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09/11/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000007628838

France | France, Cour d'appel de Douai, Ct0039, 09 novembre 2006, JURITEXT000007628838


COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 2 ARRÊT DU 09/11/2006 No RG : 04/01688 Jugement du Tribunal de Commerce de BOULOGNE SUR MER du 25 novembre 2003REF : RZ/CP APPELANTES Société FESTIVER SHIPPING COMPANY LTD prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social Paraphilippou etamp; Co - 1 Costakis Pantelides Avenue NICOSIA (CHYPRE) Représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour Assistée de Maître SCHWEITZER Stéphanie substituant Maître CLEMENS JONES, Avocate au barreau de PARIS

Société de droit anglais THE NORTH OF ENGLAND PROTECTING AND I

NDEMNITY ASSOCIATION LTD, prise en la personne de ses représentants l...

COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 2 ARRÊT DU 09/11/2006 No RG : 04/01688 Jugement du Tribunal de Commerce de BOULOGNE SUR MER du 25 novembre 2003REF : RZ/CP APPELANTES Société FESTIVER SHIPPING COMPANY LTD prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social Paraphilippou etamp; Co - 1 Costakis Pantelides Avenue NICOSIA (CHYPRE) Représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour Assistée de Maître SCHWEITZER Stéphanie substituant Maître CLEMENS JONES, Avocate au barreau de PARIS

Société de droit anglais THE NORTH OF ENGLAND PROTECTING AND INDEMNITY ASSOCIATION LTD, prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social The Quayside NE1 3DU - Newcastle Upon Tyne (ROYAUME -UNI) Représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour Assistée de Maître SCHWEITZER Stéphanie substituant Maître CLEMENS JONES, Avocate au barreau de PARIS INTIMÉS S.A. NATIONALE SUISSE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 79/81 Rue de Clichy 75009 PARIS Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER GROUPAMA NAVIGATION ET TRANSPORTS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, venant aux droits de la société NAVIGATION ET TRANSPORTS. ayant son siège social 1 Quai Georges V - BP 1403 - 76600 LE HAVRE Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER MUTUELLE ELECTRIQUE D'ASSURANCES MEA prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 6/8 Rue Chauchat 75009 PARIS Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ

Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER S.A. ALLIANZ VIA ASSURANCES prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 2-4 Avenue du Général de Gaulle 94220 CHARENTON LE PONT Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER S.A. COMMERCIAL UNION prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 100 Rue de Courcelles 75858 PARIS CEDEX Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoué à la Cour Assistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER MUTUELLES DU MANS prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 18 Rue de Londres 75009 PARIS Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER S.A. LE CONTINENT prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 62 Rue Richelieu 75009 PARIS Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER Monsieur Daniel X... ... Représenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assisté de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER GAN INCENDIE ACCIDENTS prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 3 Rue Drouot 75009 PARIS CEDEX 09 Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Maîtr NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER. MARITIM NT prise en la

personne de ses représentants légaux ayant son siège social 1 Rue de l'Union 92500 RUEIL MALMAISON Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la CourAssistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER. GENERALI prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 5 Rue de Londres 75009 PARIS CEDEX 9 Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assistée de Maître NICOLAS Pierre-Yves, Avocat au Barreau du HAVRE et de Maître FAUCQUEZ Pierre, Avocat au Barreau de BOULOGNE SUR MER. ARMEMENT LASKARIDIS SHIPPING COMPANY LTD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ayant son siège ayant son siège social 5 Chimaras Street Le MAROUSI - 15125 ATHENES (GRECE). Chez M. Y... ... Représentée par la SELARL ERIC LAFORCE, avoués à la Cour Assistée de Maître CHOPART substituant Maître DUHAMEL, Avocate au barreau de LILLE COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Monsieur FOSSIER, Président de chambre. Monsieur ZANATTA, Conseiller. Madame NEVE DE MEVERGNIES, Conseiller. GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame NOLIN. DÉBATS à l'audience publique du 28 septembre 2006, après rapport oral de l'affaire par M. ZANATTA, conseiller. Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe. ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 novembre 2006 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur FOSSIER, Président, et Madame NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.ORDONNANCE DE CLÈTURE EN DATE DU : 10 juillet 2006

Vu le jugement du tribunal de commerce de Boulogne sur Mer en date du

25 novembre 2003 ayant :

- adjugé aux demandeurs le bénéfice de leurs assignations des 15 octobre 1997 et 2 octobre 1998.

- entériné le rapport d'expertise de Monsieur Z... sur la recherche de responsabilité et partiellement sur le préjudice financier et économique.

- condamné solidairement la société LASKARIDIS SHIPPING ET LA SOCIÉTÉ FESTIVER SHIPPING à payer à :

+ GROUPAMA NAVIGATION et TRANSPORTS venant aux droits de la société NAVIGATION et TRANSPORTS, compagnie apéritrice, la somme de 3 MF soit 457.347 Euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 avril 1996, date de la quittance subrogative.

+ Monsieur X... la somme de 149.500 Euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 15 octobre 1997.

