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23/06/2011 | FRANCE | N°07/12409

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 23 juin 2011, 07/12409


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 23 JUIN 2011



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/12409



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/07149





APPELANT



Monsieur [L] [F]

[Adresse 2]

[Localité 3]



représenté par la SCP DU

BOSCQ et PELLERIN, avoué à la Cour

assisté de Me Henri LATSCHA, avocat au barreau de PARIS, toque : R076





INTIMÉE



CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA TOURAINE ET DU POITOU prise en la perso...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 23 JUIN 2011

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/12409

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/07149

APPELANT

Monsieur [L] [F]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par la SCP DUBOSCQ et PELLERIN, avoué à la Cour

assisté de Me Henri LATSCHA, avocat au barreau de PARIS, toque : R076

INTIMÉE

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA TOURAINE ET DU POITOU prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par la SCP TAZE-BERNARD - BELFAYOL-BROQUET, avoué à la Cour

assistée de Me François CARRE, avocat au barreau de POITIERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Février 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Claude APELLE, Président de chambre

Madame Marie-Josèphe JACOMET, Conseiller

Madame Caroline FEVRE, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : M. Sébastien PARESY

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile comme elles ont été avisées des dates de prorogation du délibéré .

- signé par Madame Marie-Claude APELLE, président et par M. Sébastien PARESY, greffier auquel la minute du jugement a été rendue par le magistrat signataire.

****

M. [L] [F] est appelant d'un jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Paris en date du 18 juin 2007, qui a :

- débouté MM. [L] [F] et [B] [E] de leurs demandes d'annulation de leurs engagements de caution et d'acte de nantissement ;

- condamné MM. [L] [F] et [B] [E], solidairement, à payer à la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou les sommes de : 1/ soixante-dix huit mille trois cent douze euros et vingt centimes (78.312,20 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006, au titre du prêt n° 221124 du 27 juin 1996, 2/ quatre-vingt-dix-sept mille huit cent quatre-vingt-dix euros et vingt-cinq centimes (97.890,25 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006, au titre des deux prêts constatés par billets à ordre n° 302428 et n° 310845, 3/ douze mille sept cent trente-trois euros et soixante-douze centimes (12.733,72 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 27 juin 1996, au titre de l'ouverture de crédit en compte courant consentie par convention de crédit global d'exploitation du 27 juin 1996, et 4/ trois cent quatre-vingt-onze mille cinq cent soixante-et-un euros et un centime (391.561,01 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006, au titre de la ligne de crédit à court terme de deux millions de francs (2.000.000 F) utilisée au moyen de six billets à ordre ;

- condamné M. [L] [F] à payer à la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou la somme de vingt-trois mille cent quatre-vingt-quatre euros et soixante-treize centimes (23.184,73 €), sauf à parfaire, au titre des frais de garde du tableau mis en gage au profit de la caisse;

- ordonné la vente aux enchères du tableau de Paul Cézanne Bord de rivière, remis en gage par M. [L] [F] à la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou par acte du 27 janvier 1997 ;

- débouté MM. [L] [F] et [B] [E] de leurs demandes de dommages-intérêts ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision, à l'exclusion de celles relatives à la vente aux enchères du tableau remis en gage ;

- condamné MM. [L] [F] et [B] [E], solidairement, à payer à la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou la somme de cinq mille euros (5.000 €) par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamné MM. [L] [F] et [B] [E], solidairement, aux dépens.

' ' '

Ceux des faits et relations contractuelles qui sont constants et la procédure antérieure peuvent être résumés ainsi qu'il suit :

En octobre 1995, M. [L] [F] a constitué avec M. [B] [E] la société Semd Gallus, dans la perspective, d'une part, de la reprise des actifs de la société Gallus Moyen Concept, en liquidation judiciaire, d'autre part, de l'exécution d'un important contrat d'exportation de fauteuils dentaires destinés à l'Université Gazi d'Ankara.

Dans le cadre du protocole intergouvernemental franco-turc du 19 décembre 1994, étaient prévues des opérations dites de «'crédit-acheteur'», dans le cadre desquelles des banques françaises finançaient des opérations d'exportation d'entreprises françaises à destination de la Turquie, et notamment à destination d'institutions publiques turques.

