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18/12/2006 | FRANCE | N°06/07371

France | France, Cour d'appel de Douai, Ct0039, 18 décembre 2006, 06/07371


COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 18 / 12 / 2007
* * *

No de MINUTE : / 07 No RG : 06 / 07371

Jugement (No 04 / 02248) rendu le 28 Novembre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BETHUNE

REF : VNDM / CP
Expertise : Renvoi à la mise en état du 20 juin 2008
APPELANTE
S. C. I. LA ROTONDE DE BETHUNE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 32 Avenue de Friedland 75008 PARIS

Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour Assistée de Me Bruno BOCCARA, avocat a

u barreau de PARIS

INTIMÉS
Madame Brigitte Y... épouse Z... née le 17 Février 1959 à LA BASSEE (5...

COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 18 / 12 / 2007
* * *

No de MINUTE : / 07 No RG : 06 / 07371

Jugement (No 04 / 02248) rendu le 28 Novembre 2006 par le Tribunal de Grande Instance de BETHUNE

REF : VNDM / CP
Expertise : Renvoi à la mise en état du 20 juin 2008
APPELANTE
S. C. I. LA ROTONDE DE BETHUNE prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 32 Avenue de Friedland 75008 PARIS

Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour Assistée de Me Bruno BOCCARA, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS
Madame Brigitte Y... épouse Z... née le 17 Février 1959 à LA BASSEE (59480) demeurant... 62131 VAUDRICOURT

Représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assistée de Me LEPOUTRE, avocat au barreau de LILLE

Monsieur Philippe Z... (Cf désistement partiel à son encontre) demeurant... 62131 VAUDRICOURT

Représenté par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assisté de Me LEPOUTRE, avocat au barreau de LILLE

la SELARL B... ET ASSOCIES représentée par Me Gérard B... ès qualités de liquidateur judiciaire de M. Philippe Z... ayant son siège social... 62400 BETHUNE

Représenté par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Assisté de Me LEPOUTRE, avocat au barreau de LILLE

INTERVENANT VOLONTAIRE :

Maître Martine C... demeurant... 62200 BOULOGNE SUR MER

Représenté par la SCP COCHEME-KRAUT-LABADIE, avoués à la Cour Assisté de Me Jacques HERBAUX, avocat au barreau de BETHUNE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Monsieur FOSSIER, Président de chambre Monsieur DELENEUVILLE, Conseiller Madame NEVE DE MEVERGNIES, Conseiller

DÉBATS à l'audience publique du 30 Octobre 2007
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Melle HAINAUT
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 18 Décembre 2007 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Monsieur FOSSIER, Président et Madame NOLIN, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

Par acte sous seing privé du 4 septembre 1985, la SCI DU CLOS DES ANTES, aux droits de laquelle se trouve la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE, a donné à bail à la SARL LA LOCOMOTIVE pour une durée de 9 années à compter du 9 septembre 1985 un local no 18 dans une galerie commerciale dénommée " LA ROTONDE " à BÉTHUNE pour y exercer une activité de restauration type brasserie, et vente de boissons sous licence IV. Par acte extra-judiciaire du 7 novembre 1996, la SARL LA LOCOMOTIVE a sollicité le renouvellement du bail, ce qui lui a été accordé par le bailleur avec demande de fixation du loyer de renouvellement.

Dans l'intervalle, par acte du 23 août 1994, la SARL LA LOCOMOTIVE a également pris à bail un local contigu numéroté 19. Le bail contenait une autorisation au profit du preneur, de faire effectuer des travaux notamment celui d'abattre la cloison séparative d'entre les deux lots, avec obligation de le rétablir " en cas de cession de l'un des deux locaux no18 ou 19. "

Par acte sous seing privé du 15 mars 1999, la SARL LA LOCOMOTIVE a cédé son droit au bail à Monsieur Philippe Z... et Madame Brigitte Y... épouse Z... ; ces derniers étaient mariés sous le régime de la séparation des biens, et, des deux époux, seul Monsieur Philippe Z... était inscrit au registre du commerce et des sociétés.

