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29/04/2008 | FRANCE | N°06/04359

France | France, Cour d'appel de Lyon, Ct0029, 29 avril 2008, 06/04359


R. G : 06 / 04359
décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE Au fond 2004 / 712 du 20 avril 2006

COUR D' APPEL DE LYON
8ème Chambre Civile *

ARRÊT du 29 Avril 2008
APPELANTE :
SARL GEX IMMOBILIER représentée par ses dirigeants légaux Le Tetras Avenue de la Gare 01170 GEX

représentée par la SCP BRONDEL- TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me FLEURY- ROBERT, avocat

INTIMES :
Monsieur Pierre Y... ......

représenté par la SCP LAFFLY- WICKY, avoués à la Cour assisté de Me DEZ, substitué par Me VICARI, avoc

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Madame Chantal Y... ......

représentée par la SCP LAFFLY- WICKY, avoués à la Cour assistée de Me DEZ, ...

R. G : 06 / 04359
décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG EN BRESSE Au fond 2004 / 712 du 20 avril 2006

COUR D' APPEL DE LYON
8ème Chambre Civile *

ARRÊT du 29 Avril 2008
APPELANTE :
SARL GEX IMMOBILIER représentée par ses dirigeants légaux Le Tetras Avenue de la Gare 01170 GEX

représentée par la SCP BRONDEL- TUDELA, avoués à la Cour assistée de Me FLEURY- ROBERT, avocat

INTIMES :
Monsieur Pierre Y... ......

représenté par la SCP LAFFLY- WICKY, avoués à la Cour assisté de Me DEZ, substitué par Me VICARI, avocat

Madame Chantal Y... ......

représentée par la SCP LAFFLY- WICKY, avoués à la Cour assistée de Me DEZ, substitué par Me VICARI, avocat

***** Instruction clôturée le 29 Février 2008 Audience de plaidoiries du 18 Mars 2008

*****
La huitième chambre de la COUR d' APPEL de LYON,
composée lors des débats et du délibéré de :
* Jeanne STUTZMANN, présidente de la huitième chambre, qui a fait un rapport oral de l' affaire à l' audience avant les plaidoiries, * Martine BAYLE, conseillère, * Agnès CHAUVE, conseillère,

assistées lors des débats tenus en audience publique par Nicole MONTAGNE, greffière,
a rendu l' ARRET contradictoire suivant :
FAITS- PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant acte du 17 avril 1997, les époux Y... ont donné à la SARL GEX IMMOBILIER mandat de location sans exclusivité pour leur maison située à CESSY (AIN). Le bien a été donné en location le 15 septembre 1997 à Madame B... avec la caution de Monsieur C.... En raison des difficultés de paiement des loyers, le juge des référés du tribunal d' instance de NANTUA a par ordonnance en date du 24 septembre 1998 constaté la résiliation du bail, prononcé l' expulsion de la locataire et condamné solidairement la locataire et la caution au paiement d' une provision de 25. 500 F et d' une indemnité d' occupation mensuelle de 10. 450 F à compter du 10 juin 1998. Il a été procédé à l' expulsion des occupants le 16 juin 1999.
Les époux Y... ont alors recherché la responsabilité professionnelle de la SARL GEX IMMOBILIER.
C' est dans ces conditions que par jugement en date du 20 avril 2006 le tribunal de grande instance de BOURG EN BRESSE a :
- condamné la SARL GEX IMMOBILIER à payer aux époux Y... les sommes de 19. 409, 96 € au titre de la perte de loyers avec intérêts au taux légal à compter du 10 avril 1998, de 1. 503, 38 € au titre des taxes de droit au bail et d' enlèvement des ordures ménagères avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 1999, de 4. 431, 16 € au titre des frais d' exécution avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 1999 et de 2. 500 € au titre des frais financiers, de voyage, de correspondance et d' avocats avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 1999,
- ordonné la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l' article 1154 du code civil,- débouté les époux Y... du surplus de leurs demandes,- condamné la SARL GEX IMMOBILIER à payer aux époux Y... la somme de 1. 500 € sur le fondement des dispositions de l' article 700 du nouveau Code de procédure civile,- dit n' y avoir lieu à exécution provisoire,- et condamné la SARL GEX IMMOBILIER aux dépens.

