mars 2016 (pièce 3 de l'appelante), il n'est pas établi qu'il ait existé des relances ou un suivi quant à l'état réel des lieux loués.

De surcroît, l'intéressée n'ignorait pas, du fait de sa qualité de syndic de l'immeuble, que la difficulté liée à la fissuration des carrelages des lieux étaient non seulement répandue dans la construction concernée, mais devait faire l'objet d'une déclaration auprès de l'assureur décennal.

Il est remarquable que si la société Avantim Aquitaine confond volontairement lors de son argumentation ses deux qualités de syndic et de mandataire en charge de la gestion du logement appartenant à Mme [X], elle a commis un manquement clair à sa mission à ce seul dernier titre.

Ainsi, il ressort tant du procès-verbal de constat du 28 février 2019 que du rapport de l'expert amiable (pièces 5 et 7 de l'intimée) que les fissures au sol sont saillantes, voir engendrent des angles coupant. Aussi, il revenait au mandataire de s'assurer non seulement de l'état des lieux, y compris en faisant réaliser les travaux nécessaires, mais également d'effectuer les démarches afin que ceux-ci puissent être pris en charge au titre de l'assurance décennale.

La cour ne peut constater qu'en dehors du courrier du 14 mars 2016, qui n'a été suivi d'aucune démarche, relance ou simplement information auprès de la mandante, il n'a été effectué aucune action aux fins de s'assurer du bon état des sols par la mandataire, ce pendant plus de deux ans.

Cette carence, en ce qu'elle a eu pour conséquence d'empêcher toute prise en charge au titre de la garantie décennale, alors même que l'appelante ne conteste pas que de multiples prises en charge ont eu lieu pour des désordres identiques au sein même de la copropriété dont elle était également le syndic, démontre qu'elle est seule responsable de cet état de fait en sa qualité de mandataire.

L'ensemble de ces éléments rapporte la preuve non seulement d'une faute dans la gestion du mandat par l'appelante dans le mandat que l'intimée lui avait confié, mais également sa responsabilité quant à la remise en état des lieux.

De même, il ne saurait être allégué comme le fait la société Avantim Aquitaine qu'il s'agisse d'une simple perte de chance, car il est constaté l'existence d'une responsabilité non au titre d'un devoir de conseil ou de mise en garde, mais bien de réaliser les démarches nécessaires à la préservation des intérêts de la mandante. Cette responsabilité est d'autant plus avérée que la mandataire percevait une rémunération en sa qualité de professionnelle de l'immobilier et qu'elle avait, du fait des informations qu'elle détenait en sa qualité de syndic, une parfaite connaissance des défauts affectant le sol des appartements de l'immeuble. Mais surtout, cette carence est dircetement à l'origine de l'entier préjudice de Mme [X] qui n'a pu bénéficier de la couverture assurentielle dont relevait le sinistre.

C'est pourquoi, la société Avantim Aquitaine verra sa responsabilité engagée en sa qualité de mandataire et sera tenue de verser des dommages et intérêts afin d'indemniser sa mandante des préjudices en lien direct avec la faute commise.

En ce qui concerne les travaux de réfection des lieux loués, ceux-ci résultent de l'abstention de l'appelante et ne sauraient être remis en cause, y compris dans leur montant en ce que celui-ci est justifié par les factures versées par Mme [X] (pièce 9 de cette partie). Sur ce point, il importe peu que l'intéressée ait réalisé une plus-value au titre de la revente de l'immeuble objet du litige, cet élément étant sans aucun lien avec le préjudice avancé, ou n'ait pas suivi les préconisations de l'expert amiable, afin de mettre en oeuvre une autre solution moins coûteuse.

Dès lors, la société Avantim Aquitaine sera condamnée à payer à Mme [X] le montant alloué à ce titre par les premiers juges, dont le jugement sera confirmé de ce chef.

S'agissant des frais liés à l'expertise amiable et au procès-verbal de constat, s'il est incontestable que ces deux éléments ont été utiles afin d'établir la responsabilité de la société Avantim Aquitaine lors du présent litige, ils relèvent néanmoins des frais irrépétibles en ce qu'ils constituent des dépenses en lien avec la présente instance.

Aussi, afin d'éviter qu'ils soient indemnisés deux fois, ils seront compris dans les montants alloués au titre de l'article 700 du code de procédure civile qui suit.

Il apparaît que la demande faite par Mme [X] au titre des frais de déplacement en lien avec la présente instance, sont également inclus dans ces mêmes frais irrépétibles, quand bien même il sera également noté qu'ils n'ont pas été justifiés.

Sur la question de l'indisponibilité du logement, il est exact que Mme [X] n'a pu jouir des lieux concernés entre le 1er mars 2019, date du départ du locataire, et le 1er juillet de la même année, date de fin des travaux. En revanche, il n'est pas avéré qu'entre cette dernière date et le 30 octobre 2019, date à laquelle elle a vendu son bien, elle ait été privée de la jouissance des lieux.

Surtout, une indisponibilité d'une durée 4 mois en lien avec des travaux de rénovation suite à une location de 11 ans, afin de remettre les lieux en état, ne saurait avoir un caractère anormal, ni surtout être en lien direct avec la carence de la société Avantim Aquitaine. En effet, s'il peut être reproché à cette dernière une abstention fautive dans le suivi de l'entretien des lieux et de la prise en charge des fissures constatées au titre de l'assurance décennale, il n'est pas établi que les travaux effectués qui ont permis également le rafraîchissement des lieux, n'aient pas été nécessaires pour permettre une éventuelle relocation de l'habitation.

Aucun préjudice n'est donc établi à ce titre et la décision attaquée sera donc confirmée de ce chef.

II Sur les demandes annexes.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Au vu de ce qui précède, l'équité exige que la société Avantim Aquitaine soit condamnée à verser à Mme [X] une somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 696 alinéa premier du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Sur ce fondement, la société Avantim Aquitaine qui succombe au principal, supportera la charge des entiers dépens.

LA COUR, PAR CES MOTIFS,

Confirme la décision rendue par le tribunal judiciaire de Bordeaux le 23 juillet 2021 ;

Y ajoutant,

Condamne la société Avantim Aquitaine à régler à Mme [X] une somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Avantim Aquitaine aux entiers dépens de la présente instance.

Le présent arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/05202
Date de la décision : 03/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-03;21.05202 ?
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