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07/02/2012 | FRANCE | N°11/09305

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 07 février 2012, 11/09305


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 07 Février 2012

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/09305



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Février 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 07/02276





APPELANT



Monsieur [O] [F]

[Adresse 2]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Sylvain ROUMIER,

avocat au barreau de PARIS, toque : C2081





INTIMEES



SA CANAL +

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Eric MANCA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438



SA SESI

[Adresse...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 07 Février 2012

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/09305

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Février 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 07/02276

APPELANT

Monsieur [O] [F]

[Adresse 2]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Sylvain ROUMIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C2081

INTIMEES

SA CANAL +

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Eric MANCA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438

SA SESI

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Eric MANCA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Janvier 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère

Madame Dominique LEFEBVRE-LIGNEUL, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Sandrine CAYRE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour est saisie de l'appel interjeté par M. [F] du jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris section Encadrement chambre 1 du 22 février 2008 qui a requalifié les contrats de travail de M. [F] à durée déterminée à durée indéterminée à l'égard de la société Groupe Canal + du 22 janvier 2002 au 22 mars 2005 et l'a condamnée à payer les sommes de 4 679.32 € à titre de préavis et 467.93 € de congés payés afférents, 9 358.64 € à titre d'indemnité de licenciement avec intérêt légal à dater de la réception de la convocation par la partie défenderesse devant le bureau de conciliation, 14 037.96 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 500 € pour frais irrépétibles et l'a débouté de ses demandes à l'égard de la société Sesi.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

M. [F], journaliste professionnel, a été engagé par contrats à durée déterminée par la société Canal + entre le 22 janvier 2002 et le 31 août 2005 en qualité de journaliste pigiste puis de chef opérateur de prise de vue, puis par la société filiale Sesi du 17 septembre 2005 à fin septembre 2006 d'abord comme chef opérateur de prise de vue puis comme journaliste, aux termes de 62 lettres d'engagement ;

Il a perçu sur le mois de septembre 2006 des indemnités de fin de collaboration continue de longue durée pour la somme de 12 528 € ;

Il a saisi le conseil en février 2007 en requalification en contrat à durée indéterminée et en licenciement sans cause réelle et sérieuse à l'égard des deux sociétés.

M. [F] par voie de réformation demande de requalifier les contrats en contrat à durée indéterminée à temps plein à l'égard des deux sociétés à compter du 22 janvier 2002 et de condamner solidairement les sociétés Groupe Canal + et Sesi à lui payer:

36 837 € d'indemnité de requalification

146 446.61 € et 14 644.66 € de congés payés et 12 203.88 € de 13ème mois afférents pour rappels de salaires à temps plein

62 601.17 € de rappel de prime d'ancienneté et 6 260.11 € de congés payés afférents et 5 216.77 € de 13ème mois sur la période de février 2002 au 23 septembre 2006,

36 837 € d'indemnité de travail dissimulé,

18 418.14 € à titre de préavis et 1 841.81 € pour congés payés afférents

30 696.90 € à titre d'indemnité de licenciement

110 509 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 5000 € pour frais irrépétibles, avec régularisation auprès des organismes de retraite, ursaff et prévoyance, sous astreinte, avec capitalisation des intérêts, d'ordonner la remise des documents conformes sous astreinte avec réserve de liquidation par la cour,

Les sociétés Canal + et Sesi demandent par voie d'infirmation de débouter M. [F] de toutes ses demandes, subsidiairement de confirmer le jugement et de condamner M. [F] à payer la somme de 2000 € pour frais irrépétibles.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience ;

M. [F] selon contrats de mission écrits et bulletins de salaire produits a travaillé sans interruption à l'exception du mois d'avril 2002, tous les mois entre janvier 2002 et septembre 2006, successivement pour les deux sociétés du même groupe avant et après fin août 2005, à raison de 2 jours pour le mois de janvier 2002, de 6 à 14 jours sur les autres mois et souvent 10 jours par mois, 8H par jour, le même signataire représentant les deux sociétés dans les contrats de mission;

