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08/11/2012 | FRANCE | N°11/07573

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 08 novembre 2012, 11/07573


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 08 Novembre 2012



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/07573 MAS



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Avril 2011 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 10-00599





APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU [Localité 6] -

[Adresse 1]

[Adresse 1]

re

présentée par Mme [W] [T] en vertu d'un pouvoir spécial







INTIMEE

Madame [Y] exerçant en son nom personnel

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Alann GAUCHOT, avocat au barreau de PAR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 08 Novembre 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/07573 MAS

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Avril 2011 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 10-00599

APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU [Localité 6] -

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Mme [W] [T] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE

Madame [Y] exerçant en son nom personnel

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Alann GAUCHOT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0084

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 2]

[Adresse 2]

avisé - non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Jeannine DEPOMMIER, Président

Monsieur Luc LEBLANC, Conseiller

Madame Marie-Ange SENTUCQ, Conseiller

Greffier : Mme Michèle SAGUI, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, conformément à l'avis donné après les débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Jeannine DEPOMMIER, Président et par Madame Michèle SAGUI, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

L'INSTITUT [5] a prescrit à Monsieur [K] un traitement médical pour l'affection de longue durée dont il est atteint et ce pour une durée de 3 mois en raison de son départ à l'étranger.

Au vu de cette prescription Madame [Y], en sa qualité de pharmacienne, a délivré à Monsieur [K] le 8 juillet 2008 les médicaments correspondants et a dispensé l'intéressé de l'avance des frais.

Le 15 juillet 2008 la CPAM du [Localité 6] a procédé au remboursement des frais engagés.

Le 30 juillet 2009, la CPAM a notifié à Madame [Y] une créance de 8 577 euros au motif que les produits délivrés le 8 juillet 2008 pour 3 mois en raison du départ à l'étranger ont été délivrés sans accord préalable de la CPAM pour la durée de la prescription.

Par un jugement rendu le 22 mars 2011 le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale de CRETEII, s'appuyant sur les dispositions de l'article D-253-4 et D-253-6 du Code de la Sécurité Sociale a prononcé l'annulation de la notification de créance adressée le 30 juillet 2009 par la CPAM du [Localité 6],à Madame [Y] au motif que la personne ayant délivré la notification n'est pas identifiable, a déclaré la notification de créance inopposable à la CPAM du [Localité 6], a rejeté la demande reconventionnelle de la CPAM du [Localité 6] et a rejeté la demande de Madame [Y] au titre des frais irrépétibles.

La CPAM du [Localité 6] a interjeté appel du jugement par lettre recommandée reçue au greffe le 7 juillet 2011.

Elle demande à la Cour :

d'infirmer le jugement entrepris,

de constater que la notification de payer du 30 juillet 2009 délivrée à Madame [Y] est régulière,

de statuer sur la demande reconventionnelle de la CPAM du [Localité 6],

de condamner Madame [Y] à lui payer la somme de 8 577 euros outre une indemnité de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.

Par l'intermédiaire de son représentant, elle expose que la notification de payer du 30 juillet 2009 est régulière car les articles D-253-4 et D 253-6 du Code de la Sécurité Sociale ne posent pas d'exigence en matière de délégation de pouvoir susceptible d'être donnée par le directeur en matière de notification, cette exigence étant exclusivement posée en matière de contrainte en raison de son caractère exécutoire.

Elle soutient également que la notification de payer est conforme aux exigences de l'article 25 de la loi du 12 avril 2000 applicable au litige et qu'aucun texte ne prévoit que les mentions au titre de l'article 25 de la loi du 12 avril 2000 sont requises à peine de nullité.

Sur le fond, elle rappelle que Madame [Y] a délivré les produits pharmaceutiques prescrits le 7 juillet 2008 en une seule fois pour les trois mois de traitement, que la caisse a néanmoins procédé au remboursement de la somme de 12 865,50 euros correspondant à 3 mois de traitement et qu'il en est résulté un indû de 8 577 euros dont le recouvrement peut être poursuivi par elle sur le fondement des articles 1235 et 1376 du Code Civil.