Par acte du 14 mars 2000, la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE a assigné les époux Philippe Z... et la SARL LA LOCOMOTIVE pour contester leur droit au renouvellement du bail et obtenir leur expulsion, en invoquant la nécessité, pour chaque titulaire des droits locatifs, de remplir les conditions de ce droit au renouvellement notamment l'inscription au registre du commerce pendant la durée de la procédure de renouvellement ; par jugement du 21 mai 2002, le Tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE a considéré que le droit au renouvellement du bail était acquis, et renvoyé les parties devant le Juge des Loyers Commerciaux. Par arrêt du 6 novembre 2003, cette Cour a infirmé le jugement, dit que les époux Philippe Z... n'avaient pas droit au bénéfice du renouvellement du bail commercial, fixé à leur charge le paiement d'une indemnité d'occupation et ordonné leur expulsion dans les deux mois de la signification de l'arrêt ; cet arrêt a été signifié le 8 janvier 2004 ; à l'expiration du délai fixé soit le 8 mars 2004, les époux Philippe Z... ont cessé toute exploitation dans le lot 18, et également dans le local 19 alors que, pour ce dernier le bail était en cours et devait expirer le 1er septembre 2006. Ils ont également formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la Cour du 6 novembre 2003.

*** Par arrêt du 18 mai 2005, la Cour de Cassation a cassé l'arrêt du 6 novembre 2003 en toute ses dispositions. Le 30 juin 2005, la SCI a notifié aux époux Philippe Z... et à Maître Gérard B... ès qualités de liquidateur de Monsieur Philippe Z... son acquiescement au jugement du 30 juin 2005, en offrant la réintégration des lieux, indiquant qu'elle entendait poursuivre la procédure de fixation du loyer de renouvellement devant la Juridiction compétente, et qu'enfin, à défaut de prendre possession du lot 18, ils seraient réputés avoir renoncé au renouvellement du bail.

Par jugement du 28 novembre 2006, le Tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE a, constaté que Madame Brigitte Y... épouse Z... et la SELARL B... et ASSOCIES représentée par Maître Gérard B... ès qualités se désistent de leur demande tendant au remboursement des loyers trop payés, dit que la reprise des lieux est intervenue le 18 mai 2004 et que la SCI est fondée à obtenir le paiement des loyers sur les deux lots jusqu'à cette date pour un montant de 19 030,85 €, dit que Maître Gérard B... et Madame Brigitte Y... épouse Z... sont recevables et fondés à obtenir le paiement de la valeur en équivalent du fonds de commerce au titre de la restitution en équivalent suite à l'arrêt de la Cour de Cassation et à l'acquiescement au jugement du 30 juin 2005 et condamné en conséquence la SCI à leur payer les sommes de :
-759 565 € représentant la valeur du fonds de commerce,
-85 285,95 € correspondant aux bénéfices nets perdus entre la date de libération des lieux et celle de l'acquiescement au jugement.
Le Tribunal a, encore, avant dire droit sur les autres demandes tendant notamment à la restitution du dépôt de garantie et celle relative à des réparations locatives, ordonné une expertise pour vérifier l'existence d'aménagements et la possible nécessité de travaux de remise en état..

Par déclaration au Greffe en date du 26 décembre 2006, la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE a interjeté appel de cette décision. Par ordonnance du 28 février 2007, les époux Philippe Z... et la SELARL B... et ASSOCIES représentée par Maître Gérard B... ès qualités ont été autorisés à assigner leur adversaire à date fixe pour qu'il soit statué sur cet appel. Dans ses dernières conclusions déposées le 19 juin 2007, la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE demande à la Cour de :