Ces opérations bénéficiaient d'une double garantie : d'une part, l'acheteur était l'État turc, quelque soit l'institution publique destinataire des équipements, ce qui constituait une assurance évidente de solvabilité ; d'autre part, la Coface ' Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur ' intervenait pour assurer le bon déroulement financier de l'opération.

Dans le cadre de ce protocole franco-turc, l'Université Gazi d'Ankara a commandé à la société Explo-Control cent-vingt (120) fauteuils dentaires de marque «'Gallus'», suivant contrat du 14 février 1996.

En raison de la spécification même de la marque commandée, le contrat ne pouvait qu'être sous-traité en totalité à la société Semd Gallus, venant aux droits de la société Gallus Moyen Concept et titulaire de la marque «'Gallus'». Par contrat du 15 octobre 1996, la société Explo Control a confié à la société Semd Gallus, représentée par son directeur général, M. [B] [E], la sous-traitance de l'ensemble de ce contrat.

Le 19 juillet 1996, la Coface a délivré une promesse de garantie sous condition de l'engagement écrit d'une banque de mise à la disposition de divers financements précisés dans le document. Cette promesse a été prorogée à plusieurs reprises.

Les relations entre la société Semd Gallus, MM. [F] et [E] et la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou sont totalement controversées quant au contrat portant sur la commande de ces fauteuils, M. [F] faisant valoir que la banque, en revenant sur ses engagements, a provoqué la cessation de paiements de l'entreprise et engagé sa responsabilité envers les cautions, la caisse répliquant qu'elle ne s'est jamais engagée au-delà des financements accordés et qu'en outre, ce sont les manquements de MM. [F] et [E] qui l'ont amenée à refuser un concours complémentaire.

Il est simplement constant que MM. [F] et [E] se sont portés cautions, à hauteur de deux millions d'euros, dans l'ouverture de crédit concernant cette opération et qu'en outre, M. [F] a remis en gage le tableau de Paul Cézanne, 'Les bords de la rivière'.

Par jugement en date du 11 juin 1997, le Tribunal correctionnel de Châtellerault a prononcé la liquidation judiciaire de la société Semd Gallus.

Trois instances s'en sont suivies :

D'une part, Me [U], en qualité de mandataire liquidateur de la société Semd Gallus, a assigné la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou en comblement du passif de l'entreprise.

Par arrêt en date du 27 novembre 2001, la Cour d'appel d'appel de Poitiers, confirmant le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Poitiers le 22 février 1999, a débouté Me [U], en qualité de mandataire liquidateur de la société Semd Gallus, de sa demande.

Par arrêt en date du 22 mars 2005, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par Me [U].

D'autre part, la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou a assigné en paiement MM. [F] et [E] devant le Tribunal de grande instance de Paris et ces derniers ont assigné en nullité de leurs engagements et, à titre subsidiaire, en dommages intérêts la Caisse devant le Tribunal de grande instance de Poitiers. Le tribunal de grande instance de Poitiers s'étant dessaisi au profit du Tribunal de grande instance de Paris, ces deux procédures ont été jointes..

Ce sont ces deux procédures jointes qui ont abouti au jugement entrepris du 18 juin 2007.

*****

Aux termes de ses écritures récapitulatives signifiées le 18 septembre 2009,

M. [L] [F] a demandé à la Cour :

- de le déclarer recevable en sa tierce opposition à l'encontre de l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Poitiers en date du 27 novembre 2001 ;

- de rétracter ledit arrêt et dire qu'il lui est inopposable ;

- d'infirmer le jugement entrepris ;

et, statuant à nouveau, à titre principal :

- de dire que la cause, au sens de l'article 1131 du Code civil, de son engagement de caution souscrit le 27 janvier 1997 est l'engagement de la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou, de mettre à la disposition de la société Semd Gallus les concours de trésorerie nécessaires à l'exécution du contrat avec la République de Turquie ;

- de constater que la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou a manqué à son obligation de mise à disposition de la société Semd Gallus des concours de trésorerie;

- en conséquence, de déclarer nuls l'engagement souscrit et le nantissement fourni par M. [F] ;

à titre subsidiaire :

- de dire que la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou a commis un dol par réticence à l'encontre des cautions ;

- déclarer nul les engagements de caution souscrits par M. [F] ;

- de déclarer nul, et à tout le moins sans effet faute d'objet, l'acte de nantissement du 27 janvier 1997;

- de débouter la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou de toutes ses demandes;

- de la condamner à lui payer la somme de six cent mille euros (600.000 €) à titre de dommages-intérêts ;

- de la condamner à lui payer la somme de dix mille euros (10.000 €) à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;

- de la condamner aux dépens.

