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12/03/2008 | FRANCE | N°07/16603

France | France, Cour d'appel de Paris, Ct0149, 12 mars 2008, 07/16603


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 12 MARS 2008

(no , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/16603

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2007 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2007032534

APPELANTE

La Société MCADAMS

SPA de droit italien

agissant poursuites et diligences de son représentant légal

ayant son siège social Via S Vito 46

36020

ALBETTONE (VI)

ITALIE

représentée par la SCP VERDUN-SEVENO

assistée de Me Gilles MARTIN, (SELARL CAMPBELL PHILIPPART LAIGO et associés) avocat ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 12 MARS 2008

(no , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/16603

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2007 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2007032534

APPELANTE

La Société MCADAMS

SPA de droit italien

agissant poursuites et diligences de son représentant légal

ayant son siège social Via S Vito 46

36020 ALBETTONE (VI)

ITALIE

représentée par la SCP VERDUN-SEVENO

assistée de Me Gilles MARTIN, (SELARL CAMPBELL PHILIPPART LAIGO et associés) avocat au barreau de PARIS, toque : P400

INTIMÉE

LA SOCIÉTÉ INES DE LA FRESSANGE

SA

agissant poursuites et diligences de son représentant légal

ayant son siège social au 31 avenue Franklin Roosevelt

75008 PARIS

représentée par la SCP AUTIER

assistée de Me Laurent DIXSAUT, avocat au barrreau de PARIS, toque : B1139

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Février 2008, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Marcel FOULON et Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Madame Michèle GRAFF-DAUDRET étant chargée de faire un rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marcel FOULON, président

Monsieur Renaud BLANQUART, conseiller

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, conseiller

Greffier, lors des débats : Melle Delphine LIEVEN

ARRÊT :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par Monsieur Renaud BLANQUART, conseiller, Monsieur Marcel FOULON, président empêché

- signé par Monsieur Renaud BLANQUART, conseiller et par Melle Delphine LIEVEN, greffier présent lors du prononcé.

*

FAITS CONSTANTS :

Le 1er février 2007, la société INES DE LA FRESSANGE a conclu un contrat de production et de distribution de vêtements de prêt-à-porter avec la société de droit italien Mc ADAMS.

Par acte du 21 mai 2007, la société INES DE LA FRESSANGE a assigné la société de Mc ADAMS devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, aux fins de la voir condamner, à titre conservatoire, sous astreinte, d'avoir à exécuter l'ensemble de ses obligations au titre de ce contrat, de dire que cette production devra respecter les critères de diligence et de qualité correspondant aux usages de ce type de production dans le domaine de la mode, d'interdire à la société Mc ADAMS de commercialiser, sous quelque forme que ce soit, les produits siglés NEW YORK INDUSTRIES ou tout autre produit auprès du magasin « AU 7 » sis 5-7 rue de Tournon, ainsi qu'auprès de l'ensemble des magasins dont la liste a été communiquée par la société INES DE LA FRESSANGE et ce, pendant une durée de cinq années, sous astreinte, de condamner la société Mc ADAMS aux sommes de 250 000 euros et 400 000 euros, à titre de provision, à valoir sur dommages-intérêts, respectivement au titre de son préjudce commercial et de son préjudice d'image, de désigner un expert pour déterminer, notamment, les responsabilités encourues et les préjudices subis.

Par ordonnance contradictoire du 7 juin 2007, le juge des référés a :

- dit les demandes de la société INES DE LA FRESSANGE recevables,

- ordonné à ladite société de fournir à la société Mc ADAMS pour le 30 juin 2007 au plus tard la garantie prévue à l'article 8 du contrat et une garantie bancaire à première demande de règlement intégral à 30 jours fin de mois de livraison conforme, des factures correspondant aux 300 000 euros de commandes transmises par la société INES DE LA FRESSANGE à la société Mc ADAMS par courrier du 13 avril 2007,

- ordonné à la société Mc ADAMS, sous réserve de la fourniture à bonne date des garanties énoncées ci-dessus, d'exécuter les commandes qui lui ont été passées jusqu'à ce jour dans le cadre du contrat tant par la société INES DE LA FRESSANGE que par des tiers, ainsi que les futures commandes de réapprovisionnement, et ce dans un délai correspondant aux usages du commerce pour les livraisons de collections,

- dit n'y avoir lieu à référé sur les autres demandes ni à application de l'article 700 du CPC,

- condamné la société INES DE LA FRESSANGE aux dépens.