- condamné solidairement les deux mêmes au paiement de la somme de 10.000 Euros aux assureurs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

- condamné THE NORTH ENGLAND à payer à Monsieur X... et aux assureurs toutes les sommes que les armateurs du "FRIO MARATHON " seront condamnés à verser en exécution de la lettre de garantie du 25 avril 1996.

Vu l'appel formé le 9 mars 2004 par la société de droit chypriote FESTIVER SHIPPING COMPANY LTD et son assureur, la société de droit anglais, THE NORTH ENGLAND PROTECTING AND INDEMNITY ASSOCIATION LTD.

Vu les conclusions déposées le 15 mars 2006 pour la société de droit chypriote FESTIVER SHIPPING COMPANY LTD et son assureur, la société de droit anglais, THE NORTH ENGLAND PROTECTING AND INDEMNITY ASSOCIATION LTD sollicitant :

- à titre principal et au vu de l'article 7 de la loi 67-145 du 7 juillet 1967 relative aux événements de mer, déclarer prescrites les demandes de Monsieur X... et de l'assureur GROUPAMA.

- subsidiairement, les débouter. Dire que le préjudice économique ne saurait excéder 16.500 Euros.

- en tout état de cause, les condamner à leur payer la somme de 30.000 Euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Vu les conclusions déposées le 12 octobre 2005 pour la société de droit grec LASKARIDIS SHIPPING COMPANY LTD demandant :

- l'infirmation

- constater la nullité de l'assignation faite au domicile de Monsieur Y... en violation des articles 683, 684 et 689 du nouveau code de procédure civile

- dire n'y avoir lieu à statuer

- dire que l'action était prescrite lors de la seconde assignation du 2 octobre 1998

- plus subsidiairement, constater que la société LASKARIDIS SHIPPING n'est que l'agent de l'armateur propriétaire du navire FRIO MARATHON, la société FESTIVER SHIPPING

- déclarer irrecevables les requérants vers la société LASKARIDIS SHIPPING en tant qu'armateur propriétaire du FRIO MARATHON

- infiniment subsidiairement les débouter et les condamner à la somme de 10.000 Euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Vu les conclusions déposées le 6 juin 2006 pour Monsieur Daniel X... et la société GROUPAMA TRANSPORT agissant en qualité de compagnie apéritrice pour son compte et celui de 9 sociétés de coassurance désignées ( SA Nationale Suisse, Mutuelle Electrique d'Assurance, Allianz via assurance, Commercial Union, Mutuelles du MANS Assurances, Le Continent, GAN Incendie Accidents, Maritim NT, Generali) et demandant les déboutés des sociétés appelantes (FESTIVER SHIPPING, son assureur THE NORTH ENGLAND et LASKARIDIS SHIPPING), confirmation de la décision sauf à les condamner à payer à Monsieur X... la somme de 430.983 Euros au titre de son préjudice financier et économique et à payer en outre aux compagnies d'assurances intervenantes la somme de 20.000 Euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Vu l'ordonnance de clôture en date du 7 juin 2006.

Le 24 avril 1996 à 4 heures 24, dans le rail montant du détroit du Pas de Calais, le chalutier D'ARTAGNAN II de Boulogne sur Mer a été abordé par le cargo chypriote FRIO MARATHON et a coulé au bout de quelques minutes.

Dès le lendemain, le Président du tribunal de commerce de Boulogne sur Mer, saisi en référé, a désigné un expert judiciaire, Monsieur Z....

Dès le début de l'expertise, Me DUHAMEL s'est présenté comme le conseil de l'Armement LASKARIDIS SHIPPING et Me CLEMENT JONES du cabinet HOLMAN FENWICK etamp; WILLAN Avocats à la Cour et Sollicitors à Paris, a informé l'expert de son intervention aux côtés de Me DUHAMEL "pour le compte de l'armateur du FRIO MARATHON".

L'expertise s'est déroulée en présence de l'Armement LASKARIDIS SHIPPING, seule partie présente pour le cargo FRIO MARATHON et n'ayant jamais contesté sa qualité d'armateur, représenté par Me DUHAMEL et Me CLEMENT JONES, présents aux réunions d'expertise et rédacteurs de dires.

L'expert a remis le 3 avril 1997 son rapport où il conclut à la responsabilité du navire FRIO MARATHON en se fondant sur le règlement international relatif à la prévention des abordages en mer. Il a rappelé la règle précisant que tout navire "rattrapant" un autre venant de sa droite n'est pas prioritaire et doit manoeuvrer pour éviter l'autre ; que cette règle s'applique à l'intérieur d'un dispositif de séparation du trafic ; que le cargo étant non prioritaire et le dommage survenu au milieu du "rail" de circulation,

l'angle d'entrée dans celui-ci du chalutier était indifférent à la responsabilité encourue.

