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05/04/2011 | FRANCE | N°10/00984

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 05 avril 2011, 10/00984


COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 5 AVRIL 2011
(no 136, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00984
Décision déférée à la Cour : sentence arbitrale rendue le 23 décembre 2009 et rectifiée le 18 janvier 2010 par le délégué arbitre unique désigné par M. le Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris-dossier no 721/ 195321

DEMANDEURS AU RECOURS

Madame Florence Y...... 75005 PARIS représentée par la SCP REGNIER BEQUET MOISAN, avoués à la Cour assistée de Maître Hubert DIDON, avocat au barreau de

PARIS, toque : R172

Monsieur Régis X...... 75005 PARIS représenté par la SCP REGNIER BEQUET MOI...

COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 5 AVRIL 2011
(no 136, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00984
Décision déférée à la Cour : sentence arbitrale rendue le 23 décembre 2009 et rectifiée le 18 janvier 2010 par le délégué arbitre unique désigné par M. le Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris-dossier no 721/ 195321

DEMANDEURS AU RECOURS

Madame Florence Y...... 75005 PARIS représentée par la SCP REGNIER BEQUET MOISAN, avoués à la Cour assistée de Maître Hubert DIDON, avocat au barreau de PARIS, toque : R172

Monsieur Régis X...... 75005 PARIS représenté par la SCP REGNIER BEQUET MOISAN, avoués à la Cour assisté de Me Hubert DIDON, avocat au barreau de PARIS, toque : R 172

DÉFENDEUR AU RECOURS
Monsieur Jean-Philippe B...... 75005 PARIS représenté par la SCP DUBOSCQ et PELLERIN, avoués à la Cour assisté de Me Jean LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : B 0685

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 février 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre, chargé du rapport, en présence de Madame Dominique GUEGUEN, conseiller
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur François GRANDPIERRE, Président Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller Madame Françoise MARTINI, Conseiller venu d'une autre chambre pour compléter la cour en application de l'ordonnance de roulement portant organisation des services de la cour d'appel de PARIS à compter du 3 janvier 2011, de l'article R 312-3 du Code de l'organisation judiciaire et en remplacement d'un membre de cette chambre dûment empêché

Greffier, lors des débats : Madame Noëlle KLEIN

ARRET :

- rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, président de chambre-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La Cour,
Considérant qu'en vertu d'un acte sous seing privé du 10 mai 2006, M. Jean-Philippe B... a exercé la profession d'avocat en qualité de collaborateur libéral de l'association de X...- Y... ; que, par message électronique du 27 mai 2009, Mme Florence Y... lui notifiait la décision de l'association de X...- Y... de mettre un terme au contrat qui les liait et l'invitait à quitter le cabinet dans les meilleurs délais ; que, le lendemain, M. B... prenait acte de la rupture du contrat et de la dispense d'effectuer le délai de prévenance ; Qu'un litige est né entre les parties quant aux conditions de la rupture et aux comptes à faire entre elles ; que M. B... a saisi M. le Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris dont le délégué, par sentence du 23 décembre 2009, rectifiée le 18 janvier 2010, a :- constaté que n'était pas rapportée la preuve du manquement grave allégué par l'association de X...- Y... contre M. B... pour justifier la rupture, sans délai de prévenance, du contrat de collaboration,- dit que M. B... avait droit à un délai de prévenance de trois mois,- condamné Mme Y... et M. X..., membres de l'association de X...- Y..., à payer à M. B... la somme de 22. 500 euros, hors taxe, à titre de solde de rétrocession d'honoraires,- liquidé à la somme de 1. 800 euros, hors taxe, les frais d'arbitrage et dit qu'ils seraient supportés pour 1/ 3 par M. B... et pour les 2/ 3 par Mme Y... et M. X...,- dit n'y avoir lieu à payement d'une indemnité pour frais irrépétibles ;

