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27/03/2012 | FRANCE | N°09/06829

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 27 mars 2012, 09/06829


R. G : 09/ 06829

COUR D'APPEL DE LYON

8ème chambre
ARRET DU 27 Mars 2012
Décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE Au fond du 19 octobre 2009

RG : 2007/ 3076 ch no

SARL CALLIDEO

C/
SARL AC3 X...
APPELANTE :
SARL CALLIDEO anciennement dénommée SARL ISULA COMPANY représentée par ses dirigeants légaux 52 rue de la République 69002 LYON

représentée par Me Paul-Richard ZELMATI, avocat au barreau de LYON, substitué par Me BECQUET

INTIMÉE :

SARL AC3 X... représentée par ses dirigeants lÃ

©gaux 22 boulevard Voltaire 01000 BOURG-EN-BRESSE

représentée par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON

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R. G : 09/ 06829

COUR D'APPEL DE LYON

8ème chambre
ARRET DU 27 Mars 2012
Décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE Au fond du 19 octobre 2009

RG : 2007/ 3076 ch no

SARL CALLIDEO

C/
SARL AC3 X...
APPELANTE :
SARL CALLIDEO anciennement dénommée SARL ISULA COMPANY représentée par ses dirigeants légaux 52 rue de la République 69002 LYON

représentée par Me Paul-Richard ZELMATI, avocat au barreau de LYON, substitué par Me BECQUET

INTIMÉE :

SARL AC3 X... représentée par ses dirigeants légaux 22 boulevard Voltaire 01000 BOURG-EN-BRESSE

représentée par Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 05 Septembre 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 01 Février 2012
Date de mise à disposition : 20 Mars 2012 prorogé au 27 Mars 2012
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Catherine ZAGALA, conseiller

assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier
A l'audience, Dominique DEFRASNE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSE DU LITIGE
En 2004, la SCCV LE CLOS MOGADOR, représentée par la SARL ISULA COMPANY devenue ultérieurement la SARL CALLIDEO a entrepris la construction d'un ensemble immobilier à BOURG EN BRESSE et régularisé le 15 juillet 2004 un contrat de maîtrise d'oeuvre complète avec la SARL d'architecture AC3 X....
En marge de ce projet de construction, la société ISULA COMPAGNY, en sa qualité de promoteur immobilier a sollicité à nouveau le concours de la société AC3 X... pour un autre projet de construction de villas dénommé " LE JADE " à THOIRY dans le PAYS DE GEX.
Toutefois, aucun contrat écrit n'a été régularisé à cette occasion.
La société AC3 X... a établi et déposé le 30 octobre 2006 un dossier de permis de construire.
Cependant la communauté des communes du PAYS DE GEX et le conseil d'architecture et d'urbanisme de l'environnement de l'AIN devaient relever des insuffisances dans le projet et ce permis de construire, faute d'accord entre les parties, a été classé sans suite.
Le 16 avril 2007, la société AC3 X... a réclamé à la société ISULA COMPANY le paiement d'une facture d'honoraires de 71. 760 € TTC puis dans un contexte devenu particulièrement conflictuel la SCCV LE CLOS MOGADOR a résilié le contrat de maîtrise d'oeuvre concernant l'ensemble immobilier de BOURG EN BRESSE le 24 avril 2007.
Le 5 octobre 2007, la société AC3 X... a fait assigner la société ISULA COMPANY devant le tribunal de grande instance de BOURG EN BRESSE pour avoir paiement de ses honoraires et de dommages et intérêts.
Par jugement du 19 octobre 2009, le tribunal a condamné la société ISULA COMPANY à payer à la société AC3 X... la somme de 71. 760 € outre celle de 10. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la société ISULA COMPANY de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts motivée par le manquement de la société d'architecture à son obligation de conseil.
Le 3 novembre 2009, la société ISULA COMPANY a interjeté appel de cette décision.
La SARL CALLIDEO venant aux droits de la SARL INSULA COMPANY demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,
- de débouter la société AC3 X... de ses prétentions,
- à titre subsidiaire, de dire que la société AC3 X... a engagé sa responsabilité contractuelle et se trouve redevable de dommages et intérêts qui compensent intégralement les honoraires sollicités,
- à titre plus subsidiaire, de dire que les honoraires fixés unilatéralement par la société AC3 X... sont sans rapport avec l'objet de sa mission et à tout le moins, d'en réduire le montant,
- en toute hypothèse, de condamner la société AC3 X... à lui payer la somme de 50. 000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice économique, la somme de 10. 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et la somme de 5. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

L'appelante fait valoir à titre principal que la convention conclue entre les parties au titre du programme " JADE " était un contrat à titre gratuit qui s'inscrivait comme accessoire de celui concernant le programme " MOGADOR " à BOURG EN BRESSE pour lequel la société AC3 X... devait bénéficier d'honoraires plus que substantiels, soit 763. 048 €.

