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18/09/2007 | FRANCE | N°06/01267

France | France, Cour d'appel de chambéry, Chambre commerciale, 18 septembre 2007, 06/01267


LE DIX HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE SEPT LA CHAMBRE COMMERCIALE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

dans la cause 06 / 01267-Chambre commerciale
FC / MV

opposant :

Appelante

La CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES ALPES
dont le siège social est situé 10 rue Hébert-38043 GRENOBLE

représentée par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, avoués à la Cour
assistée de Me Michel DALMAS, avocat au barreau de GRENOBLE

à :

Intimés

M. Alain Y...Z...,
demeurant...
M. Michel A...B..., <

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Mme Brigitte C...,
demeurant...
M. Didier D...,
...-...-...
M. Jean Pierre D...,
demeurant...
M. Pascal ...

LE DIX HUIT SEPTEMBRE DEUX MILLE SEPT LA CHAMBRE COMMERCIALE DE LA COUR D'APPEL DE CHAMBERY a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

dans la cause 06 / 01267-Chambre commerciale
FC / MV

opposant :

Appelante

La CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DES ALPES
dont le siège social est situé 10 rue Hébert-38043 GRENOBLE

représentée par la SCP BOLLONJEON-ARNAUD-BOLLONJEON, avoués à la Cour
assistée de Me Michel DALMAS, avocat au barreau de GRENOBLE

à :

Intimés

M. Alain Y...Z...,
demeurant...
M. Michel A...B...,
demeurant...
Mme Brigitte C...,
demeurant...
M. Didier D...,
...-...-...
M. Jean Pierre D...,
demeurant...
M. Pascal A...B...,
demeurant ...
Mme Anne Marie E...,
...
M. Bernard A...B...,
...
M. Christophe Y...Z...,
demeurant...
M. René Y...Z...,
demeurant...

représentés par la SCP DORMEVAL-PUIG, avoués à la Cour
assistés de Me Laure COMBAZ, avocat au barreau de CHAMBERY

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l'audience publique des débats, tenue le 25 juin 2007 avec l'assistance de Madame VIDAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

-Madame ROBERT, Président de chambre,

-Madame CARRIER, Conseiller, qui a procédé au rapport

-Monsieur BETOUS, Conseiller.

-=-=-=-=-=-=-=-=-

Madame Lucie A...B..., Veuve G... est décédée le 27 août 2001. Aux termes d'un testament olographe en date du 7 novembre 1979, elle a légué les bons d'épargne acquis entre 1975 et 1981 et déposés dans le coffre dont elle était locataire à l'agence de la Caisse d'Epargne d'ALBERTVILLE à dix de ses neveux et petits neveux dans une proportion qu'elle avait déterminée pour chacun d'eux.

Le coffre loué par la défunte a été ouvert par Maître H..., Notaire chargé de la succession. Il y a été trouvé pour 980 000F. de bons d'épargne.

La Caisse d'Epargne ayant refusé de payer ces bons en faisant valoir qu'ils étaient prescrits, les légataires l'ont fait assigner en remboursement desdits bons, subsidiairement en paiement de dommages et intérêts, devant le Tribunal de Grande Instance d'ALBERTVILLE.

Par jugement en date du 16 mai 2006, ce Tribunal a rejeté la fin de non recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir des demandeurs, a déclaré l'action en paiement des bons litigieux irrecevable comme prescrite mais a retenu la responsabilité contractuelle de la Caisse d'Epargne et de Prévoyance des Alpes pour manquement à son devoir d'information et de conseil, a condamné celle-ci à payer aux demandeurs la somme de 475 347 € outre intérêts au taux légal à compter de la date de l'exploit introductif d'instance et la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, a rejeté les autres demandes et condamné la Caisse d'Epargne et de Prévoyance des Alpes aux dépens.

La Caisse d'Epargne des Alpes aux droits de laquelle se trouve la Caisse d'Epargne et de Prévoyance RHONE ALPES (ci-après la Caisse d'Epargne) a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières écritures, signifiées le 23 mai 2007, elle conclut à la réformation du jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle relative à la prescription.

