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13/03/2009 | FRANCE | N°08/03450

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 13 mars 2009, 08/03450


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
RG : 08 / 03450
HOPITAL SAINT GALMIER
C / X... LA HALDE

APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de MONTBRISON du 13 Mai 2008 RG : F 07 / 00040

COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 13 MARS 2009
APPELANTE :
HOPITAL SAINT GALMIER Route de Cuzieu 42330 SAINT GALMIER

représentée par Maître Henri Pierre VERGNON, avocat au barreau de LYON
INTIMÉES :
Fatima X......

représentée par Madame Suzanne Z..., déléguée syndicale ouvrier munie d'un pouvoir
LA HALDE 11 Rue Sain

t Georges 75008 PARIS

représentée par Maître Claudine CHABANNES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
PARTIES CO...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
RG : 08 / 03450
HOPITAL SAINT GALMIER
C / X... LA HALDE

APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes de MONTBRISON du 13 Mai 2008 RG : F 07 / 00040

COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 13 MARS 2009
APPELANTE :
HOPITAL SAINT GALMIER Route de Cuzieu 42330 SAINT GALMIER

représentée par Maître Henri Pierre VERGNON, avocat au barreau de LYON
INTIMÉES :
Fatima X......

représentée par Madame Suzanne Z..., déléguée syndicale ouvrier munie d'un pouvoir
LA HALDE 11 Rue Saint Georges 75008 PARIS