Monsieur X... et ses assureurs ont assigné au fond l'Armement LASKARIDIS SHIPPING le 15 octobre 1997 en la personne et au domicile de Monsieur Y..., présumé consignataire du navire FRIO MARATHON, pour le voir condamner à leur payer la somme de 5,131 MF. Me CLEMENT JONES s'est constitué à l'audience comme avocat de l'Armement LASKARIDIS SHIPPING (rôle d'audience du 27 janvier 1998, Pièces 5 et 18 ). Cependant, dans une lettre du 20 mai 1998, soit plus de 2 ans après le sinistre, cet avocat les a informés qu'il représentait la société FESTIVER SHIPPING, armateur du navire FRIO MARATHON au moment des faits et que c'est en qualité de représentant de cette dernière société qu'il est intervenu à l'expertise.

Monsieur X... et ses assureurs ont donc assigné la société FESTIVER SHIPPING le 2 octobre 1998.

Le premier juge a estimé que la première assignation envers la société LASKARIDIS SHIPPING était régulière pour avoir été faite au consignataire du navire à Boulogne sur Mer ; que le navire appartenait au moment du sinistre à la société LASKARIDIS SHIPPING sous couvert d'une société fictive panaméenne NAUTICAL CHALLENGER ; que pendant la procédure, cette société LASKARIDIS SHIPPING s'est toujours présentée comme l'armateur ; que la société FESTIVER SHIPPING est en fait une autre société fictive ; que la responsabilité du FRIO MARATHON était seule engagée ; que l'assignation dirigée contre la société LASKARIDIS SHIPPING a interrompu la prescription envers la société FESTIVER SHIPPING.

En cause d'appel, la société de droit grec Armement LASKARIDIS SHIPPING soutient que l'assignation à sa personne le 15 octobre 1997 est nulle ; qu'elle aurait du être faite à parquet, la société étant à l'étranger, celle-ci ne pouvant être faite à domicile élu ; que Monsieur Y... n'est pas le consignataire du navire et n'avait pas mandat pour recevoir l'acte ; qu'au surplus et même s'il l'avait été, l'article 18 du décret du 19 juin 1969 n'autorise pas à assigner l'armateur au domicile personnel de l'agent.

Elle fait valoir que le propriétaire du navire au jour des faits était la société FESTIVER SHIPPING pour l'avoir acquis le 22 mars 1996 de la société NAUTICAL CHALLENGER ; qu'elle-même en était le "manager" ; que les demandeurs ont eu connaissance de cet état de fait bien avant l'expiration du délai de 2 ans.

Au fond, elle oppose au rapport de l'expert, un rapport d'enquête nautique établi par un administrateur maritime, Monsieur A..., qui aboutit à la conclusion inverse.

La société FESTIVER SHIPPING et la société THE NORTH ENGLAND son assureur rappellent que seul le propriétaire armateur du navire au moment des faits, la société FESTIVER SHIPPING, devait être assigné dans le délai de prescription de 2 ans ; que la société LASKARIDIS était le manager intervenu dans l'expertise par Me DUHAMEL, la société FESTIVER intervenant volontairement dans celle-ci par Me CLEMENT JONES ; qu'un document "ship's particulars" annexé au rapport d'expertise précise que FESTIVER était bien armateur propriétaire.

Elles constatent que l'assignation du 2 octobre 1998 faite à parquet aux sociétés FESTIVER, LASKARIDIS et PetI Club est atteinte par la prescription biennale de l'article 7 de la loi du 7 juillet 1967 sur les événements de mer

Sous la réserve de la nullité de l'assignation faite à la société

LASKARIDIS en 1997, elles contestent la position des demandeurs voulant faire croire que cette première assignation à une première partie a interrompu la prescription à l'égard de la seconde s'agissant du même but en considérant que la seconde était virtuellement comprise dans la première.

Elles contestent également le caractère fictif que le tribunal a attribué à la société FESTIVER en se fondant sur le fait qu'il s'agissait de l'adresse d'un cabinet d'avocats.

Elles soutiennent que le navire appartenait à la société FESTIVER un mois avant les faits et que cette situation était connue des demandeurs dès 1997 pour figurer en annexe du rapport d'expertise ; que si certaines publications maritimes ne sont mises à jour qu'une fois par an, d'autres le sont tous les 6 mois (lloyd's Confidential Index) de sorte que les demandeurs avaient tout loisir d'accéder à l'information avant la prescription et que les demandeurs ne se sont jamais trouvés dans l'impossibilité absolue d'agir dans le délai légal en vue d'interrompre la prescription.

Subsidiairement, elles contestent la responsabilité du navire FRIO MARATHON et s'appuient sur le rapport d'enquête nautique de la direction des affaires maritimes du Pas de Calais concluant à la faute du chalutier. Elles soutiennent que le chalutier n'avait pas la qualité de navire "rattrapé" et se trouvait en faute pour être entré dans le couloir de navigation selon un angle de 30o trop important auquel il s'est maintenu alors qu'il aurait dû être soit traversier à 90o soit inférieur ou égal à 20o ; que les règles de veille n'ont pas été respectées ; que le cargo en apercevant le chalutier a pu penser qu'il était soit traversier soit empruntant le couloir dans le même sens que lui.