M. [V], qui a été directeur de l'information à Canal + et directeur général à I  Telévision a attesté que M. [F] n'a exercé qu'une activité de journaliste non limitée aux fonctions d'opérateur de prise de vue au sein de I-télé;

M. [Z], qui a été responsable d'édition à I-télé, en charge des reportages depuis septembre 2001, a déclaré que M. [F] n'était pas rémunéré pour les tâches de préparation ;

Ces deux attestants ont quitté les sociétés ensuite de départ conventionnel et après médiation ;

M. [F] était titulaire d'un badge d'accès à I-Télévision ;

M. [F] a assuré ainsi au regard de la régularité et de la continuité de ses missions, un travail permanent de journaliste reporter images dit jri pour les sociétés Canal + et Sesi du même Groupe, abusivement indiqué comme chef opérateur intermittent sur la période de février 2005 à février 2006 au lieu des fonctions réelles de jri remplies ainsi qu'établi selon les tâches d'interview et reportages relatées dans les notes manuscrites de M. [F] produites par l'employeur pour cette période, et notamment :

- en août 2005 pour assurer les interviews de [P] [N] et [M] [T], portraits croisés,

- en octobre 2005 pour des reportages et interview,

- en novembre 2005 pour des sujet JT, de Duvet Setton et Médecins du monde, de reportages Sdf grands froids,

- en décembre 2005 de reportage nouveaux pauvres de la rue, qui a fait l'objet de commentaire à son nom dans le journal du Canard Enchainé du 14 décembre 2005, ainsi que piste de ski à Dubaï, Grands chefs Reveillon,

- en janvier 2006, [K] [W] chef Reveillon, interview témoins troubles, préparation et tournage Pakistan et Cachemire qui a fait l'objet de commentaire à son nom dans la nouvelle République des Pyrénées en mars 2006,

ce qui est corroboré par les attestations de MM. [V] et [Z] ;

Les sociétés ne sont donc pas fondées à opposer des contrats d'usage pour les fonctions de chef opérateur intermittent telles que visées aux conventions collectives de production audiovisuelle alors que les fonctions réelles exercées pendant toutes les périodes travaillées sont celles de journaliste reporter images; Par ailleurs le fait que M. [F] a été employé en tant que journaliste pigiste qui peut proposer des projets de reportage n'est pas de nature à empêcher que son emploi est présumé être un contrat de travail, quelque soit le mode et le montant de la rémunération, en l'espèce versée sous forme de salaire de telle sorte que la présomption de salariat de l'article L 7 112-1 du code du travail n'est pas combattue et n'empêche pas la requalification à contrat à durée indéterminée au regard de la nature de l'emploi de collaborateur régulier et permanent tous les mois consécutifs à l'exception du mois d'avril 2002 pendant plus de quatre ans au sein d'une relation de travail salariée au profit successif des deux sociétés du Groupe Canal + pour des fonctions identiques ;

Par ailleurs de nombreuses missions n'indiquent pas le reportage concerné par la mission donnée ;

Il en résulte que le recours à l'utilisation de contrats successifs mensuels et réguliers pour assurer les fonctions salariées de jri pigiste pour des émissions permanentes et normales d'information et de reportage, pendant plus de quatre ans sur des mois consécutifs à l'exception du mois d'avri 2002, n'est pas justifié par des raisons objectives de nature à établir le caractère par nature temporaire de l'emploi;

Les contrats à durée déterminée seront donc requalifiés en contrat à durée indéterminée à l'égard des deux sociétés ayant fonctionné comme co-employeurs à dater de janvier 2002 ainsi du reste qu'établi par le versement volontaire par la société Sesi en septembre 2006 d'une indemnité conventionnelle attachée à la totalité des emplois occupés dans les deux sociétés ;

Tous les contrats ont été signés et datés au premier jour du travail de tous les jours travaillés datés et énumérés dans les contrats de mission dans une colonne jours sise à gauche du contrat avec le total des jours travaillés ;

M. [F] était donc informé des jours travaillés en chaque début de mission et n'était pas tenu de rester à disposition des sociétés en dehors de ces jours datés de telle sorte qu'il a travaillé à temps partiel sur des jours programmés connus en début de mission et n'est pas fondé à revendiquer un emploi à temps plein, en dehors des quelques jours ci-après manifestement travaillés et non rémunérés qui vont donner lieu à rappels de salaire ;