-confirmer le jugement sur la condamnation des autres parties à lui payer la somme de 19 030,85 € TTC au titre des loyers et dire que cette somme produira intérêts depuis sa date d'exigibilité,
-infirmer le jugement :
* sur sa demande quant au rétablissement du mur et aux réparations locatives et condamner les intimés de ce chef au paiement d'une somme de 31 000 €, subsidiairement retenir celle de 5 172 € HT correspondant à un devis que les intimés avaient fait établir, encore plus subsidiairement confirmer la disposition du jugement déféré relative à l'instauration d'une mesure d'expertise sur ce point,
* sur l'allocation d'une indemnité correspondant à la valeur du fonds de commerce, déclarer l'action irrecevable faute d'intérêt à agir compte-tenu des instances en responsabilité engagées par les consorts Z... contre le Notaire et l'Agent Immobilier, subsidiairement, surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de ces autres actions, plus subsidiairement rejeter la demande en considérant que les époux Philippe Z... ont volontairement exécuté l'arrêt de cette Cour, que pour sa part, elle s'est acquittée de son obligation de restitution des lieux en nature ce dès son acquiescement au jugement le 30 juin 2005 et rejeter toute demande à ce titre, encore plus subsidiairement dire que la valeur de ce fonds ne saurait être supérieure à 241 000 €, le cas échéant encore ordonner une expertise de ce chef,
* sur la demande d'allocation d'une indemnité pour perte de bénéfices d'exploitation, rejeter cette réclamation et subsidiairement limiter cette indemnité à 10 000 €,
* quant aux demandes d'intérêts et d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, rejeter toutes réclamations de ces chefs.
Elle fait valoir notamment, à l'appui de sa position et de ses demandes, que :
-si les époux Philippe Z... avaient arrêté l'exploitation en mars 2004, ils n'ont effectivement pas restitué les locaux avant le 18 mai 2004 ainsi que l'a justement retenu le premier juge,
-les époux Philippe Z... ont volontairement exécuté l'arrêt de cette Cour et que les conséquence sont de leur seul fait alors que, pour sa part, elle a offert, dès le 30 juin 2005 la restitution des locaux qui n'avaient pas été reloués,
-elle n'a, pour sa part, commis aucune faute parce qu'elle a exercé des voies de droit selon le droit positif de l'époque et ne saurait en conséquence se voir condamner à payer des dommages-intérêts,
-Madame Brigitte Y... épouse Z... pouvait parfaitement, nonobstant la liquidation judiciaire de son mari, poursuivre l'exploitation du fonds,
-l'arrêt rendu le 21 janvier 2005 dans l'instance dirigée contre l'agent immobilier A...ne lui est pas opposable quant à l'estimation de la valeur du fonds et cette valeur a été, en toute hypothèse, surestimée dans le jugement déféré.
Par conclusions du 29 décembre 2006, elle a indiqué se désister de son appel à l'égard de Monsieur Philippe Z... uniquement.

Les époux Philippe Z... et la SELARL B... et ASSOCIES représentée par Maître Gérard B... ès qualités, dans leurs dernières conclusions déposées le 4 juin 2007, demandent la confirmation du jugement déféré en ce qui concerne l'allocation d'une somme de 759 565 € au titre de la valeur du fonds en équivalent de la restitution de ce dernier ; ils demandent encore, y ajoutant, qu'il soit dit que les sommes allouées au titre de la valeur du fonds et de la perte de bénéfices porteront intérêts à compter du 30 juin 2005 et que ces intérêts seront capitalisés.

Mais ils sollicitent que, statuant sur leur appel incident, la Cour réforme le jugement en ses dispositions suivantes et fasse droit à leurs demandes tendant à voir :
-pour les loyers, rejeter la demande de la SCI et, au plus, dire qu'ils ne doivent les loyers jusqu'au 18 mai 2004 que pour le lot no 19 et pas pour le lot 18, en soutenant que le constat d'huissier révèle que les locaux étaient libres d'occupation à la date du 9 mars 2004,
-pour les travaux locatifs, dire qu'ils sont inexistants et qu'il n'y a pas lieu à expertise sur ce point,
-pour les pertes de bénéfices, condamner la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE à leur payer la somme de 131 233 € calculée sur les seize mois séparant le 8 mars 2004 et le 30 juin 2005 date de l'acquiescement au jugement, et sur les bénéfices de la dernière année parce que ceux-ci étaient en augmentation constante.
Ils demandent enfin condamnation de la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE à leur payer la somme de 10 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par conclusions du 22 juin 2007, Maître Martine C..., Notaire, est intervenue volontairement à l'instance en demandant qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle s'associe à l'argumentation développée par les intimés, et qu'elle appuie leurs prétentions devant la présente Cour ; elle indique y avoir intérêt dans la mesure où, si cette action aboutit, le préjudice allégué dans l'action en responsabilité engagée contre elle serait inexistant.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le désistement
Il y a lieu de constater le désistement, par la SCI, de son appel dirigé contre Monsieur Z... ; en application des articles 405 et 399 du Nouveau Code de Procédure Civile, la SCI doit supporter les frais de l'instance.