Sur les demandes de réparation des assureurs et de Monsieur X..., elles soutiennent que l'assureur subrogé ne peut demander plus que la

valeur réelle du navire, la somme de 3 MF demandée n'étant aucunement justifiée comme représentant cette valeur et que Monsieur X... ne justifie pas du prix du navire de remplacement.

Monsieur X... et la société GROUPAMA TRANSPORT compagnie apéritrice exposent que selon le Lloyd's register et le Greek Shipping Directory le FRIO MARATHON appartenait au moment du sinistre à l'Armement LASKARIDIS SHIPPING Company sous couvert d'une société "offshore" NAUTICAL CHALLENGER ce qui explique l'assignation faite à l'Armement LASKARIDIS pris en la personne du capitaine du navire le lendemain du sinistre et la lettre de garantie faite le même jour par la société NORTH OF ENGLAND pour l'armateur.

Ils rappellent que pendant l'expertise, l'Armement LASKARIDIS n'a jamais contesté sa qualité d'armateur au moment du sinistre, Me CLEMENT JONES confirmant cette qualité et se constituant pour celui-ci dès l'assignation au fond mais revenant sur cette position dès l'échéance de la prescription tout en reconnaissant qu'il assistait à l'expertise en qualité d'avocat de la société FESTIVER.

Sur l'assignation du 15 octobre 1997, ils exposent que celle-ci, faite au consignataire du navire (article 11 de la loi 6968 du 3 janvier 1969 ), Monsieur Y..., est valide, la société y faisant élection de domicile et ce dernier ayant payé les frais de port du navire comme mandataire salarié de l'Armement LASKARIDIS; que la Cour de Cassation a jugé ( C.Com. 16 / 02 / 1993 ) que tous actes judiciaires adressés à l'armateur peuvent l'être au consignataire ; que cette assignation a bien été transmise à l'Armement puisque ce dernier est intervenu et a conclu au fond devant le tribunal de commerce en constituant avocat dès avant la prescription de sorte qu'aucun grief ne peut être avancé.

Ils font valoir qu'au moment du sinistre et pendant l'expertise,

l'Armement LASKARIDIS et le cabinet de Me CLEMENT JONES ont entretenu l'apparence de ce qu'il était l'armateur ; que la société FESTIVER tout comme la société NAUTICAL sont en fait des cabinets d'avocats et présentent un caractère fictif, la seule structure concrète d'entreprise restant LASKARIDIS ; que devant cette apparence, ils n'avaient pas à rechercher dans les publications spécialisées si cette situation avait changé.

Sur l'assignation du 2 octobre 1998 à la société FESTIVER se déclarant Armateur, ils exposent que conformément à une jurisprudence de la Cour de Cassation, les deux actions tendant vers un même but, la seconde est virtuellement comprise dans la première de sorte que la prescription vers FESTIVER était interrompue par l'action au fond vers LASKARIDIS en 1997.

Au fond, ils demandent à voir entériner le rapport de l'expert judiciaire et écarter celui de l'administrateur maritime A... produit par les défendeurs.

Sur les circonstances de l'abordage, ils rappellent que l'angle d'entrée dans la voie de circulation est sans incidence sur le sinistre et que le FRIO MARATHON n'a pas respecté les règles maritimes sur la prévention des abordages.

Sur le montant de la demande chiffrée des assureurs que les défendeurs voudraient voir limiter à la "valeur réelle" ils expliquent que la valeur est une valeur "agréée" contractuelle et non une valeur "réelle".

Monsieur X... demande à voir prendre en compte le préjudice né de la perte de son armement (695.923,71 Francs), de la valeur réelle de son navire estimé à 3,5 MF remboursé hauteur de 3 MF (0,5 MF), du préjudice financier lié au remboursement des dettes d'emprunt (1 MF) et de la perte d'exploitation résultant de la perte de l'outil de travail (631.141 Francs) sur une période estimée de 3 mois.

SUR CE :

La qualité de propriétaire du navire FRIO MARATHON

Au vu des documents présentés et des conclusions concordantes des intimés, il n'est plus contestable que le propriétaire du navire au moment du sinistre était la société FESTIVER pour l'avoir acquis un mois avant les faits de la société NAUTICAL CHALLENGER.

La société LASKARIDIS SHIPPING ne peut en conséquence être retenue en cette qualité ni être condamnée in solidum avec la société FESTIVER SHIPPING.

L'assignation du 15 octobre 1997 à la société LASKARIDIS

Cette assignation a été délivrée à l'Armement LASKARIDIS SHIPPING au domicile et à la personne de Monsieur Y... qualifié de "consignataire" du navire, qualité contestée par les sociétés appelantes.

Dans la mesure où, avant l'échéance du délai de la prescription biennale, la société LASKARIDIS s'est constituée au fond devant le tribunal de commerce dans l'instance initiée par cette assignation, celle-ci a été régularisée et il importe peu de déterminer désormais s'il s'agissait ou non du consignataire du navire et si l'armement LASKARIDIS était valablement assigné.

L'assignation du 2 octobre 1998 à la société FESTIVER

Cette assignation délivrée à parquet a été effectuée après l'échéance

de la prescription biennale.

La situation apparente pendant les deux années suivant le sinistre.

