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24/09/2012 | FRANCE | N°10/02377

France | France, Cour d'appel de metz, Chambre sociale, 24 septembre 2012, 10/02377


Minute no 12/00500

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24 Septembre 2012

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RG 10/02377

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de THIONVILLE

28 Mai 2008

07/384 I

----------------------RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU

vingt quatre septembre deux mille douze

APPELANT :

Monsieur Paul X...

...

57180 TERVILLE

Représenté par Me NASSOY (avocat au barreau de THIONVILLE), substi

tué par Me BROCHE (avocat au barreau de THIONVILLE)

INTIMEE :

SA RML MICRON'EST, prise en la personne de son représentant légal

Zone Industrielle Sainte Agathe

7 R...

Minute no 12/00500

-----------

24 Septembre 2012

-------------------------

RG 10/02377

-----------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de THIONVILLE

28 Mai 2008

07/384 I

----------------------RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU

vingt quatre septembre deux mille douze

APPELANT :

Monsieur Paul X...

...

57180 TERVILLE

Représenté par Me NASSOY (avocat au barreau de THIONVILLE), substitué par Me BROCHE (avocat au barreau de THIONVILLE)

INTIMEE :

SA RML MICRON'EST, prise en la personne de son représentant légal

Zone Industrielle Sainte Agathe

7 Rue Lavoisier

57190 FLORANGE

Représentée par Me CLANCHET (avocat au barreau de METZ)

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Madame Monique DORY, Président de Chambre

ASSESSEURS : Madame Marie-José BOU, Conseiller

Madame Gisèle METTEN, Conseiller

***

GREFFIER (lors des débats) : Madame Céline DESPHELIPPON, Greffier

***

DÉBATS :

A l'audience publique du 11 juin 2012, l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 24 septembre 2012 par mise à disposition publique au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel de METZ.

EXPOSE DU LITIGE

Paul X... a été engagé à compter du 1er septembre 1995 par la société RML Micron'Est et a occupé un emploi de chef de poste jusqu'au 31 janvier 2000, sa qualification étant alors devenue celle de chef de poste/opérateur polyvalent.

Il a démissionné le 3 janvier 2004.

Suivant demande du 15 juin 2004, il a fait attraire la société RML Micron'Est devant le conseil de prud'hommes de Thionville.

L'affaire ayant été radiée, il a sollicité, par acte reçu au greffe le 21 avril 2006, la reprise de l'instance.

Le 12 septembre 2007, le Conseil de Prud'hommes a ordonné la radiation de l'affaire.

Par acte daté du 24 septembre 2007, Paul X... a de nouveau sollicité la reprise de l'instance.

Dans le dernier état de ses prétentions, Paul X... a demandé à la juridiction prud'homale de:

- condamner la S.A. RML Micron'Est à lui payer la somme de 14 104,57 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir, au titre des heures supplémentaires effectuées en 2002 et 2003 et des congés payés y afférents ;

à titre subsidiaire,

- condamner la S.A. RML Micron'Est à lui payer la somme de 12 002 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir, au titre des heures supplémentaires effectuées au cours des années 2000-2003 ainsi que les congés afférents, soit la somme de 1 200,20 euros ;

en tout état de cause,

- condamner la SA RML Micron'Est à lui payer la somme de 11 616,66 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir, à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

- condamner la SA RML Micron'Est à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SA RML Micron'Est aux entiers frais et dépens.

La société RML Micron'Est a soulevé la prescription de la demande formée au titre des années 2000 et 2001, a demandé au Conseil de prud'hommes de débouter Paul X... de l'ensemble de ses prétentions et de le condamner au paiement de la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

Le conseil de prud'hommes de Thionville a, par jugement du 28 mai 2008, débouté Paul X... de toutes ses demandes, débouté la SA RML Micron'Est de sa demandé formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et mis les dépens à la charge de Paul X....

Suivant déclaration de son avocat expédiée le 25 juillet 2008 par lettre recommandée au greffe de la cour d'appel de Metz, Paul X... a interjeté appel de ce jugement, étant précisé que la lettre de notification dudit jugement adressée sous forme recommandée le 30 mai 2008 à Paul X... a été retournée au greffe de la juridiction sans que l'avis de réception ait été signé par son destinataire.

