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13/10/2010 | FRANCE | N°08/22756

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 13 octobre 2010, 08/22756


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2010



(n° , 09 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/22756



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Novembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/11288





APPELANTE



La société civile SPEDIDAM

Agissant poursuites et diligences de ses représentan

ts légaux

ayant son siège [Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour

assistée de Me Guillem QUERZOLA, avocat au barreau de Paris, toque E 606





INTIMÉES...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2010

(n° , 09 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/22756

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Novembre 2008 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/11288

APPELANTE

La société civile SPEDIDAM

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour

assistée de Me Guillem QUERZOLA, avocat au barreau de Paris, toque E 606

INTIMÉES

La société MEDICI ARTS INTERNATIONAL, S.A.S.

Anciennement dénommée IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL

Prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour

assistée de Me François POUGET, avocat au barreau de Paris, toque E 1458

UNION SYNDICALE DE LA PRODUCTION AUDIOVISUELLE - USPA

Pris en la personne de son représentant légal

intervenant volontaire

ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 6]

représenté par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour

assisté de Me Christophe CARON, avocat au barreau de Paris, toque C 500

plaidant pour la SCP Cabinet Christophe CARON (AARPI)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Juin 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Didier PIMOULLE, Président

Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère

Madame Anne-Marie GABER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Melle Aurélie GESLIN

ARRÊT :- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président et par Mademoiselle Aurélie GESLIN, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement contradictoire du 5 novembre 2008 rendu par le tribunal de grande instance de Paris,

Vu l'appel interjeté le 3 décembre 2008 par la société SPEDIDAM, Société de Perception et de Distribution des Droits des Artistes-Interprètes de la Musique et de la Danse,

Vu les dernières conclusions du 8 juin 2010 de la société appelante,

Vu les dernières conclusions du 15 juin 2010 de la société MEDICI ARTS INTERNATIONAL (ci-après dite MEDICI), anciennement dénommée IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL (ci-après dite IDEALE), intimée et incidemment appelante,

Vu les dernières conclusions du 28 avril 2010 de l'Union Syndicale de la Production Audiovisuelle, dite USPA, intervenante volontaire intimée et incidemment appelante,

Vu l'ordonnance de clôture du 15 juin 2010,

SUR CE, LA COUR,

Considérant que la société IDEALE (actuellement MEDICI), a entrepris d'exploiter sous forme de vidéogrammes du commerce divers enregistrements audiovisuels d''uvres de musique classique dans une collection de DVD intitulée 'classic archive' interprétées en particulier par différentes formations d'orchestres français de l'ORTF et recueillies dans le fonds d'archives télévisuelles de l'INA ;

Que la SPEDIDAM, faisant valoir qu'elle n'a délivré aucune autorisation d'utilisation secondaire pour le compte des artistes interprètes dont elle gère les droits pour 31 de ces enregistrements et que les droits d'au moins 424 artistes interprètes ont été violés par la société IDEALE, a fait assigner cette dernière devant le tribunal de grande instance de Paris le 31 juillet 2006 en réparation du préjudice individuel subi par les artistes interprètes et du préjudice collectif subi par la profession des artistes interprètes ;

Que le syndicat USPA est intervenu volontairement à l'instance le 28 novembre 2006 dans l'intérêt collectif de la profession des producteurs audiovisuels ;

Que, suivant jugement dont appel les premiers juges ont essentiellement :

-déclaré recevable l'action de la SPEDIDAM $gt;, mais l'a déclarée irrecevable à agir pour la défense des intérêts individuels des autres artistes interprètes ayant participé aux enregistrements litigieux $gt; de la SPEDIDAM,

-déclaré recevable l'action de l'USPA,

-dit que la société IDEALE devait solliciter l'autorisation écrite des 313 artistes interprètes sus visés ayant participé aux 31 enregistrements litigieux représentés par la SPEDIDAM avant de commercialiser les DVD litigieux,

-dit que la SPEDIDAM a abusé de sa position dominante dans la négociation des droits et rejeté sa demande de communication de la liste complète des artistes interprètes concernés,

-condamné la société IDEALE à payer à la SPEDIDAM 17.000 euros en réparation du préjudice individuel subi $gt; et 1 euro en réparation du préjudice collectif subi par la profession d'artistes-interprètes,

-condamné la SPEDIDAM à verser à la société IDEALE 1 euro de dommages-intérêts ;