Madame [Y] demande à la Cour :

de déclarer le recours de la CPAM du [Localité 6] recevable mais mal fondé ;

A titre principal :

de constater que la notification de créance délivrée le 30 juillet 2009 par la CPAM du [Localité 6] est irrégulière, son auteur n'étant pas titulaire d'une délégation de pouvoir et de signature du directeur de cet organisme ;

de constater que la procédure de recouvrement subséquente est entachée d'une irrégularité de fond la rendant nulle à son encontre ;

de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 avril 2011 par le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale ;

de condamner la CPAM du [Localité 6] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

A titre subsidiaire :

de constater qu'elle n'a pas contrevenu aux dispositions des articles R 5123-2 et 12 du Code de la Santé Publique en faisant application du dispositif de prise en charge mis en place par la CPAM du [Localité 6] à l'occasion de la délivrance de médicaments en cas de départ à l'étranger pour les assurés sociaux atteints d'une affection longue durée et bénéficiant à ce titre d'une exonération du ticket modérateur ;

de juger que la pharmacie [Y] était fondée à délivrer à Monsieur [K] [X] les médicaments prescrits à ce dernier le 7 juillet 2008 par l'Institut [5] pour une durée de traitement de 3 mois ;

de juger que la CPAM du [Localité 6] n'est pas fondée à poursuivre à l'encontre de Madame [Y] le recouvrement de la somme de 8 577 euros ;

de débouter la CPAM du [Localité 6] de sa demande reconventionnelle en condamnation au paiement de la dite somme.

Madame [Y] fait valoir à titre principal qu'en vertu des dispositions de l'article D 253-4 du Code précité le Directeur exerce des fonctions d'ordonnateur, qu'à ce titre il engage et liquide les dépenses, a seul qualité pour émettre les ordres de recettes et de dépenses et est seul chargé des poursuites à l'encontre des débiteurs de l'organisme mais qu'il peut néanmoins déléguer sous sa responsabilité une partie de ses pouvoirs à certains agents préposés et ce en vertu des articles R 122-3 alinéa 19 et D 253-6 du code de la Sécurité Sociale.

Selon l'intimée, à défaut d'une telle délégation le signataire de l'acte doit être considéré comme n'ayant pas qualité pour l'effectuer ce qui entache la procédure subséquente d'une irrégularité de fond qui la rend nulle.

Ainsi selon l'intimée la notification litigieuse a été signée aux lieu et place d'un cadre pour ordre par une dénommée Madame [J] [O] sans faire référence au directeur et à sa délégation de pouvoir.

Les textes visés à savoir : les articles L 211-2, R 122-3, R 211-2-2 et D 253-4 et D 253-6 font référence à l'appui des délégations de pouvoir habituellement pratiquées.

Le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a annulé la notification irrégulière.

Enfin Madame [Y] indique que les dispositions de la loi du 12 avril 2000 imposent que toute décision administrative individuelle, en ce qu'elle fait notamment grief, comporte l'énoncé des considérations en droit et en fait qui en constitue le fondement or en l'espèce aucun texte ne fonde la créance litigieuse de sorte que la notification de créance et la procédure subséquente lui sont inopposables.

A titre subsidiaire, elle demande à la Cour de constater que les assurés sociaux reconnus atteints d'une affection de longue durée et bénéficiant à ce titre d'une exonération du ticket modérateur n'ont pas à obtenir l'accord préalable de la CPAM pour se voir délivrer à l'occasion d'un départ à l'étranger les médicaments prescrits pour une durée de trois mois en conséquence de quoi la délivrance des médicaments prescrits à Monsieur [K] a été effectuée à juste titre.

SUR QUOI, LA COUR

Sur la nullité de la notification alléguée,

La nullité d'un acte ne peut être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de rapporter la preuve d'une irrégularité de forme qui lui cause un grief au sens des dispositions de l'article 114 du code de procédure civile.

Les articles D-253-4 et D 253-6 du Code de la Sécurité Sociale visent expressément la délégation de pouvoir susceptible d'être donnée par le Directeur de l'organisme social qui est seul ordonnateur en matière de notification d' acte et qui a seul qualité pour émettre les ordres de recettes et de dépenses et engager les poursuites à l'encontre des débiteurs de l'organisme sauf à déléguer sous sa responsabilité une partie de ses pouvoirs à un préposé dénommé.

En l'espèce, la notification adressée le 30 juillet 2009 par la CPAM à Madame [Y] en qualité de pharmacienne à hauteur de la somme de 8 577 euros est signée «pour ordre  par [O] [J] qualifiée le Cadre».

Cette notification n'émane pas du Directeur de l'organisme qui seul a qualité pour émettre des ordres de recettes mais d'une personne n'ayant pas qualité pour le représenter.

