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24/05/2011 | FRANCE | N°09/10317

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 24 mai 2011, 09/10317


COUR D'APPEL DE PARISPôle 2 - Chambre 1
ARRET DU 24 MAI 2011
(no 179, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10317
Décision déférée à la Cour : jugement du 17 mars 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 05/14743arrêt avant dire droit 19 octobre 2010Cour d'appel de PARIS Pôle 2 chambre 1

APPELANT
Monsieur Roland X......1204 GENEVE (SUISSE)représenté par la SCP NARRAT PEYTAVI, avoués à la Courayant pour avocat Me Stéphanie LE ROY, avocat au barreau de PARIS, toque : J 148qui a fait déposer son dossier

INTIMEE
Madame

Brigitte Z... divorcée A......demeurant ...75002 PARISreprésentée par la SCP GUIZARD, avoués à...

COUR D'APPEL DE PARISPôle 2 - Chambre 1
ARRET DU 24 MAI 2011
(no 179, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10317
Décision déférée à la Cour : jugement du 17 mars 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 05/14743arrêt avant dire droit 19 octobre 2010Cour d'appel de PARIS Pôle 2 chambre 1

APPELANT
Monsieur Roland X......1204 GENEVE (SUISSE)représenté par la SCP NARRAT PEYTAVI, avoués à la Courayant pour avocat Me Stéphanie LE ROY, avocat au barreau de PARIS, toque : J 148qui a fait déposer son dossier

INTIMEE
Madame Brigitte Z... divorcée A......demeurant ...75002 PARISreprésentée par la SCP GUIZARD, avoués à la Courassistée de Me Patrick QUIBEL, avocat au barreau de NANTERRE

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été appelée à l'audience de plaidoirie du 25 janvier et débattue à l'audience de plaidoirie du 22 février 2011 en audience publique, l'avocat ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre chargé d'instruire l'affaire entendu en son rapport, en présence de Madame GUEGUEN, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :Monsieur François GRANDPIERRE, Président Madame Brigitte HORBETTE, ConseillerMadame Dominique GUEGUEN, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Noëlle KLEIN

