La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/10/2008 | FRANCE | N°06/01023

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 08 octobre 2008, 06/01023


RG N° 07/02069

COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU MERCREDI 08 OCTOBRE 2008

Appel d'une décision (N° RG 06/01023)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 11 mai 2007
suivant déclaration d'appel du 31 Mai 2007

APPELANTE :

LA SAS CATERPILLAR FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
40, Avenue Léon Blum
BP 55
38041 GRENOBLE CEDEX 9

Représentée par Madame X... (Responsable Juridique) assistée par Me Michel BENICHOU (a

vocat au barreau de GRENOBLE)

INTIME :

Monsieur Pascal Z...


...

44800 ST HERBLAIN

Représenté par Me Flor...

RG N° 07/02069

COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU MERCREDI 08 OCTOBRE 2008

Appel d'une décision (N° RG 06/01023)
rendue par le Conseil de Prud'hommes de GRENOBLE
en date du 11 mai 2007
suivant déclaration d'appel du 31 Mai 2007

APPELANTE :

LA SAS CATERPILLAR FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
40, Avenue Léon Blum
BP 55
38041 GRENOBLE CEDEX 9

Représentée par Madame X... (Responsable Juridique) assistée par Me Michel BENICHOU (avocat au barreau de GRENOBLE)

INTIME :

Monsieur Pascal Z...

...

44800 ST HERBLAIN

Représenté par Me Florence NERI (avocat au barreau de GRENOBLE) substituée par Me PHILIP (avocat au barreau de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,
Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,
Madame Hélène COMBES, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Simone VERDAN, Greffier.

DEBATS :

A l'audience publique du 03 Septembre 2008,
Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie (s).

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 08 Octobre 2008.

L'arrêt a été rendu le 08 Octobre 2008.

Par arrêt de cette cour en date du 18 juin 2008, la disjonction de la demande de M. Pascal Z... relative au paiement de la contrepartie du temps d'habillage et de déshabillage pendant la période non couverte par la prescription de son activité au bénéfice de la société Caterpillar a été prononcée, la procédure sur ce point ayant été renvoyée à l'audience du 3 septembre 2008 au cours de laquelle l'ensemble des demandes relatives au temps d'habillage et de déshabillage faites par les salariés de la société Caterpillar seront examinées.

demandes et moyens des parties

La société Caterpillar, appelante, demande à la cour de réformer le jugement rendu le 11 mai 2007, de débouter M. Z... de sa demande au titre du temps d'habillage / déshabillage.

La société Caterpillar expose en ses conclusions régulièrement déposées, visées et développées oralement à l'audience que :
1) les décisions antérieures n'ont pas autorité de la chose jugée,
2) il n'y a pas d'obligation de porter une tenue de travail ni de mettre la tenue de travail dans l'entreprise,
3) le temps d'habillage / déshabillage se situe à 6 minutes ainsi qu'un huissier mandaté par la société l'a constaté.

M. Pascal Z..., intimé, demande à la cour de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Grenoble le 11 mai 2007 en ce qu'il lui a alloué la somme de 4 113, 60 euros au titre de la contrepartie du temps d'habillage et de déshabillage, de condamner la société Caterpillar à lui payer la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer les dépens.

M. Z... expose en des conclusions régulièrement déposées, visées et développées oralement à l'audience que :

1) il faisait partie du personnel d'atelier en tant que coordinateur de production et à ce titre était contraint de porter un bleu de travail et des chaussures de sécurité même si le règlement intérieur ne rend plus obligatoire le port de ces équipements,
1-2) tant la réglementation que les nécessités de la sécurité imposent ce port en raison du caractère salissant des travaux effectués,
2) c'est bien sur les lieux de travail qu'ont lieu les opérations d'habillage et de déshabillage, des vestiaires nominatifs étant mis à la disposition des salariés par l'employeur,
3) l'évaluation du temps d'habillage et de déshabillage résultant du jugement rendu le 17 juin 2002 et confirmé en appel et en cassation est définitive et rien ne justifie qu'elle soit réduite d'autant que le constat d'huissier n'a pas été établi dans des conditions contradictoires.

MOTIFS DE LA DECISION :

Attendu que pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;

Attendu que suite au rapport des conseillers du Conseil de Prud'hommes produit dans le cadre de cette procédure, il est établi que lorsqu'il arrive au travail, le salarié qui pointe dans le cadre d'un contrôle lié à la sécurité incendie, se rend ensuite aux vestiaires où il se change, puis se rend sur son poste de travail à l'horaire de début de prise de fonction ; que la grande majorité du personnel porte une tenue de travail fournie par la société ; que pour certains postes spécifiques (soudure) des équipements de protection sont mis à la disposition du salarié sur le poste de travail ; que « si aucune réprimande n'est faite si un salarié n'a pas revêtu une tenue de travail », il apparaît qu'il « est très rare qu'un salarié ne mette pas une tenue de travail » ; que des casiers réglementaires sont à la disposition des salariés ; que ces éléments ne sont pas sérieusement discutés par l'employeur ;