Elle explique que monsieur X..., le gérant de la société d'architecture, fait état dans ses courriers de " service rendu " et que sa société n'a jamais réclamé d'honoraires pour le programme " JADE " avant que ne soit résilié le contrat de maîtrise d'oeuvre du programme " MOGADOR ".
Elle fait valoir à titre subsidiaire que l'architecte a manqué à ses obligations en ne veillant pas au respect des règles d'urbanisme, ayant déposé un dossier de permis de construire incomplet sans étude sérieuse des sols, alors que son intervention à titre amical ne le dispensait pas de son obligation de compétence et de diligence.
Elle ajoute que la société AC3 X... n'a pas attiré l'attention du maître de l'ouvrage sur les difficultés rencontrées ni modifié les plans de réseau conformément aux exigences de l'administration.
Elle estime que sa responsabilité professionnelle est entière d'autant plus qu'elle a choisi elle-même de mettre fin à sa mission.
Elle fait valoir également que les honoraires réclamés ne sont pas justifiés dans leur montant, la mission relative au programme " JADE " n'ayant qu'un caractère ponctuel, la société AC3 X... ne produisant aucun élément sur la fixation de ses honoraires ou sur leur validation, que sa référence au projet présenté ultérieurement par un autre architecte pour 2. 673. 000 € HT n'étant pas valable car le but de ce projet était beaucoup plus exigeant que le projet envisagé par les parties.

Enfin, elle explique que par suite de la défaillance de la société AC3 X... elle a du s'adresser en urgence à un autre architecte EXNDO, ce qui a retardé d'autant le projet dans le contexte d'un marché difficile.

La société AC3 X... demande de son côté à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement querellé et de débouter la société CALLIDEO de l'intégralité de ses prétentions,
- de condamner la société CALLIDEO à lui payer la somme de 5. 000 € à titre de dommages et intérêts complémentaires pour résistance abusive et celle de 3. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Elle soutient qu'il existe bien une convention verbale liant les parties sur le programme " JADE ", qu il ne s'agit nullement d'un contrat à titre gratuit et que la société CALLIDEO d'ailleurs ne rapporte pas la preuve de l'intention libérale de l'architecte.
Elle indique que son intervention sur le chantier " MOGADOR " est une circonstance inopérante car rien indique que les deux opérations seraient liées ou que la première inclurait la seconde et que la date de facturation prétendument tardive est tout aussi inopérante.
Elle fait valoir qu'à défaut de contrat écrit entre les parties il appartient au juge de fixer les honoraires du maître d'oeuvre en se référant à tout document approprié.
Elle précise qu'elle a elle-même fixé ses honoraires à 60. 000 € HT pour une mission accomplie jusqu'au stade du dépôt du permis de construire sur la base d'un projet de 2. 673. 000 €, ce qui se situe dans une fourchette de 18 à 25 %, conformément aux usages de la profession.
La société CALLIDEO conteste par ailleurs les manquements qui lui sont reprochés en expliquant que le premier permis de construire aurait pu être obtenu par son intermédiaire si la société ISULA lui avait fourni tous les éléments nécessaires et surtout, si elle n'avait pas modifié son projet par le rachat d'un terrain et l'application du label de qualité MINERGIE P et qu'en définitive c'est à la société ISULA elle même qui n'a pas donné suite à la demande de ce permis de construire.
Elle ajoute que si par la suite la société ISULA a décidé de refondre son projet et déposé une deuxième demande de permis de construire dont elle a chargé le cabinet d'architecture EXNDO, ce dernier s'est trouvé confronté aux mêmes difficultés car le maître de l'ouvrage a multiplié les atermoiements en imposant de nombreux changements.

MOTIFS DE LA DECISION

1) Sur la demande de la société AC3 X...
Attendu que l'existence d'un contrat de maîtrise d'oeuvre entre les parties concernant le programme " JADE " à THOIRY n'est pas contesté, ne serait-ce parce que la société CALLIDEO motive sa demande reconventionnelle par la mauvaise exécution de ce contrat par la société AC3 X... ;
Attendu que la société CALLIDEO qui allègue la gratuité de ce contrat en dépit de la demande en paiement d'honoraires doit rapporter la preuve que l'architecte ne voulait pas de rémunération ;
Qu'en réalité, son explication sur le lien entre le projet " JADE " et le projet " MOGADOR " n'est étayé par aucune pièce, ni à plus forte raison l'affirmation que l'architecte était rémunéré dans le premier projet pour ses deux interventions ;
Que la facturation des honoraires par la société AC3 X... plus d'un an après le début de la collaboration des parties sur le projet " JADE " n'est pas un élément déterminant ;
Que les courriers adressés par la société ISULA elle-même ou par son conseil à la société AC3 X... les 18 octobre 2006 et 27 avril 2007 dans lesquels il est fait état soit de service rendu, soit de geste commercial sont manifestement inopérants ;

Attendu en conséquence, que le contrat liant les parties sur le projet " JADE " ne peut-être qualifié de contrat à titre onéreux, en l'absence de preuve de son caractère gratuit ;

Attendu qu'en l'absence de contrat écrit entre l'architecte et son client, il appartient au juge de fixer les honoraires de l'architecte en fonction des éléments soumis à son appréciation ;