Le 13 août 2007, la société INES DE LA FRESSANGE a assigné la société Mc ADAMS devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, afin d'obtenir sa condamnation sous astreinte d'avoir, à compter de la date de livraison prévue pour les commandes passées par les clients de la société Mc ADAMS et à défaut de date prévue, à compter du 15 septembre 2007, date limite prévue par les usages, à exécuter l'obligation de satisfaire aux commandes mises à sa charge par l'ordonnance de référé du 7 juin 2007, et de la voir condamner à lui verser une provision de 50 000 euros au titre de son préjudice commercial et d'image.

Parallèlement, la société Mc ADAMS a saisi le même juge des référés d'une requête en interprétation de l'ordonnance du 7 juin 2007 portant sur le délai correspondant aux « usages du commerce pour les livraisons de collections ».

Statuant sur ces deux saisines le même jour, le juge des référés a, par une première ordonnance du 6 septembre 2007 (RG 2007050522), dit que « les usages du commerce sont une livraison avant le 15 septembre pour les collections Automne-Hiver pour autant que les parties se seraient mises d'accord et aient rempli leurs obligations préalables en temps utile pour tenir ce délai, compte tenu des contraintes normales et particulières d'approvisionnement et de fabrication. Dans la mesure où cette condition n'est pas remplie, il appartient donc aux parties de négocier de bonne foi un délai plus long ».

Aux termes d'une seconde ordonnance contradictoire du 6 septembre 2007 (RG 200705854), le juge des référés, après avoir relevé « qu'aucune des parties n'avait tenté de résoudre le problème des livraisons de façon constructive, la société INES DE LA FRESSANGE ne tenant pas compte des délais indiqués dans la lettre du 29 juin 2007 et la société Mc ADAMS ne faisant aucun effort particulier pour réduire ces délais et qu'il convenait d'ordonner une astreinte pour que la livraison des commandes soit assurée dans un délai qui implique des efforts particuliers pour la société Mc ADAMS, tout en limitant les conséquences des retards pour la société INES DE LA FRESSANGE », a :

- ordonné à la société Mc ADAMS de livrer conformément aux spécifications à la société INES DE LA FRESSANGE avant le 1er novembre 2007 la moitié en valeur des commandes passées et non annulées, et avant le 15 novembre 2007, le solde, le tout sous astreinte provisoire de 10 000 euros par jour de retard, pendant 30 jours, passé lequel délai il sera à nouveau fait droit,

- réservé la liquidation de l'astreinte,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- débouté les parties de leur demande au titre de l'article 700 du CPC,

- condamné la société Mc ADAMS aux dépens.

La société Mc ADAMS a interjeté appel des ordonnances du 7 juin 2007 et du 6 septembre 2007 (RG 2007050854) le 28 septembre 2007.

L'ordonnance de clôture a été rendue dans chacune des procédures le 12 février 2008.

PRETENTIONS ET MOYENS DE LA SOCIETE Mc ADAMS :

Par dernières conclusions du 23 janvier 2008, déposées en des termes identiques dans chacun des dossiers, auxquelles il convient de se reporter, la société Mc ADAMS fait valoir :

- que les parties ont signé un contrat de production et de distribution le 1er février 2007,

- que le 2 mars 2007, elle a organisé une présentation pour la marque INES DE LA FRESSANGE, qui n'a pas eu les résultats escomptés, et que le seuil minimum de

500 000 euros HT de commandes prévues n'a pas été atteint de sorte que la société INES DE LA FRESSANGE a artificiellement commandé elle-même des marchandises pour un montant de 248 418 euros afin d'échapper à l'obligation pesant sur elle de rembourser intégralement les frais de collection engagés par elle,

- que n'ayant pu obtenir la garantie bancaire prévue au contrat, elle a légitimement refusé de donner suite à cette commande,

- que la société INES DE LA FRESSANGE a fourni les garanties auxquelles elle s'était engagée le 27 juin 2007, mais que la validité de l'une d'elle a été discutée, s'agissant d'une garantie non bancaire, celle-ci étant finalement doublée d'une contre-garantie,