représentée par Maître Claudine CHABANNES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
PARTIES CONVOQUÉES LE : 17 juin 2008
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 06 Février 2009
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Bruno LIOTARD, Président Hélène HOMS, Conseiller Marie-Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 13 Mars 2009, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Bruno LIOTARD, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Fatima X... a été embauchée par l'HOPITAL de SAINT-GALMIER le 18 juin 2001 dans le cadre d'un contrat emploi consolidé d'un an, en qualité d'agent de service au restaurant. Ce contrat a été renouvelé à trois reprises et, en dernier lieu, jusqu'au 17 juin 2005.
Par courrier du 12 juin 2003, Fatima X... a alerté la direction de l'hôpital au sujet des propos racistes tenus par certains de ses collègues de travail à son encontre, particulièrement Michèle Y..., en raison de son statut de " travailleur handicapé " et le harcèlement moral dont elle s'estimait victime, pour que des dispositions soient prises en vue de faire cesser ces agissements.
Après une entrevue en date du 16 juillet 2003, la direction de l'hôpital a, par courrier du 6 août 2003, indiqué à Fatima X... qu'elle avait demandé au responsable de son service de veiller au maintien de la cohésion de l'équipe ainsi qu'au respect mutuel entre collègues, et l'a informée de ce que la possibilité d'un changement d'affectation était en cours d'étude.
Par courrier du 1er décembre 2003, Fatima X... a relancé la direction de l'hôpital, ne constatant pas d'amélioration.
Par courrier du 16 décembre 2003, la direction lui a répondu qu'une analyse serait réalisée dans le cadre de l'évaluation des équipes de l'établissement.
Les plannings de Fatima X... ont été modifiés dès le 1er janvier 2004, limitant ses relations de travail avec Michèle Y...
La synthèse du bilan diagnostic réalisé le 1er juin 2004 fait état de difficultés d'intégration " en cours de résolution " de Fatima X...
Le 15 février 2005, Fatima X... a saisi le Procureur de la République, puis elle a déposé plainte le 24 mars 2005 pour harcèlement moral, injures à caractère raciste et menaces de la part de Michèle Y...
La Gendarmerie a diligenté une enquête.
Lors de son audition par les services de gendarmerie, Fatima X... a déclaré que lors d'une réunion du personnel de la salle à manger, le 7 février 2005, son travail avait été critiqué par Michèle Y... ainsi que le fait qu'elle ait informé le responsable d'un changement de planning opéré par deux de ses collègues.
Par courrier du 21 avril 2005, l'HOPITAL de SAINT-GALMIER l'a informé de ce que son contrat prendrait fin le 17 juin 2005.
Par courrier du 11 mai 2005, Fatima X... a contesté cette décision.
Le Procureur de la République a décidé de recourir à une médiation pénale que Fatima X... a refusée le 5 juillet 2005.
La plainte a été classée sans suite le 24 octobre 2005.
Par courrier du 13 juillet 2005, Fatima X... a saisi la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité, se plaignant d'avoir fait l'objet de harcèlement discriminatoire et d'injures à caractère raciste et handiphobe de la part d'une collègue sur son lieu de travail et reprochant à son employeur de ne pas avoir pris des mesures suffisantes pour faire cesser ces agissements et d'avoir refusé de renouveler son contrat de travail en suite de sa plainte.
La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité a effectué une enquête auprès du Procureur de la République, de l'Inspection du Travail et de l'HOPITAL de SAINT-GALMIER et a pris une délibération le 5 février 2007.
Par courrier recommandé du 6 février 2006, l'HOPITAL de SAINT-GALMIER a notamment indiqué à la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité que le contrat de Fatima X... n'avait pas été reconduit pour permettre le recrutement d'une autre personne dans le cadre d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi, que l'encadrement de Fatima X... n'avait jamais été témoin de propos racistes envers elle, mais que les tensions avec Michèle Y... étaient bien réelles bien que des tensions bien plus importantes aient traversé le service lors de l'enquête de gendarmerie.
La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité, a estimé qu'il semblait que Fatima X... avait été confrontée à des difficultés relationnelles réelles, manifestées par des comportements vexatoires répétés, laissant présumer qu'elle avait fait l'objet d'un harcèlement moral à raison de son origine et de son handicap et qu'il existait suffisamment d'éléments concordants permettant de présumer que Fatima X... avait fait l'objet d'un non-renouvellement de son contrat de travail pour avoir dénoncé ces faits.
Le 5 mars 2007, Fatima X... a saisi le Conseil de prud'hommes de MONTBRISON.
Par courrier du 26 avril 2007, l'HOPITAL de SAINT-GALMIER a contesté la délibération de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité, sans réaction de la part de cette autorité.
A l'audience de jugement du 4 septembre 2007, Fatima X... a demandé au conseil de prud'hommes de lui accorder :- trois mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour n'avoir pas pris les mesures qui s'imposaient pour la soustraire au harcèlement subi, soit 2. 900 €,- un an de salaire pour non renouvellement de son contrat de travail, soit 11. 336 €,- des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, soit 10. 000 €,- et 1. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le bureau de jugement du conseil de prud'hommes a invité la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité à produire ses observations, ce qu'elle a fait.
Par jugement du 13 mai 2008, le conseil de prud'hommes a :- dit que l'HOPITAL de SAINT-GALMIER n'avait pas respecté son obligation de sécurité envers Fatima X...,- dit que le non-renouvellement du contrat emploi consolidé de Fatima X... était lié à la dénonciation des faits,- condamné l'HOPITAL de SAINT-GALMIER à verser à Fatima X... la somme de 11. 336 € à titre de dommages et intérêts,- dit que les preuves rapportées n'étaient pas suffisantes pour caractériser l'existence d'un harcèlement discriminatoire,- condamné l'HOPITAL de SAINT-GALMIER à verser à Fatima X... la somme de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- débouté Fatima X... de ses autres demandes et l'HOPITAL de SAINT-GALMIER de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné l'HOPITAL de SAINT-GALMIER aux dépens.

Appelant de ce jugement, l'HOPITAL de SAINT-GALMIER prie la Cour de :- déclarer irrecevables les observations présentées par la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité,- juger qu'il a respecté son obligation de sécurité envers Fatima X... et que le non-renouvellement de son contrat emploi consolidé n'est pas lié à sa dénonciation des faits,- infirmer le jugement sur ces points,- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que les preuves apportées n'étaient pas suffisantes pour caractériser l'existence d'un harcèlement discriminatoire,- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamné à verser à Fatima X... la somme de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- à titre subsidiaire, réduire le montant de l'indemnité à de plus justes proportions,- condamner Fatima X... à lui payer 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