Suivant conclusions signifiées le 8 octobre 2009, la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou a demandé à la Cour de : débouter M. [F] de tous ses moyens et demandes ; confirmer le jugement entrepris ; condamner M. [F] à lui payer la somme de dix mille euros (10.000 €) par application de l'article 700 du Code de procédure civile ; de condamner M. [F] aux dépens.

Par arrêt en date du 10 décembre 2009, cette Cour a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à conclure sur sa compétence pour connaître d'une tierce opposition formée à l'encontre de l' arrêt de la Cour d'appel de Poitiers ayant statué sur une action en comblement de passif, ordonné la communication du dossier à M. Le Procureur Général pour ses éventuelles réquisitions.

Le Ministère Public a conclu, suite à la réouverture des débats, à la compétence de cette Cour.

Par conclusions suite à la réouverture des débats signifiées le 19 février 2010, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Touraine et du Poitou a demandé à la Cour de:

- déclarer M. [F] irrecevable en sa tierce opposition incidente à l'encontre de l'arrêt prononcé le 27 novembre2001 par la Cour d'appel de Poitiers,

- déclarer M. [F] mal fondé en son appel à l'encontre du jugement rendu le 18 juin 2007 par le Tribunal de grande instance de Paris,

en conséquence,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- condamner M. [F] à lui payer la somme de dix mille euros - 10.000 € - sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- en tout état de cause, lui donner acte de ce qu'elle sollicite d'ores et déjà le débouté de tous moyens et prétentions contraires et de toutes demandes additionnelles qui pourraient être développées ultérieurement,

- condamner M. [F] en tous les dépens.

Par conclusions signifiées le 30 mars 2010, M. [F] a demandé à la Cour de:

- constater que le moyen de droit , relevé d'office , tel qu'il a été défini dans l' arrêt de cette cour du 10 décembre 2009, n'est pas fondé et , par voie de conséquence, d'y renoncer,

- condamner le Crédit Agricole en tous les dépens de première instance, d'appel et de tierce opposition dont le recouvrement sera poursuivi pour ceux le concernant.

SUR CE

Considérant que la Semd Gallus a contracté divers prêts ou ouvertures de crédit auprès du Crédit Agricole:

- le prêt n° 221121 d'un montant initial de quatre cent mille francs - 400.000 F - consenti le 27 juin 1996 et cautionné à la même date par M. [F],

- l'ouverture de crédit en compte courant d'un montant de trois cent mille francs

- 300.000 F - consentie également le 27 juin 1996, par convention de crédit global d'exploitation, et cautionnée le même jour par M. [F],

- deux prêts sur billet à ordre d'un montant initial de huit cent mille euros - 800.000 € - et deux cent mille euros - 200.000 € - consentis le 24 décembre 1996 et cautionnés le 27 janvier 1997 par M. [F],

- enfin, une ligne de crédits à court terme de deux millions d'euros utilisée au moyen de six billets à ordre et cautionnée par M. [F] le 27 janvier 1997; que s'est ajoutée à sa caution sur cette ligne de crédit la mise en gage d'un tableau de maître de M. [F] ;

Considérant que la Semd Gallus a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Châtellerault en date du 11 juin 1997; que la Caisse de Crédit Agricole a régulièrement déclaré sa créance entre les mains du liquidateur judiciaire le 23 juin 1997 et mettait en demeure M. [F] d'honorer ses engagements en ce compris ceux de la ligne de crédit de deux millions d'euros ; que la mise en demeure étant restée infructueuse, la Caisse a assigné, par exploit en date du 24 septembre 1997, M. [F] afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de deux millions quarante trois mille quatre cent sept euros et sept centimes - 2.043.407,07 € - ainsi que la réalisation du gage portant sur le tableau que celui-ci avait donné en garantie.

