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30/01/2013 | FRANCE | N°11/02214

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6- chambre 6, 30 janvier 2013, 11/02214


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 6

ARRÊT DU 30 Janvier 2013
(no 23, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/ 02214

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Janvier 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS section industrie RG no 09/ 09935

APPELANTE
SA A...
...
75008 PARIS
représentée par Me Mathilde HOUET-WEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : R02

INTIMÉE
Madame Christine X...
...
77850 HERICY
représent

ée par Me Fabrice DE KORODI KATONA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0286 et Me MERLIN JOHANNET avocat au barreau de PARIS

COMPO...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6- Chambre 6

ARRÊT DU 30 Janvier 2013
(no 23, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/ 02214

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Janvier 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS section industrie RG no 09/ 09935

APPELANTE
SA A...
...
75008 PARIS
représentée par Me Mathilde HOUET-WEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : R02

INTIMÉE
Madame Christine X...
...
77850 HERICY
représentée par Me Fabrice DE KORODI KATONA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0286 et Me MERLIN JOHANNET avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Décembre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère faisant fonction de Président
Madame Claudine ROYER, Conseillère
Madame Laurence GUIBERT, Vice-présidente placée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 3 septembre 2012
qui en ont délibéré

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE
-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Claudine ROYER, Conseillère ayant participé au délibéré et par Madame Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement du 3 janvier 2011, auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Paris a condamné la société A... à payer à madame X... les sommes suivantes :
-58. 500 euros : dommages et intérêts pour licenciement nul
-2. 500 euros : non réponse de l'employeur sur la demande d'explication sur différence de salaire
-500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SA A... a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 4 décembre 2012, conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments ;

* * *

Il résulte des pièces et des écritures des parties les faits constants suivants :

La cristallerie A..., spécialisée dans la fabrication à la main de verre et de cristal et la vente d'objets d'art de la table, a été créée par René A... en 1909 à Combs la Ville.

En 1921, le site de production a été transféré à Wingen sur Moder en Alsace, le site de Combs la Ville étant plus particulièrement consacré à la logistique et l'administration des ventes.

La société A... avait son siège social..., possédait 5 filiales à l'étranger, employait 542 salariés, dont 411en France et relevait de la convention collective nationale de la fabrication du verre à la main.

Madame X... a été embauchée, par la société A..., en qualité de mécanographe 1er degré, à compter du 1er mars 1982, avant d'être promue assistante ADV, moyennant une rémunération mensuelle brute, en dernier lieu, de 2. 000 euros.

Elle travaillait sur le site de Combs la Ville.

Alors qu'elle présentait des comptes déficitaires, la société A..., a été cédée, en février 2008, à la société suisse Art et Fragrance, dirigée par monsieur Silvio B...et employant 35 salariés ; ce rachat qui prévoyait le transfert de la logistique de Combs la Ville vers le site de Wingen sur Moder, a été accepté à l'unanimité par le comité d'entreprise de la société A....

En juin 2008, la société Art et Fragrance a voté une augmentation de capital de 22 millions d'euros.

En septembre 2008, elle a cédé 49, 2 % de son capital social à la Financière Saint Germain.

Le 5 janvier 2009, la SA A... a mis en place un projet de restructuration de l'entreprise, de licenciements collectifs et un plan de sauvegarde pour l'emploi, portant sur la suppression de 56 emplois : 18 postes au siège social parisien et 38 postes à Combs la Ville, soit la totalité des emplois rattachés à ce site qui devait être ainsi supprimé.

Mme X... a été licenciée pour motif économique le 31 mars 2009 après avoir reçu le 30 janvier 2009, des offres de reclassement.

Elle n'a pas souhaité adhérer à la convention de reclassement personnalisée.

Le 21 juillet 2009, avec d'autres salariés, elle a saisi le conseil de prud'hommes à titre principal, d'une demande de nullité de son licenciement pour cause de nullité du plan de sauvegarde pour l'emploi, à titre subsidiaire, d'une contestation de son licenciement.