L'indemnité de requalification en contrat à durée indéterminée des contrats à durée déterminée de journaliste pigiste est due ; Elle sera fixée à la somme de

3000 € appropriée au préjudice subi de ce chef ;

Sur les rappels de salaire

Tous les contrats de mission étant signés par le salarié valent avenant accepté par lui du taux journalier indiqué sur chaque mission et M. [F] n'est pas fondé à opposer que la modification a été unilatérale ;

Il est justifié une période travaillée du 14 au 18 décembre 2005 passée sur place selon les tampons du passeport à Dubaï rémunérée pour deux jours les 14 et 15 décembre 2005 au lieu des 4 jours, soit un rappel de deux jours à 219.30 € ;

Le voyage au Pakistan Afghanistan s'est déroulé du 26 janvier au 11 février 2006 sans interruption de telle sorte qu'il manque sur le mois de février les 1er et 2 février et les 10 et 11 février 2006, soit quatre jours à 223.25 € ;

M. [F] est revenu le 1er mai 2006 du reportage du Maroc effectué les 3 derniers jours d'avril, soit un jour à 219.30 € ;

Il est donc dû un rappel total de salaire de 1 562.90 € outre les congés payés afférents de 156.29 € et 130.18 € au titre du 13ème mois ;

Il n'est pas dû de rappel de salaire pour la préparation des reportages dans la mesure où le journaliste pigiste a la faculté de proposer des sujets de reportage dont la préparation lui incombe et qu'il est par ailleurs fait régulièrement état de temps de préparation dans ses notes manuscrite relativement à certains reportages effectués, ce qui va à l'encontre de l'attestation de M. [Z] ;

Il n'est pas établi d'intention de recourir à travail dissimulé au regard des rappels très ponctuels admis et il n'y a pas lieu à indemnité de ce chef ;

Sur la prime d'ancienneté

M. [F] n'établit pas que les salaires tels que perçus sont inférieurs au minima du poste occupé majoré de la prime d'ancienneté dans la profession selon les minima garantis en vertu de l'article 22 de la convention collective ;

Il n'y a donc pas lieu à rappel de ce chef ;

Sur le licenciement

L'arrêt des fonctions au terme de la mission de septembre 2006 sans motif constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Il est dû 2 mois de préavis au regard de l'ancienneté supérieure à 3 ans ;

La dernière moyenne mensuelle au regard des rappels effectués s'élève à 2 421 € ; il sera alloué la somme de 4 842 € outre les congés payés afférents;

Il sera alloué la somme de 20 000 € de dommages-intérêts pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse appropriée à l'ancienneté et au préjudice subi ;

Il sera alloué à raison d'un mois par année d'ancienneté ou fraction d'année, une indemnité de congédiement de l'article L 7 112-3 du code du travail, représentant 5 mois, soit 12 105 € ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement et statuant à nouveau :

Requalifie les contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à compter du 22 janvier 2002 en qualité de journaliste reporter images à temps partiel;

Condamne solidairement les sociétés Canal + et Sesi à payer à M. [F]:

1 562.90 € et 156.29 € de congés payés et 130.18 € de 13ème mois afférents, pour rappels de salaires

4 842 € à titre de préavis et 484.20 € pour congés payés afférents

12 105 € à titre d'indemnité de congédiement

avec intérêt légal à dater de la réception de la convocation par la partie défenderesse devant le bureau de conciliation

3 000 € d'indemnité de requalification

20 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêt légal à compter de l'arrêt

et 2500 € pour frais irrépétibles.

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

Ordonne la régularisation auprès des organismes de retraite, ursaff et prévoyance

et la remise des documents conformes sans avoir lieu à astreinte.

Ordonne le remboursement par les sociétés Canal + et Sesi au profit des organismes intéressés des indemnités de chômage servies dans la limite de 6 mois.

Rejette les autres demandes ;

Condamne solidairement les sociétés Canal + et Sesi aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 11/09305
Date de la décision : 07/02/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°11/09305 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-02-07;11.09305 ?
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