La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/06/2001 | FRANCE | N°2000/21164

France | France, Cour d'appel de Paris, 21 juin 2001, 2000/21164


COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section B ARRET DU 21 JUIN 2001

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/21164 Pas de jonction Décision dont appel : Décision rendue le 07/07/2000 par la COMMISSION D'INDEMNISATION DES VICTIMES (CIVI) de PARIS RG n :

1999/00469 Date ordonnance de clôture : 30 Mars 2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : MIXTE-REOUV. DEBATS APPELANT :

Monsieur X... Y... ... par Maître BODIN-CASALIS, avoué assisté de Maître LEDOUX, avocat au Barreau de Paris, P505 INTIME :

F.G.V.I. FONDS DE GARANTIE

DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET AUTRES INFRACTIONS pris en la personne de se...

COUR D'APPEL DE PARIS 1ère chambre, section B ARRET DU 21 JUIN 2001

(N , pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 2000/21164 Pas de jonction Décision dont appel : Décision rendue le 07/07/2000 par la COMMISSION D'INDEMNISATION DES VICTIMES (CIVI) de PARIS RG n :

1999/00469 Date ordonnance de clôture : 30 Mars 2001 Nature de la décision : CONTRADICTOIRE Décision : MIXTE-REOUV. DEBATS APPELANT :

Monsieur X... Y... ... par Maître BODIN-CASALIS, avoué assisté de Maître LEDOUX, avocat au Barreau de Paris, P505 INTIME :

F.G.V.I. FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET AUTRES INFRACTIONS pris en la personne de ses représentants légaux ayant son siège 64 rue Defrance 94682 VINCENNES CEDEX représenté par la SCP HARDOUIN, avoué assisté de Maître LEROY, avocat au Barreau de Paris, G891 COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré Président : Monsieur GRELLIER Z... :

Madame BRONGNIART Z... : Madame CHAUBON A... : lors des débats et du prononcé de l'arrêt A... : Madame B... MINISTERE C... : à qui le dossier a été préalablement communiqué : représenté aux débats par Madame D...,substitut général, qui a présenté des observations orales. DEBATS : A l'audience publique du 6 AVRIL 2001 ARRET : prononcé publiquement par Monsieur GRELLIER, Président, qui a signé la minute avec Madame B..., A.... Statuant sur l'assignation en référé en date du 4 août 2000, délivrée à la requête de M. Y... X... au Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions, ci après dénommé le FONDS, le Premier Président de la Cour d'appel de céans, par délégation, a, par ordonnance en date du 2 octobre 2000, d'une part, autorisé celui-ci à interjeter appel de la décision rendue par la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions du Tribunal de grande instance de Paris, en date du 7 juillet 2000, qui a sursis à statuer

sur sa demande d'indemnisation jusqu'au règlement de l'instruction judiciaire n 96 271 2701/0 conduite au Tribunal de grande instance de Paris, et, d'autre part, fixé l'examen de l'affaire à l'audience de la cour du 6 avril 2001; La déclaration d'appel de M. Y... X... a été remise au secrétariat greffe de cette cour le 6 octobre 2000; Par acte du 5 février 2001, M. Y... X... a fait assigner à jour fixe le FONDS; LA COUR Vu les conclusions de M. Y... X... par lesquelles celui-ci demande à la cour : - d'infirmer la décision entreprise - de constater que les atteintes et les dommages qu'il a subis résultent de faits qui présentent le caractère matériel du délit de blessures involontaires prévu et réprimé par l'article 222-19 du Code Pénal et d'abstention délictueuse prévue par l'article 223-6 du Code Pénal - de réparer comme suit son préjudice: préjudice personnel...........400.000 Francs - de dire que ces indemnités seront directement versées par le FONDS selon les modalités prévues à l'article R 50- 24 du Code de procédure pénale - de dire que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt à intervenir - de condamner le FONDS au paiement d'une somme de 15.000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et aux entiers dépens; Vu les conclusions du FONDS par lesquelles celui-ci demande à la cour: - de déclarer M. Y... X... irrecevable et mal fondée en son appel - de le débouter de l'ensemble de ses demandes - de confirmer la décision de la CIVI du 7 juillet 2000 en toutes ses dispositions A titre subsidiaire, - de dire que M. Y... X... n'établit pas , en l'état de la procédure , que son préjudice résulte de faits volontaires ou non , présentant le caractère matériel d'une infraction - de dire qu'il ne justifie d'aucun préjudice économique et personnel - de débouter M. Y... X... de sa demande