Fatima X... demande à la Cour de :- retenir que l'employeur n'a pas pris les mesures qui s'imposaient pour la soustraire au harcèlement qu'elle subissait,- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'HOPITAL de SAINT-GALMIER n'avait pas respecté son obligation de sécurité envers elle, en ce qu'il a jugé que le non-renouvellement de son contrat emploi consolidé était lié à la dénonciation des faits par elle et en ce qu'il a condamné l'HOPITAL de SAINT-GALMIER à lui verser 11. 336 € à titre de dommages et intérêts,- condamner l'HOPITAL de SAINT-GALMIER à lui payer 10. 000 € en réparation de son préjudice moral et 1. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité demande à la Cour de déclarer ses observations recevables. Elle soutient qu'aucune restriction ne peut être apportée à son droit à être entendue par les juridictions à sa demande, sauf le cas où elle a procédé à une médiation en vertu de l'article 7 de la loi du 31 décembre 2004, ce qu'elle n'a pas fait en l'espèce.
DISCUSSION
1. La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité est une autorité administrative compétente pour connaître de toutes discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi ou par un engagement unilatéral auquel la France est partie.
Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination peut saisir cette autorité.
C'est ce qu'a fait Fatima X... le 13 juillet 2005.
La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité est dotée de pouvoirs d'investigation. Elle peut demander des informations ou des documents, délivrer des mises en demeure si nécessaire, et procéder à des auditions ainsi qu'à des vérifications sur place.
L'article 13 de la loi du 30 décembre 2004 dispose que lorsqu'elles sont saisies de faits relatifs à des discriminations, les juridictions civiles, pénales ou administratives peuvent, d'office ou à la demande des parties, inviter la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité ou son représentant à présenter des observations.
La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité peut elle-même demander à être entendue par ces juridictions. Dans ce cas, son audition est de droit.
En première instance, la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité a produit des observations à la demande de la juridiction. En appel, elle a sollicité le droit de faire de même.
L'article 7 précise que la Haute Autorité peut également procéder ou faire procéder à la résolution amiable des différends portés à sa connaissance, par voie de médiation.
Lorsqu'il est procédé à cette médiation, les constatations et les déclarations recueillies au cours de celle-ci ne peuvent être ni produites ni invoquées ultérieurement dans les instances civiles ou administratives, sans l'accord des personnes intéressées.
En l'espèce, la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité n'a procédé à aucune médiation.
En vertu de l'article 11, la Haute Autorité peut encore formuler des recommandations tendant à remédier à tout fait ou à toute pratique qu'elle estime discriminatoire, ce qu'elle n'a pas fait ici.
Même dans ce cas, il n'existe aucune restriction à son droit d'être entendue en justice.
L'article 6, § 1, de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales n'est pas applicable à cette haute autorité qui n'agit pas en tant que juridiction ni comme instance disciplinaire.
Il suit de là que les observations de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité sont recevables.
2. Selon l'article L. 322-4-8, I, du code du travail (devenu l'article L. 5134-65), issu de la loi no 98-657 du 29 juillet 1998, applicable en l'espèce, le contrat de travail, dénommé " contrat emploi consolidé " conclu une durée déterminée a une durée initiale de douze mois et est renouvelable chaque année par avenant dans la limite d'une durée totale de soixante mois.
L'employeur n'est tenu à aucune obligation de renouvellement du contrat emploi consolidé.
Il ne peut être reproché, en principe, à l'HOPITAL de SAINT-GALMIER de ne pas avoir renouvelé le contrat emploi consolidé de Fatima X..., après son terme fixé au 17 juin 2005 après trois renouvellements successifs.
3. En vertu de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, notamment en matière de renouvellement de contrat, pour avoir relaté des agissements répétés de harcèlement moral.
4. L'article L. 1132-1 dispose qu'aucune personne ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, notamment en matière de renouvellement de contrat, en raison notamment de son origine ou de son handicap.
En application de l'article L. 1154-1, lorsque survient un litige en matière de harcèlement moral, le salarié doit établir des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
L'article L. 1134-1 précise que lorsque survient un litige en matière de discrimination, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Dès le 12 juin 2003, Fatima X... a informé son employeur de ce qu'elle s'estimait victime de discrimination et de harcèlement moral de la part d'une collègue en raison de son origine et de son handicap.
Elle a relancé l'employeur le 1er décembre 2003.
Le 15 février 2005, Fatima X... a saisi le Procureur de la République et le 24 mars 2005, elle a déposé une plainte pour harcèlement moral, injures à caractère raciste et menaces.
Par courrier du 21 avril 2005, l'HOPITAL de SAINT-GALMIER l'a informée de ce que son contrat prendrait fin le 17 juin 2005, sans autre explication.
Alors que le renouvellement du contrat de Fatima X... à trois reprises présageait une quatrième reconduction, la quasi-concomitance entre le dépôt de plainte de la salarié pour harcèlement discriminatoire et la notification de la décision de l'employeur de ne pas renouveler son contrat de travail laisse supposer que ce non-renouvellement a pour cause le fait pour la salariée d'avoir relaté à son employeur les faits de discrimination et de harcèlement moral dont elle s'estimait victime et d'avoir déposé plainte contre sa collègue de travail auteur des agissements dénoncés.
Il incombe par conséquent à l'employeur de prouver que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à l'action de Fatima X... en la matière.
L'employeur déclare qu'au moment de sa décision, il n'était pas informé du dépôt de plainte, ce qui paraît peu compatible avec l'argument qu'il tire des tensions qui auraient traversé le service lors de l'enquête de gendarmerie.