Par ordonnance du 8 juin 2010, l'affaire a été radiée.

Suivant acte reçu au greffe le 30 juin 2010, Paul X... a sollicité le rétablissement de celle-ci.

Par conclusions de son avocat, reprises oralement à l'audience de plaidoirie par ce dernier, Paul X... demande à la Cour de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel ;

- condamner la SA RML Micron'Est à lui payer la somme de 20 705,63 euros avec intérêts au taux légal à compter du 29 février 2004, au titre des heures supplémentaires effectuées au cours des années 2000-2003 et des congés payés y afférents ;

- condamner la SA RML Micron'Est à lui payer la somme de 11 616,66 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé;

- condamner la SA RML Micron'Est aux entiers frais et dépens y compris ceux de première instance ainsi qu'au paiement à hauteur de Cour d'une indemnité de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions de son avocat, reprises oralement à l'audience de plaidoirie par ce dernier, la SA RML'Micron'Est conclut à la prescription des demandes présentées au titre des heures supplémentaires pour la période 2000 et 2001, demande à la Cour de déclarer l'appel mal fondé, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner Paul X... aux entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L'ARRET

Vu le jugement entrepris ;

Vu les conclusions des parties, déposées le 30 juin 2010 pour l'appelant et le 30 mai 2012 pour l'intimée, présentées en cause d'appel et reprises oralement à l'audience de plaidoirie, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens invoqués et des prétentions émises ;

Sur la prescription

Paul X... estime qu'aucune prescription ne saurait lui être opposée dès lors que selon lui, sa saisine du Conseil de Prud'hommes a interrompu la prescription de l'action en paiement des heures supplémentaires.

La société RML Micron'Est fait valoir qu'en application de la prescription quinquennale, la demande en paiement d'heures supplémentaires pour les années 2000 et 2001, formée pour la première fois dans des conclusions datées du 7 février 2007, est prescrite.

* * *

Aux termes de l'article L 3245-1 du code du travail anciennement codifié à l'article L 143-14, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil.

En l'espèce, il résulte des pièces du dossier et, notamment des conclusions déposées les 20 décembre 2006 et 7 février 2007 par Paul X... devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes de Thionville, que la demande initiale de Paul X... formée lors de sa saisine du Conseil de Prud'hommes le 15 juin 2004 portait sur le paiement d'heures supplémentaires accomplies en 2002 et 2003 et que ce n'est qu'à l'audience du bureau de jugement du 7 février 2007, que Paul X... a sollicité le paiement d'heures supplémentaires pour les années 2000 et 2001 en demandant, à titre subsidiaire, la condamnation de son ex employeur à lui payer une certaine somme à titre d'heures supplémentaires réalisées de 2000 à 2004.

Cependant, si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à l'autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail.

Or, tel est bien le cas en l'occurrence, les différentes demandes en paiement d'heures supplémentaires formées par Paul X... se rattachant toutes à l'exécution d'un seul et même contrat de travail.

Dès lors, l'effet interruptif de la prescription résultant de la saisine du Conseil de Prud'hommes le 15 juin 2004 visant à l'obtention du paiement d'heures supplémentaires pour les années 2002 et 2003 bénéficie à la demande formée en cours d'instance, portant sur des heures supplémentaires pour les années 2000 et 2001.

En conséquence, il y a lieu de rejeter la fin de non recevoir tirée de la prescription.

Sur le rappel de salaire au titre des heures supplémentaires

Paul X... explique que le protocole d'accord portant sur les 35 heures qui avait été préparé n'a pas été signé par la direction dont il prétend qu'elle souhaitait que son effectif reste soumis à une durée hebdomadaire de 39 heures de travail, Paul X... soutenant que l'employeur a fait en sorte que son choix n'apparaisse par sur les bulletins de salaire qui mentionnent une durée hebdomadaire de 35 heures.