- qu'elle a fait savoir, par lettre du 29 juin 2007, à la société INES DE LA FRESSANGE que les dates de livraisons ne pourraient s'échelonner qu'entre novembre et décembre 2007, la société INES DE LA FRESSANGE exigeant, pour sa part, une livraison durant la période du 15 juillet au 15 septembre 2007 conformément aux usages, dates qu'elle considérait comme impossible à tenir,

- que l'appel de l'ordonnance du 7 juin 2007 n'est dirigé que contre la disposition ayant ordonné la production des commandes litigieuses, le premier juge s'étant fondé sur un péril imminent, alors qu'un tel péril n'existait pas au moment où ce juge a statué,

- que le péril imminent existait d'autant moins que les parties avaient elles-mêmes prévu la possibilité de la non fourniture de la collection Automne-Hiver 2007-2008, que la collection n'a pas rencontré de succès, seulement 241 918 euros de commandes ayant été obtenus de la part des boutiques démarchées et la société INES DE LA FRESSANGE ayant artificiellement passé pour 274 418 euros de commandes supplémentaires sans indiquer comment elle assurerait la distribution de ces produits,

- qu'elle n'avait plus, en tout état de cause, à ce moment là, la possibilité de prévenir un tel dommage,

- que l'exécution forcée ordonnée lui était préjudiciable,

- que l'infirmation de cette première ordonnance, du 7 juin 2007, même complétée, par l'ordonnance interprétative, doit entraîner corrélativement celle de la seconde ordonnance, du 6 septembre 2007, qui en est la suite,

- que même si la première en date de ces ordonnances venait à être confirmée, la seconde ordonnance devrait néanmoins être infirmée en raison de l'absence d'exécution par la société INES DE LA FRESSANGE de ses propres obligations imposées par la première ordonnance, de l'absence de péril imminent justifiant cette seconde ordonnance ainsi que de l'impossibilité matérielle d'exécuter cette décision,

- qu'elle a parfaitement respecté ses obligations de commercialisation que tant le nombre de boutiques contactées que leur choix ne peuvent être sérieusement contestés,

- qu'aucun acte de concurrence déloyale ne peut lui être reproché car elle a bien proposé les produits INES DE LA FRESSANGE dans le magasin rue de Tournon, pour la période considérée dans le contrat, saison Automne-Hiver 2007-2008, mais ils n'ont pas eu le succès attendu, qu'en outre, les produits NEW YORK INDUSTRIES commandés par cette boutique à Mc ADAMS correspondent à une période non couverte par le contrat, printemps-été 2007,

- que le contrat ne comportait aucune exclusivité ou interdiction de proposer des produits d'autres marques,

- qu'en ce qui concerne Dubaï, elle n'a commercialisé des produits de la marque NEW YORK INDUSTRIES que lorsqu'elle a appris que la société INES DE LA FRESSANGE avait définitivement renoncé à son projet dans ce pays,

- que la société INES DE LA FRESSANGE était au courant de l'organisation de la présentation conjointe des collections INES DE LA FRESSANGE et NEW YORK INDUSTRIES et que cette présentation loin de lui nuire, lui a profité,

- que les affirmations sur de prétendues difficultés financières qui seraient les siennes sont infondées et ne justifient, en tout état de cause, aucun manquement de la société INES DE LA FRESSANGE à ses propres obligations,

- que la société INES DE LA FRESSANGE engage sa responsabilité du chef d'un abus de procédure, dès lors que, pour échapper à son obligation de remboursement, elle a passé une commande artificielle puis l'a assignée en référé d'heure à heure pour obtenir, outre la production litigieuse, sa condamnation au paiement de sommes exorbitantes,

- que ces demandes l'ont contrainte à exposer des frais irrépétibles importants dans le cadre de plusieurs instances, y compris celle en interprétation.

Elle demande à la Cour :

- de joindre les deux procédures d'appel,

-de rejeter l'ensemble des demandes formées par la société INES DE LA FRESSANGE à titre principal ou par voie d'appel incident,

- d'infirmer l'ordonnance du 7 juin 2007 en ce qu'elle a ordonné la production par elle, de marchandises et, statuant à nouveau, de rejeter la demande de la société INES DE LA FRESSANGE à ce titre ainsi que toutes ses autres demandes,

- d'infirmer l'ordonnance du 6 septembre 2007 et de rejeter l'ensemble des demandes de la société INES DE LA FRESSANGE dans le cadre de cette seconde procédure à titre principal ou par voie d'appel incident,

- de condamner la société INES DE LA FRESSANGE à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- et la somme de 30 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,

- de condamner l'intimée aux entiers dépens.

