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25/05/2010 | FRANCE | N°08/10400

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 25 mai 2010, 08/10400


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 25 mai 2010



(n° 6 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10400



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 juin 2008 par le conseil de prud'hommes de Paris chambre 5 section encadrement RG n° 07/08031





APPELANT



M. [E] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Christian DECAUX, avocat au barreau

de DIJON







INTIMÉE



SA LABORATOIRES FOURNIER

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Joseph AGUERA, avocat au barreau de LYON







COMPOSITION DE LA COUR :

En app...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 25 mai 2010

(n° 6 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/10400

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 11 juin 2008 par le conseil de prud'hommes de Paris chambre 5 section encadrement RG n° 07/08031

APPELANT

M. [E] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Christian DECAUX, avocat au barreau de DIJON

INTIMÉE

SA LABORATOIRES FOURNIER

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Joseph AGUERA, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 octobre 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Serge TRASSOUDAINE, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Elisabeth PANTHOU-RENARD, présidente

Mme Michèle MARTINEZ, conseillère

M. Serge TRASSOUDAINE, conseiller

Greffier : Mme Ingrid JOHANSSON, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Elisabeth PANTHOU-RENARD, présidente, et par M. Eddy VITALIS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé des faits et de la procédure :

Engagé à compter du 2 novembre 2000, selon un contrat de travail à durée indéterminée du 16 octobre 2000, en qualité de contrôleur financier des opérations pharmaceutiques France ventes, statut cadre, par la société anonyme Laboratoires FOURNIER, puis promu directeur financier "des opérations US et des opérations de Cork" à compter du 20 janvier 2005, M. [E] [U] a, selon une lettre recommandée avec avis de réception du 9 mai 2007, fait l'objet d'un licenciement pour motif économique en raison de la suppression de son poste de directeur financier par suite d'une réorganisation de l'entreprise rendue nécessaire par la cession, le 28 juillet 2005, de la société Laboratoires FOURNIER au groupe SOLVAY.

Contestant l'assiette de calcul de l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue par l'article 33 de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique, ainsi que de l'indemnité financière de rupture et de l'indemnité d'initiative individuelle prévues par les fiches 13 et 11 du plan de sauvegarde de l'emploi, qui lui ont été versées en mai 2007 à concurrence respectivement des sommes de 27.484,53 €, 52.351,48 € et 91.615,09 € net, calculées sur la base d'un salaire de référence de 13.087,87 € brut n'incluant pas un "stay" bonus de 57.720 € brut ni l'intéressement perçus en août 2006, il a saisi, le 13 juillet 2007, le conseil de prud'hommes de Paris qui, par un jugement du 11 juin 2008, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes en paiement des sommes complémentaires de 10.912 €, 20.784,80 € et 36.373,40 €.

Appelant, M. [U], qui conclut à l'infirmation de cette décision, demande de condamner la société Laboratoires FOURNIER à lui verser la somme complémentaire de 72.020,88 €, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2007, date du paiement des trois indemnités précitées, ainsi que la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Intimée, la société Laboratoires FOURNIER, qui conclut à la confirmation du jugement déféré, demande de débouter M. [U] de l'intégralité de ses prétentions et de le condamner à lui payer la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 28 octobre 2009, reprises et complétées lors de l'audience.

Motifs de la décision :

Les parties s'accordent sur le fait qu'aussi bien l'indemnité conventionnelle de licenciement, que les deux indemnités financière de rupture et d'initiative individuelle prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi, ont pour base de calcul, ou "salaire de référence", la rémunération telle qu'elle est définie par l'article 33, 2° de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique, laquelle est ainsi rédigé :

" La base de calcul de l'indemnité de licenciement est la rémunération effective totale mensuelle gagnée par le salarié licencié pendant le mois précédent le préavis de licenciement. Cette rémunération ne saurait être inférieure à la moyenne des rémunérations mensuelles des douze mois précédant le préavis de licenciement.

Pour le calcul de cette rémunération entrent en ligne de compte, outre les appointements de base, les majorations relatives à la durée du travail, les avantages en nature, les primes de toute nature, y compris les primes de rendement, les primes à la productivité et la prime d'ancienneté, lorsqu'elle est attribuée au salarié, les participations au chiffre d'affaires ou aux résultats, les gratifications diverses ayant le caractère contractuel ou le fait d'un complément de rémunération annuelle, à l'exclusion des gratifications exceptionnelles.

N'entrent pas en ligne de compte les sommes versées à titre de remboursement de frais, la prime de transport de la région parisienne, les primes d'insalubrité ou de travaux salissants, de danger, de froid ou de pénibilité".

Le bonus perçu, en août 2006, par M. [U], pour être resté à cette date plus d'un an dans ses fonctions de directeur financier de la société Laboratoires FOURNIER après que celle-ci eut été cédée le 28 juillet 2005 au groupe SOLVAY, constitue l'exécution, par l'employeur, d'une obligation contractuelle découlant d'un avenant confidentiel à son contrat de travail, cosigné le 30 septembre 2002 par le président, le directeur général des opérations pharmaceutiques France et le directeur des ressources humaines de la société Laboratoires FOURNIER, ainsi que par M. [U], dont l'article 1er est ainsi rédigé :

"Conscientes de la nécessité pour le groupe FOURNIER de chercher à adosser sa branche pharmacie sur des partenaires lui permettant d'assurer sa pérennité, et soucieuses de reconnaître l'importance de la contribution de M. [E] [U] aux performances de l'entreprise, tant dans la perspective de son éventuelle cession à un nouvel actionnaire que suite à la prise de contrôle qui interviendrait ainsi, les parties sont convenues du versement d'un bonus conditionné à la présence de M. [E] [U] à l'issue d'une période de douze mois suivant l'acte consacrant une telle cession.

