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03/03/2016 | FRANCE | N°14/07404

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 3, 03 mars 2016, 14/07404


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 03/03/2016

***

N° MINUTE :

N° RG : 14/07404

Jugement (N° 14/02842)

rendu le 28 Novembre 2014

par le Juge de l'exécution de BOULOGNE SUR MER

REF : PC/VC

APPELANTS



Monsieur [T] [Q]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 1] - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 1]

Représenté par Me Philippe TALLEUX, avocat au barreau de LILLE



Madam

e [C] [D]

née le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 2] - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 1]

Représentée par Me Philippe TALLEUX, avocat au barreau de LILLE



INTIM...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 03/03/2016

***

N° MINUTE :

N° RG : 14/07404

Jugement (N° 14/02842)

rendu le 28 Novembre 2014

par le Juge de l'exécution de BOULOGNE SUR MER

REF : PC/VC

APPELANTS

Monsieur [T] [Q]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 1] - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 1]

Représenté par Me Philippe TALLEUX, avocat au barreau de LILLE

Madame [C] [D]

née le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 2] - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 1]

Représentée par Me Philippe TALLEUX, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS

Monsieur [J] [D]

né le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 2] - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 2]

Représenté par Me Anne-Bénédicte ROBERT, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

Madame [R] [T] épouse [D]

née le [Date naissance 4] 1964 à [Localité 3] (ALLEMAGNE) - de nationalité Française

demeurant : [Adresse 2]

Représentée par Me Anne-Bénédicte ROBERT, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DÉBATS à l'audience publique du 21 Janvier 2016 tenue par Pierre CHARBONNIER magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Patricia PAUCHET

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre CHARBONNIER, Président de chambre

Catherine CONVAIN, Conseiller

Benoît PETY, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 03 Mars 2016 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Patricia PAUCHET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

LA COUR ;

Attendu que [T] [Q] et [C] [D] ont interjeté appel d'un jugement rendu le 28 novembre 2014 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de BOULOGNE SUR MER, lequel a liquidé à la somme de 188.800 € pour la période du 10 mars 2004 au 10 juillet 2014 l'astreinte de 50 € par jour de retard prononcée par un précédent jugement du même siège du 6 janvier 2004, cette mesure assortissant l'injonction faite aux consorts [Q]/[D] de se rendre en l'étude de Maîtres [S] et [N], notaires à [Localité 4], pour y régulariser l'acte de cession à leur profit des parts de la société civile immobilière (S.C.I.) NAREPARE et préalablement y déposer le solde du prix des titres cédés, de 7.622,45 € ; que la décision déférée a ordonné en outre une nouvelle astreinte provisoire de 50 € par jour de retard, et condamné les consorts [Q]/[D] à payer aux époux [D]/[T] une somme de 600 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu qu'à l'appui de leur appel, les consorts [Q]/[D] se prévalent de l'irrecevabilité de la demande adverse, faute pour les époux [D]/[T] d'avoir poursuivi l'exécution du jugement portant obligation, du 6 janvier 2004, dans le délai de dix ans imparti à cet effet par l'article L.111-4 du code des procédures civiles d'exécution ; qu'ils observent que la mise à exécution dudit jugement plus de dix ans après la signification de cette décision effectuée les 6 et 9 février 2004, révèle en tout état de cause la mauvaise foi des époux [D]/[T] dont le comportement constitue une cause étrangère au sens de l'article L.131-4 du code des procédures civiles d'exécution, d'où provient l'inexécution de l'obligation imposée par l'astreinte ; que le premier juge, en s'abstenant de caractériser la mauvaise foi et la résistance abusive des débiteurs, non seulement n'a pas motivé sa décision mais encore a liquidé la pénalité à un montant disproportionné aux conséquences de l'inexécution de l'obligation ; que subsidiairement, les consorts [Q]/[D] font valoir qu'à tout le moins l'astreinte doit être supprimée à l'égard de [T] [Q] ; que, de fait, le jugement du 6 janvier 2004, comme aussi le jugement dont appel, n'a pas été signifié à la résidence de celui-ci, [Adresse 3], mais l'a été par la voie d'un procès-verbal de recherches infructueuses à l'adresse d'[C] [D], [Adresse 4], où il avait cessé d'habiter ; que l'absence d'une signification régulière a présenté pour [T] [Q], tenu à dessein dans l'ignorance de la décision le concernant, les caractères d'une cause étrangère à laquelle l'inexécution de l'obligation assortie d'astreinte est imputable ; que la bonne foi de celui-ci est d'autant plus manifeste qu'il a, aussitôt après avoir eu connaissance du jugement ayant prononcé l'astreinte, réglé dès le mois de février 2015 le solde du prix des parts de société litigieuses en même temps qu'il prenait contact sans succès avec l'étude de Maîtres [S] et [N] en vue de réitérer le contrat cession des titres par acte authentique ; qu'au cas où l'astreinte devrait être cependant liquidée, son montant ne saurait excéder pour [T] [Q] à la somme « symbolique » d'1 € ; que les consorts [Q]/ [D] demandent la condamnation des époux [D]/[T] à leur payer une somme de 3.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que les époux [D]/[T] concluent à la confirmation du jugement entrepris et à l'allocation, à la charge des consorts [Q]/[D], d'une somme de 5.000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement du tribunal de grande instance de BOULOGNE SUR MER du 6 janvier 2004 a été signifié à [C] [D] par acte du 6 février 2004 remis à sa personne et à [T] [Q] le 9 février 2004 suivant un procès-verbal de recherches infructueuses dressé conformément à l'article 659 du code de procédure civile ; que les consorts [Q]/[D], s'ils estiment que les époux [D]/[T], dans une intention malicieuse, se sont délibérément abstenus d'agir avant de les assigner le 2 octobre 2014 en liquidation de l'astreinte, ne contestent néanmoins pas que la décision portant obligation leur ait été valablement notifiée ;