Elle entend bénéficier des dispositions de l'article 699 du CPC.

PRETENTIONS ET MOYENS DE LA SOCIETE INES DE LA FRESSANGE :

Par dernières conclusions du 6 février 2008, auxquelles il convient de se reporter, la société INES DE LA FRESSANGE fait valoir que :

- qu'elle sollicite des mesures conservatoires de nature à permettre la prévention d'un dommage imminent, à savoir la non production de la collection Automne-Hiver 2007-2008 ; que même si la collection devait être commercialisée avec un retard important, la non commercialisation d'une collection entière pour une marque de luxe entraînerait pour elle un péril considérable en termes d'image ainsi qu'en termes financiers et pourrait conduire au licenciement de membres de son personnel,

- que la circonstance que les parties aient prévu la possibilité de la non exécution du contrat n'est pas de nature à démontrer l'absence de dommage imminent ou de trouble manifestement illicite,

- que la condition de passation de commandes pour un montant total de 500 000 euros a bien été réalisée, celles passées par elle n'ayant rien d'artificiel puisque l'intimée dispose de ses propres réseaux de commercialisation et s'adresse également, le cas échéant, à un soldeur dans le cas de livraisons tardives, et que le paiement de ces commandes était couvert par les garanties prévues au contrat,

- que l'argument de Mc ADAMS selon lequel 65 186 euros de produits commandés par la société INES DE LE FRESSANGE elle-même portaient sur des marchandises dont la vente avait été écartée ou dont les caractéristiques n'avaient pas été précisées est tardif et non étayé par la moindre preuve,

- que Mc ADAMS n'a jamais indiqué que l'intervention de Mme SEIGNARD DE LA FRESSANGE aurait été une condition essentielle de son intervention,

- que les demandes de Mc ADAMS de paiement anticipé des coûts de production, notamment des échantillons, ne sont justifiées par aucune clause du contrat,

- que Mc ADAMS n'est pas fondée à se retrancher derrière l'absence de garantie telle que prévue au contrat car elle réclamait des sommes exorbitantes au titre des frais avancés par elle, sans en justifier,

- qu'ainsi, aucun des arguments de Mc ADAMS pour refuser de produire n'est de nature à justifier ce refus, lequel constitue dès lors un trouble manifestement illicite,

- que la société Mc ADAMS a manqué à ses obligations contractuelles, car elle n'a pas sérieusement démarché les clients de la société INES DE LA FRESSANGE, s'abstenant totalement de démarcher les trois quarts des magasins clients les années précédentes ou démarchant des clients avec retard, de sorte que ceux-ci ont renoncé à passer commande, et que Mc ADAMS a réalisé 20 % à peine du chiffre d'affaires qualifié par elle-même, dans un « business plan », de minimal, ce afin que la collection n'atteigne pas les 500 000 euros de commandes prévus au contrat et qu'elle puisse ainsi recouvrer les frais exposés par elle au titre des prototypes conformément à l'article 6 du contrat ; qu'elle a fait des choix inadaptés de nature à entraver la commercialisation de la collection,

- que l'attitude de Mc ADAMS s'explique par les difficultés financières de cette société, qui a, en réalité, eu pour objectif de saborder la collection afin de récupérer au minimum les coûts exposés voire davantage, et de détourner le réseau commercial de la société INES DE LA FRESSANGE,

- qu'en outre, la société Mc ADAMS a commis des actes de concurrence déloyale : ainsi, elle a organisé la présentation de sa propre collection le même jour et à un horaire se chevauchant avec celui de la société INES DE LA FRESSANGE, et a utilisé les fichiers clientèle d'INES DE LA FRESSANGE pour commercialiser sa propre collection « NEW YORK INDUSTRIES », que tel est le cas du magasin « AU 7 » rue de Tournon à Paris 6ème, comme en attestent deux constats d'huissier de janvier et avril 2007, que, selon plusieurs témoignages, Mc ADAMS n'a pas proposé à ce magasin les mêmes conditions favorables que pour la commercialisation de sa propre collection, que de plus, elle a entravé le projet d'ouverture d'un magasin INES DE LA FRESSANGE à Dubaï pour y mettre en place la commercialisation de ses propres produits,