Sur les fins de non recevoir

Considérant que la SPEDIDAM soutient que c'est à tort que le tribunal l'a déclarée irrecevable à agir pour des artistes interprètes non membres ou qui ne lui auraient pas donné mandat, et reprend en cause d'appel la fin de non recevoir tirée du défaut du droit d'agir de l'USPA ;

Que la société de reproduction MEDICI (anciennement IDEALE) oppose, appuyée sur ce point par l'USPA dont elle est membre, l'irrecevabilité de l'action de la SPEDIDAM au titre des droits individuels d'artistes interprètes non adhérents, et prétend en outre que cette société de gestion collective serait irrecevable à agir au nom de ses membres et de l'intérêt collectif de la profession ;

Sur la qualité à agir de la SPEDIDAM

-au titre de l'intérêt collectif

Considérant que pour apprécier la recevabilité de l'action dans l'intérêt collectif d'une profession il importe peu que la preuve d'une violation d'intérêts individuels ou de l'intérêt collectif, qui relève d'une appréciation au fond soit ou non effectivement rapportée, ou que les intéressés n'aient pas entendu agir à titre personnel ;

Qu'il a en revanche été justement retenu en première instance que la SPEDIDAM, société de perception et de répartition de droits d'artistes interprètes, était recevable en une telle action, s'agissant de défendre des droits dont elle a statutairement la charge, ayant aux termes de l'article 3-5 de ses statuts $gt; (ainsi que par toute disposition nationale) et le litige portant sur l'autorisation devant être donnée par les artistes interprètes conformément aux dispositions de l'article L 212-3 du Code de la propriété intellectuelle (pour la reproduction et la communication de leur prestation au public) ainsi que le mode de calcul de leur rémunération (régie par le Code du travail et celui de la propriété intellectuelle), ce qui intéresse incontestablement l'ensemble de la profession ;

Que la décision déféré sera confirmée en ce qu'elle a déclarée l'action recevable de ce chef ;

-au titre des droits individuels

Considérant que la SPEDIDAM soutient qu'elle est non seulement recevable à agir au titre de la défense de l'intérêt collectif à raison de l'atteinte à l'intérêt général des titulaires de droits, y compris des artistes interprètes non membres, mais également à raison du préjudice individuel subi tant par ses 313 membres, que par les 111 artistes-interprètes identifiés qui ne sont ni ses adhérents ni ses mandants et qui ont participé aux 31 enregistrements en cause énumérés dans ses écritures ;

Considérant qu'à l'appui de cette prétention elle fait valoir que l'article 3 de ses statuts, auquel renvoie l'article L. 321-1 du Code de la propriété intellectuelle, n'opère aucune distinction selon que les artistes interprètes pour lesquels elle agit sont ou non ses adhérents, et partant ne limitent pas sa qualité à agir à ses seuls membres, et qu'aucune disposition légale ne subordonne son droit d'agir à la production d'un mandat spécial ;

Considérant toutefois que si l'article 3-5 précité des statuts de la SPEDIDAM indique qu'elle a qualité pour ester en justice $gt;, il convient de relever que cette société civile de gestion collective n'a été constituée qu'entre les membres fondateurs et $gt;, et que l'article 3 vise notamment l'exercice des droits définis à l'article 2, savoir ceux des adhérents, et $gt; ;

Considérant par ailleurs que l'article L.321-1 du code de la propriété intellectuelle en reconnaissant aux sociétés de gestion collective, telle la SPEDIDAM, le droit d'agir pour la défense des droits dont elles ont statutairement la charge, ne saurait leur conférer le pouvoir d'agir pour défendre les droits de professionnels qui n'auraient pas adhéré à leurs statuts ou ne leur auraient pas confié le mandat exprès de les représenter ;

Considérant qu'en réalité la SPEDIDAM, nonobstant sa qualité, ne saurait valablement revendiquer des droits dont elle n'est pas elle-même titulaire, en s'arrogeant de manière universelle le droit de réclamer, à la place de tout artiste-interprète victime supposée d'une atteinte à ses droits, la condamnation à son profit de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de cette atteinte par l'artiste-interprète intéressé ;

Considérant que si la SPEDIDAM peut se prévaloir d'un préjudice qui lui serait propre, comme portant atteinte à ses intérêts propres ou collectivement à la profession des artistes interprètes (s'agissant de la défense d'intérêts dont elle a statutairement la charge), elle ne peut agir qu'au nom de chacun de ses adhérents ou mandants en réparation du préjudice qui leur a été causé individuellement ;

Considérant que la décision des premiers juges sera donc approuvée en ce qu'elle a retenu que la SPEDIDAM est habilitée à agir en justice pour défendre les intérêts individuels et personnels des artistes interprètes à condition qu'ils en soient membres ou lui aient donné mandat exprès de les représenter ;