Attendu en l'espèce que la société AC3 X... réclame le paiement de la somme de 60. 000 € HT, outre TVA, soit 71. 760 € TTC, correspondant aux missions : esquisse, avant projet sommaire, dépôt du permis de construire ;

Que cette société verse aux débats les dossiers de permis de démolir et de permis de construire qu'elle a déposés le 30 octobre 2006 dans le cadre du projet de construction de quatre maisons individuelles bioclimatiques " LE JADE " à THOIRY ;
Qu'il est constant que la communauté de communes du pays de GEX a émis un avis défavorable le 17 novembre 2006 dès lors que le plan des réseaux hydrauliques n'était pas conformes aux prescriptions techniques de son cahier des charges et que le dossier étant demeuré incomplet à cet égard, il n'a pas été donné suite à la demande de permis de construire par la commune de THOIRY ;
Que la société CALLIDEO qui reproche aujourd'hui à la société AC3 X... d'avoir manqué à ses obligations contractuelles de diligence et de conseil ne portait manifestement pas la même appréciation sur le travail de l'architecte lorsqu'elle lui a écrit le 7 novembre 2006 : " pour te remercier de la qualité de ta prestation sur le projet de THOIRY au regard du peu de temps dû à l'urgence " ;
Qu'il ressort de ce même courrier que la société ISULA a souhaité pour l'avenir opérer quelques modifications concernant l'agencement intérieur de la construction et surtout obtenir d'une société suisse la certification MINERGIE P, certification qui impliquait un nouveau cahier des charges et, selon les explications non contestées de l'architecte, le dépôt d'un nouveau permis de construire ;
Que la situation est demeurée en l'état jusqu'à ce que la société ISULA en mai 2007 décide de faire appel à la société EXNDO studio et à l'atelier d'architecture EXNDO pour son nouveau projet qui n'a pas non plus abouti en raison de certaines exigences non respectées du PLU ;
Qu'il n'est pas permis d'affirmer au vu de ces circonstances que la société AC3 X... a pu disposer en temps utile de tous les éléments nécessaires au dépôt d'un permis de construire conforme aux exigences réglementaires ; que la société CALLIDEO ne peut donc lui reprocher d'avoir manqué à ses obligations de diligence et de conseil ;
Que la société AC3 X... dit avoir calculé ses honoraires sur la base du projet de construction présenté ultérieurement par EXNDO pour un montant total HT de 2. 673. 000 € ;
Qu'il ressort des explications non contestées de la société CALLIDEO que le projet intégrait dès la conception des exigences très strictes du label MINERGIE P et qu'il était donc d'un coût nécessairement supérieur au projet envisagé par les parties ;
Que par ailleurs la société AC3 X... ne justifie pas de diligences ou d'études particulières au stade de l'avant projet, même si comme il a été précédemment constaté sa responsabilité contractuelle ne peut être retenue ;
Que dans ces conditions, la Cour a les éléments suffisants pour fixer à 30. 000 € HT, soit 35. 880 € TTC la rémunération due à la société AC3 X... pour son intervention dans le projet " JADE " de THOIRY ;
Attendu en conséquence que le non paiement par la société CALLIDEO de la facture de 71. 760 € TTC ne peut être qualifié d'abusif et qu'il n'y a pas lieu d'allouer à la société AC3 X... des dommages-intérêts complémentaires ;
2) Sur la demande reconventionnelle de la société CALLIDEO
Attendu que les demandes en paiement de dommages-intérêts formées par la société CALLIDEO ne sauraient prospérer en ce qu'elles sont fondées sur des fautes non démontrées de l'architecte ;
Que la défection brutale et imprévisible reprochée à la société AC3 X... ne ressort pas des pièces produites devant la Cour ;
Qu'il est évoqué également des actes de diffamation de la société AC3 X... qui ont déjà été sanctionnés par la juridiction de proximité ;
Qu'enfin l'action initiale introduite par cette société pour obtenir le paiement de ses honoraires ne peut sérieusement être qualifié d'abusive ;
Attendu en conséquence qu'il convient de rejeter les demandes indemnitaires formées par l'appelante ;

Attendu que la société CALLIDEO qui succombe supportera les dépens ; qu'il convient d'allouer en cause d'appel à la société AC3 X... la somme de 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en sus de l'indemnité allouée par le premier juge ;

PAR CES MOTIFS
Dit l'appel recevable ;
Confirme le jugement entrepris sauf sur le montant des honoraires de la SARL AC3 X....
Statuant de nouveau de ce chef :
Condamne la SARL CALLIDEO anciennement dénommée ISULA COMPANY à payer à la SARL AC3 X... la somme de 35. 880 € TTC avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 mai 2007.
Y ajoutant :
Condamne la SARL CALLIDEO anciennement dénommée ISULA COMPANY à payer à la SARL AC3 X... la somme de 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SARL CALLIDEO anciennement dénommée ISULA COMPANY aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/06829
Date de la décision : 27/03/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2012-03-27;09.06829 ?
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