- qu'elle préférait voir sa collection produite, même avec retard, et commercialisée à travers ses propres réseaux ou soldée que perdue, d'importants coûts de stylisme et préparation ayant été avancés, sans compter le préjudice commercial et d'image, qu'elle subit ainsi un dommage imminent,

- que les dates de livraison proposées par Mc ADAMS sont contradictoires, que cette société a volontairement proposé des dates éloignées pour s'exonérer de ses obligations,

- que Mc ADAMS s'est contenter des réponses négatives de ses fournisseurs sans insister sur l'urgence ou chercher d'autres fournisseurs, alors qu'une livraison en novembre 2007 pour les soldes aurait pu permettre de sauver la collection et son image,

- que Mc ADAMS n'a pas interrogé les boutiques sur l'annulation éventuelle des commandes livrées avec retard mais au contraire leur a fait savoir qu'elles ne seraient pas livrées et ce, dès le prononcé de l'ordonnance l'obligeant pourtant à exécuter la production, l'ordonnance réservant par ailleurs la possibilité de l'annulation de commandes tardives,

- que Mc ADAMS ne prouve pas le caractère préjudiciable pour elle de la mise en production de la collection, qu'il n'y a pas impossibilité matérielle d'exécuter,

- que les obligations de la société Mc ADAMS ne sont pas sérieusement contestables et que la société INES DE LA FRESSANGE n'a fait que lui opposer l'exception d'inexécution,

- qu'elle est fondée à réclamer à Mc ADAMS une provision de 250 000 euros au titre des redevances exigibles, cette somme correspondant à la différence entre le chiffre d'affaires prévisibles et le chiffre d'affaires réalisé à ce jour au titre des commandes passées, ainsi qu'une somme de 400 000 euros au titre du préjudice d'image subi en raison des agissements de Mc ADAMS (manquements aux obligations de commercialisation, actes de concurrence déloyale),

- qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société INES DE LA FRESSANGE justifie d'un motif légitime à ce qu'il soit désigné un expert sur le fondement de l'article 145 du CPC afin que soit déterminées la teneur et l'étendue du préjudice subi par elle en raison des agissements de Mc ADAMS,

- que s'agissant des astreintes, la société Mc ADAMS a opposé de manière délibérée un refus manifeste d'exécuter la décision du juge des référés du 7 juin 2007, contrairement à la société INES DE LA FRESSANGE qui a fourni les garanties mises à sa charge par cette décision, de sorte qu'il convient d'augmenter de 10 000 à 30 000 euros l'astreinte prononcée par l'ordonnance du 6 septembre 2007, que l'absence de péril n'empêche pas le prononcé d'une astreinte, que cependant le péril est certain,

- que les garanties fournies par elle sont conformes au contrat et à l'ordonnance du 7 juin 2007, celle de la CEGI étant contre-garantie par la banque Palatine, et couvraient les livraisons devant être effectuées, aux termes de l'ordonnance du 6 septembre 2007, au 15 novembre au plus tard, sans qu'il soit nécessaire de les proroger.

Elle demande à la Cour :

- d'ordonner la jonction des instances d'appel initiées par la société Mc ADAMS,

- sur le "fond du référé", de condamner celle-ci, sous astreinte de 30 000 euros par jour de non faire, à compter du 1er novembre 2007, d'avoir à exécuter l'ensemble de ses obligations de production et de commercialisation au titre du contrat du 1er février 2007 et notamment de son article 2,

- de dire que cette production devra respecter les critères de diligence et de qualité correspondant aux usages de ce type de production dans le domaine de la mode,

- subsidiairement,

- de confirmer l'ordonnance du 7 juin 2007, en ce qu'elle a ordonné à la société INES DE LA FRESSANGE de fournir à la société Mc ADAMS pour le 30 juin 2007 au plus tard la garantie prévue à l'article 8 du contrat et une garantie à première demande, et ordonné à la société Mc ADAMS, sous réserve de la fourniture à bonne date de ces garanties, d'exécuter les commandes qui lui ont été passées jusqu'à ce jour dans le cadre du contrat tant par la société INES DE LA FRESSANGE que par des tiers, ainsi que les futures commandes de réapprovisionnement, et ce dans un délai correspondant aux usages du commerce pour les livraisons de collections,