Il précise que ses demandes sont fondées sur les articles L 3121-26 et suivants du code du travail auxquels l'accord national du 28 juillet 1998 sur l'organisation du travail dans la métallurgie renvoie. Il ajoute que comptabilisant plus de 20 salariés au 1er janvier 2000, la société RML Micron'Est est assujettie à la durée légale de 35 heures depuis cette même date.

S'agissant des années 2000 et 2001, il fait valoir qu'il a travaillé sur la base de 39 heures hebdomadaires alors qu'il n'était rémunéré que pour une durée hebdomadaire de 35 heures. Il estime que les attestations qu'il produit confirment le temps de travail dont il se prévaut. Comptabilisant 4 heures supplémentaires par semaine pour 47 semaines annuelles travaillées sur une durée de deux ans, il aboutit à 376 heures supplémentaires auxquelles il applique une majoration de 25% sur la base d'un taux horaire normal de 12,77 euros.

S'agissant des années 2002 et 2003, il indique les semaines où il a effectué des heures supplémentaires en détaillant le nombre d'heures supplémentaires par semaine, appliquant une majoration de 25% de la 36ème à la 43ème heure et de 50% pour les heures suivantes sur la base du même taux horaire. Il conteste les fiches de pointage produites par l'employeur, déclarant n'en avoir jamais eu connaissance. Il considère que les explications données par la société RML Micron'Est quant aux fiches journalières de pointage qu'il fournit lui-même ne sont guère convaincantes, voire fausses, l'intéressé contestant avoir travaillé sur plusieurs machines en même temps. Il relève que la société RML Micron'Est s'abstient de produire les éléments issus du système de pointage qu'elle dit avoir mis en place en janvier 2001.

Au titre de la demande portant sur les années 2000 et 2001, la société RML Micron'Est affirme que Paul X... a travaillé 35 heures par semaine comme tous ses collègues, l'intimée faisant à cet égard référence aux avenants signés par ceux-ci aux termes desquels l'horaire de travail est passé à 151 heures par mois. Elle considère que les deux attestations produites par l'appelant ne justifient aucunement des heures qu'il réclame.

Au titre de la demande portant sur les années 2002 et 2003, elle prétend que les fiches sur lesquelles Paul X... se fonde sont des fiches de travail indiquant le temps de production des différentes machines sur lesquelles le salarié travaillait, machines qui fonctionnaient simultanément. Elle fait valoir à cet égard que l'intéressé était affecté à plusieurs machines, parfois jusqu'à trois. Elle explique que la mention TM figurant sur ces fiches signifie temps masqué, ce qui correspond au laps de temps pendant lequel plusieurs machines, placées sous le contrôle de Paul X..., usinaient de concert. Elle considère en conséquence qu'il faut défalquer du temps de production des machines ce temps masqué, ainsi qu'une demi-heure par jour pour le temps de repas, et que ce faisant, il apparaît que l'horaire hebdomadaire de Paul X... est bien de 35 heures. Elle soutient qu'elle-même prouve les heures effectuées par Paul X... par les fiches de pointage de l'ensemble du personnel établies par le chef d'atelier, la société RML Micron'Est indiquant avoir abandonné le système du badge à l'entrée et à la sortie du parking car celui-ci ne justifiait pas de la présence sur l'activité propre.

* * *

S'il résulte de l'article L 3171-4 du code du travail anciennement codifié à l'article L 212-1-1 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier d'étayer sa demande en fournissant des éléments suffisamment précis quant aux horaires accomplis pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En l'espèce, le bulletin de paie de janvier 2000 mentionne que Paul X... a travaillé 169 heures et que sa rémunération brute est composée d'un salaire de base mensuel de 11 500 francs, sans paiement d'heures supplémentaires. A partir de février 2000 et jusqu'à la fin de la relation contractuelle, il est fait état sur les fiches de paye de 151,66 heures travaillées par mois sans paiement d'heures supplémentaires, le salaire de base mensuel ayant été porté à 12 500 francs en février 2000.

Il est acquis aux débats que l'effectif de la société RLM Micron'Est était de plus de 20 salariés à la date du 1er janvier 2000 de sorte que l'entreprise s'est trouvée soumise à la durée légale de travail effectif de 35 heures par semaine à compter de cette date.