ARRET :
- contradictoire- rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, président de chambre- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
M. X..., avocat genevois qui a défendu, dans plusieurs procédures l'opposant à son mari, les intérêts de Mme Z..., qui résidait alors en Suisse, ayant obtenu de la commission de taxation des honoraires d'avocat de Genève la fixation de ses honoraires à la somme de 29 850 francs suisses (CHF), dont 18 772,30 CHF déjà payés, a demandé la condamnation de son ancienne cliente au payement de la contre-valeur en euros de la somme de 17 140,62 CHF, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2005, après avoir refusé l'offre de celle-ci de lui verser 10 000 € pour solde de tout compte.
Par jugement du 17 mars 2009, le tribunal de grande instance de Paris, se déclarant compétent et appliquant le droit genevois, a condamné Mme Z... à payer la somme de 10 000 € en règlement de ses honoraires à M. X... qu'il a condamné à lui verser la même somme à titre de dommages et intérêts, a ordonné la compensation entre ces deux sommes, a condamné M. X... à payer à Mme Z... 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et laissé à chacun la charge de ses dépens.
Par arrêt avant dire droit du 19 octobre 2010, la cour, saisie de l'appel de M. X..., a invité les parties à s'expliquer sur l'application de la convention de LUGANO du 30 octobre 2007 s'agissant de l'effectivité, en France, d'une décision suisse et de son exécution et ce, notamment, au regard de la clause attributive de compétence exclusive aux juridictions de Genève du litige et des articles 2, 3, 5, 22-5o, 23 et 33 de ladite convention.
CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,
Vu l'arrêt avant dire droit susvisé,
Vu les dernières conclusions déposées par M. X... le 22 novembre 2010 selon lesquelles il demande que soient prononcés :la condamnation de Mme Z... au payement de la contre-valeur en euros de la somme de 17 140,62 CHF, augmentée des intérêts au taux légal de 5% à compter du 31 mai 2005 sur la somme de 16 093,45 CHF au motif qu'elle ne peut plus contester la décision définitive, exécutoire et reconnue d'office sur le territoire français en application de l'article 33 de la convention de LUGANO, rendue le 10 février 2004 par la commission de taxation des honoraires d'avocat de Genève, non assortie de condamnation qui ne peut qu'être prononcée que par la juridiction française, en exécution et par application de l'article 5 de la même convention,l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle de Mme Z... devant les juridictions françaises du fait de la clause attributive de compétence exclusive à la juridiction suisse insérée dans le mandat du 5 septembre 2001 pour contester l'exécution du mandat et donc de l'incompétence des juridictions françaises, subsidiairement, le rejet de ses demandes indemnitaires, au motif de la procédure abusive et de l'absence de faute commise, un autre avocat ayant été le conseil de Mme Z... dans la procédure de divorce et, très subsidiairement, au motif de l'absence de preuve d'un préjudice,sa condamnation à lui payer 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées le 14 décembre 2010 par lesquelles Mme Z... solliciteque la juridiction française se reconnaisse compétente tant sur la demande principale que sur la demande reconventionnelle aux constats que, dans les rapports entre la France et la Suisse la convention révisée de LUGANO du 30 octobre 2007 n'est pas applicable avant le 1er janvier 2011 et que la saisine du tribunal de grande instance de Paris par M. X... n'est pas incompatible avec la convention de LUGANO,
la réformation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer la somme de 10 000 €, aux constats que la juridiction française n'est pas saisie en vertu du la convention de LUGANO mais seulement d'une demande en paiement, qu'elle n'est pas tenue par la décision de la commission de taxation des honoraires d'avocat de Genève du 10 février 2004 dont le caractère exécutoire n'est pas établi et faute de condamnation, que son courrier du 23 juin 2004 n'est pas un accord sur le principe et le montant des honoraires, qu'en l'absence de convention d'honoraires M. X... ne justifie pas qu'ils excèdent les provisions reçues, que la note d'honoraire est insuffisante à établir un solde faute d'un coût horaire convenu et de justifications du temps passé, très subsidiairement que les diligences ont été inutiles, la confirmation du jugement en ce que le tribunal s'est déclaré compétent au constat que le déclinatoire de compétence n'a pas été soutenu avant la défense au fond, sa confirmation en ce qu'il a constaté des fautes professionnelles et la réalité d'un préjudice, mais sa réformation sur le montant accordé et la condamnation de M. X... à lui payer 5 000 € pour son préjudice moral, 4 000 € pour les frais engagés, 22 694 € pour le manque à gagner, 10 000 € pour la perturbation de son budget, et, pour le cas de confirmation du jugement sur la demande principale, le condamner, avec compensation, à lui payer10 000 € de remboursement des honoraires pour les procédures inutiles et, en tout état de cause, la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné M. X... à lui verser des indemnités procédurales et le condamner à lui payer 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel,
SUR CE,
Sur l'application de la convention de LUGANO :
Considérant que, répondant aux questions posées par l'arrêt susvisé du 19 octobre 2010, M. X... énonce que, au vu des articles 5.1 et 33.1 de ladite convention, seuls susceptibles selon lui de s'appliquer éventuellement à l'espèce, la décision rendue par la commission de taxation des honoraires d'avocat de Genève est définitive et reconnue d'office sur le territoire français, Mme Z... n'ayant pas soulevé son incompétence, sans qu'il soit nécessaire de demander son exequatur mais que, non assortie de condamnation conformément au droit suisse, il est fondé à obtenir en France, domicile de Mme Z..., la condamnation de celle-ci au payement de la somme arrêtée par la commission ; que, en revanche, les juridictions françaises ne sont pas compétentes pour se prononcer sur la demande reconventionnelle, Mme Z... n'ayant pas formé de recours, en Suisse, contre la décision précitée ni n'usé des voies de droit qui lui étaient ouvertes à ce sujet et du fait de la clause attributive de compétence exclusive insérée dans le mandat du 5 septembre 2001 le liant à sa cliente, au vu de l'article 23 de la convention de LUGANO ; que ce dernier texte n'a pas vocation à s'appliquer à sa demande principale car cela impliquerait qu'il saisisse d'abord les juridictions suisses et genevoises avant de faire exécuter en France leur décision alors que la saisine directe des juridictions françaises, lieu du domicile de la débitrice s'imposait en l'absence de contestation par elle, à l'époque, du montant des honoraires comme de la bonne exécution du mandat, cela n'ayant d'autre but que d'échapper au paiement ; qu'il expose l'incongruité de la position de Mme Z... qui demande à la fois l'application du droit français sur sa défense à la demande principale et du droit suisse sur sa demande reconventionnelle en responsabilité pour éluder l'application de la décision définitive de la commission des honoraires ; qu'il en déduit que le juge français doit appliquer le droit genevois sur la demande principale et se déclarer incompétent sur la demande reconventionnelle du fait de la clause attributive de compétence contenue dans le mandat ;