- de dire que l'obligation faite à Mc ADAMS sera assortie d'une astreinte de 30 000 euros par jour de non faire à compter du 1er novembre 2007,

- de faire interdiction à la société Mc ADAMS de commercialiser sous quelque forme que ce soit les produits siglés NEW YORK INDUSTRIES ou tout autre produit auprès du magasin « AU 7 » sis 5-7 rue de Tournon, ainsi qu'auprès de l'ensemble des magasins dont la liste a été communiquée par la société INES DE LA FRESSANGE par courriel de Mme RUBENSTEIN du 7 novembre 2006 à 15 h 14, et ce pendant une durée de 5 années et sous astreinte définitive de 10 000 euros par infraction et par jour de non faire,

- de condamner la société Mc ADAMS à verser à la société INES DE LA FRESSANGE la somme de 250 000 euros à titre de provision à valoir sur dommages-intérêts au titre de son préjudice commercial,

- de la condamner à lui verser la somme de 400 000 euros à titre de provision à valoir sur dommages-intérêts au titre de son préjudice d'image,

- de désigner un expert avec pour mission de se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission, fournir d'une façon générale tous documents techniques ou de nature à permettre à la juridiction compétente de se prononcer sur les responsabilités encourues au titre des faits visés dans les écritures des parties, et notamment la responsabilité de la société Mc ADAMS au regard du démarchage par elle de la liste de clients qui lui avait été fournie par la société INES DE LA FRESSANGE ainsi que du fait de la non commercialisation par elle de la collection Automne-Hiver 2007-2008, et d'évaluer, s'il y a lieu, tous les préjudices subis de ces chefs, notamment les préjudices d'exploitation et les préjudices d'image,

- de débouter la société Mc ADAMS de toutes ses demandes,

- de dire que l'arrêt à intervenir sera, au vu de l'urgence, exécutoire au seul vu des minutes,

- de condamner Mc ADAMS à lui verser la somme de 500 000 euros au titre de son exercice abusif du droit d'appel,

- de condamner Mc ADAMS à lui verser la somme de 30 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,

- de condamner Mc ADAMS aux entiers dépens, dont le montant sera recouvré par la SCP AUTIER, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

SUR QUOI, LA COUR

Sur les injonctions de produire :

Le contrat de production et de distribution conclu entre les parties, pour la période relative à la commercialisation de la saison Automne-Hiver 2007-2008, comporte un article « 8. Garanties dues par la Maison » (société INES DE LA FRESSANGE ») aux termes duquel « La Maison fournira une garantie bancaire ou une caution personnelle de l'un de ses représentants légaux pour les montants correspondants aux coûts relatifs à l'échantillonnage tels que définis à l'article 3, à savoir : détermination analytique des coûts de réalisation des prototypes de la collection. La Maison s'engage à fournir une telle garantie au plus tard à la date du 15 février 2007 ».

Cette garantie apparaît avec évidence comme la condition des engagements du « Producteur » (Mc ADAMS).

La société INES DE LA FRESSANGE ne l'a cependant pas fournie dans le délai imparti.

Ce n'est que le 27 juin 2007 que, contrainte par l'ordonnance du 7 juin 2007 lui faisant injonction de fournir à la société Mc ADAMS pour le 30 juin 2007 au plus tard, la garantie prévue à l'article 8 du contrat et une garantie bancaire à première demande de règlement intégral, à 30 jours fin de mois de livraison conforme, des factures correspondant aux 300 000 euros de commandes transmises par la société INES DE LA FRESSANGE à la société Mc ADAMS par courrier du 13 avril 2007, que la société INES DE LA FRESSANGE transmettait un acte de cautionnement de Monsieur VUITTON.

Elle ne justifie d'aucun élément qui lui aurait permis de s'exonérer de la fourniture de la garantie promise dans le délai prévu « au plus tard » au contrat, lequel, dès lors qu'il « couvrait », aux termes de son article « 11. Durée du contrat », « exclusivement la période relative à la commercialisation de la saison Automne-Hiver 2007-2008, laquelle sera commercialisée à compter du 1er février », prévoyait nécessairement des délais de nature à permettre la livraison de cette collection dans un délai correspondant aux usages du commerce pour les livraisons de collections à savoir, selon les pièces produites, durant la période courant du 15 juillet au 15 septembre 2007, ce que les parties ne pouvaient ignorer, en tant que professionnels du prêt à porter.