Attendu que les dispositions de l'article R 233-1 du Code du travail prévoient « que le chef d'établissement doit mettre en tant que de besoin les équipements de protection individuelle appropriés et, lorsque le caractère particulièrement insalubre ou salissant des travaux l'exige, les vêtements de travail appropriés à la disposition des travailleurs et veiller à leur utilisation effective. Les équipements de protection individuelle et les vêtements de travail mis à la disposition des travailleurs conformément aux dispositions du présent titre ne constituent pas des avantages en nature au sens de l'article L 233-13 » ;

Attendu que le tableau n° 1 de l'arrêté du 23 juillet 1947 recensant les travaux salissants y inclut les travaux de métallurgie ainsi que les travaux d'usinage comportant un contact avec les fluides de coupe ;

Attendu que l'article 2 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 dispose que « lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions législatives ou réglementaire, par des clauses conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail, et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet de contreparties soit sous forme de repos, soit financière, devant être déterminées par convention ou accord collectif ou à défaut par le contrat de travail. » ;

Attendu que la convention collective des mensuels des industries de métaux de l'Isère stipule dans le cadre de l'article 52 consacré à l'hygiène, la sécurité et les conditions de travail que « les dispositifs et effets de protection nécessaires à l'exécution des travaux dangereux ou insalubres sont fournis par l'employeur ainsi que les effets de protection nécessaires à l'exécution de certains travaux exposant les mensuels... ou leurs vêtements à une détérioration prématurée » ; que l'article 2 du règlement intérieur de la société CATERPILLAR stipule jusqu'en 2006 que le personnel doit se trouver à son poste, en tenue de travail, aux heures fixées pour le début et pour la fin de celui-ci » ; que les consignes de la plupart des postes de travail exigent le port de chaussures de sécurité ;

Attendu que, s'agissant des protections spécifiques à certains postes de travail (lunettes de protection ou tabliers), il n'est pas contesté que le temps nécessaire à leur mise en place est décompté comme un temps de travail effectif ;

Attendu que si l'on peut admettre que pour certaines professions offrant des emplois non salissants dans lesquelles il est imposé aux salariés de porter une tenue spécifique, il soit envisageable de laisser ceux-ci libres de revêtir ces uniformes à leur domicile, cette possibilité doit être écartée lorsque l'emploi exercé est salissant et rend nécessaire un changement de vêtements entre la période de travail et le retour à la vie civile ;

Attendu que les salariés des ateliers de production procèdent à un changement général de tenue et notamment à la mise des chaussures de sécurité, obligatoires pour tous, qui se fait dans les vestiaires, tout comme le changement des vêtements de ville pour passer en tenue de travail et mettre les pantalons dont les rapporteurs ont noté que pratiquement tous les salariés les portaient ;

Attendu que pour tenter de se soustraire à la prise en compte du temps passé par les salariés affectés à des travaux relevant de la métallurgie, la société CATERPILLAR a modifié son règlement intérieur (article 3), n'exigeant plus de ses salariés le port d'une tenue de travail, ce port devenant simplement recommandé jusqu'en 2006, puis même plus recommandé ensuite du nouveau règlement intérieur ;

Attendu toutefois que le règlement intérieur spécifiait en son article 2, jusqu'à sa nouvelle mouture datée du 16 août 2006, que le salarié doit se trouver à l'heure à son poste de travail dans l'atelier, en tenue de travail ; que les modifications de ce règlement intérieur ne peuvent avoir pour seul objectif d'échapper à des dispositions réglementaires ou conventionnelles destinées à assurer la protection des salariés et leur santé ;

Attendu qu'il apparaît incontestable que le port de vêtements de travail spécifique s'impose dans les ateliers en exécution de la réglementation applicable tant pour des raisons de sécurité qu'en raison du caractère salissant des travaux effectués ; qu'il faut que le temps passé par les salariés pour s'habiller et se déshabiller soit compensé selon les modalités prévues par l'article L 212-4, alinéa 3 du Code du travail, dès lors que cette protection est exigée par la réglementation relative aux travaux salissants et par les règles de sécurité propres à chaque poste de travail, et que le caractère salissant de ce travail interdit aux salariés de rentrer chez eux après le travail dans des tenues sales, ce qui les contraint à procéder aux opérations d'habillage / déshabillage dans l'entreprise ;

Attendu que le nombre de jours concernés dans le cadre de la prescription n'est pas discuté ;

Attendu que la société Caterpillar produit un constat d'huissier qu'elle a fait établir non contradictoirement, alors qu'il eut été fort simple de rendre ce constat contradictoire en y associant les parties ou leurs représentants ; que si dans le cadre des procédures de référé, il peut exister une contestation sur la durée effective du temps d'habillage / déshabillage au-delà du temps constaté par huissier, il n'apparaît pas dans ce jugement au fond qu'un temps inférieur à celui alloué aux salariés ayant précédemment agi à l'encontre de la société Caterpillar, jugement confirmé par la cour d'appel de Grenoble puis par la Cour de cassation, doive être retenu ; que la condamnation au paiement de la somme de 4 113, 60 euros sera confirmée ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris pour ses dispositions restant en litige,

Condamne la société Caterpillar à payer à M. Z... la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en cause d'appel,

Déboute la société Caterpillar de sa demande faite en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Condamne la société Caterpillar aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement ce jour par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

Signé par Monsieur DELPEUCH, Président, et par Madame VERDAN, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Numéro d'arrêt : 06/01023
Date de la décision : 08/10/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Grenoble


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-10-08;06.01023 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award