Considérant cependant que la société MEDICI prétend qu'il n'est pas justifié du nombre réel des artistes interprètes concernés, du fait qu'ils seraient toujours en vie ou que le mandat initial aurait été réitéré par les héritiers, ni d'un apport effectif des droits à la SPEDIDAM ;

Considérant, sur ce dernier point, qu' il sera rappelé que la qualité à agir doit être appréciée au moment où le juge statue et partant en considération des statuts actuels de la SPEDIDAM, et non de ceux qui existaient antérieurement, dès lors qu'à l'évidence les artistes interprètes qui n'ont pas dénoncé leur adhésion sont soumis aux statuts tels qu'ils ont régulièrement évolué dans le temps ;

Que par ailleurs les premiers juges ont justement relevé qu'un simple raisonnement statistique ne saurait établir le décès de partie des adhérents, étant observé que la SPEDIDAM peut agir pour défendre les droits de chacun d'eux, même après leur mort lorsqu'elle ignore le décès ou lorsque les ayants droits de l'intéressé s'abstiennent de le faire ne se prévalant pas de son décès même s'il peut paraître vraisemblable ;

Que si les écritures de la SPEDIDAM ne reproduisent pas les noms des 313 artistes interprètes adhérents au nom desquels elle agit, tels que listés en sa pièce 51, et contiennent une demande de dommages et intérêts globale, elle n'en demeure pas moins recevable en sa demande au titre des droits individuels, à charge pour elle de procéder ensuite à la répartition des sommes éventuellement allouées conformément à ses statuts, sa mission étant de percevoir les droits ou dommages et intérêts devant revenir à ses adhérents ou mandants pour pouvoir ensuite les répartir ;

Considérant qu'il doit également être admis que la SPEDIDAM s'est suffisamment expliquée sur la portée des pièces par elle produites en particulier sur la pièce 44 qui constitue un document comptable, destiné à pallier le défaut de feuille de présence signée pour un enregistrement de janvier 1970, ou sur les feuilles de présence aux répétitions pour établir la participation aux émissions qui s'en sont suivies ;

Que si le recoupement des éléments par elle versés au débat et récapitulés en page 28 de ses écritures : jaquettes des vidéogrammes litigieux, feuilles de présence ou liste de musiciens ayant participé aux enregistrements, liste récapitulative des artistes interprètes identifiés, actes d'adhésion et listes d'artistes interprètes dont l'interprétation est reproduite par vidéogramme, s'avère malaisé, la liste des adhérents ayant participé à au moins un des enregistrements en cause est suffisamment cohérente pour justifier sa qualité à agir telle qu' admise en première instance pour 313 adhérents identifiables selon liste récapitulative (produite en pièce 51) commençant ainsi que l'a relevé le tribunal par [C] [D] et finissant par [P] [X] ;

Considérant en définitive, que la décision entreprise doit être confirmée en toutes ses dispositions relatives aux fins de non recevoir opposées à l'action de la SPEDIDAM ;

Sur l'intervention de l'USPA

Considérant que la SPEDIDAM soutient que seuls les droits des artiste interprètes sont en cause et non ceux des producteurs d'oeuvre audio visuelles ;

Considérant toutefois que dans la mesure où le litige qui oppose la SPEDIDAM à un producteur membre de l'USPA (la société IDEALE, actuellement MEDICI) porte notamment sur une grille de rémunération ou tarif d'usage que la société de gestion collective entend voir appliquer aux artistes interprètes et sur un éventuel abus de position dominante de cette société, qui porterait atteinte au droit d'exploiter des oeuvres comprenant des prestations d'artistes interprètes, la solution du litige intéresse nécessairement la profession des producteurs amenés à exploiter de telles prestations ;

Considérant que les premiers juges ont ainsi exactement déclaré recevable l'intervention de l'USPA, syndicat professionnel des producteurs d'oeuvre audiovisuelles au soutien d'une partie à l'instance et pour la défense collective de la profession, étant ajouté que cet organisme a été mandaté pour agir en première instance le 14 novembre 2006 puis en appel le 29 septembre 2009 par son conseil syndical ;

Considérant que la décision entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté la fin de non recevoir opposée par la SPEDIDAM ;