Sur l'intervention volontaire de Madame Martine C...

Cette intervention ne peut qu'être accessoire au sens de l'article 330 du Nouveau Code de Procédure Civile dès lors que cette personne n'élève aucune prétention à l'égard de la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE, mais vise seulement à appuyer les prétentions des intimés. Au surplus, son auteur se borne à formuler qu'il appuie ces prétentions, mais sans développer aucun moyen ni argument visant à les conforter, si ce n'est de contester avoir commis la moindre faute dans la mission d'authentification qui lui avait été confiée alors que tel n'est absolument pas l'objet du présent litige. Dès lors il suffira de constater cette intervention, la formule de " donner acte " ne présentant aucun intérêt en l'espèce et, partant, les dépens de cette intervention volontaire seront laissés à la charge de son auteur.

Sur le fond du litige

# sur la valeur du fonds en équivalent de la restitution
* sur la recevabilité
C'est à tort que la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE soutient que les consorts Z... n'ont pas d'intérêt à agir en l'espèce en se fondant sur l'existence des deux actions parallèles en responsabilité dirigées respectivement contre le Notaire C... et l'Agent immobilier A...intervenus dans la rédaction de l'acte de cession du fonds de commerce, dès lors que, ainsi que la SCI le relève elle-même, d'une part ces actions reposent sur une possible responsabilité ayant donné lieu à un préjudice ce qui n'est pas en cause en l'espèce, d'autre part elles n'ont donné lieu, en l'état, à aucune décision de justice définitive. Le moyen ainsi soulevé ne peut donc qu'être écarté.

* sur le fond

Les consorts Z... fondent leur réclamation sur les dispositions de l'article 19 de la loi du 3 juillet 1967 relative à la Cour de Cassation aux termes duquel " Sauf dispositions contraires, le pourvoi en cassation en matière civile n'empêche pas l'exécution de la décision attaquée. Cette exécution ne pourra donner lieu qu'à restitution ; elle ne pourra en aucun cas être imputée à faute ". Il résulte de ce texte que, en cas d'exécution d'un arrêt d'appel exécutoire de plein droit ce qui est bien le cas en l'espèce, le pourvoi en cassation n'étant pas suspensif, si l'arrêt est par la suite cassé, celui qui l'a exécuté a le droit d'être rétabli dans la situation dans laquelle il se trouverait s'il n'avait pas exécuté. Ainsi, le droit dont il est question ne repose en rien sur une faute que ce soit de celui qui a exécuté, ou encore de celui qui était bénéficiaire de la décision exécutoire et qui l'a fait signifier ; dès lors, les arguments de la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE selon laquelle les époux Philippe Z... ont volontairement exécuté l'arrêt du 6 novembre 2003 sont totalement inopérants, cette exécution s'étant imposée à eux, et l'absence de toute faute de sa part, pour n'avoir engagé aucune voie d'exécution compte-tenu du pourvoi, l'est tout autant.
La SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE prétend s'être acquittée de son obligation de restitution en ayant, quelques jours après l'arrêt de la Cour de Cassation, acquiescé au jugement du Tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE et en conséquence offert aux preneurs la réintégration dans les lieux lesquels n'avaient pas été reloués. En ce faisant elle omet, à tort, de prendre en considération le fait que le fonds de commerce exploité par les époux Philippe Z..., qu'ils avaient eux-mêmes acquis de la SARL LA LOCOMOTIVE, ne comportait pas seulement le droit au bail mais aussi d'autres éléments incorporels tels que la clientèle. Or, en étant contraint de cesser l'exploitation, dans les lieux loués, de leur activité commerciale au plus tard le 8 mars 2004 aux termes du délai fixé par la Cour d'Appel de céans dans l'arrêt du 6 novembre 2003, les époux Philippe Z... ont, de fait, dû délaisser sans aucune contrepartie la clientèle qui y était attachée ; il est évident que l'offre de réintégration de la bailleresse formulée plus d'un an après soit le 30 juin 2005, après l'intervention de l'arrêt de la Cour de Cassation, n'a pas fait renaître, de facto, la clientèle disparue et que, dès lors, l'offre de réintégration ne constituait pas, pour les époux Philippe Z..., une remise dans la situation dans laquelle ils se seraient trouvés s'ils n'avaient pas exécuté. En conséquence une restitution en nature était devenue totalement impossible, et c'est à bon droit que les preneurs ont demandé au Premier juge de leur allouer son équivalent en deniers, et que le Tribunal de BÉTHUNE y a fait droit en accordant à ce titre, notamment, la somme qu'ils estimé correspondre à la valeur du fonds de commerce.
Sur la fixation de cette valeur, les éléments du dossier apparaissent, en l'état, insuffisants puisqu'ils reposent pour l'essentiel sur deux attestations succinctes de l'expert-comptable des époux Philippe Z.... Il y donc lieu, avant dire droit sur ce point, d'ordonner une expertise selon les modalités qui seront précisées au dispositif du présent arrêt.