Que Mme Z..., qui souligne que M. X... n'a jamais demandé l'application de la convention de LUGANO, qui ne peut être applicable en Suisse qu'à compter du 1er janvier 2011, soutient que, si dans leurs rapports a été prévue la compétence exclusive des juridictions suisses, cette attribution de compétence n'était pas d'ordre public, que son adversaire y a dérogé en saisissant les juridictions françaises et que cette compétence n'est pas incompatible avec la convention de LUGANO qui ne prévoit dans son article 5 qu'une "possibilité" ; que l'article 1er vise toutes les juridictions mais exclut l'arbitrage et que M. X... se prévaut d'une décision qui n'a aucun caractère exécutoire puisqu'elle ne comporte aucune condamnation à payement ; qu'elle ne relève donc pas des articles 32 et 33 de la convention et s'assimile à un arbitrage ; que la demande formée devant les juridictions françaises doit donc s'analyser en une simple demande en paiement d'honoraires rendant compétentes les juridictions françaises y compris pour statuer sur sa propre demande reconventionnelle, M. X... n'ayant pas soulevé l'exception d'incompétence des juridictions françaises à ce titre in limine litis ; que la décision de la commission, non revêtue de force exécutoire car non soumise à la procédure d'exequatur, n'a pas lieu de s'appliquer en France de sorte que la juridiction française peut se prononcer tant sur le quantum des honoraires que sur la qualité des diligences ;
Considérant qu'il est paradoxal de la part de chacune des parties, qui admettent toutes deux tant la compétence des juridictions françaises pour connaître de leur litige que l'application des seuls droits suisse et genevois audit litige par les juridictions françaises, de solliciter devant elles le bénéfice à leur profit respectif des dispositions étrangères invoquées uniquement en ce qui concerne leurs prétentions mais leur rejet en ce qui concerne les prétentions adverses ; que dans cette mesure elles s'opposent quant aux articles de la convention de LUGANO applicables à leur contentieux, en en revendiquant ou écartant, selon leurs thèses singulières, la pertinence ;
Qu'il n'est cependant pas discuté par les parties, quoiqu'en lui donnant chacune un éclairage différent, que le mandat du 5 septembre 2001qui les lient comporte une clause attributive exclusive de compétence aux juridictions étrangères, dont, pour certains aspects, elle réclament toutes deux l'application ; qu'il n'est pas plus contesté que Mme Z... n'a ni formé de recours contre la décision qui lui est opposée, ayant même par avance indiqué qu'elle s'y plierait, ni saisi les juridictions genevoises compétentes pour, au vu de la décision de la commission de taxation des honoraires, contester l'utilité ou le bien fondé des diligences taxées ;
Considérant que la convention de LUGANO susvisée porte sur la reconnaissance dans les pays signataires des décisions rendues par des juridictions d'autres Etats parties ; qu'il n'est pas contesté que la décision dont se prévaut M. X... ne répond pas à la définition conventionnelle ; qu'il ne justifie pas, en conséquence, comme il l'affirme, de ce qu'elle serait " reconnue d'office sur le territoire français", quand bien même Mme Z... n'en n'aurait ni contesté le bien fondé ni soulevé l'incompétence de la commission en question, en Suisse, pour connaître du litige d'honoraires, étant observé qu'elle a comparu effectivement devant ladite commission et convenu devoir en exécuter la décision telle qu'elle serait rendue ; qu'en outre M. X... admet ne pas avoir saisi et indique ne pas souhaiter saisir, pour des motifs tenant à la simplicité et à la rapidité, les juridictions civiles genevoises de l'exécution de cette décision, ce qui l'aurait rendue pleinement exécutoire en France ;
Considérant dans ces conditions que les juridictions françaises ne peuvent, comme il le sollicite, tenir la décision rendue par la commission des honoraires comme pouvant, sous réserve d'une décision judiciaire française, justifier "d'office" exécution ;
Que dès lors, M. X... ne peut qu'être invité à saisir les juridictions genevoises compétentes pour rendre exécutoire la décision rendue par la commission de taxation des honoraires avant de pouvoir en rechercher l'exécution en France contre Mme Z..., la juridiction ne pouvant y suppléer et ce, en particulier, au regard de la clause d'attribution de compétence exclusive aux juridictions genevoises incluse dans le mandat du 5 septembre 2001 ;
Considérant que le jugement, qui avait alors constaté qu'aucune des parties ne contestait ni la compétence des juridictions françaises ni l'application du droit genevois à leur litige, ce qui est toujours la situation en cause d'appel, mais avait aussi pris acte du fait que le demandeur, à l'inverse de sa position en appel, ne demandait pas que la décision rendue par la commission des honoraires soit "reconnue d'office sur le territoire français", sera infirmé ;
Et considérant qu'en cet état, la demande reconventionnelle ne peut pas plus être examinée ;
Considérant que chacune des parties revendique à son profit le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que les circonstances légitiment l'octroi, à M. X... seul, d'indemnités procédurales dans la mesure précisée au dispositif ;
PAR CES MOTIFS,
Infirme le jugement rendu le 17 mars 2009 part le Tribunal de grande instance de Paris ;
Faisant droit à nouveau :
Rejette les demandes
Condamne Mme Z... à payer à M. X... la somme de 3 000 € (trois mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/10317
Date de la décision : 24/05/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2011-05-24;09.10317 ?
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