Les navires avec mention de leurs armateurs et gestionnaires sont enregistrés dans des registres maritimes diffusés et accessibles à tous. Ces registres sont mis à jour selon une périodicité variable allant de 6 mois à 1 an.

La vente du FRIO MARATHON, intervenue en mars 1996 n'était pas encore enregistrée en avril 1996 et la lecture des registres pouvait légitimement entraîner des incertitudes.

En effet, les registres "Lloyd Register 96-97" et "Lloyd Confidential Index" en vigueur à cette dernière date mentionnent la société panaméenne NAUTICAL CHALLENGER en qualité de propriétaire et le registre "Greek Shipping Directory" mentionne la société LASKARIDIS comme "Piraeus office" (bureau du Pirée) de la "shipowning" (propriétaire du navire) du FRIO MARATHON, la société NAUTICAL CHALLENGER tandis que le capitaine du navire, pour les besoins du contentieux, a établi un document signé de sa main intitulé "Ship's Particulars" où il déclare comme propriétaire la société FESTIVER, cette dernière société ne figurant pas dans les registres de la Lloyd parmi les armateurs existant à cette date. La procédure ultérieure fera apparaître que cette société FESTIVER fait partie d'un groupe "Far Eastern Shipping" qui, lui, est bien inscrit comme armateur dans les registres de la Lloyd.

Pour ce qui concerne la situation au regard de la procédure, il faut constater que l'Armement LASKARIDIS SHIPPING Company Ltd s'est présenté spontanément comme "l'armateur" dès le début du sinistre et s'est constitué comme tel dans l'instance en référé et au fond par Me DUHAMEL ; que dès le lendemain de l'abordage, l'assureur THE NORTH ENGLAND a adressé une lettre de garantie pour le compte de

"l'armateur" ; que Me CLEMENT JONES est intervenu aux côtés de son confrère Me DUHAMEL pour "l'armateur" sans désigner nommément la société LASKARIDIS mais ne révélant officiellement le nom du véritable propriétaire FESTIVER qu'une fois la prescription acquise au profit de ce dernier.

La prescription (2ans, article 7 de la loi 67-545 du 7 juillet 1967)

Considérant qu'au jour du sinistre, il ne ressortait d'aucun registre ou document officiel que la société FESTIVER était le propriétaire du navire ; qu'au contraire le recoupement des informations recueillies des différents registres laissait apparaître des incertitudes sur le véritable propriétaire ; que la société FESTIVER n'était pas enregistrée comme armateur ; que la simple déclaration du capitaine désignant comme propriétaire la société FESTIVER n'était confirmée par aucun élément ; que la société Armement LASKARIDIS se constituant spontanément dans l'instance sans dénier à aucun moment sa qualité d'armateur propriétaire, est intervenue dès le début en référé puis au fond pour discuter de la responsabilité du propriétaire comme l'aurait fait ce dernier ; que cette situation apparente a été confortée par la lettre de garantie de l'assureur de "l'armateur" ; que Me CLEMENT JONES en se présentant "pour l'armateur" a ajouté à la vraisemblance ; qu'ainsi Monsieur X... et ses assureurs, au regard des registres officiels et dès l'intervention de la société LASKARIDIS, n'avaient plus aucune raison de penser que cette dernière n'était pas l'armateur propriétaire ni de rechercher en permanence la véritable identité d'un propriétaire régulièrement constitué devant eux et discutant sa responsabilité ; qu'en se comportant pendant le délai de la prescription de façon à laisser croire en cette apparence, la société LASKARIDIS et Me CLEMENT JONES ont masqué la

réalité et placé les demandeurs dans la situation identique à celle d'une personne mise dans l'impossibilité d'agir en interruption du délai légal de la prescription à l'égard de la société FESTIVER ; que dans ces conditions, il convient de dire soit que l'action vers la société FESTIVER était virtuellement comprise dans l'assignation de 1997 à l'encontre de la société LASKARIDIS soit que le délai biennal de prescription à l'encontre de la société FESTIVER n'a commencé à courir qu'à compter du 20 mai 1998 date à laquelle Me CLEMENT JONES a révélé le nom du véritable propriétaire qu'il déclarait représenter depuis le début de la procédure ; que dans l'un ou l'autre cas, l'action de Monsieur X... et de ses assureurs est recevable à l'encontre de la société FESTIVER.

La responsabilité des navires

Les règles internationales de navigation maritime relatives à l'abordage sont régies par la convention de Londres du 20 octobre 1972.

Le chalutier D'ARTAGNAN II est entré dans le rail montant du dispositif de séparation du trafic (dst) du détroit du Pas de Calais selon un angle vraisemblablement supérieur à 22 o et non conforme à la recommandation de l'article 10 de la convention qui impose à tout navire d'entrer ou de sortir d'une voie de circulation d'un dispositif de séparation du trafic selon un angle aussi réduit que possible par rapport à la direction générale du trafic. Il a poursuivi sa route selon le même angle sensiblement pour franchir la voie de circulation. Contrairement aux prescriptions de l'article 7 b de la convention, son homme de veille n'a pas mis en oeuvre la radio VHF ni effectué le "plotting"de l'écho radar du FRIO MARATHON quand celui-ci est apparu, c'est à dire le suivi de la trajectoire de ce

navire ce qui aurait permis de constater le croisement des routes. Sa vitesse de surface était de 9,1 noeuds. Sa trajectoire croisait celle du FRIO MARATHON en venant sur la droite de ce dernier.