# sur la perte de bénéfices

L'allocation d'une somme correspondant à la valeur du fonds comme équivalent de la restitution, n'est pas suffisante pour remettre les consorts Z... dans le même et semblable état ou étaient avant l'arrêt de cette Cour d'Appel finalement cassé ; en effet, s'ils n'avaient pas exécuté cet arrêt, ils auraient détenu une chance de percevoir, de l'exploitation de leur fonds de commerce, des revenus de nature à leur procurer un bénéfice. L'expert sera donc chargé de recueillir les informations nécessaires à la fixation de cet équivalent à la jouissance des locaux dont les époux Philippe Z... ont été privés entre l'exécution de la décision et l'offre de réintégration.

# sur les travaux de remise en état

Il ressort d'un procès-verbal de constat d'huissier que les époux Philippe Z... ont fait réaliser des travaux d'aménagement des locaux, dont la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE est fondée à demander la remise en état comme corollaire de la restitution. Les époux Philippe Z... sont mal fondés à opposer, à ce titre, le moyen selon lequel la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE serait irrecevable en cette demande parce qu'elle a obtenu l'admission de sa créance à ce titre au passif de la liquidation judiciaire de Monsieur Philippe Z... ; en effet, sauf à ce que la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE ait déjà obtenu paiement effectif de la somme admise à ce titre, ce qui n'est pas allégué et qui paraît peu probable parce qu'une telle créance ne bénéficie d'aucun privilège, le créancier conserve le droit d'agir contre toute autre personne qui peut être tenue de la même somme et qui peut y être condamnée in solidum-ce serait d'ailleurs le cas si Monsieur Philippe Z... ne faisait pas l'objet d'une procédure collective et que la SCI ait poursuivi son action contre lui dans le cadre de la présente instance-.
C'est donc à bon droit que le premier juge a ordonné une expertise sur ce point, et il y a lieu de confirmer la disposition du jugement déféré de ce chef.
# sur la demande de rétablissement d'un mur
La SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE demande l'application de la clause 26 du bail en date du 23 août 1994 relative au local 19, prévoyant que " le preneur est autorisé à abattre le mure séparant du local no 18 et sera tenu de réimplanter le mur en cas de cession de l'un des deux locaux no 18 ou 19. " Or, la situation actuelle, dans laquelle le fonds de commerce relatif au local 18 a disparu par la dépossession, au détriment du preneur, de la jouissance des locaux en exécution d'une décision de justice, ne peut en rien être assimilée à une cession qui suppose un transfert de propriété à titre onéreux.
C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté la demande à ce titre.