Sur le fond

Sur la violation des droits des artistes interprètes par la société MEDICI

Considérant qu'il n'est pas contesté que les artistes interprètes ont enregistré les prestations reproduites sur les 17 vidéogrammes litigieux entre 1960 et 1969 pour l'ORTF et que celles-ci relevaient du fonds d'archives de l'INA laquelle a cédé ses droits à la société IDEALE le 15 octobre 1999 pour l'exploitation de programmes sous réserve que cette société fasse son affaire de l'obtention des autorisations des artistes interprètes ;

Considérant que s'il peut être déduit de la participation aux émissions de concerts enregistrées pour l'ORTF que les artistes interprètes ont autorisé la fixation de leurs prestations pour une diffusion par l'ORTF il ne peut être admis que cette autorisation vaut pour la communication au public sous forme de vidéogrammes par la société IDEALE de la restauration de ces enregistrements ;

Que les premiers juges ont exactement relevé que la seule signature de feuilles de présence lors d'émission de radio télévision française ne permet pas de prouver que leur autorisation n'était pas limitée à la télédiffusion ;

Qu'à supposer établi, ce qui n'est pas le cas, que les dispositions réglementaires régissant l'ORTF actuellement invoquées par la société MEDICI aient vocation à s'appliquer à tous les artistes interprètes en cause, il n'en résulterait pas pour autant la preuve d'une acceptation sans restriction de l'exploitation de leurs prestations ; qu'en effet si, pour assurer sa mission de service public, l'ORTF pouvait librement utiliser les prestations de musiciens, il était expressément prévu, s'agissant de l'exploitation commerciale pour la réalisation de disques du commerce, que celle-ci était limitée notamment à huit heures par an et il ne peut être admis qu'une exploitation non envisagée, sous forme de vidéogrammes par une société ne pouvant se prétendre investie d'une mission de service public, nonobstant la qualité non déniée de sa démarche, serait ainsi autorisée ;

Considérant qu'au contraire les éléments du dossier permettent de retenir que la portée de leur autorisation ne couvrait pas cette exploitation qui constitue une nouvelle communication au public manifestement non prévue ;

Considérant que les dispositions de l'article L 212-3 du Code de la propriété intellectuelle doivent régir les droits qui ne peuvent être considérés comme ayant été cédés avant l'entrée en vigueur de la loi du 3 juillet 1985 ; que dès lors c'est à juste titre que le tribunal a retenu, à l'encontre de la société IDEALE (actuellement MEDICI), le défaut d'autorisation écrite des artistes interprètes représentés par la SPEDIDAM pour la diffusion de leur prestation sur les DVD litigieux, réalisés postérieurement au 1er janvier 1986, portant atteinte aux droits des artistes interprètes ;

Sur les abus de la SPEDIDAM

Considérant qu'il est imputé à la SPEDIDAM une gestion abusive des droits d'utilisation secondaires des artistes interprètes ;

Considérant que les premiers juges ont estimé qu'elle avait commis une faute en refusant toute négociation de ses tarifs et que son refus d'envisager une rémunération proportionnelle était de nature à empêcher la sortie des DVD litigieux, tout en admettant que les tarifs n'étaient pas eux mêmes excessifs et que la faute commise par la SPEDIDAM n'exonérait pas la société IDEALE de sa propre faute ;

Considérant toutefois qu'il ne peut être reproché à faute à la SPEDIDAM d'avoir imposé des conditions de transaction abusives alors qu'il s'avère qu'en l'espèce son tarif, calculé en fonction du nombre de musiciens impliqué, de l'ancienneté de l'enregistrement et de sa durée n'apparaissait pas excessif bien que ne prenant pas en compte, contrairement à ceux pratiqués dans d'autres Etats de l'Union européenne un pourcentage des recettes ; qu'en effet il n'est pas contesté que la somme globale réclamée de 237.758,40 à 365.745,60 euros pour l'exploitation envisagée en 2000, qui représente environ 8% du budget global de la production estimé à 5 millions d'euros, était en fait, ainsi que retenu par le tribunal, comparable à celle de 300.000 euros que le producteur prévoyait de verser selon ses simulations de juin 1999 ; que même s'il ne s'agissait que d'un objectif de recettes sur une durée de licence de15 ans, et non d'un investissement immédiat, le tarif forfaitaire ne s'avérait en fait pas inéquitable ou disproportionné ; que la seule production par la société MEDICI d'un nouvel état, qui tiendrait compte d'une exploitation jusqu'au 31 décembre 2006, contredisant les données initialement en discussion sur la base de ses propres prévisions ne saurait suffire à démontrer le caractère abusif du tarif de la SPEDIDAM dans le présent litige ;