Le cargo FRIO MARATHON circulait dans le rail montant du dispositif de séparation du trafic (dst ) du détroit du Pas de Calais selon une direction sensiblement parallèle à celui-ci. Sa vitesse de surface était de 17 noeuds. Sa trajectoire croisait celle du D'ARTAGNAN II qui arrivait sur sa droite. Son équipement radar était en fonctionnement mais son second capitaine a déclaré n'avoir pas vu l'écho du chalutier de sorte qu'il n'a pas effectué de "plotting".

L'abordage a eu lieu au milieu du rail de circulation à deux miles de l'entrée.

L'article 10 de la convention relatif à la navigation dans un dispositif de séparation du trafic recommande l'entrée selon un angle très réduit, la circulation dans la direction générale de celui-ci, la coupure si nécessaire de la voie de circulation selon un angle droit si possible. Il précise cependant que ces règles ne dispensent pas les navires de leurs autres obligations ce qui sous entend que la navigation dans un tel dispositif selon la direction générale du trafic ne veut pas dire que l'on est prioritaire.

L'article 13 précise que tout navire qui en rattrape un autre doit s'écarter de la route de ce dernier, étant considéré dans ce cas qu'est considéré comme "rattrapant" tout navire qui, s'approchant d'un autre de plus de 22 o 5 sur l'arrière du travers de ce dernier se trouve dans une position telle que de nuit il ne pourrait voir que le feu arrière sans voir aucun de ses feux de côté ; que s'il ne peut déterminer s'il rattrape l'autre il doit se considérer comme s'il en rattrape un autre et manoeuvrer en conséquence.

L'article 15 énonce que lorsque deux navires se croisent de telle sorte qu'il existe un risque d'abordage, le navire qui voit l'autre

sur tribord (droite ) doit s'écarter de la route de celui-ci.

L'article 17 précise que lorsqu'un navire est tenu de s'écarter de la route d'un autre navire, cet autre navire doit maintenir son cap et sa vitesse.

Le rapport d'enquête nautique de la direction interdépartementale des affaires maritimes en date du 27 avril 1998 signé de Monsieur B..., administrateur de 1ère classe, confirme les positions et vitesses respectives des navires précisées dans l'expertise et souligne que les hommes de veille respectifs ne se sont aperçus de la présence de l'autre navire qu'à 4 heures 20 alors que la distance entr'eux était de 0,2 ou 0,3 miles ce qui souligne les fautes mutuelles consistant à avoir négligé la surveillance du radar ou de ne pas avoir fait de "plotting" sitôt l'écho de l'autre navire aperçu.

Il expose que le FRIO MARATHON a toujours respecté la convention de Londres sur le règlement de 1972 relatif à l'abordage en mer et affirme que l'étude des trajectoires montre qu'à aucun moment ce navire ne peut être considéré comme "rattrapant" en application de l'article 13 de la convention. Il ne dit toutefois pas pourquoi.

Il déclare que ce navire pouvait légitimement présumer que les navires circulant dans le dispositif de séparation du trafic (dst ) en connaissaient les règles et que le chalutier s'apprêtait à emprunter la voie montante et non à la couper ; qu'au moment de l'abordage il a manoeuvré pour limiter les dégâts du chalutier ; qu'ainsi il a respecté les règles de la navigation.

Concernant le D'ARTAGNAN II, il lui reproche une entrée dans le dispositif de séparation du trafic selon un angle trop important de 34 o contraire à l'article 10 de la convention et de s'y être

maintenu de sorte qu'il n'était ni dans la sens de la voie de circulation ni traversier selon une direction perpendiculaire ce dont il déduit que ce navire est fautif pour avoir prêté à confusion en ne respectant pas les règles de la circulation maritime.

La Cour observe d'après l'expertise judiciaire que le recoupement cinématique des trajectoires (page 19 et suivante du rapport d'expertise) montre qu'en raison de la position et de la vitesse respectives des navires, le FRIO MARATHON arrivant deux fois plus vite que le chalutier et se trouvant derrière lui dans la voie de circulation, se trouvait jusqu'avant l'abordage, à gauche et en arrière du D'ARTAGNAN II par rapport à la direction générale de circulation des deux navires de sorte qu'il devait voir le feu de poupe à l'arrière soit, en raison des embardées du chalutier, son feu de côté gauche.

A l'endroit de l'abordage, c'est à dire au milieu du "rail de circulation" soit à plusieurs kilomètres des bords de celui-ci, la règle relative à l'entrée dans le "rail" ne trouvait plus à s'appliquer, le chalutier étant en franchissement de celui-ci selon un angle de 30 à 45 o par rapport au sens de circulation pour se rendre à une zone de pêche. Il s'ensuit que la règle applicable était celle des articles 13, 15 et 17 de la convention étant rappelée que l'article 10 précise que les règles concernant la circulation dans un dispositif de séparation du trafic(entrée selon un angle très réduit, circulation dans la direction générale de celui-ci, coupure si nécessaire de la voie de circulation selon un angle droit si possible ) ne dispensent pas les navires de leurs autres obligations.