Or, il ressort du bulletin de salaire de janvier 2000 établi par l'employeur lui-même que Paul X... a travaillé durant ce mois 169 heures mais qu'il n'a perçu aucun paiement au titre d'heures supplémentaires. La société RLM Micron'Est ne conteste pas qu'avant la mise en oeuvre de la loi portant réduction du temps de travail, l'horaire collectif était de 39 heures par semaine. Il apparaît donc qu'en janvier 2000, Paul X... a travaillé 39 heures par semaine, soit 4 heures supplémentaires hebdomadaires. Il est donc en droit de prétendre au paiement de 16 heures supplémentaires majorées à 25% sur la base du taux horaire normal de 12,77 euros, les modalités de calcul de la rémunération des heures supplémentaires n'étant pas en elles-même critiquées, soit la somme de 255,36 euros outre celle de 25,54 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents.

Pour les mois qui ont suivi, Paul X... se fonde sur une attestation de Gilles Y..., salarié de la société RML Micron'Est jusqu'en juin 2000, qui indique qu'il pratiquait les horaires suivants en alternance : du lundi au jeudi de 6 à 14h ou de 14 à 22h et le vendredi de 6 à 13h ou de 13 à 20h et que Paul X... était toujours présent à son poste de travail à 7h et le quittait à 15h30.

Toutefois, il résulte des horaires en alternance dont le témoin fait lui-même état que Gilles Y... n'a pu personnellement constater la présence de Paul X... telle qu'il la mentionne. Cette attestation n'est donc pas crédible.

L'appelant verse aussi aux débats une attestation de Rémy Z..., salarié de la société RLM Micron'Est du 1er août 2000 au 31 mai 2002, qui indique que se trouvant à son poste de 8h à 12h et de 13 à 17h, Paul X... était lui-même à son poste à 8h et le quittait à 15h30 du lundi au vendredi.

Néanmoins, il convient de relever que le témoin précise qu'il était absent de son propre poste durant une heure, entre 12 et 13 heures, et qu'il n'atteste de la présence de Paul X... qu'à compter de 8h le matin de sorte qu'il peut seulement en être déduit que Paul X... se trouvait à son poste de 8 à 12h et de 13à 15h30, horaire qui ne caractérise pas l'accomplissement d'heures supplémentaires.

Par ailleurs, les deux attestations susvisées, dans lesquels chacun des salariés fait état pour lui-même d'un temps de travail de 39 heures par semaine, ne sauraient suffire à justifier à elles seules du bien fondé de l'allégation de Paul X... selon laquelle le personnel dans son ensemble est resté soumis à un horaire de 39 heures hebdomadaires et ce dès lors que l'entreprise comptait plus de vingt salariés et que pour sa part, la société RLM Micron'Est produit de nombreux avenants à contrat de travail signés par des salariés en janvier 2000 mentionnant un horaire de travail de 151,66 heures.

Aussi, Paul X... ne peut qu'être débouté du surplus de sa demande au titre des années 2000.

A compter du mois de janvier 2002, Paul X... verse aux débats pour les semaines où il prétend avoir effectué des heures supplémentaires un document par journée, intitulé "fiche journalière de pointage individuelle" avec l'indication de noms de clients, l'ordre de fabrication correspondant à chaque client, l'opération de gamme en cause et le temps passé par opération, la case observations portée en regard du temps passé étant parfois renseignée d'une mention d'une durée en "TM".

L'intitulé de cette fiche qui lui a été donné par l'employeur tend à démontrer qu'elle a pour but de déterminer l'activité de chaque salarié, ce que confirme les stipulations figurant dans les avenants à contrat de travail produits par l'intimée. En effet, il y est indiqué dans le paragraphe concernant la prime annuelle d'objectif, qui est calculée en fonction des heures "gagnées", que les commerciaux ou le chef d'atelier estiment les heures de travail vendues par opération de gamme, que le salarié effectue son pointage des heures de travail effectivement passées par opération et que les heures gagnées sont la différence entre les heures vendues et les heures passées, les temps masqués n'étant pas pris en compte.