# sur la demande au titre des loyers

Il ressort d'un procès-verbal de constat d'huissier en date du 9 mars 2004 (pièce no 9 de la SCI) qu'à cette date les époux Philippe Z... avaient cessé toute exploitation dans le local no 18. Pour autant, cela ne constitue pas la preuve que les locaux étaient effectivement restitués, à cette même date, au propriétaire, l'huissier indiquant expressément, au milieu de l page 2 de son constat, que ses constatations ont été opérées depuis la galerie marchande à travers les vitrines de l'établissement. Les époux Philippe Z... ne fournissent, par ailleurs, aucun autre élément de preuve de ce que les clés aient été restituées à la SCI avant le 18 mai 2004, date à laquelle elle reconnaît avoir été mise en possession ; c'est donc cette dernière date qui doit être retenue comme étant celle de la restitution effective des locaux. C'est en conséquence à bon droit que le premier juge a dit que la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE est fondée à obtenir les loyers sur les lots 18 et 19 jusqu'à la date du 18 mai 2004 pour un montant de 19 030,85 €. La SCI demande, sur ce point, la confirmation du " jugement entrepris en ce qu'il a condamné les intimés au paiement de la somme de 19 030,85 € TTC " ; la disposition du jugement déféré relative à ce point ne comportant aucune condamnation, et, selon le contenu des conclusions tel que rappelé dans le jugement, une telle demande n'ayant pas été formée devant le Premier Juge, il y a lieu d'inviter les parties, sur ce point, à s'expliquer notamment au regard des dispositions de l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Dans l'attente, toutes les autres demandes des parties seront réservées, ainsi que les dépens.
PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

CONSTATE l'intervention volontaire de Madame Martine C..., Notaire. Rejette sa demande de " donner acte ". Laisse à la charge de cette partie les frais et dépens de son intervention.

CONSTATE le désistement, par la SCI LA ROTONDE, de son appel dirigé contre Monsieur Philippe Z... ; laisse à la charge de la SCI LA ROTONDE les dépens de cet appel.

***

# sur la valeur du fonds de commerce en équivalent de la restitution :

* CONFIRME le jugement en ce qu'il a dit que Maître B... et Madame Brigitte Z... sont recevables et fondés à obtenir paiement de la valeur en équivalent du fonds de commerce au titre de la restitution à la suite de l'arrêt de la Cour de Cassation du 18 mai 2005.
* AVANT DIRE DROIT sur la somme à allouer à ce titre :
EXPERTISE confiée à Madame D... à CAMBRAI MISSION : rechercher les éléments de nature à permettre de fixer la somme à revenir aux consorts Z... en équivalent de la restitution des locaux, soit la valeur du fonds de commerce, ainsi que la perte d'une chance de percevoir des bénéfices de ce fonds entre le 8 mars 2004 et le 30 juin 2005, au regard de sa rentabilité moyenne et compte-tenu d'une part de ce qu'a été la situation financière effective des époux Philippe Z... durant ce laps de temps, d'autre part du fait qu'il s'agissait d'une exploitation sous forme individuelle. CONSIGNATION : 2 500 € par Madame Brigitte Y... épouse Z... et la SELARL B... et ASSOCIES ès qualités avant le 15 février 2008. Rapport avant le 30 juin 2008.

# sur les demandes relatives aux travaux

CONFIRME le jugement en ce qu'il a considéré que la SCI LA ROTONDE n'est pas fondée en sa demande de rétablissement du mur entre les lots 18 et 19 et en ce qu'il a ordonné une expertise, avant dire droit sur les autres demandes à ce titre et sur la demande de restitution du dépôt de garantie. Dans l'hypothèse où la consignation n'aurait pas été opérée par suite de l'appel, dit qu'elle devra intervenir, à la charge de la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE, avant le 15 février 2008.

# sur la demande relative aux loyers

* CONFIRME le jugement en ce qu'il a dit que la SCI LA ROTONDE DE BÉTHUNE est fondée à obtenir les loyers sur les lots no 18 et 19 jusqu'au 18 mai 2004 pour un montant de 19 030,85 €
* AVANT DIRE DROIT sur le surplus de la demande à ce titre :
PRONONCE la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture.
INVITE les parties à s'expliquer sur les dispositions de l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile.

RÉSERVE, dans l'attente, toutes les autres demandes des parties, ainsi que les dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Ct0039
Numéro d'arrêt : 06/07371
Date de la décision : 18/12/2006

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Béthune, 28 novembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2006-12-18;06.07371 ?
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