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19/01/2011 | FRANCE | N°08/12062

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 19 janvier 2011, 08/12062


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 19 Janvier 2011

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/12062-BVR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Novembre 2008 par le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE SAINT GEORGES section Commerce RG n° 07/00441









APPELANT

Monsieur [C] [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne assis

té de Me Jean-marc WASILEWSKI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0325







INTIMÉE

SARL V7 DISTRIBUTION

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Marie Véronique JEANNIN, ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 19 Janvier 2011

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/12062-BVR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Novembre 2008 par le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE SAINT GEORGES section Commerce RG n° 07/00441

APPELANT

Monsieur [C] [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne assisté de Me Jean-marc WASILEWSKI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0325

INTIMÉE

SARL V7 DISTRIBUTION

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Marie Véronique JEANNIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P 69

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 Novembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Suivant jugement en date du 6 novembre 2008 auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de VILLENEUVE SAINT GEORGES a :

dit que le lien de subordination liant monsieur [F] et la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION n'était pas établi,

débouté en conséquence monsieur [F] de toutes ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail .

Monsieur [F] a relevé appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la cour le 26 novembre 2008.

********

Suivant conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, monsieur [C] [F] demande à la cour de :

infirmer le jugement,

constater qu'il a exercé son activité pour le compte de la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION dans le cadre d'un contrat de travail du 1er février 2005 au 15 novembre 2007,

dire que la rupture du contrat de travail intervenue s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ,

condamner la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION au paiement des sommes suivantes:

-indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 31.080 euros .

-indemnité de licenciement : 1.446,08 euros.

-indemnité compensatrice de préavis : 5.180 euros outre 518 euros pour congés payés afférents

- indemnité pour travail dissimulé :15.540 euros

-article 700 du Code de Procédure Civile : 3.000 euros

ordonner la délivrance d'un certificat de travail et une attestation pole emploi conformes,

dire que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation,

ordonner la capitalisation des intérêts.

********

Par conclusions régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience février auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens et arguments, la société V7 DISTRIBUTION demande à la cour de :

confirmer le jugement,

débouter Monsieur [C] [F] de l'ensemble de ses demandes,

le condamner à 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

MOTIFS

Considérant que la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION est une société de commerce de gros spécialisée dans les articles de sport de glisse ;

Qu'elle a fait appel, à compter de décembre 2004, aux services de monsieur [F] photographe, pour réaliser des prestations photographiques et graphiques sur son site internet, des prises de vue de nature morte (planches de skate, vêlements et accessoires ..)pour ses catalogues, du matériel publicitaire pour la société ( flyer, invitations ...) pour gérer les logos des différentes marques distribuées par cette dernière ainsi que les insertions publicitaires dans la presse spécialisée desdites marques ;

Qu'en contrepartie, monsieur [F] lui adressait des factures d'honoraires;

Qu'à compter de septembre 2007, monsieur [F] ne recevait plus de commandes ;

Qu'aux motifs qu'il était lié à la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION par un contrat de travail à temps complet à compter de février 2005 et que la rupture ainsi intervenue s'analyse en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié formule plusieurs demandes financières ;

Qu'en réplique, la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION conteste l'existence d'un lien de subordination entre les parties, estimant que monsieur [F] qui au demeurant travaillait pour d'autres prestataires , était totalement libre dans l'organisation de son travail , qu'il percevait des honoraires et était assujetti au régime des artistes auteurs, de sorte qu'il n'avait pas la qualité de salarié ;

Sur l'existence d'un contrat de travail

Considérant que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ;

Que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le travail au sein d'un service organisé peu constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail ;

Et Considérant en l'espèce que la preuve d'un lien de subordination entre les parties à compter de février 2005 est suffisamment rapportée par les pièces produites aux débats dont des témoignages, des courriels, des agendas, qui établissent que :

- monsieur [F] exerçait son activité dans les locaux de la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION au sein desquels il bénéficiait d'un poste de travail qui lui était personnellement attribué, qu'il travaillait sur un ordinateur de l'entreprise et disposait de matériel professionnel de photos fourni par celle-ci,

- comme les autres salariés, il bénéficiait d'une carte de visite à son nom avec le logo et l'adresse de la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION de même que plusieurs adresses électroniques créées par celle ci à son nom,

-que présent chaque jour de 10 h à 18 h, il signait une feuille de présence, qu'il recevait de nombreux ordres et directives par messages électroniques de la part des responsables de la commercialisation des différents départements (vêtements, matériels ..), des responsables marketing notamment monsieur [V], des responsables achat, du gérant monsieur [U]; qu'il ne disposait d'aucune latitude ou indépendance pour organiser son travail ;