Ce bonus, versé le mois suivant la date anniversaire de la cession, serait d'un montant de six fois le salaire mensuel brut de base de M. [E] [U] à cette date, cette base mensuelle étant augmentée d'un douzième, représentatif du prorata du treizième mois.

En cas de départ de l'entreprise dans le cours des douze mois suivant la cession, aucun bonus ne serait versé. Cependant, en cas de licenciement de M. [E] [U] après cession mais avant la date anniversaire ci-dessus évoquée et hors cas de faute grave ou lourde, il percevrait une indemnité de licenciement majorée de six mois".

Ces stipulations contractuelles sont explicitées par une note interne, confidentielle, du 16 septembre 2002, intitulée "texte de présentation du stay bonus", indiquant tout spécialement :

"Pour que ce rapprochement se fasse dans les meilleures conditions pour l'entreprise et ses salariés, il convient de continuer à la faire fonctionner, à la développer et notamment à finaliser le projet Autonomie. Votre contribution, ainsi que votre capacité à fédérer vos collaborateurs autour de ces projets, avant et après la cession, sont importantes pour l'entreprise. Conscient de l'engagement et de la charge de travail qui vont être les vôtres pendant cette période, l'entreprise vous versera, à l'issue de ces projets, soit 12 mois après la cession, une prime d'un montant brut équivalent à .... mois de salaire de base [...]. Nous savons que nous pouvons compter sur votre collaboration pour atteindre ces objectifs indispensables à la pérennité et au développement de la Pharmacie", et précisant en outre, dans les commentaires : "Cette prime sera fiscalisable et cotisable".

Il en résulte que ce bonus correspondait non seulement à la volonté de la société Laboratoires FOURNIER de s'assurer du maintien des compétences stratégiques de certains cadres de haut niveau, dont faisait partie M. [U], mais aussi de garantir à ceux-ci, de manière non discrétionnaire, dans l'hypothèque d'une cession effective de l'entreprise, un complément de rémunération annuelle intégrant expressément une somme représentative du prorata de treizième mois, ayant un caractère contractuel et reposant sur des critères objectifs ne dépendant pas de la volonté de l'employeur, destiné à rémunérer, sinon le "rendement" ou la "productivité" stricto sensu du personnel d'encadrement supérieur, à tout le moins l'engagement et la charge de travail supplémentaires de ces salariés dont le contrat de travail stipulait, en raison de leur forte autonomie d'organisation, un décompte du temps de travail en jours et un forfait annuel de jours travaillés.

Ce n'est donc qu'à titre superfétatoire qu'il sera observé, sans préjudice du rapport d'audit financier du cabinet DELOITTE du 13 juillet 2006 énonçant, de manière concordante

(p. 4), que "les stay bonus sont désormais pris en compte dans le calcul du salaire de référence", que c'est à juste titre que M. [U] se prévaut accessoirement (cf. ses conclusions d'appel, p. 14), au vu de documents probants qui sont versés aux débats (sommation de la SCP d'huissiers de justice LE GOFF- KAPRAL du 1er mars 2008 ; lettre à M. [B] du directeur des ressources humaines de la société Laboratoires FOURNIER du 14 mars 2006), d'une inégalité de traitement par rapport au traitement réservé à d'autres salariés de l'entreprise, tels que M. [K] [B].

L'employeur qui, dans ces conditions, apparaît mal fondé à soutenir qu'il s'agissait d'une "gratification exceptionnelle" au sens de l'article 33 de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique, ou d'une contrepartie indemnitaire récompensant la fidélité du salarié ou compensant une sujétion de maintien de ce cadre dans les effectifs, aurait donc dû prendre en compte la somme de 57.720 € brut, perçue en août 2006 à titre de bonus par M. [U], qui constituait un des éléments de sa rémunération à intégrer dans le salaire de référence servant d'assiette aux calculs de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité financière de rupture et de l'indemnité d'initiative individuelle.

Il en va de même pour le montant de l'intéressement perçu au même moment par

M. [U] à concurrence de la somme de 7.574,35 €, dès lors que, de manière plus favorable que la loi, la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique du

6 avril 1956 prévoit expressément, en son article 33, 2°, qu'entrent en ligne de compte pour le calcul de la rémunération, qui sert de base au calcul des trois indemnités précitées, "les participations au chiffre d'affaires et aux résultats" et qu'en outre, ce texte n'exclut de l'assiette de calcul, de manière claire et précise, que les gratifications exceptionnelles, ainsi que les sommes versées à titre de remboursement de frais, la prime de transport de la région parisienne, les primes d'insalubrité ou de travaux salissants, de danger, de froid ou de pénibilité.

Il s'ensuit que, contrairement à ce qu'a décidé le conseil de prud'hommes, dont la décision sera infirmée, M. [U] est bien fondé à solliciter la condamnation de la société Laboratoires FOURNIER à lui payer, suivant son décompte non contesté par la partie adverse, la somme complémentaire totale de 72.020,88 €, étant précisé que les intérêts au taux légal ne doivent courir qu'à compter du 20 juillet 2007, date de réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement déféré ;

Condamne la société anonyme Laboratoires FOURNIER à payer à M. [E] [U] la somme de 72.020,88 €, avec intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2007 ;

Condamne la société anonyme Laboratoires FOURNIER aux dépens de première instance et d'appel ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la société anonyme Laboratoires FOURNIER de sa demande pour frais irrépétibles et la condamne à payer, de ce chef, la somme de 2.500 € à M. [E] [U].

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 08/10400
Date de la décision : 25/05/2010

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°08/10400 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-05-25;08.10400 ?
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