Considérant que certes il est regrettable que celle-ci entende imposer unilatéralement le tarif forfaitaire d'usage par elle pratiqué sans accepter de le négocier, même si elle explique sa position par une non discrimination, une pratique antérieure de rémunération de musiciens d'orchestre, des difficultés de gestion ou sa spécificité, son interlocuteur entendant manifestement permettre une nouvelle exploitation de prestations archivées d'artiste interprètes et négocier un accord de même nature que celui obtenu notamment dans un autre pays européen ; que pour autant cette attitude ne suffit pas à caractériser en la cause un abus préjudiciable de la SPEDIDAM alors que son prix n'apparaissait ni excessif ni réellement de nature à empêcher la réalisation d'un projet dont il ne représentait qu'un pourcentage relativement modeste du budget ;

Considérant qu'il ne peut pas plus valablement être imputé à la SPEDIDAM une action abusive alors que des atteintes aux droits d'artiste interprètes ont été établies et que la poursuite de leur sanction relève de sa fonction statutaire ;

Considérant que la décision entreprise sera donc infirmée en ce qu'elle a retenu une faute de la SPEDIDAM et alloué à la société IDEALE 1 euro à titre de réparation ;

Sur le préjudice de la SPEDIDAM et les autres demandes

Considérant qu'il appartient, ainsi que relevé par le tribunal, à la SPEDIDAM d'établir que ses adhérents ont participé aux enregistrements litigieux ; qu'en l'espèce aucun élément ne permet de retenir que des prestations d'adhérents qui ne pourraient pas être identifiées par la SPEDIDAM auraient été utilisées sans autorisation par la société IDEALE (actuellement MEDICI) ; qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit à sa demande de communication d'informations complémentaires sur les musiciens dont les enregistrements ont été utilisés ;

Considérant que la société IDEALE a manifestement entendu dans la phase d'étude de son projet ne pas méconnaître les droits des artistes interprètes, puisqu'elle a formé des propositions de rémunération des prestations qu'elle souhaitait reproduire, malgré un contexte difficile tenant à leur ancienneté, et a recherché un accord avec la SPEDIDAM ; qu'en de telles conditions les premiers juges ont pu justement fixer à un euro la réparation du préjudice collectif subi par cette dernière du fait des atteintes réalisées ;

Que s'agissant de l'évaluation du préjudice individuel subi par les artistes interprètes, la SPEDIDAM demande de tenir compte de son tarif, étant rappelé que celui-ci n'a pu être négocié et étant observé que ses calculs établissant la perte de redevance par interprète à 10,40 euros par ayant droit et par enregistrements se fondent sur les participations de 424 artistes interprètes et non de ses seuls 313 adhérents ; que la société MEDICI pour sa part invoque la pertinence d'un accord passé le 3 mai 2006 entre l'INA et les syndicats d'artistes interprètes sur la rémunération des nouvelles utilisations des prestations des musiciens sans toutefois avancer la moindre évaluation à ce titre ni fournir les chiffres certifiés qu'elle posséderait pour en permettre le calcul ; qu'eu égard aux atteintes en cause, aux agissements imputables à la société IDEALE (actuellement MEDICI) et aux éléments d'appréciation il sera par infirmation de la décision entreprise sur ce point alloué une indemnité de 60.000 euros en réparation de l'entier préjudice individuel subi par les adhérents concernés ;

Considérant qu'une mesure de publication ne s'impose pas en la cause ; que toutes les demandes des parties à ce titre seront rejetées ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire application dans la présente instance des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a retenu à l'encontre de la SPEDIDAM un abus de position dominante, la condamnant à verser à la société IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL un euro à titre de dommages et intérêts, et en ce qu'elle a évalué à 17.000 euros la réparation du préjudice individuel subi par les 313 artistes interprètes adhérents de la SPEDIDAM ;

Et statuant à nouveau dans cette limite,

Déboute la société MEDICI ARTS INTERNATIONAL, anciennement dénommée IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL, de toutes ses demandes pour abus de la SPEDIDAM ;

Condamne la société MEDICI ARTS INTERNATIONAL, anciennement dénommée IDEALE AUDIENCE INTERNATIONAL, à payer à la SPEDIDAM 60.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice individuel subi par les 313 artistes interprètes adhérents tels que retenus par le tribunal ;

Rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation ;

Condamne la société MEDICI ARTS INTERNATIONAL aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 08/22756
Date de la décision : 13/10/2010

Références :

Cour d'appel de Paris I1, arrêt n°08/22756 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-10-13;08.22756 ?
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