En conséquence, il convient d'infirmer l'ordonnance du 7 juin 2007 et corrélativement, celle du 6 septembre 2007, et de dire n'avoir lieu d'ordonner la production sollicitée.

Sur les demandes de dommages-intérêts et d'expertise au titre de l'exécution du contrat :

Il résulte de ce qui précède que la société INES DE LA FRESSANGE est responsable de l'inexécution du contrat et qu'elle ne justifie d'aucun motif légitime de voir ordonner une expertise.

Ses demandes de dommages-intérêts provisionnels seront donc rejetées.

Il en va de même de sa demande d'expertise fondée sur l'article 145 du CPC.

Sur la concurrence déloyale :

Il résulte des éléments produits que la société Mc ADAMS a informé la société INES DE LA FRESSANGE de ce qu'elle se proposait d'organiser la présentation conjointe des collections INES DE LA FRESSANGE et NEW YORK INDUSTRIES lors d'un cocktail le 2 mars 2007, dans le but de la faire bénéficier des retombées commerciales et médiatiques de cette manifestation et l'a, notamment, sollicitée, « de lui faire parvenir une liste de nominatifs à inviter », sans rencontrer d'opposition de sa part.

Les allégations de la société INES DE LA FRESSANGE concernant les magasins du 5/7 rue de Tournon à Paris 16 ème et de Dubaï sont contredites par les éléments produits par la société Mc ADAMS.

Il n'apparaît donc pas avec l'évidence requise devant le juge des référés que cette dernière société ait commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société INES DE LA FRESSANGE.

Il y a, en conséquence, lieu de rejeter les demandes provisionnelles faites à ce titre.

La société INES DE LA FRESSANGE ne fournit pas non plus suffisamment d'éléments faisant ressortir l'existence d'un motif légitime permettant d'ordonner une expertise sur les faits allégués à ce titre dans les conditions autorisées par l'article 145 du CPC.

Sur les demandes pour procédure abusive :

Ni la société INES DE LA FRESSANGE ni la société Mc ADAMS ne démontrent en quoi l'exercice par leur contractant de son droit d'agir en justice aurait dégénéré en abus.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la société Mc ADAMS les frais irrépétibles qu'elle a exposés pour la présente instance ;

La société INES DE LA FRESSANGE, qui succombe, devra supporter les dépens de première instance et d'appel ; qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance du 6 septembre 2007 en ce qu'elle a condamné la société Mc ADAMS aux dépens ;

PAR CES MOTIFS :

Joint les procédures d'appel n 07/16 603 et 07/16 606,

Infirme l'ordonnance du 7 juin 2007, en ce qu'elle a dit les demandes de la société INES DE LA FRESSANGE recevables, en ce qu'elle a ordonné à celle-ci de fournir à la société Mc ADAMS pour le 30 juin 2007 au plus tard la garantie prévue à l'article 8 du contrat et une garantie bancaire à première demande, et en ce qu'elle a ordonné à la société Mc ADAMS, sous réserve de la fourniture à bonne date des garanties énoncées, d'exécuter les commandes qui lui ont été passées jusqu'à ce jour dans le cadre du contrat tant par la société INES DE LA FRESSANGE que par des tiers, ainsi que les futures commandes de réapprovisionnement, et ce dans un délai correspondant aux usages du commerce pour les livraisons de collections,

Confirme cette ordonnance pour le surplus,

Infirme l'ordonnance du 6 septembre 2007, dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

Rejette les demandes des parties,

Ajoutant aux deux ordonnances :

Rejette les demandes de dommages-intérêts provisionnels,

Rejette les demandes formées au titre de l'article 700 du CPC,

Condamne la société INES DE LA FRESSANGE aux dépens afférents à l'instance ayant donné lieu à l'ordonnance du 6 septembre 2007 dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 48, 59 euros TTC dont TVA 7, 75 euros),

Condamne la société INES DE LA FRESSANGE aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

LE GREFFIER P/LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Ct0149
Numéro d'arrêt : 07/16603
Date de la décision : 12/03/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal correctionnel de Paris, 07 juin 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2008-03-12;07.16603 ?
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