Il s'ensuit que pour l'employeur lui-même, le temps passé correspond bien à des heures de travail accomplies par l'opérateur concerné.

S'agissant des lettres TM, force est de constater que Paul X... ne fournit aucune explication sur le sens des mentions qu'il a lui-même apposées à ce titre sur les fiches de pointage qui fondent sa demande.

Or, les avenants susvisés confirment que ces initiales correspondent à temps masqué et indiquent que ce temps doit être déduit du temps passé, clause sur laquelle les salariés concernés ont donné leur accord.

Il résulte par ailleurs desdites fiches que le temps de travail du salarié est comptabilisé par opération de production et que plusieurs productions sont parfois assurées le même jour. La photographie de l'atelier produite aux débats, dont Paul X... ne conteste pas qu'elle correspond à celui où il travaillait, démontre que ce site comprend plusieurs machines. Ces éléments confirment ainsi l'affirmation de l'employeur suivant laquelle l'intéressé pouvait travailler sur plusieurs machines en même temps.

Enfin, il convient de relever que si le temps masqué n'est pas déduit du temps passé, le temps de travail de Paul X... apparaît certains jours très élevé, allant jusqu'à 16h par jour, ce qui est incompatible avec l'attestation de Rémy Z... suivant laquelle il quittait son poste à 15h30.

En considération de ces éléments, il apparaît que le temps masqué désigne un temps de travail du salarié déjà pris en compte au titre d'une autre opération de sorte que le temps de travail effectif correspond à l'addition du temps passé sur chaque opération après déduction du temps masqué.

En revanche, dès lors que le temps passé est un temps de travail effectif, sous déduction du temps masqué, il n'est pas justifié d'y imputer un temps de repas.

Il s'ensuit que pour les années 2002 et 2003, le salarié étaye sa demande sous la réserve tenant au temps masqué alors que, pour sa part, l'employeur ne produit pas en réalité d'éléments sur les horaires de son salarié. En effet, les seuls documents fournis à cet égard, à savoir les suivis des présences-absences-aménagements d'horaires, sont non contradictoires et surtout ne mentionnent ni les horaires journaliers, ni même le temps de travail de chaque salarié.

En conséquence, Paul X... est fondé à réclamer le paiement des heures supplémentaires suivantes et ce, en appliquant une majoration de 25% de la 36ème à la 43ème heure et de 50% au delà sur la base d'un taux horaire normal de 12,77, soit :

Année 2002

semaines temps passé temps masqué temps de travail effectif HS total euros

2 43,5 4,5 39 4 63,84

3 48,75 10,75 38 3 47,31

4 61,25 23,25 38 3 47,31

5 52,75 14,75 38 3 47,31

21 50 18 32

22 60,25 23,5 36,75 1,75 27,93

23 50 12,25 37,75 2,75 43,36

26 62,25 18,5 43,75 8,75 142,05

27 40,75 9,75 31

31 44,75 5,75 39 4 63,84

32 57,75 18,75 39 4 63,84

33 47 12 35

34 52 20 32

38 45 6 39 4 63,84

39 43,75 4,75 39 4 63,84

40 49,75 10,75 39 4 63,84

41 48,25 9,25 39 4 63,84

42 49 4,75 44,25 9,25 151,63

43 38 7 31

46 41,25 10,25 31

47 64,25 25,5 38,75 3,75 59,13

48 55,75 16,75 39 4 63,84

50 60,5 20 40,5 4,5 70,96

51 51 12 39 4 63,84

représentant la somme de 1 211,55 euros au titre des heures supplémentaires, outre celle de 121,15 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents.