Attendu, sur la recevabilité de l'action des époux [D]/[T], que le délai de prescription extinctive, de dix ans, posé par l'article 3-1 de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 n'est applicable à l'exécution des titres exécutoires que depuis l'entrée en vigueur de ce texte, le 19 juin 2008 ; qu'il s'est alors substitué au délai de trente ans édicté par l'ancien article 2262 du code civil, auquel étaient précédemment soumises les actions en recouvrement des condamnations résultant d'une décision de justice exécutoire ; que le nouveau délai décennal, compris dans les limites initiales du délai trentenaire, devait ainsi venir à expiration le 19 juin 2018 ; que les consorts [Q]/[D] ne peuvent donc valablement prétendre que les droits constitués au profit des époux [D]/[T] par le jugement du 6 février 2004 se seraient trouvés déjà prescrits à l'époque où ces derniers, le 2 octobre 2014, les ont assignés afin de voir liquider l'astreinte ordonnée par cette décision ;

Attendu qu'aux termes de l'article L.131-4 du code des procédures civiles d'exécution, le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter ; que l'astreinte provisoire ou définitive est supprimée s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou en partie, d'une cause étrangère ;

Attendu que, quand même l'assignation des 9 et 13 octobre 2003 contenant la demande en fixation de l'astreinte n'a pas été signifiée à la personne de [T] [Q], non plus que le jugement du 6 février 2004 qui prononce la pénalité, toutefois celui-ci n'établit pas qu'il aurait ignoré l'existence de cette décision avant que le jugement dont appel, réputé contradictoire, lui ait été notifié ; qu'il n'est pas discuté qu'[C] [D] et lui avaient formé contre le jugement du 6 février 2004 un appel qui a été ultérieurement radié du rôle par une ordonnance du magistrat de cette Cour chargé de la mise en état du 19 octobre 2004 ; que conformément à l'article 416 du code de procédure civile, [T] [Q] ne peut utilement, sur ses seules allégations ou celles d'[C] [D], codébitrice de l'astreinte liquidée, prétendre que l'appel ultérieurement radié aurait été engagé puis supprimé du rang des affaires en cours sans qu'il en eût donné mandat à l'avoué qui le représentait devant la Cour ;

Attendu que l'inaction pendant dix ans des créanciers de l'obligation édictée à peine d'astreinte ne constituait pas pour les débiteurs de celle-ci une circonstance irrésistible qui les aurait empêchés de s'exécuter ;