Il produit un courrier en date du 29 juillet 2007 du directeur départemental des affaires sanitaires et sociales et le courrier du Ministre de la santé qui y été joint, lui demandant de s'engager dans le développement de contrats aidés, plus particulièrement de contrats d'avenir et de contrats d'accompagnement dans l'emploi appelés à remplacer les contrats aidés existant auparavant, dont les contrats emploi consolidé.
Ces courriers sont postérieurs au non-renouvellement du contrat. Il ne prouvent pas que la décision de l'employeur était justifiée par des éléments objectifs étrangers au fait que Fatima X... avait dénoncé les faits de harcèlement moral et de discrimination dont elle s'estimait l'objet.
En allouant 11. 336 € de dommages et intérêts à Fatima X..., les premiers juges ont rempli l'intéressée de ses droits et le jugement doit être confirmé.
5. Selon l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il est tenu à ce titre d'une obligation de sécurité de résultat.
L'absence de faute de la part de l'employeur ne peut l'exonérer de sa responsabilité.
Dès le 12 juin 2003, Fatima X... a alerté la direction de l'hôpital au sujet des propos racistes tenus par certains de ses collègues de travail à son encontre et du harcèlement moral dont elle s'estimait victime.
La direction de l'hôpital n'établit pas avoir pris de véritables mesures, hormis un entretien en date du 16 juillet 2003 et un courrier du 6 août 2003 dans lequel elle indique à la salariée qu'elle a demandé au responsable de son service de veiller au maintien de la cohésion au sein de l'équipe et au respect mutuel entre collègues, tout en l'invitant à rester intégrée dans l'équipe et en l'informant de l'étude d'un changement d'affectation en cours.
S'il ne s'est pas véritablement engagé à changer Fatima X... d'affectation, l'HOPITAL de SAINT-GALMIER ne démontre pas avoir réellement cherché à réaliser ce changement.
Dans son auto-évaluation de l'année 2003 daté du 14 octobre 2003, Fatima X... a reconnu ses difficultés d'intégration au sein de l'équipe. Mais elle les a expliquées par le sentiment d'être dévalorisée, faisant état de paroles prononcées qu'elle ne pouvait pas oublier.
Son évaluateur lui reproche d'être trop personnelle dans son travail et d'avoir des difficultés à travailler en équipe. Ces reproches ne sont pas de nature à justifier l'inaction de l'employeur au constat du malaise de sa salarié clairement exprimé.
Après une nouvelle relance de Fatima X... en date du 1er décembre 2003, l'HOPITAL de SAINT-GALMIER n'a procédé qu'à un simple changement de planning pour 2004 dans le but de limiter au maximum les rapports professionnels entre Fatima X... et Michèle Y...
Il ressort de nombreuses attestations que le mal-être de la salarié était connu de l'employeur et de la plupart des collègues de travail dès 2002 et que l'intéressée a été reçue à plusieurs reprises par des membres du personnel en vue de trouver des solutions à ses difficultés d'intégration.
Ces attestations font état de l'attitude de rejet de Fatima X... à l'égard des solutions proposées mais ne contiennent aucune précision sur la nature de ces solutions.
Les témoins indiquent que Fatima X... critiquait souvent le travail de ses collègues, qu'elle le refaisait à leur place, le jugeant mal fait, et qu'elle refusait de se rendre aux relèves journalières malgré les conseils prodigués par certains membres du personnel.
La synthèse du bilan diagnostic réalisé le 1er juin 2004 mentionne de nouveau les difficultés d'intégration de Fatima X... en précisant qu'elles étaient " en cours de résolution ".
La saisine du Procureur de la République pour harcèlement moral contre Michèle Y... est consécutive à une altercation survenue lors d'une réunion du personnel le 7 février 2005.
Il ressort d'un procès-verbal d'audition que Fatima X... a été en arrêt maladie pour état dépressif du 17 au 25 février 2005.
Rien ne prouve que Fatima X... ait informé son employeur des nouvelles difficultés rencontrées dans ses relations avec ses collègues de travail ainsi que de son dépôt de plainte antérieurement au 21 avril 2005, date de la notification du non-renouvellement de son contrat.
L'HOPITAL de SAINT-GALMIER reconnaît toutefois que sa décision lui a été dictée par les difficultés d'intégration de Fatima X... alors même qu'aucune mesure n'avait été prise en vue de mettre fin à ces difficultés ainsi qu'au mal être vécu par la salariée depuis le mois de janvier 2004.
L'employeur s'est abstenu de mettre en oeuvre tous les moyens dont il disposait pour préserver la santé, plus particulièrement mentale, et la sécurité de Fatima X... Il a préféré ne pas renouveler le contrat de la salariée concernée. Il a ainsi commis un manquement à son obligation de sécurité de résultat à l'égard de cette dernière. Il est à l'origine du préjudice qu'elle subit. La Cour possède les éléments d'appréciation suffisants pour fixer à 7. 000 € l'indemnité réparatrice et le jugement doit être infirmé.
6. L'article L. 1152-4 du code du travail impose à l'employeur, tenu à une obligation de résultat, de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.
Il ne peut être condamné à verser des dommages et intérêts à la salariée que si les faits de harcèlement moral sont établis, s'il est prouvé qu'il en avait connaissance et s'il est établi qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour les faire cesser.
Pour prouver l'existence du harcèlement moral qu'elle invoque, Fatima X... ne produit aucun autre élément que son propre témoignage.
De nombreux salariés de l'HOPITAL de SAINT-GALMIER rapportent ne jamais avoir été témoin direct de propos racistes, insultants et vexatoires à l'égard de Fatima X...
Ces salariés précisent que Fatima X... avait des problèmes d'intégration, qu'elle se mettait volontairement en retrait, qu'elle ne participait pas activement aux réunions du personnel, qu'elle ne se rendait pas aux relèves journalières, qu'elle rencontrait des difficultés en matière de travail en équipe et qu'elle critiquait le travail de ses collègues.
Nul n'étant autorisé à se constituer une preuve à soi même, le seul témoignage de Fatima X... est insuffisant à faire présumer l'existence d'un harcèlement et aucun manquement à l'obligation de prévenir les agissements allégués de harcèlement moral ne peut être reproché à l'HOPITAL de SAINT-GALMIER.
7. L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles, de débouter l'HOPITAL de SAINT-GALMIER de sa demande présentée en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de le condamner à ce titre à payer à Fatima X... la somme de 800 €.
PAR CES MOTIFS La Cour,