- que son travail exécuté sous les ordres de la société faisait l'objet de contrôle de la part de cette dernière qui pouvait le modifier ou lui donner des instructions aux fins de modification comme le démontrent les nombreux messages reçus au cours de la période considérée ;

- qu'il était payé non à la prestation mais sous forme de rémunération forfaitaire laquelle a été fixée à 2.590 euros brut par mois à compter de mars 2006 ,un complément de rémunération lui étant alloué pour toute prestations extérieures comme le tournage en juin 2006 d'une tournée dite 'teenage' dans diverses villes de France ;

Considérant que c'est en vain que pour échapper à ses obligations, la société invoque la réalisation par monsieur [F] de prestations pour le compte d'autres entreprises ;

Qu'en effet outre que l'intéressé n'était pas astreint dans son activité de graphiste vis à vis de la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION à une obligation d'exclusivité , les prestations qu'il a pu réalisées en qualité de photographe ont été très ponctuelles et effectuées pour l'essentiel sur son temps libre avec des sociétés présentées par S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION ; que parmi les pièces produites par cette dernière à l'appui de ses affirmations, force est de constater que nombreuses sont soit antérieures soit postérieures à sa prestation salariée ;

Considérant en tout état de cause que l'activité ponctuelle de monsieur [F] en qualité de photographe pour le compte d'autres prestataires n'est pas incompatible avec une activité salariée au sein de la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION ;

Considérant en conséquence que l'ensemble des ces éléments démontrant l'existence d'un lien de subordination entre les parties, monsieur [F] est fondé à revendiquer la reconnaissance d'un contrat de travail à durée indéterminée depuis février 2005 ;

Sur la rupture

Considérant qu'il est acquis que la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION, non satisfaite des prestations de monsieur [F] a rompu sa collaboration à compter de septembre 2007 après avoir avisé l'intéressé de sa décision courant mai ;

Que cette rupture initiée à l'encontre d'un salarié sans respect de la procédure légale de licenciement, s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse;

Que licencié abusivement, monsieur [F] peut prétendre à une indemnité de préavis, des congés payés afférents et une indemnité légale de licenciement qui seront fixés aux montants justifiés qu'il réclame sur la base d'une moyenne mensuelle de 2.590 euros ;

Qu'il a également droit à des dommages et intérêts qui compte tenu de son ancienneté au sein de la société (2 ans et demi ) des éléments de préjudice qu'il produit, seront fixés à la somme de 15.540 euros représentant 6 mois de salaires ;

Sur l'indemnité pour travail dissimulé

Considérant que la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que si l'employeur s'est soustrait intentionnellement à l'accomplissement des formalités prévues aux articles L. 1221-10 et L. 3243-2 du code du travail ;

Et considérant en l'espèce qu'en ayant sciemment recours pendant plus de deux années à un travailleur indépendant qui a exercé son activité sous sa subordination juridique permanente sans avoir procédé aux formalités de déclaration préalable d'embauche et sans avoir délivré de bulletins de paie alors que la prestation prévue a été remplie et ce , dans le seul but d'éluder la législation sociale, la société S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION est bien l'auteur d'un travail dissimulé au sens de l'article L.8221-5 du Code du Travail et se trouve dès lors redevable de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L.8223-1 égale à six mois de salaire ;

Qu'elle devra donc verser à monsieur [F] une somme de 15.540 euros de ce chef ;

Sur la remise des documents de fin de contrat

Considérant que la S.A.R.L. V7 DISTRIBUTION devra délivrer à monsieur [F] un certificat de travail et une attestation pole emploi conformes ;

Considérant que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les éléments de salaire à compter du présent arrêt pour les dommages et intérêts ;

Que la capitalisation des intérêts sera ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;

Que l'employeur qui succombe assumera les dépens et versera au salarié une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Dit que les parties sont liés par un contrat de travail,

Condamne la société V7 DISTRIBUTION à verser à Monsieur [C] [F] les sommes suivantes :

-indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 15.540 euros

-indemnité de licenciement : 1.446,08 euros.

-indemnité compensatrice de préavis : 5.180 euros outre 518 euros pour congés payés afférents

- indemnité pour travail dissimulé :15.540 euros

Ordonne la délivrance par l'employeur d'un certificat de travail et d' une attestation pole emploi conformes,

Dit que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les éléments de salaire , à compter du présent arrêt pour les dommages et intérêts,

Ordonne la capitalisation des intérêts,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société V7 DISTRIBUTION à régler à Monsieur [C] [F] une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 08/12062
Date de la décision : 19/01/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°08/12062 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-01-19;08.12062 ?
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