Attendu que, par suite, les consorts [Q]/[D], faute de justifier que le retard dans l'exécution de l'injonction qui leur avait été adressée par le juge de l'exécution provienne d'une cause étrangère au sens de l'article L.131-4 du code des procédures civiles d'exécution, ne peuvent prétendre à la suppression de l'astreinte ;

Attendu que le juge qui liquide l'astreinte n'a pas à tenir compte de la disproportion existant entre la somme réclamée à ce titre et l'enjeu du litige ;

Attendu, toutefois, que le jugement portant obligation, du 6 janvier 2004, s'il enjoignait aux consorts [Q]/[D] « de se présenter dans le mois qui suivra la signification du jugement en l'étude de Maîtres [S] et [N], notaires à [Localité 4] (62) pour y régulariser l'acte de cession de parts sociales de la S.C.I. NAREPARE et préalablement y déposer la somme de 7.622,45 € », n'apportait aucune précision sur la manière dont les époux [D]/[T] devraient eux-mêmes concourir au résultat des diligences imposées à leurs cocontractants, qui exigeaient, pour leur réalisation, qu'ils participent à des démarches concertées ; que les consorts [Q]/[D] produisent une lettre adressée à leur avocat le 3 septembre 2015 par Maître [S] qui y confirme « n'avoir jamais reçu le jugement du 6 janvier 2004 par suite de la nomination de l'étude pour régulariser le projet d'acte de cession, que ce soit de la part du tribunal ou de la partie adverse » ; que l'inertie prolongée des époux [D]/[T] dans un contexte personnel marqué par l'existence de liens de famille entre [J] et [C] [D], frère et s'ur, si elle n'exonérait pas les débiteurs des obligations qui leur incombaient vis-à-vis de ces derniers, était cependant de nature à créer une incertitude sur l'intention actuelle de leurs créanciers de poursuivre sur eux l'exercice de leurs droits ; qu'il ressort au demeurant des pièces du dossier qu'après avoir formé appel du jugement déféré, les consorts [Q]/[D] sont entrés en relation avec la société civile professionnelle (S.C.P.) [N] et associés dès le mois de janvier 2015 ; que, quoiqu'ayant reçu de leur part un virement de 7.622,45 € le 10 février 2015 correspondant au solde du prix des titres cédés, ce notaire, en l'absence d'une intervention des créanciers, n'avait toujours pas, à la date du 1er septembre 2015, donné suite à la demande de réitération de l'acte de cession dont les consorts [Q]/[D] l'avaient saisi au mois de janvier 2015 ;

Attendu que les parties ne remettent pas en cause la durée de la période d'effet de l'astreinte fixée par le premier juge entre la date du 10 mars 2004 et celle du 10 juillet 2014 ;

Attendu que compte tenu du comportement des consorts [Q]/[D] et des difficultés qu'ils ont rencontrées pour satisfaire aux obligations assorties de l'astreinte, la liquidation de celle-ci doit être fixée à la somme de 1.000 € ;

Attendu que, du moment que les consorts [Q]/[D] ont déféré à l'injonction prononcée à peine d'astreinte, la demande des époux [D]/[T] tendant à voir ordonner pour l'avenir une nouvelle pénalité s'avère sans objet ;

Attendu qu'il n'apparaît pas équitable de mettre à la charge des consorts [Q]/[D] les frais exposés par les époux [D]/[T] et non compris dans les dépens ;

PAR CES MOTIFS ;

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Réformant le jugement déféré et prononçant de nouveau ;

Condamne [T] [Q] et [C] [D] à verser à [J] [D] et [R] [T] la somme de 1.000 € représentant la liquidation de l'astreinte prononcée contre eux par le jugement du tribunal de grande instance de BOULOGNE SUR MER du 6 janvier 2004 ;

Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une nouvelle astreinte ;

Déboute les époux [D]/[T], comme non fondés, de leur demande formée contre les consorts [Q]/[D] par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne les consorts [Q]/[D] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

P. PAUCHETP. CHARBONNIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 3
Numéro d'arrêt : 14/07404
Date de la décision : 03/03/2016

Références :

Cour d'appel de Douai 83, arrêt n°14/07404 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-03;14.07404 ?
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