MOTIFS

1- sur la nullité du licenciement

Considérant que Mme X... conclut à la nullité du plan de sauvegarde pour l'emploi, aux motifs, d'une part que ce plan n'a pas été valablement mis en place, d'autre part qu'il était insuffisant au regard des moyens dont disposait le groupe auquel appartenait la société A... ;

Qu'elle plaide, en conséquence, la nullité de son licenciement ;

sur l'irrégularité de l'élaboration du plan de sauvegarde pour l'emploi

Considérant tout d'abord, que seule l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi ou l'insuffisance de celui-ci entraîne la nullité de la procédure de licenciement pour motif économique ; que l'irrégularité de la procédure consultative permet seulement d'obtenir la suspension de la procédure de licenciement, tant qu'elle n'est pas achevée par la notification des licenciements ou, à défaut, la réparation du préjudice subi à ce titre, dans les termes de l'article L. 1235-12 du code du travail ;

Considérant, ensuite, que la salariée fait valoir que les représentants du personnel de Combs la Ville n'ont pas été valablement consultés sur le projet de licenciements collectifs et sur le plan de sauvegarde pour l'emploi ;

Considérant toutefois, qu'il est établi par les pièces produites, que la procédure légale a été suivie par l'employeur conformément aux dispositions des articles L. 2323-6 et L. 1233-29 du code du travail ;

Qu'en effet :

- le 15 janvier 2009, la société A... a réuni le comité central d'entreprise, le comité d'établissement de Paris et le comité d'établissement de Combs la Ville, aux fins de se prononcer, pièces à l'appui préalablement adressées, sur le projet de restructuration de l'entreprise comportant les projets de licenciements économiques collectifs et sur le plan social élaboré ;

- qu'au cours de cette réunion, réclamant une revalorisation complémentaire en faveur des salariés, le comité central et le comité de Paris se sont déclarés favorables au projet présenté, le comité d'établissement de Combs la Ville s'étant montré pour sa part partagé,

- que les 29 janvier et 10 février 2009, de nouvelles réunions d'information et consultation sur le plan de sauvegarde ont été organisées, suite au constat de carence rendu par la direction du travail de Paris ; que les trois instances se sont prononcées notamment sur les aménagements apportées, par la société, au volet social ; que dans ce cadre, monsieur C...et Mme D..., membres titulaires du comité d'établissement de Combs la Ville ont le premier, réservé son avis sur les mesures de reclassement, la seconde refusé de le donner ;

- que le 11 mars 2009, ont eu lieu les dernières consultations sur le plan de sauvegarde pour l'emploi et les mesures de reclassement, points dont le comité d'établissement a débattu sans vote formel mais en émettant des réserves, comme le révèle le procès verbal de la réunion ;

Considérant qu'il n'importe que les membres du comité d'établissement de Combs la Ville n'aient pas donné leur avis ou refusé de le donner dès lors qu'il est démontré, comme ici, que l'employeur a mis à la disposition de ces membres, l'ensemble des éléments leur permettant de se prononcer ;

Qu'aucun n'a sollicité de compléments d'informations ou de pièces ; qu'il s'en déduit que ces membres se sont estimés suffisamment éclairés par les éléments délivrés ;

Considérant dès lors que la procédure d'information-consultation du comité de Combs la Ville a été respectée ;

Que la salariée sera donc déboutée des demandes de ce chef ;

sur l'insuffisance du plan de sauvegarde pour l'emploi

Considérant que le plan de sauvegarde pour l'emploi doit comporter des mesures précises prévues par l'article L. 1263-62 du Code du Travail destinées à faciliter le reclassement du personnel, éviter des licenciements ou en limiter le nombre, des actions en vue du reclassement interne des salariés, des créations d'activités nouvelles par l'entreprise, des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés, des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion ;

Que ces mesures doivent être appréciées en fonction des moyens dont disposait l'entreprise, pour aider au reclassement des salariés ;

Considérant, tout d'abord, qu'il est constant que la SA A... employait au moment des licenciements, 411 salariés en France dont 266 sur le site de Wingen sur Moder, 107 au siège parisien et 38 à Combs la Ville ;

Considérant, ensuite, que le projet de restructuration économique, soumis aux représentants du personnel, a prévu pour l'essentiel :
- la modernisation de l'outil de production à Wingen sur Moder par l'achat d'un four à bassin d'un coût de 7 millions d'euros,
- le transfert de la logistique et des ateliers de finition de Combs la Ville vers Wingen sur Moder ce transfert étant prévu dès le projet initial de rachat par la société Art et Fragrance,
- la fermeture du centre logistique de Combs la Ville et la suppression de l'intégralité des 38 postes rattachés à ce site,
- la réorganisation du site parisien avec la suppression de 18 postes sur 107, notamment des emplois de commerciaux ;
- la fermeture des stands dans les grands magasins et des filiales étrangères non rentables,