Se trouvante de celui-ci, coupure si nécessaire de la voie de circulation selon un angle droit si possible ) ne dispensent pas les navires de leurs autres obligations.

Se trouvant devant et à droite du FRIO MARATHON, navire plus rapide

que lui, et dans une trajectoire venant franchir celle de ce dernier selon un angle inférieur à 45 o, le D'ARTAGNAN II était dans une position privilégiée par rapport à ce navire au sens des règles relatives à l'abordage et le FRIO MARATHON était par rapport à lui soit navire "rattrapant" soit, dans l'incertitude de cette situation, tenu de s'écarter de la route de celui-ci venant de sa droite et devant maintenir son cap et sa vitesse. Il s'ensuit que le D'ARTAGNAN II était prioritaire.

S'il est soutenu que le personnel de veille du D'ARTAGNAN II a commis des fautes en n'utilisant pas la radio et en s'abstenant de faire un "plotting" des échos radar du FRIO MARATHON , la Cour constate que le personnel de veille du FRIO MARATHON déclare n'avoir pas constaté d'écho radar du D'ARTAGNAN II ce qui, selon l'expert, apparaît impossible en raison des dimensions du chalutier et des conditions météorologiques favorables, ce que la Cour traduit comme une négligence dans l'utilisation de ce moyen de repérage, de sorte que des fautes du personnel de veille sont établies de part et d'autre qui interdisent de faire porter une responsabilité supplémentaire à l'un ou à l'autre des navires au titre de la mauvaise utilisation des moyens techniques de repérage.

La responsabilité du FRIO MARATHON sera retenue.

La demande des assureurs subrogés de Monsieur X...

La quittance subrogative de Monsieur X... pour la somme de 3 MF est produite aux débats ainsi que la police d'assurance correspondante qui mentionne dans son article 7 des conditions

générales qu'il s'agit d'une valeur agréée et non d'une valeur réelle comme soutenu par les armateurs de sorte que l'article L173-6 du code des assurances s'applique qui précise que "lorsque la valeur assurée du navire est une valeur agréée, les parties s'interdisent toute autre estimation" ainsi que l'article L 172-29 qui dispose que "l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance acquiert à concurrence de son paiement tous les droits de son assuré nés des dommages qui ont donné lieu à garantie".

Si les appelants contestent cette valeur comme ne reflétant pas la réalité du préjudice subi, Monsieur X... produit un rapport de la SOEMARI du 5 février 1996 (p. 28 )soit un mois avant le sinistre, rapport qui avait procédé à l'estimation de la valeur vénale du D'ARTAGNAN II et fixé à 3,5 MF cette valeur hors matériel de pêche, de sécurité et d'approvisionnement (P.29), d'où il suit que la somme versée à Monsieur X... n'excède pas le préjudice né de la perte du navire.

La somme de 3 MF ( 457.347 Euros ) due aux assureurs sera confirmée.

La demande de Monsieur X...

Monsieur X... a subrogé ses assureurs dans le préjudice subi du fait de l'abordage du D'ARTAGNAN II tout en précisant dans la quittance subrogative que l'indemnité d'assurance ne l'avait pas désintéressé et qu'il restait titulaire d'une créance de dommages et intérêts. Il conserve donc la possibilité d'agir pour le surplus non indemnisé.

Monsieur X... demande la somme de 500.000 Francs à titre de complément de la valeur du navire fixée à 3,5 MF, la somme de 695.923,71 Francs (P.30) au titre du matériel embarqué (pêche, sauvetage, exploitation, cuisine, consommables, outillage ...), la somme de 1MF correspondant à la différence entre l'emprunt de 4,5 MF pour l'acquisition du navire et des équipements et les 3,5MF

remboursés, un préjudice économique de 96.217 Euros fondé sur 98 jours d'immobilisation correspondant au délai nécessaire pour retrouver et mettre en exploitation un navire équivalent

Les sociétés LASKARIDIS SHIPPING, FESTIVER SHIPPING et THE NORTH ENGLAND n'ont pas conclu sur les demandes de Monsieur X....

La Cour rappelle qu'en matière de responsabilité délictuelle le préjudice de la victime doit être entièrement indemnisé ; que Monsieur X... est bien fondé à demander la somme de 500.000 Francs à titre de complément de la valeur du navire et la somme de 695.923,71 Francs au titre du matériel embarqué, ces postes n'étant pas indemnisés par l'assureur soit 1.195.923,71 Francs ou 182.317 Euros.

Il convient de rejeter la somme de 1 MF correspondant à la différence entre l'emprunt de 4,5 MF pour l'acquisition du navire et la valeur vénale de celui-ci. La réalité du montant de cet emprunt n'est pas établi, étant seulement fait état d'un remboursement mensuel de 46.100 Francs. En outre, ce poste ne correspond pas à un préjudice car ce navire de 22 ans au jour du sinistre ne peut être indemnisé à sa valeur neuve.