Que, de leurs côtés, M. [F] et son associé et caution solidaire, avaient assigné la Caisse devant le Tribunal de grande instance de Poitiers, aux fins de voir annuler les engagements de caution qu'ils avaient signé, et, à titre subsidiaire, de voir condamner la banque au paiement de dommages-intérêts destinés à se compenser avec le montant des condamnations portées à leur encontre; que les deux procédures furent jointes devant le Tribunal de grande instance de Paris, le Tribunal de grande instance de Poitiers s'étant dessaisi au profit du Tribunal de grande instance de Paris ;

Considérant que, parallèlement à ces procédures, le liquidateur de la Semd Gallus a assigné, devant le Tribunal de grande instance de Poitiers, la Caisse aux fins de voir la banque condamnée à payer l'entier passif de la société; que, par jugement du Tribunal de grande instance de Poitiers en date du 22 février 1999, Me [U], en qualité de liquidateur de la Semd Gallus, fut débouté de ses demandes, jugement qui fut confirmé en appel le 27 novembre 2001, arrêt définitif, le pourvoi de Me [U] en qualité de liquidateur de la SA Semd Gallus à l'encontre de cet arrêt ayant été rejeté. ; que c'est à l'encontre de cet arrêt que M. [F] fait tierce opposition ;

1) Sur la tierce opposition formée par M. [F] à l'encontre de l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers en date du 27 novembre 2001.

Considérant que M. . [F] a fait tierce opposition à l'encontre de l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers ayant confirmé le jugement du Tribunal de grande instance de Poitiers qui débouté le liquidateur de la société Gallus de sa demande tendant à voir ordonner la Caisse de Crédit Agricole à payer la totalisé du passif de la société; que l'action portée devant cette cour étant une action en paiement du Crédit Agricole à l'encontre de la société Gallus incidente et une demande en dommages-intérêts à l'encontre de M. [F] est donc une tierce opposition incidente;

Considérant qu'aux termes de l'article 558 du Code de procédure civile 'la tierce opposition incidente à une contestation dont est saisie une juridiction est tranchée par cette dernière si elle est de degré supérieure à celle qui a rendu le jugement ou, si, étant d'égal degré, aucune règle de compétence d'ordre public n'y fait obstacle' ;que la tierce opposition peut donc être portée devant la juridiction saisie du litige principal, en l'espèce cette Cour, puisque cette juridiction est saisie tant des demandes en paiement de la caisse que de la demande de nullité de l'engagement de caution et, à titre subsidiaire, de dommages - intérêts de M. [F], ce que les deux parties reconnaissent; qu'il convient, par voie de conséquence, de déclarer recevable la tierce opposition formée devant la Cour d'appel de Paris à l'encontre de l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers en date du 27 novembre 2001;

Considérant qu'aux termes de l'article 583 du Code de procédure civile, ' est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt à la condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque. Les créanciers et autres ayant cause d'une partie peuvent toutefois former opposition au jugement rendu en fraude de leurs droits ou s'ils invoquent des moyens qui leur sont propres ' ;

Considérant que M. [F] est à la fois associé de la société Gallus et caution solidaire de l'ensemble des engagements de cette société;

Considérant que si un associé ou une caution solidaire est effectivement représenté à l'audience, comme le soutient la banque, par le mandataire liquidateur dont il est associé ou pour lequel il s'est porté caution, encore faut il que cet associé ou cette caution n'invoque pas des droits qui lui sont propres et que le représentant n'aurait pu invoquer;

Considérant que force est de constater que M. [F] invoque dans la présente instance le dol de la banque à son encontre pour solliciter la nullité de son engagement de caution ; qu'il s'agit à d'un moyen qui lui est incontestablement propre;

Considérant par ailleurs que M. [F] doit prouver qu'il a intérêt à agir, la finalité de la voie de recours étant de rendre inopposable une décision à l'opposant et donc de lui causer préjudice;

Considérant que si ce préjudice doit résulter du dispositif du jugement et non de la motivation du jugement, force est de constater toutefois que M. [F], en sa qualité de caution, n'a pu qu'avoir préjudice de la décision ayant débouté le liquidateur de la société en sa demande en paiement;

Considérant qu'il convient, par voie de conséquence, de faire droit à la tierce opposition incidente de M. [F] et de déclarer l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers inopposable à M. [F].