Que cette restructuration a été adoptée à l'unanimité par le comité d'entreprise et le comité d'établissement de Combs la Ville, dont aucun n'a sollicité la nomination d'un expert ;

Que le plan de sauvegarde pour l'emploi, qui y était adossé, a prévu :
-21 postes de reclassement en interne : 7 à Paris, 3 en région parisienne, 11 à Wingen sur Moder
-3 postes de reclassement externe au sein de la société Art et Fragrance,

Considérant qu'étaient ainsi proposés 24 postes de reclassement sur 56 suppressions de postes ;

Que le plan social prévoyait en outre des mesures suivantes :
- prime de déménagement : 2. 500 euros portée à 3. 000 euros
-aide à la mobilité : 2. 500 euros
-aide à la création d'entreprise : 3. 500 euros portée à 5. 000 euros
-les critères d'ordre des licenciements
-convention de reclassement personnalisée
-une cellule animée par un cabinet spécialisée choisie par le comité d'entreprise
-une dispense de préavis et un doublement de crédit d'heures de DIF. pour les salariés n'optant pas pour la convention de reclassement personnalisée ;

Considérant, la direction du travail de Melun validant ce plan, que le directeur du travail de Paris a constaté sa carence ;

Que la SA A... a répondu précisément à ces critiques, suivant un courrier dont les termes ont été approuvées à l'unanimité par le comité d'entreprise, détaillant en particulier le dispositif mis en place par la cellule de reclassement et l'augmentation du montant des aides à l'emploi ;

Que l'administration a, par courrier du 6 mars 2009, pris acte de ces améliorations, sans notifier d'autres observations ;

Que le plan de sauvegarde pour l'emploi n'a fait l'objet d'aucune contestation de la part du comité d'entreprise central ou des comités d'établissement ;

Que l'inspecteur du travail a parallèlement autorisé le licenciement des salariés protégés ;

Et considérant que Mme X... invoque l'insuffisance manifeste de ces mesures au regard du périmètre du groupe composé des sociétés A..., Art et Fragrance et Financière Saint Germain et plaide l'indigence des mesures prises par rapport aux moyens du groupe ;

Mais considérant toutefois que son argumentation ne peut prospérer :

Considérant en effet :

- premièrement sur le périmètre du groupe

Considérant que le périmètre à prendre en considération pour l'exécution de l'obligation de reclassement se comprend de l'ensemble des entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, peu important qu'elles appartiennent ou non à un même secteur d'activité ;

Qu'il ressort des pièces produites, qu'en janvier 2009, le capital de la SA A... était détenu à 50, 1 % par la société Art et Fragrance, 49, 9 % par la Financière Saint Germain ; que la société Art et Fragrance, actionnaire majoritaire, détenant le contrôle sur la direction générale de la SA A... et consolidant ses comptes avec cette dernière, faisait partie du groupe composée de la société A... et de ses 5 filiales étrangères ;

Qu'en revanche, la seule détention d'une partie du capital d'une société par une autre n'implique pas la possibilité d'effectuer entre elles la permutation de tout ou partie du personnel et ne caractérise pas l'existence d'un groupe au sein duquel le reclassement devait s'effectuer ;

Que dès lors, la société Financière Saint Germain, dont la participation était exclusivement financière et capitalistique, et qui au demeurant est sortie du capital social de la SA A... dès novembre 2010, n'est pas comprise dans le périmètre du groupe ;

- deuxièmement sur l'insuffisance des mesures proposées

Considérant que les mesures de reclassement entreprises doivent être appréciées au regard des moyens du groupe ainsi défini ;

Et considérant qu'il est largement établi, par les pièces produites, que la situation financière de la SA A... et de ses filiales était très dégradée avant la restructuration envisagée, les résultats d'exploitation du groupe A... étaient structurellement déficitaires depuis 2004 ;

Que les différents rapports d'expertise comptable produits aux débats révèlent qu'au 31 décembre 2008, la perte d'exploitation du groupe A... s'était élevée à 6, 6 millions d'euros provenant pour l'essentiel des activités bijoux et cristallerie du groupe A... en France et dans le monde avec parallèlement, fin 2008 un chiffre d'affaires en baisse de 5. 194 millions d'euros et un endettement de près de 7. 8 millions d'euros ;