Elle demande à voir dire que les légataires à titre universel de justifient pas de leur qualité à agir au regard du droit des successions et à les voir déclarer irrecevables en leur action. Subsidiairement, elle demande à voir constater qu'ils ne rapportent la preuve ni de l'existence à sa charge d'une obligation d'information ni d'une faute de sa part pas plus que de la qualité de créancière de cette information de Madame G....

Elle demande à voir dire qu'elle n'a pas failli à son devoir de conseil tant au regard des bons d'épargne qu'au regard du contrat de location de coffre-fort et conclut au débouté de l'ensemble des demandes.

Elle sollicite l'allocation de la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle prétend que les intimés ne rapportent pas la preuve de la demande de délivrance de leur legs ni celle de l'absence d'héritiers réservataires ou de légataires à titre universel.

Elle soutient que la prescription de droit commun en matière de bons d'épargne est celle de l'article L 110-4 du Code de Commerce soit 10 ans, que cette prescription s'applique aux bons souscrits avant 1980, que les bons postérieurs à 1980, à l'exception des derniers qui mentionnent un délai de 10 ans courant à compter de l'échéance, mentionnent une prescription abrégée de trois ans ; qu'ainsi l'ensemble des bons est prescrit.

Elle fait valoir que le banquier n'est tenu d'aucun devoir de conseil en matière de souscription de bons d'épargne en raison de leur caractère anonyme ; qu'au surplus, la détention par Madame G... des bons litigieux dans son coffre est insuffisante à établir qu'elle en ait été le souscripteur initial et qu'elle ait été créancière de l'obligation d'information ; que le banquier n'ayant d'autre part aucun pouvoir de surveillance des valeurs déposées dans un coffre, les dispositions des articles 1931 et 9 du Code Civil lui faisant au contraire interdiction d'accéder au contenu du coffre loué par un client, aucune faute ne saurait être retenue dans l'exécution du contrat de location de coffre-fort.

Elle rappelle qu'en l'absence de texte faisant peser sur le banquier un devoir d'information et de conseil en matière de souscription de bons au porteur, c'est aux légataires de rapporter la preuve d'une faute de sa part.

Aux termes de conclusions signifiées le 8 juin 2007, les intimés concluent à la réformation du jugement déféré en ses dispositions relatives à la prescription et demandent à voir condamner la Caisse d'Epargne à leur verser la somme de 84. 303,31 € en remboursement des bons émis de 1975 à 1979 et la somme de 391. 043 € en réparation du préjudice que leur a causé sa faute contractuelle.

Subsidiairement, ils concluent à la confirmation du jugement déféré et sollicitent en outre l'allocation de la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Plus subsidiairement, ils demandent à voir condamner la Caisse d'Epargne à communiquer les numéros de l'ensemble des bons de caisse souscrits par Madame G....

Ils soutiennent qu'ils ont qualité pour agir en l'absence d'héritiers réservataires ou de légataire universel et de formalités particulières en matière de délivrance des legs à titre particulier.

Ils prétendent que la prescription de droit commun applicable aux bons souscrits avant 1980 ne mentionnant aucune prescription est la prescription trentenaire.

Ils font valoir que le devoir d'information et de conseil du banquier s'applique aux bons de caisse qui ne sont que des reconnaissances de dette de la banque en contrepartie du prêt que lui consent le client, que Madame G... était créancière de cette obligation en sa qualité de souscriptrice des bons, que la Caisse d'Epargne ne rapporte pas la preuve qu'elle s'est libérée de cette obligation et notamment de ce qu'elle a expliqué les risques de prescription ou le sens et la portée de la prescription abrégée mentionnée sur certains bons, tirant de l'attitude de Madame G... ayant consisté à déposer les bons d'épargne dans son coffre sans considération de délai l'absence d'information alléguée.

La clôture a été prononcée le 11 juin 2007.

La Caisse d'Epargne a signifié de nouvelles écritures le 21 juin 2007 et sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture sur le fondement de l'article 784 du Code Civil en faisant valoir que les intimés avaient déposé la veille de la clôture des conclusions et des pièces nécessitant réponse.