Considérant qu'appelants de cette sentence, Mme Y... et M. X..., qui en poursuivent l'infirmation, demandent que M. B... soit débouté de toutes ses réclamations ; Qu'à l'appui de leur recours, Mme Y... et M. X... soutiennent, comme en première instance, que M. B... était « fuyant », peu impliqué, voire désengagé, et incapable de travailler en équipe de sorte que son activité n'était pas contrôlable et qu'il n'y avait d'autre solution que de lui faire confiance, ce dont il a profité pour se montrer déloyal et organiser une concurrence à son profit personnel ; qu'ils en déduisent que, même s'il était loisible à M. B... de développer une clientèle personnelle, cette concurrence, organisée à l'intérieur du cabinet et avec les moyens du cabinet constitue une faute justifiant une rupture dans des conditions dispensant le cabinet de payer tout préavis à M. B... ; Que, subsidiairement, et s'il est retenu que M. B... n'a pas commis de faute, les appelants font observer qu'il n'en demeure pas moins qu'ayant organisé sa propre structure, il n'est créancier d'aucun préavis ;

Considérant que M. B... conclut à la confirmation de la sentence tout en demandant que la somme de 22. 500 euros qui lui est allouée au titre de la rétrocession d'honoraires soit augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 mai 2009, date de la rupture, et que ces intérêts soient capitalisés ; Que l'intimé, qui conteste avoir manqué à ses obligations, soutient que la détérioration survenue entre Mme Y... et M. X..., d'une part, et lui-même, d'autre part, est le résultat de la volonté de ses associés, pour des raisons d'ordre financier, de le pousser à la démission ; qu'il ajoute que les circonstances de la cause prouvent que l'association de X...- Y... avait décidé non seulement de mettre fin au contrat de collaboration sans préavis, mais également de ne pas lui payer la rétrocession d'honoraires de sorte que la responsabilité de la rupture incombe au cabinet ; Qu'enfin, M. B... fait valoir que, comme l'a constaté l'arbitre, les appelants n'apportent aucune preuve des agissements prétendument constitutifs d'actes de concurrence déloyale et de défaut d'implication ou de tout autre manquement grave ; qu'il en déduit que le payement de la rétrocession d'honoraires lui est dû ;