d'indemnisation A titre infiniment subsidiaire, - de ramener à de plus justes proportions la demande de condamnation formulée par M. Y... X... à l'encontre du FONDS au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; En tout état de cause, - de dire que les dépens seront à la charge du Trésor C... conformément aux dispositions des articles R 91 et R 92 -15 du code de procédure pénale; SUR CE Considérant que M. Y... X..., né le 29 octobre 1939, expose qu'il a été victime dans les locaux du campus de JUSSIEU, où il a travaillé en qualité de mécanicien depuis 1966, d'une pollution à l'amiante qui a entraîné des plaques pleurales ; qu'il soutient, en substance, essentiellement, que les risques liés à la présence d'amiante étaient parfaitement connus en raison de la réglementation existante et des nombreuses enquêtes effectuées sur le site de JUSSIEU, que la protection contre ce risque a été insuffisante et que son préjudice résulte de faits propres à caractériser l'élément matériel du délit de blessures involontaires et du délit d'abstention délictueuse prévus et réprimées respectivement par les articles 222-19 et 223-6 du code pénal; Considérant que le FONDS estime pour sa part, que le sursis à statuer s'impose, seul le juge d'instruction pouvant diligenter des enquêtes permettant d'apprécier les responsabilités et caractériser les éventuelles imprudences ayant concouru à la réalisation du dommage; qu'il fait valoir, à titre subsidiaire, qu'une décision d'indemnisation aboutirait à une réparation à la charge du FONDS alors que l'administration n'est pas tenue d'une indemnisation équivalente, que M. Y... X... n'établit pas le lien de causalité entre son préjudice et des faits présentant le caractère matériel d'une infraction, qu'il ne démontre pas l'existence du préjudice économique et personnel allégué, qu'il ne précise pas si il a formé une demande de réparation auprès des personnes mises en cause

et, enfin, qu'il ne justifie pas de ses droits au regard de la législation sociale et n'indique pas si il perçoit une allocation temporaire d'invalidité; Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 706-3 du code de procédure pénale que peut obtenir réparation de son préjudice, sous certaines conditions, toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'un infraction; Considérant qu'il résulte des éléments produits aux débats, notamment des différents rapports établis sur la présence d'amiante dans les locaux de JUSSIEU, que les risques liés à l'existence d'amiante sur le campus étaient bien connus , en premier lieu, en raison de la réglementation afférente à la matière, laquelle, d'une part, a concerné spécifiquement les travailleurs exposés à la poussière d'amiante depuis l'ordonnance du 2 août 1945, relative à la fibrose pulmonaire consécutive à l'inhalation de poussière renfermant de la silice ou de l'amiante, et le décret du 31 août 1950, qui a prévu l'inscription au tableau 30 des maladies professionnelles de l'asbestose, d'autre part, a interdit le flocage à l'amiante par l'arrêté du 29 juin 1977 et le décret du 20 mars 1978, par ailleurs, a introduit en 1985 au tableau des maladies professionnelles liées à cette matière le mésothéliome, les tumeurs de la plèvre et le cancer, et enfin a créé, en 1996, le tableau 30 bis ne faisant plus référence à des limites d'exposition et assurant la protection des travailleurs exposés à l'inhalation des poussières, et, en second lieu, en raison des rapports qui ont révélé les risques concernant spécifiquement le campus de JUSSIEU, construit entre 1964 et 1972, qui comprend l'université Pierre et Marie CURIE ( Paris VI), l'université Denis DIDEROT ( Paris VII) et l'institut de physique du globe de Paris ( IPGP), et , notamment, dés 1975, le rapport du laboratoire d'étude des particules inhalées ( LEPI) dont les conclusions ont été

confirmées par les recherches du CERCHAR et de l'INRS, puis en 1982 et 1983 le rapport de la SETEC qui a constaté l'absence de fermeture à clef des gaines dans les locaux de Paris VI et le rapport du BRGM qui a relevé une concentration de fibres par mètre cube dépassant dans certains endroits les seuils autorisés, et, enfin en 1995 un rapport établi par les sociétés BRGM, EUROTEC et FIBRECOUNT qui a relevé un risque important de pollution dans 22 % des locaux, résultant soit d'un flocage à nu dans les gaines techniques, soit de faux plafonds ne faisant pas écran aux fibres d'amiante; Considérant que le docteur E..., expert commis par le juge d'instruction a conclu dans son rapport , en date du 25 janvier 1999, versé à la procédure, que: "M. X... souffre d'une pathologie liée à un empoussiérage par fibres d'amiante. Il existe un épaississement pleural droit, postérieur accompagné de douleurs pleurales inconstantes. Il s'agit pour l'instant d'une pathologie bénigne. Mais rien ne permet de juger de l'avenir. En effet, dans cette pathologie professionnelle, il peut se déclarer très longtemps après l'exposition des pathologies plus graves telles qu'une pleurésie, une atteinte péricardique, un cancer bronchopulmonaire, un mésothéliome malin"; qu'il a fixé le taux d'IPP de M. X... à 5 % et indiqué qu'il existe indubitablement une relation de cause à effet entre son affection et ses conditions d'exercice professionnel, M. X... ayant été exposé pendant plus de 40 ans aux poussières d'amiante; que, par ailleurs, l'affection dont est atteint M. Y... X... a été reconnue comme maladie professionnelle au titre du tableau 30; Considérant que tout employeur a l'obligation de prendre toute mesure afin d'assurer la sécurité de ses salariés et de protéger leur santé; Considérant que le lien de causalité entre l'affection dont souffre M. Y... X... et son exposition à l'amiante dans le cadre de son activité professionnelle dans les locaux de JUSSIEU, nonobstant