Les intimés se sont opposés à la révocation sollicitée.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'incident de procédure

La Caisse d'Epargne ne fait valoir au soutien de sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture aucune cause grave révélée postérieurement à celle-ci conformément à l'article 784 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Les conclusions signifiées postérieurement à la clôture doivent être déclarées irrecevables comme tardives par application de l'article 783 du même code.

Sur la qualité des légataires des bons d'épargne de Madame G... à agir

Il ressort du testament olographe de Madame G... et de l'acte de notoriété établi par Maître H... le 6 avril 2001 que la défunte était sans héritier réservataire et qu'elle n'avait institué que des légataires à titre particulier.

Si l'article 1014 du Code Civil prévoit que le légataire à titre particulier est tenu, pour faire reconnaître son droit, de demander la délivrance du legs, aucune forme particulière n'est exigée pour formuler cette demande. Il résulte en l'espèce suffisamment des actes établis par Maître H... ensuite de l'ouverture du testament de Madame G..., notamment du procès-verbal d'inventaire en date du 10 janvier 2002 et des courriers échangés par le Notaire avec la banque que les légataires des bons d'épargne ont bien demandé la délivrance de leur legs. La décision déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a déclaré l'action recevable.

Sur la prescription des bons légués

C'est par de justes motifs, que la Cour adopte, que les premiers juges ont retenu que la prescription applicable aux bons d'épargne, en l'absence de mention contraire, était celle édictée par l'article L 110-4 du Code de Commerce et que l'ensemble des bons litigieux était prescrit. La décision déférée sera également confirmée sur ce point.

Sur le manquement de la Caisse d'Epargne à son devoir de conseil et d'information

Les bons de caisse au porteur ont pour caractéristique essentielle de constituer un placement insusceptible d'évolution, transmissible par simple remise et payable au porteur anonymement ce dont il résulte que la banque n'a d'autre obligation à l'égard du souscripteur que la présentation du produit. Aucun manquement de la Caisse d'Epargne à un devoir de conseil ne saurait en conséquence être retenu à l'égard de Madame G..., à supposer que celle-ci ait été la souscriptrice des bons.

Le banquier n'ayant d'autre part aucun droit ni aucun moyen de vérifier le contenu des coffres qu'il donne en location, il ne saurait être tenu d'un quelconque devoir de conseil ou de surveillance quant aux titres qui y seraient déposés. Il ne saurait dès lors être reproché à la banque de ne pas avoir attiré l'attention de Madame G... sur le sort des bons déposés dans le coffre.

La décision déférée sera en conséquence réformée en ce qu'elle a fait droit à la demande de dommages et intérêts des légataires de Madame G....

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par mise à disposition au Greffe et contradictoirement,

DIT n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture.

DECLARE irrecevables les conclusions signifiée par la Caisse d'Epargne et de Prévoyance RHONE ALPES le 21 juin 2007.

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable l'action des légataires de Madame G... et prescrite l'action en paiement des bons de caisse litigieux.

LE REFORME en toutes ses autres dispositions.

Statuant à nouveau,

DEBOUTE les intimés de leur demande de dommages et intérêts fondée sur la responsabilité contractuelle de la Caisse d'Epargne.

DIT n'y avoir lieu à application de l'article l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

CONDAMNE solidairement les intimés aux dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON par application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ainsi prononcé publiquement le 18 septembre 2007 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile et signé par Madame ROBERT, Président et Madame VIDAL, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de chambéry
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 06/01267
Date de la décision : 18/09/2007
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

BANQUE

- Les bons de caisse au porteur ont pour caractéristique essentielle de constituer un placement non susceptible d'évolution, transmissible par simple remise et payable au jporteur anonymement, ce dont il résulte que la banque, qui n'a d'autre obligation à l'égard du souscripteur que de lui présenter le produit, ne peut être tenue à un devoir de conseil envers lui ou envers les porteurs successifs.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Albertville, 16 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.chambery;arret;2007-09-18;06.01267 ?
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