SUR CE :
Considérant qu'il n'est pas contesté que, par contrat en date du 10 mai 2006, M. B... a été recruté par le cabinet de X...- Y... en qualité de collaborateur libéral moyennant une rétrocession d'honoraires mensuelle de 7. 500 euros, hors taxe ; qu'en vertu des stipulations du contrat, le cabinet s'est engagé à mettre à la disposition de M. B... une installation garantissant le secret professionnel et lui permettant de constituer et de développer sa clientèle personnelle, sans contrepartie financière ; que, de son côté, il s'est engagé à organiser son activité pour consacrer le temps nécessaire au traitement des dossiers qui étaient confiés par le cabinet en veillant à toujours y apporter le même soin et la même conscience que pour ses affaires personnelles ; qu'en outre, la convention prévoyait un délai de prévenance de trois mois, sauf manquement grave et flagrant aux règles professionnelles, la rémunération mensuelle restant due pendant ce délai même en cas de non-exercice effectif de la collaboration du fait du cabinet de X...- Y... ; Qu'il est également constant que M. B..., avocat publiciste et spécialisé en matière de marchés public et de « partenariats public-privé », a été recruté afin d'animer le secteur « marchés publics » et de développer l'activité « partenariats public-privé » du cabinet de X...- Y... ; Considérant qu'en fait, il ressort de très nombreux messages électroniques échangés entre les animateurs du cabinet de X...- Y... et M. B... que les relations sont devenues « compliquées » dès le mois de mars 2007 ; que c'est ainsi que, le 19 mars 2007, Mme Y..., qui tentait de rencontrer M. B..., a dû lui envoyer un message électronique et qu'il a répondu qu'il n'était pas immédiatement disponible ; Qu'au mois de novembre de la même année, alors qu'un important appel d'offres émanant de la commune d'Argenteuil nécessitait une réponse rapide et impliquant le savoir-faire de plusieurs membres du cabinet et que Mme Y... avait fait connaître que « On s'y met tous. On n'a pas le choix », M. B... ne trouvait qu'à répondre : « Çà dépendra des grèves … Je m'engage sous réserve de disposer des stagiaires » ; Que, par un message adressé le 20 octobre 2008, M. X..., qui avait pris l'attache d'un bureau d'études à propos d'une évaluation préalable concernant la commune du Tampon (Ile de la Réunion) et effectué diverses démarches à ce sujet, reproche amèrement à M. B..., qui ne l'ignorait pas, de s'être, de son côté, sans lui en parler, adressé à une autre société pour préparer une réponse, une telle situation étant de nature à entraîner des difficultés avec ce bureau d'études, partenaire habituel du cabinet ; Qu'à l'occasion du traitement du dossier relatif à l'incinérateur de Fos-sur-Mer, dont les enjeux, y compris politiques et médiatiques étaient d'une particulière importance, démontre que, même en présence d'un tel dossier, Mme Y... a été obligée, par un long message, de lui reprocher de n'avoir pas élaboré le « descriptif juridique du montage » dont la rédaction lui revenait et de s'abstenir de participer à une réunion alors qu'une personnalité se déplaçait spécialement de Marseille ; que, même si M. B... a finalement admis être « conscient des enjeux » du dossier de Fos-sur-Mer, il n'en demeure pas moins qu'en réalité, il a persisté à ne pas y mettre l'énergie que le cabinet était en droit d'attendre de lui ; que, sur ce point, le message que lui a fait parvenir Mme Y... le 24 novembre 2008 note encore que sa mission ne consistait pas à « travailler dans son coin » et que M. X..., ne pouvant pas travailler « à l'aveugle », avait un besoin impératif de ses analyses et de ses avis dans son domaine de spécialité et, tout particulièrement, en matière de « partenariats public-privé » ; Considérant que d'autres échanges de messages électroniques démontrent qu'il était difficile aux membres du cabinet de dialoguer avec M. B... qui était absent sans que les raisons et la durée de ses absences fussent connues ; que, plus grave, le défaut de réponse nette à des questions relatives au traitement de dossiers a créé, comme l'a écrit Mme Y..., « un climat d'insécurité très préoccupant » pour le cabinet ; Que l'ensemble des messages et des réponses évasives de M. B... démontrent un défaut d'implication, de travail en commun et de dialogue incompatibles avec l'exécution normale d'un contrat de collaboration ; Considérant que, même si les actes de concurrence déloyale allégués ne sont pas démontrés avec précision et certitude, encore que des échanges de messages prouvent que M. B... avait organisé sa propre structure avant la rupture des relations contractuelles, il n'en demeure pas moins que son désengagement vis-à-vis du cabinet au profit de sa clientèle personnelle constitue, à lui seul, un manque de loyauté ; Que ces faits, qui sont imputables à M. B..., constituent des fautes suffisamment graves, flagrantes et réitérées pour le priver du délai de prévenance de trois mois prévu par le contrat de collaboration ; Que, par voie de conséquence, il convient d'infirmer la sentence frappé d'appel et de débouter M. B... de toutes ses demandes ;

PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme la sentence rendue le 23 décembre 2009 et rectifiée le 18 janvier 2010 par le délégué de M. le Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris ;
Faisant droit à nouveau :
Déboute M. Jean-Philippe B... de toutes les demandes qu'il forme contre Mme Florence Y... et M. Régis X... ;
Condamne M. B... aux frais d'arbitrage et aux dépens d'appel qui seront recouvrés par la S. C. P. Régnier, Béquet et Moisan, avoué de Mme Y... et de M. X..., conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/00984
Date de la décision : 05/04/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2011-04-05;10.00984 ?
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