La SARL GEX IMMOBILIER a relevé appel de cette décision le 4 juillet 2006 en concluant à son infirmation aux motifs qu' aucune faute ne peut lui être imputée à l' occasion de la présentation de la locataire et de la conclusion du bail aux conditions acceptées par les époux Y.... En tout état de cause elle réclame à ses adversaires une indemnité de 3. 000 € au titre de l' article 700 du Code de procédure civile.
Elle soutient que les époux Y... avaient accepté avant la signature du bail de prévoir un loyer minoré et avaient tacitement ratifié- par l' acceptation du paiement du dépôt de garantie et du loyer pour la deuxième quinzaine de septembre- les actes accomplis par leur mandataire, que les garanties financières offertes par la locataire étaient suffisantes et ne justifiaient pas une caution laquelle n' était ni obligatoire ni exigée par les bailleurs.
Subsidiairement elle fait valoir que le différentiel entre le loyer prévu et le loyer stipulé ne peut pas être mis à sa charge (42. 000 F), que le préjudice des époux Y... ne saurait se confondre avec la dette de la locataire puisque son insolvabilité n' est pas établie, qu' elle n' avait pas reçu mandat d' administration du bien, que le préjudice des époux Y... ne peut s' apprécier qu' au titre d' une perte de chance et qu' elle n' était tenue qu' à une obligation de moyens.
Elle discute par ailleurs l' existence de la perte de loyers, les époux Y... n' ayant pas l' intention de relouer leur bien et indique que la TOM et le droit au bail était compris dans le montant du loyer et que les frais de remise en état de la maison et ceux relevant de la gestion de l' immeuble- qui ne lui avait pas été confiée- ne sont pas établis.
Les époux Y... concluent à la confirmation du jugement en ce qu' il a reconnu la responsabilité de la SARL GEX IMMOBILIER mais à son infirmation quant aux chefs de préjudice rejetés en sollicitant à nouveau le paiement, outre intérêts au taux légal à compter du 16 juin 1999, des sommes de 3. 747, 96 € au titre des frais de remise en état de la maison, de 3. 033, 58 € au titre des frais d' avocats, de 1. 538, 58 € au titre des frais financiers, 72, 29 € au titre des frais de correspondance, de 5. 780, 89 € au titre des frais de voyage et de 11. 671, 58 € au titre de la perte de location pour la période du mois de juillet 1999 à décembre 1999 outre intérêts à compter du 1er juillet 1999 ou à tout le moins la somme de 7. 000 € au titre de la perte de chance de relouer dans un délai normal la maison outre intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 1999, le tout avec capitalisation des intérêts.
Ils réclament enfin la somme de 5. 000 € par application des dispositions de l' article 700 du Code de procédure civile.
Ils estiment que la SARL GEX IMMOBILIER a commis une faute de gestion en établissant le dossier de Madame B... et nient avoir ratifié même tacitement les engagements pris par la SARL GEX IMMOBILIER en leur nom. Ils soutiennent que les renseignements recueillis sur la locataire permettait à la SARL GEX IMMOBILIER de voir qu' elle ne disposait pas des ressources suffisantes, que la SARL GEX IMMOBILIER ne s' est pas assurée de la solvabilité de la caution et que leur préjudice ne s' analyse pas en une perte de chance.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que les époux Y... reprochent en premier lieu à la société GEX IMMOBILIER d' avoir rédigé un contrat de bail dans des conditions différentes de celles prévues dans le mandat ; que le tribunal a retenu cet argument ;
Mais attendu que les actes accomplis par le mandataire peuvent faire l' objet par le mandant d' une ratification, tacite ou expresse (article 1998 du code civil) ;
Attendu que les éléments de la cause et plus particulièrement l' acceptation par les bailleurs du paiement du dépôt de garantie et du premier loyer calculés sur la base de 10. 000 F mensuelle ainsi que l' échange de courriers entre les parties (courrier du 23 septembre 1997 de l' agent immobilier non contesté par les époux Y... " nous vous adressons le dossier de votre locataire suite à votre enquête et acceptation de candidature " et la télécopie des époux Y... du 7 novembre 1997 "... ce qui donne un total de 10. 450 F ") et la motivation de l' assignation en référé démontrent que les époux Y... avaient accepté de baisser le loyer à 10. 000 F et que la seule contestation portait sur l' absence de mention dans le bail de la provision sur charges couvrant la TOM et le droit au bail et sur le caractère global ou non du loyer ;
Attendu au demeurant sur ce dernier point que l' absence de mention n' a pas eu d' incidence sur le préjudice des époux Y... puisque le juge des référés a condamné les occupants au paiement d' une indemnité provisionnelle de 10. 450 F et d' un arriéré de 25. 500 F comprenant cette provision sur charges ;
Attendu que la responsabilité de la société GEX IMMOBILIER ne peut être engagée sur ce seul motif ;
Attendu que s' agissant de la solvabilité de la locataire, la société GEX IMMOBILIER a fait toutes diligences en réclamant ses quatre dernières fiches de paie et l' attestation de l' employeur (l' ONU) ; que ces documents révélaient un salaire moyen mensuel de 4. 897, 49 Francs Suisses correspondant à 21. 548, 94 Francs Français au cours de 4, 40, permettant de régler un loyer de 10. 000 F ;
Attendu en revanche qu' eu égard au montant du loyer, et même si les époux Y... n' avaient pas exigé dans le mandat la justification d' une caution solidaire, par ailleurs non obligatoire, la société GEX IMMOBILIER devait solliciter une telle garantie ce qu' elle a fait mais s' assurer aussi de son efficacité en s' entourant de renseignements complémentaires sur la solvabilité de Monsieur C... ce qu' elle n' a manifestement pas fait se contentant d' un rappel de l' administration fiscale sans rechercher la profession de Monsieur C... ni le montant de ses revenus ; qu' elle a ainsi manqué à son obligation de conseil et engagé à ce titre sa responsabilité envers ses mandants ;
Mais attendu que le préjudice subi par les époux Y... ne peut pas correspondre à la dette de leur locataire outre leurs frais (frais d' exécution non compris dans les dépens et frais divers : voyage, déplacement, correspondance) ; qu' il ne peut s' analyser qu' en une perte de chance ;
Attendu que les époux Y... ont perdu la chance de récupérer auprès de la caution le montant de l' arriéré fixé par l' ordonnance de référé à 25. 500 F y compris la provision sur charges, l' indemnité d' occupation mensuelle de 10. 450 F (comprenant également la provision sur charges) à compter du 10 juin 1998 jusqu' au 16 juin 1999, date de l' expulsion, leurs frais non répétibles (1. 000 F) et les dépens ;
Attendu que les frais de remise en état de la maison n' ont fait l' objet d' aucune décision vérifiant leur bien- fondé et leur montant ; que la perte de loyers durant l' immobilisation de la maison entre l' expulsion et sa vente en janvier 2000 est purement hypothétique et sans lien de causalité prouvé avec l' insolvabilité de la locataire et de sa caution ;
Attendu que la perte, un an après la signature du bail et de l' engagement de caution, de la chance de recouvrement contre la caution doit être fixée à 15. 000 € ;
Attendu que le jugement sera en conséquence infirmé ;
Attendu que l' équité commande d' allouer aux époux Y... en application des dispositions de l' article 700 du code de procédure civile la somme de 1. 500 € ;
Attendu que la société GEX IMMOBILIER succombant principalement à l' instance en supportera les entiers dépens, de première instance et d' appel ;
PAR CES MOTIFS La Cour,