Toutefois cette irrégularité de forme ne peut affecter la validité de la notification de paiement qui fonde la poursuite de l'intimée par l'organisme social qu'autant que l'appelante fait la preuve du grief qu'elle lui cause ; or en l'espèce, Madame [Y], nonobstant l'absence de délégation, était en mesure de contester cette notification auprès de la Commission de Recours Amiable de la caisse ainsi qu'elle y était expressément invitée par le courrier de notification.

Par conséquent Madame [Y] ne saurait donc prospérer en sa demande de nullité et doit être déboutée de ce chef.

Sur l'inopposabilité soulevée de la notification à défaut des mentions prévues à l'article 4 alinéa 2 de la loi du 12 avril 2000,

La notification fait expressément référence aux dispositions de l'article 25 de la loi du 12 avril 2000 portant sur les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

Ces dispositions imposent aux organismes de sécurité sociale de motiver l'ordre de reversement des prestations sociales indûment perçues. Elles indiquent les voies et délais de recours ouverts à l'assuré, ainsi que les conditions et les délais dans lesquels l'assuré peut présenter ses observations écrites ou orales.

En l'espèce la notification de la caisse fait référence aux prestations du 8 juillet 2008- lot 835 (départ à l'étranger) qui ont été réglées sans accord préalable de la CPAM pour la durée de la prescription et indique la possibilité d'exercer un recours dans un délai de deux mois devant la commission de recours amiable.

L'ordre de reversement des prestations sociales est motivé au sens de la loi du 12 avril 2000 et Madame [Y] a pu le contester dans les formes et les délais requis.

La notification est donc parfaitement opposable à l'appelante qui ne saurait prospérer en ce moyen.

Sur le non respect prétendu des dispositions de l'article R 5132-12 du code de la santé Publique,

Ces dispositions prévoient qu'il ne peut être délivré en une seule fois une quantité de médicaments correspondant à une durée de traitement supérieure à quatre semaines ou à un mois de trente jours selon le conditionnement.

Toutefois les médicaments présentés sous un conditionnement correspondant à une durée de traitement supérieure à un mois peuvent être délivrés pour cette durée dans la limite de trois mois.

Il est constant que chaque caisse peut librement décider des modalités de mise en oeuvre de cette procédure.

Par un courrier du 11 juillet 2007 la CPAM en la personne du coordonnateur de la gestion du risque et des relations avec les professionnels de santé a informé lesdits professionnels des modalités applicables pour la prise en charge par l'assurance maladie :

'l'assuré doit demander l'accord préalable au service administratif de la CPAM par la production d'une prescription médicale avec la mention «départ à l'étranger» ou d'une attestation sur l'honneur le précisant,

l'accord de la caisse pour la durée de la prescription dans la limite de trois mois sera inscrit sur la prescription médicale par l'apposition du cachet du service administratif,

l'assuré devra présenter ce document pour la délivrance du médicament'.

Dans le cas d'espèce, la prescription médicale du 7 juillet 2008 produite par Monsieur [K] ne comportait pas le cachet susmentionné qui fait foi de l'accord de la caisse.

L'exonération du ticket modérateur dont a bénéficié l'assuré est sans effet sur la procédure qui vient d'être décrite et n'exonère pas le professionnel de santé de son obligation de vérifier que la CPAM a donné son accord préalable.

En l'absence de la justification de cet accord Madame [Y] n'était donc pas fondée à délivrer à Monsieur [K] les médicaments prescrits le 7 juillet 2008 pour une durée de trois mois par l'Institut [5].

La CPAM est donc fondée à poursuivre Madame [Y] en paiement de la somme de 8 577 euros et cette dernière doit être condamnée à ce paiement.

L'équité commande que Madame [Y] soit condamnée à payer à la CPAM la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Déclare la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 6] recevable et bien fondée en son appel ;

En conséquence ;

Infirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

Déclare valable et opposable à Madame [Y] la notification de créance adressée le 30 juillet 2009 par la Caisse Primaire d' Assurance Maladie du [Localité 6] à Madame [Y] en qualité de pharmacienne à hauteur de la somme de 8 577 euros ;

Condamne Madame [Y] à régler à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 6] la somme de 8 577 euros ;

Condamne Madame [Y] à régler à la Caisse Primaire d' Assurance Maladie du [Localité 6] une indemnité de 1500 euros au titre des frais irrépétibles.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 11/07573
Date de la décision : 08/11/2012

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°11/07573 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-11-08;11.07573 ?
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