Sur le préjudice d'exploitation, la cour retiendra la somme de 564.274 Francs (86.023 Euros) correspondant au calcul de l'expert qui limite à 90 jours l'immobilisation en tenant compte de ce que Monsieur X... a pu rembourser son emprunt au 64 ème jour suite au versement de l'indemnité d'assurance.

La cour retient la somme de 268.340 Euros au profit de Monsieur X....

Les frais irrépétibles et dépens

La société LASKARIDIS SHIPPING qui s'est abstenu volontairement et

anormalement de révéler le nom du véritable propriétaire dès le début du contentieux en vue de faire acquérir la prescription, sera associée à la condamnation de la société FESTIVER SHIPPING aux frais irrépétibles et dépens.

Il n'apparaît pas équitable de laisser supporter par Monsieur X... et ses assureurs les frais irrépétibles engagés à l'occasion de la présente instance aussi la société FESTIVER SHIPPING et la société THE NORTH ENGLAND seront condamnées à leur payer la somme de 15.000 Euros et la société LASKARIDIS SHIPPING la somme de 5000 Euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La Cour confirme la décision pour l'essentiel, réforme pour une petite partie et dans le but d'une meilleure lisibilité, reformule intégralement le dispositif.

PAR CES MOTIFSLa Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, en dernier ressort,

Constate que la société FESTIVER SHIPPING est l'armateur propriétaire du navire FRIO MARATHON et la société LASKARIDIS SHIPPING le

gestionnaire de celui-ci.

Dit que l'action à l'encontre des sociétés LASKARIDIS SHIPPING, FESTIVER SHIPPING et THE NORTH ENGLAND exercée par Monsieur X... et ses assureurs, la société GROUPAMA TRANSPORT anciennement GROUPAMA NAVIGATION etamp; TRANSPORTS agissant en qualité de compagnie apéritrice pour son compte et celui de 9 sociétés de coassurance, les sociétés Nationale Suisse, Mutuelle Electrique d'Assurance, Allianz via assurance, Commercial Union, Mutuelles du MANS Assurances, Le Continent, GAN Incendie Accidents, MARITIM NT et GENERALI, n'est pas prescrite.

Dit que le navire FRIO MARATHON porte la responsabilité de l'abordage du navire D'ARTAGNAN II, la responsabilité délictuelle de la société FESTIVER SHIPPING engagée et la réparation du préjudice due à Monsieur X... et à ses assureurs.

Condamne in solidum la société FESTIVER SHIPPING et son assureur la société THE NORTH ENGLAND à payer à la société GROUPAMA TRANSPORT anciennement GROUPAMA NAVIGATION etamp; TRANSPORTS agissant en qualité de compagnie apéritrice pour son compte et celui de 9 sociétés de coassurance citées ci-avant, la somme de 457.347 Euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 avril 1996, date de la quittance subrogative.

Condamne in solidum la société FESTIVER SHIPPING et son assureur la société THE NORTH ENGLAND à payer à Monsieur X... la somme de 268.340 Euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 2 octobre 1998.

Déboute Monsieur X... du surplus de ses demandes.

Condamne in solidum la société FESTIVER SHIPPING et son assureur la société THE NORTH ENGLAND à payer ensemble à Monsieur X... et ses assureurs la somme de 15.000 Euros en application de l'article 700 du

nouveau code de procédure civile.

Condamne in solidum la société LASKARIDIS SHIPPING à payer ensemble à Monsieur X... et ses assureurs la somme de 5.000 Euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Condamne in solidum la société FESTIVER SHIPPING, son assureur la société THE NORTH ENGLAND et la société LASKARIDIS SHIPPING aux dépens de première instance et d'appel dont les frais d'expertise qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT

C. Nolin

T. Fossier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Ct0039
Numéro d'arrêt : JURITEXT000007628838
Date de la décision : 09/11/2006

Analyses

DROIT MARITIME - Abordage - Action en indemnité

Considérant qu'au jour de l'abordage, il ne ressortait d'aucun registre ou document officiel que la société Festiver était propriétaire du navire, qu'une société Laskaridis a été assignée comme telle et est intervenue spontanément, en référé, puis devant l'expert et enfin au fond, pour discuter la responsabilité du propriétaire comme l'aurait fait ce dernier, que son avocat britannique n'a relevé la distinction entre armateur gestionnaire et armateur propriétaire que 24 mois et 20 jours après l'accident, les demandeurs ont été placés dans l'impossibilité d'agir contre Festiver dans le temps de la prescription biennal, et celle-ci n'est pas acquise, soit que l'action contre Festiver ait été comprise dans l'assignation contre Laskaridis, soit que le point de départ pour assigner ait été retardé, l'assignation finalement délivrée contre Festiver l'ayant été à peine cinq mois après la découverte de la dissimulation


Références :

article 7 de la loi 67-545 du 7 juillet 1967

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. FOSSIER, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2006-11-09;juritext000007628838 ?
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