Infirmant le jugement déféré et statuant à nouveau :
Dit que la SARL GEX IMMOBILIER a engagé sa responsabilité en ne s' assurant pas de la solvabilité de la caution ;
La condamne à payer aux époux Y... la somme de 15. 000 € au titre de la perte de chance outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et la somme de 1. 500 € au titre de l' article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les autres chefs de demandes des époux Y... ;
Condamne la SARL GEX IMMOBILIER aux entiers dépens qui seront recouvrés par l' avoué de ses adversaires conformément à l' article 699 du code de procédure civile.
Cet arrêt a été prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l' article 450 du code de procédure civile et signé par Jeanne STUTZMANN, présidente de la huitième chambre et par Martine SAUVAGE, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Ct0029
Numéro d'arrêt : 06/04359
Date de la décision : 29/04/2008

Analyses

MANDAT - Mandataire - Responsabilité - Obligation de renseigner - / JDF

Aux termes de l'article 1998 du Code civil, les actes acceptés par le mandataire peuvent faire l'objet par le mandant d'une ratification totale ou expresse.Tel n'est cependant pas le cas lorsque le mandataire qui a reçu pouvoir de conclure un contrat de bail sollicite une caution solidaire sans s'assurer de son efficacité en s'entourant de renseignements complémentaires sur la solvabilité de la caution. En l'espèce, le mandataire engage sa responsabilité envers le mandant dès lors qu'il s'est simplement contenté d'un rappel de l'administration fiscale sans rechercher ni la profession de la caution ni le montant de ses revenus


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, 20 avril 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2008-04-29;06.04359 ?
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