les travaux qui y ont été réalisés, n'est pas contestable; Considérant qu'il s'ensuit, sans qu'il soit nécessaire, comme le soutient le FONDS, de surseoir à statuer pour déterminer les responsabilités en cause dans la présente affaire, que le dommage subi par M. Y... X... résulte de faits qui présentent, à tout le moins, le caractère matériel de l'infraction prévue à l'article R 622-1 du Code Pénal qui réprime le fait de porter, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, atteinte à l'intégrité d'autrui sans qu'il en résulte d'incapacité totale de travail ; Considérant que le FONDS ne peut, en outre, pour solliciter le rejet de sa demande, opposer utilement à M. Y... X... qu'il ne pourrait , en cas de décision allouant une indemnisation, exercer son recours subrogatoire à l'encontre de l'administration en raison des règles spécifiques régissant les accident de service ou maladies professionnelles dont sont victimes les fonctionnaires et agents de l'Etat, alors que la demande d'indemnisation de celui-ci tend à réparer un préjudice résultant d'une infraction pénale dans le cadre de la législation qui y est applicable et qu'aux termes de l'article 706-11 du Code de Procédure Pénale l'existence du recours subrogatoire du FONDS n'est pas une condition de recevabilité de la demande d'indemnisation ; qu'il ne peut davantage soutenir, avec pertinence, que la victime n'a pas précisé si une demande de réparation ou d'indemnité a été présentée auprès des personnes mises en cause et dans l'affirmative, la suite donnée à cette demande, dès lors que les dispositions des articles 706-3 et 706-9 du code de procédure pénale n'imposent pas à la victime d'une infraction de tenter d'obtenir l'indemnisation de son préjudice de la part des personnes responsables du dommage causé par l'infraction préalablement à la saisine d'une commission

d'indemnisation; Considérant que l'action introduite par M. Y... X... doit être déclarée recevable et que la décision déférée doit être infirmée; Sur le préjudice Considérant que M.Jacques X... ne justifie pas du montant des sommes de 60.000 F et de 400.000 F qu'il sollicite, respectivement, au titre de son préjudice économique et de son préjudice personnel; que par ailleurs il ne donne pas d'indication sur les éventuelles prestations qui lui ont été, ou lui sont encore versées, par un ou plusieurs organismes sociaux; qu'il convient, en conséquence, de prononcer la réouverture des débats pour lui permettre de communiquer ces éléments à Cour qui ne peut statuer en l'état; PAR CES MOTIFS Infirme la décision déférée; Statuant à nouveau, Dit que le préjudice dont M. Y... X... demande réparation résulte de faits présentant le caractère matériel d'une infraction, Déclare recevable sa demande d'indemnisation , Avant dire droit sur le préjudice: Prononce la réouverture des débats, Enjoint à M. Y... X...: -- de justifier du montant des sommes dont il sollicite le versement au titre de son préjudice économique et de son préjudice personnel, -- d'indiquer à la Cour si il a perçu, et si il perçoit encore, des prestations de la part d'organismes sociaux, et, dans l'affirmative, de préciser les organismes concernés et de fournir le décompte des prestations servies, Renvoie l'affaire pour clôture à l'audience du 5 octobre 2001, 13 H, et pour plaidoiries à l'audience du 19 décembre 2001, 14 H; LE A...

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Numéro d'arrêt : 2000/21164
Date de la décision : 21/06/2001

Analyses

INDEMNISATION DES VICTIMES D'INFRACTION - Infraction - Caractère matériel

L'action en réparation introduite sur le fondement de l'article 706-3 du Code procédure pénale par un salarié souffrant d'une affection, liée à l'exposition à l'amiante dans le cadre de son activité professionnelle est recevable dès lors que le dommage subi par lui résulte de faits présentant le caractère matériel de l'infraction prévue à l'article R. 622-1 du Code pénal, qui réprime le fait de porter, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, atteinte à l'intégrité d'autrui sans qu'il en résulte d'incapacité totale de travail


Références :

Code de procédure pénale, article 706-3
Code pénal, article R622-1

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2001-06-21;2000.21164 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award