Année 2003

semaines temps passé temps masqué temps de travail effectif HS total euros

2 42,5 3,5 39 4 63,84

3 53 14 39 4 63,84

4 54,75 15,75 39 4 63,84

5 55,5 16 39,5 4,5 71,82

10 47,5 8 39,5 4,5 71,82

12 50,25 5,75 44,5 9,5 156,42

13 60,5 21,75 38,75 3,75 59,85

14 66,25 24,25 42 7 111,72

18 45,75 16,25 29,5

20 47 8 39 4 63,84

21 54,75 15,5 39,25 4,25 67,83

22 53,25 21,75 31,5

23 39 0 39 4 63,84

26 45,5 6,5 39 4 63,84

27 39,75 0,75 39 4 63,84

28 43,5 3,5 40 5 79,80

30 46,25 7,75 38,5 3,5 55,86

31 41,75 2,75 39 4 63,84

35 42,25 4,25 38 3 47,31

36 39,5 0,5 39 4 63,84

38 41 2 39 4 63,84

39 48,5 9,5 39 4 63,84

40 41,5 2,5 39 4 63,84

41 40,5 1,5 39 4 63,84

42 40,5 1,5 39 4 63,84

43 46 7 39 4 63,84

44 39,5 0,5 39 4 63,84

45 41 2 39 4 63,84

47 42 3 39 4 63,84

48 42 3 39 4 63,84

49 39 7 32

50 45,5 16,5 29

51 38,5 7,5 28

représentant la somme de 1 935,39 euros au titre des heures supplémentaires, outre celle de 193,54 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents.

En définitive, il y a donc lieu de condamner l'employeur à payer à Paul X... les sommes de:

- 3 402,30 euros au titre des heures supplémentaires ;

- 340,23 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents ;

et ce avec intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2004, date de saisine du Conseil de Prud'homme, à défaut de toute preuve d'une mise en demeure expédiée antérieurement à l'employeur.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé

Paul X... fonde sa demande sur les articles L 8221-3, L 8223-1 et R 3243-1 du code du travail.

L'intimée s'y oppose au motif que Paul X... n'a effectué aucune heure supplémentaire.

* * *

Aux termes de l'article L 8221-5 du code du travail, anciennement codifié à l'article L 324-10, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de, notamment, mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre 1er de la troisième partie.

En l'espèce, il résulte des énonciations précédentes que les bulletins de salaire de 2002 et 2003 de Paul X... ne font état d'aucune heure supplémentaire alors que l'employeur avait parfaitement connaissance des heures de travail accomplies par son salarié par les fiches journalières de pointage que celui-ci remettait chaque jour en fin de poste. En considération de ces éléments, du surcoût que représentait la prise en compte des heures supplémentaires et du fait que l'employeur n'invoque aucune erreur mais se prévaut uniquement de l'inexistence des heures supplémentaires, l'élément intentionnel du travail dissimulé est caractérisé.

En conséquence, Paul X... est en droit de prétendre à l'indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire prévue à l'article L 8223-1 du code du travail, anciennement codifié à l'article L 324-11-1 du même code. L'appelant, qui disposait d'un salaire mensuel brut de base de 1 936,11 euros, est ainsi en droit de prétendre à une indemnité à ce titre de 11 616,66 euros, soit 1 936,11 x 6, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société RML Micron'Est, qui succombe pour l'essentiel, doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel et déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Par suite, il y a lieu de condamner la société RML Micron'Est à payer à Paul X... la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel, le jugement étant confirmé sur les frais irrépétibles de première instance.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement et par arrêt contradictoire :

Reçoit l'appel de Paul X... contre un jugement rendu le 28 mai 2008 par le conseil de prud'hommes de Thionville ;

Infirme le jugement sauf en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile;

Statuant à nouveau et ajoutant :

Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription ;

Condamne la société RML Micron'Est à payer à Paul X... les sommes de :

- 3 402,30 euros au titre des heures supplémentaires avec intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2004 ;

- 340,23 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents avec intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2004 ;

- 11 616,66 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Condamne la société RML Micron'Est aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique au greffe de la chambre sociale de la cour d'appel de METZ le 24 septembre 2012, par Madame BOU, Conseiller, en l'absence du Président de Chambre empêché, assistée de Madame DESPHELIPPON, Greffier, et signé par elles.

Le Greffier, Le Conseiller,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de metz
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02377
Date de la décision : 24/09/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.metz;arret;2012-09-24;10.02377 ?
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