2 ) Sur la demande en paiement de la banque

A) au titre du prêt n° 221124 et des deux prêts constatés par billets à ordre n° 302428 et n° 310845;

Considérant que M. [F] ne conteste pas devoir à la Caisse Agricole , en sa qualité de caution de ces engagements de la société les sommes suivantes et qui sont justifiées par les pièces produites au débat:

- soixante dix huit mille trois cent douze euros et vingt centimes - 78.312,20 € - outre les intérêts légaux du 23 mai 2006 jusqu'à parfait paiement ,

- quatre vingt dix sept mille huit cent quatre vingt dix euros et vingt cinq centimes - 97.890,25 € - avec intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006 jusqu'à parfait paiement;

Considérant qu'il convient de confirmer le jugement entrepris de ce chef ;

B) au titre de l'ouverture de crédit en compte courant consentie par convention de crédit global d'exploitation du 27 juin 1996 et au titre de la ligne de crédit à court terme de deux millions de francs - 2.000.000F - utilisée au moyen de six billets à ordre

Considérant que M. [F] conteste par contre le jugement entrepris en ce qu'il a l'a condamné à payer à la Caisse de Crédit Agricole les sommes de:

- douze mille sept cent trente trois euros et soixante douze centimes - 12.733,72 € - et ce avec intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006 jusqu'à parfait paiement , au titre de l'ouverture de crédit en compte courant consentie par convention de crédit global d'exploitation du 27 juin 1996,

- trois cent quatre vingt onze mille cinq cent soixante et un euros et un centime - 391.561,01 € - avec intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006 jusqu'à parfait paiement au titre de la ligne de crédit à court terme de deux millions de francs - 2.000.000 F - utilisée au moyen de six billets à ordre ;

Considérant que M. [F] soulève en premier lieu la nullité de son acte de cautionnement de deux millions de francs - 2.000.000 F -

Qu'il fait valoir que, par lettre en date du 17 décembre 1996, la Caisse confirmait son intention de soutenir la société Gallus dans les termes suivants ' Concernant la seule opération Gazi, trois crédits pourraient être envisagés ( contre-garantie Caution Bancaire restitution d'acompte, crédit de trésorerie spécifique pour l'opération et contre garantie Caution Bancaire de bonne fin ), les deux premiers avec la caution des associés , matérialisée de surcroît avec la mise en gage d'un tableau de maître ' les bords de la rivière ' appartenant à M. [F] , le troisième avec une caution des associés, limitée en montant ';

Qu'il ajoute que l'accord était confirmé par une lettre en date du 24 décembre 1996 prévoyant, concernant l'opération Gazi ' Crédit de trésorerie de 2.000.000 de francs d'une durée maximale de... huit mois assorti de la caution solidaire de MM. [E] et [F] avec remise en gage au profit de la Caisse Régionale d'un tableau de maître et que, par télécopie du 21 janvier 1997, la banque a adressé à M. [E] un projet de courrier dans lequel la banque s'engageait à délivrer les cautions requises par la Coface et à mettre à disposition de la Semd Gallus les concours de trésorerie nécessaires à l'exécution du contrat de Turquie; que ce courrier a été adressé par la Banque à la Coface le 27 janvier 1997; que la Coface reconnaissait alors que l'engagement du Crédit Agricole tel qu'il avait été transmis le 27 janvier 1997 répondait à l'exigence émise par la Commission des

garanties ;

Considérant que M. [F] soutient que ce n'est qu'en raison de cet engagement de la banque de mettre à la disposition de la société Gallus les fonds nécessaires à l'opération Gazi tant que cette opération se déroulerait qu'il a signé son engagement de caution de deux millions de francs- 2.000.000 F -

Que, pour M. [F], d'une part du fait de la défaillance de la Banque à honorer ses engagements financiers durant l'exécution du contrat Gazi, son engagement est dépourvu de cause, d'autre part , il n'aurait pas signé l'engagement de caution contesté sans les manoeuvres dolosives de la banque ;

Considérant que la cause de l'engagement de caution est l'ouverture de crédit ou un prêt consenti à l'emprunteur ;

Que force est de constater qu'en la présente espèce M. [F] ne conteste pas que la Caisse de Crédit Agricole s'est acquittée les sommes ayant fait l'objet de l'ouverture de crédit en compte courant consentie par convention de crédit global d'exploitation du 27 juin 1996 et de la ligne de crédit à court terme de deux millions de francs - 2.000.000F - utilisée au moyen de six billets à ordre et pour lesquelles M. [F] s'est porté caution;