Déclare recevables les observations présentées par la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné l'HOPITAL de SAINT-GALMIER à payer à Fatima X... 11. 336 € à titre de dommages et intérêts pour non-renouvellement de son contrat de travail et 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Condamne l'HOPITAL de SAINT-GALMIER à payer à Fatima X... 7. 000 € de dommages et intérêts pour manquement à son obligation de sécurité et de protection de la santé physique et mentale des travailleurs,
Ajoutant,
Déboute l'HOPITAL de SAINT-GALMIER de sa demande présentée en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Le condamne à payer à Fatima X... 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Le condamne aux dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 08/03450
Date de la décision : 13/03/2009
Type d'affaire : Sociale

Analyses

PRUD'HOMMES - Procédure - Débats - Oralité - Dépôt de conclusions par une partie - / JDF

L'article 13 de la loi n 2004-1486 du 30 décembre 2004 dispose que lorsqu'elles sont saisies de faits relatifs à des discriminations, les juridictions civiles, pénales ou administratives peuvent, d'office ou à la demande des parties, inviter la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité (HALDE) ou son représentant à présenter des observations. La HALDE peut elle-même demander à être entendue par ces juridictions. Dans ce cas son audition est de droit. L'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas applicable à la HALDE, qui n'agit pas en tant que juridiction ni comme instance disciplinaire. Sont dès lors recevables en appel les observations de la HALDE qui a produit des observations en première instance à la demande de la juridiction et a sollicité le droit de faire de même en appel


Références :

Article 6 §1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales Article 13 de la loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Montbrison, 13 mai 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2009-03-13;08.03450 ?
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