Considérant qu'au vu de ces éléments, M. [F] ne peut sérieusement soutenir que son engagement de caution est dépourvu de cause ;

Considérant que M [F] soulève en deuxième lieu la nullité de son engagement de caution et ce du fait de manoeuvres dolosives de la Banque ;

Que M. [F] soutient qu'il y a eu manoeuvres dolosives de la Banque du fait que cette dernière lui aurait fait croire, pour avoir sa caution qu'elle soutiendrait l'activité de la société Gallus tout au long de l'exécution du contrat Gallus;

Considérant que M. [F] ne justifie pas toutefois de manoeuvres dolosives de la Banque à son encontre;

Qu'il justifie sa demande par la lettre de la banque à la Coface du 27 janvier 1997; que, dans cette lettre la Banque s'engage à mettre à la disposition de la société Gallus les concours de trésorerie nécessaires à l'exécution du contrat avec la Turquie,

Considérant que , si la banque ne précise pas dans cette lettre , le montant de ses engagements, force est de constater qu'elle avait peu de temps auparavant, soit le 24 décembre 1996, informé la société Gallus qu'elle envisageait un crédit de trésorerie de deux millions d'euros d'une durée de huit mois; ce concours étant assorti de la caution solidaire de M. [F] et de M. [E] avec remise au gage au profit de la Caisse d'un tableau de maître ' Les Bords de la Rivière' par M. [F] ;

Considérant que, par voie de conséquence, M. [F] ne peut sérieusement soutenir qu'au vu de la lettre adressée à la Coface par la Banque, il ne pouvait que penser que la banque s'engageait pour un montant indéterminé jusqu'à la fin du contrat Gazi;

Qu'en l'absence de preuve de la moindre manoeuvre dolosive, il ne peut qu'être débouté de sa demande tendant à voir annuler ses deux engagements de caution pour dol;

Considérant que M. [F] ne conteste pas les sommes retenues par les premiers juges au titre de l'ouverture de crédit en compte courant consentie par convention de crédit global d'exploitation du 27 juin 1996 et au titre de la ligne de crédit à court terme de deux millions de francs - 2.000.000F - utilisée au moyen de six billets à ordre;

Considérant que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné

M. [F] à payer à la Caisse de Crédit Agricole la somme de douze mille sept cent trente-trois euros et soixante-douze centimes (12.733,72 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 27 juin 1996, au titre de l'ouverture de crédit en compte courant consentie par convention de crédit global d'exploitation du 27 juin 1996, ainsi que la somme de trois cent quatre-vingt-onze mille cinq cent soixante-et-un euros et un centime (391.561,01 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006, au titre de la ligne de crédit à court terme de deux millions de francs (2.000.000 F) utilisée au moyen de six billets à ordre ;

3) Sur la demande en dommages-intérêts formée par M. [F]

Considérant que M. [F] reproche une faute contractuelle de la banque du fait d'avoir refusé d'accorder à la société Gallus de nouveaux crédits ;

Considérant qu'il ressort des pièces produites au débat que la société Semd Gallus a reçu le 9 avril 1996 un courrier de Me [K] en qualité d'administrateur judiciaire de la société Gallus précisant qu''il y avait un besoin supplémentaire de six millions cinq cent mille euros - 6.500.000 € - et que, seul le Crédit Agricole et la société trouvent un terrain d'entente et l'exploitation peut reprendre dans des conditions à peu près normales, le financement de la trésorerie à court terme étant assuré , soit il faudra constater l'état de cessation des paiements et en tirer les conséquences';

Considérant qu'aucun reproche ne peut être fait , dans ces conditions, au Crédit Agricole d'avoir refusé l'ouverture de nouveaux crédits, la lettre du 27 janvier 1997 ne pouvant être prise comme un engagement illimité, le Crédit Agricole ne pouvant s'exposer à un risque abusif de crédit;

Considérant enfin que le Crédit Agricole a , à plusieurs reprises, sollicité de la société Gallus les garanties; que, devant l'inertie de celle ci, elle devait adresser à la société Gallus, le 28 avril 1997, la lettre suivante:

' Nous nous sommes clairement engagés sur la base de besoins chiffrés fin 1996 à sept millions de francs mais vous comprendrez que le caractère fluctuant et incertain de vos nouvelles prévisions conjugué à l'absence des résultats comptables 1996 ne nous permet pas de mettre en place de nouveaux financements.

D'autre part , les associés ont clairement manifesté leur refus d'augmenter leur engagement financier pour conforter suffisamment et durablement les fonds propres de la société alors que la situation personnelle le leur permet.

Enfin, nous vous rappelons qu'un crédit débloqué en janvier est garanti par le nantissement d'un tableau par l'un des associés. Or, à ce jour, les frais de garde ne sont pas réglés et, plus grave, le propriétaire a essayé de reprendre possession de ce tableau à notre insu , tentant ainsi un détournement d'objet gagé. Vous comprendrez aisément que ceci n'est évidemment pas de nature à conforter notre confiance ';

Considérant que du fait de la situation particulièrement difficile de la société Gallus et du comportement de M. [F], aucune faute ne peut être reprochée à la banque pouvant ouvrir droit à dommages-intérêts du fait du refus de nouveaux crédits pour l'opération Gazi; qu'elle n'est pas plus à l'origine de la liquidation judiciaire de la société Gallus , cette société était débitrice de sommes importantes à l'égard d'autres créanciers et que donc les difficultés de la Semd Gallus étaient antérieures au refus de la Caisse d'accorder de nouveaux crédits ;

Considérant que le jugement entrepris sera, par voie de conséquence confirmé en ce qu'il a :

- débouté M. [L] [F] de ses demandes d'annulation de ses engagements de caution et d'acte de nantissement ;

- condamné M. [L] [F] solidairement avec M. [E], à payer à la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou les sommes de : 1/ soixante-dix huit mille trois cent douze euros et vingt centimes (78.312,20 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006, au titre du prêt n° 221124 du 27 juin 1996, 2/ quatre-vingt-dix-sept mille huit cent quatre-vingt-dix euros et vingt-cinq centimes (97.890,25 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006, au titre des deux prêts constatés par billets à ordre

n° 302428 et n° 310845, 3/ douze mille sept cent trente-trois euros et soixante-douze centimes (12.733,72 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 27 juin 1996, au titre de l'ouverture de crédit en compte courant consentie par convention de crédit global d'exploitation du 27 juin 1996, et 4/ trois cent quatre-vingt-onze mille cinq cent soixante-et-un euros et un centime (391.561,01 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2006, au titre de la ligne de crédit à court terme de deux millions de francs (2.000.000 F) utilisée au moyen de six billets à ordre ;

- condamné M. [L] [F] à payer à la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou la somme de vingt-trois mille cent quatre-vingt-quatre euros et soixante-treize centimes (23.184,73 €), sauf à parfaire, au titre des frais de garde du tableau mis en gage au profit de la caisse;

- ordonné la vente aux enchères du tableau de Paul Cézanne Bord de rivière, remis en gage par M. [L] [F] à la Caisse régionale de Crédit agricole de Touraine et du Poitou par acte du 27 janvier 1997 ;

- débouté MM. [L] [F] et [B] [E] de leurs demandes de dommages-intérêts ;

4) Sur les autres demandes

Considérant qu'il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la Caisse les frais irrépétibles qu'elle a exposés;

Que M. [F] doit être condamné à lui payer la somme de trois mille euros

- 3.000 € - au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, la somme allouée au titre des frais irrépétibles exposés en première instance étant par ailleurs confirmée ;

Considérant que M. [F], partie succombante, doit les dépens d'appel, sa condamnation par les premiers juges aux dépens de première instance étant par ailleurs confirmée.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable la tierce opposition en ce qu'elle est formée par M. [L] [F] devant la Cour d'appel de Paris.

Déclare recevable la tierce-opposition formée par M. [L] [F] à l'encontre de l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Poitiers en date du 27 novembre 2001.

Déclare , par voie de conséquence, l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Poitiers entre Me [U] es qualités d'administrateur judiciaire de la Semd Gallus et la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel de Paris inopposable à M. [L] [F].

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Condamne M. [L] [F] à payer à la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel de Paris la somme de trois mille euros - 3.000 € - au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Condamne M. [L] [F] aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP Taze Bernard & Belfayol Broquet, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 07/12409
Date de la décision : 23/06/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°07/12409 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-23;07.12409 ?
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