Qu'à cette date, le groupe A... qui représentait 68 % à lui seul du chiffre d'affaires de la société Art et Fragrance, affichait une perte de 3 millions d'euros, portée à 9 millions d'euros en 2009 ;

Que les experts soulignaient, à cet égard, qu'aucune ressource stable n'avait été créée par l'entreprise elle même au cours des trois derniers exercices, que le fond de roulement avait été financé par l'actionnaire par le biais d'augmentations de capital, que la société A... était entièrement dépendante des financements accordés par la société Art et Fragrance dont le poids financier ne lui permettrait pas de soutenir, dans la durée et sans contrepartie une structure de coûts non adaptée au contexte d'un marché du luxe tendu ;

Qu'en 2009, le groupe A... a constaté une perte de la moitié de son capital social ;

Que la société Art et Fragrance, plus particulièrement, a subi une diminution de moitié de son chiffre d'affaires en 2009, accusant pour sa part une perte de 1, 4 millions d'euros ; qu'à l'issue de l'exercice 2010 et compte tenu des pertes exceptionnelles de la société A..., elle a souscrit une nouvelle augmentation de capital au profit de cette dernière, d'un montant de 3, 8 millions d'euros, sous forme d'abandon de créances ;

Considérant au vu de l'ensemble de ces éléments, que les reclassements proposés de 21 postes au sein de la société A... et de 3 postes au sein de la société Art et Fragrance, laquelle employait 35 salariés, étaient conformes aux moyens dont disposait le groupe ;

- troisièmement sur les mesures d'accompagnement

Considérant, compte tenu des éléments sur la situation du groupe et de ses possibilités financières, que les mesures mises en place par le groupe A... au titre des mesures de reclassement externes et d'accompagnement telles qu'elles ont été déclinées ci dessus au titre notamment de l'aide à la création d'emplois, de souscription à la convention de reclassement personnalisée, sont satisfaisantes ;

Que concernant plus particulièrement la cellule de reclassement, dont le choix a été approuvé, à l'unanimité, par le comité d'entreprise, les comptes rendus de suivi témoignent de l'efficacité et du sérieux de cette structure en faveur des 37 salariés ayant souhaité adhéré au dispositif, 12 d'entre eux ayant retrouvé une solution d'emploi, de formation ou de création d'entreprises ;

Considérant, enfin, qu'aucune carence dans le plan de sauvegarde pour l'emploi ne peut être tirée de l'absence d'information de la commission paritaire de l'emploi prévue par les dispositions de l'article 21 de la convention collective, de l'accord national interprofessionnel du 10 février 1969 et son avenant du 21 novembre 1974 ;

Que ces dispositions n'attribuent à cette commission paritaire aucune mission en matière d'aide aux reclassements de salariés licenciés le dispositif mis en place n'ayant qu'une vocation informative du marché de l'emploi ;

Considérant en définitive qu'il ressort de tous ces développements, que le plan de sauvegarde pour l'emploi proposé aux salariés de la société A..., et dont le coût s'est élevé à 2, 47 millions d'euros, était, compte tenu des moyens du groupe sus exposés, et des mesures précises destinées à éviter ou à limiter le nombre des licenciements, conforme aux prescriptions légales ;

Que Mme X... sera donc déboutée de sa demande de nullité de licenciement ;

2- sur le bien fondé du licenciement

Considérant que la lettre de licenciement est ainsi motivée :

" Dans le cadre de l'important projet de restructuration justifiée par la situation très difficile de l'entreprise (baisse très importante du chiffre d'affaires, pertes importantes d'exploitation, absence de visibilité économique) l'ensemble des postes dont celui que vous occupiez, sont supprimés compte tenu de la necessité de regrouper l'activité sur le site de Wingen sur Moder au siège social de Paris.
Dans la cadre du plan de sauvegarde pour l'emploi nous vous avons informé de l'ensemble des postes disponibles recensés tant en interne qu'externes ; vous avez exprimé votre volonté de ne pas donner suite à ces propositions. Nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour motif économique à défaut de reclassement possible. "

Considérant, tout d'abord, que les mesures entreprises, qui se placent dans le cadre d'un licenciement collectif, ont été exposées aux représentants du personnel lors des différentes réunions du comité d'entreprise et des comités d'établissement et rappelées ci dessus ;

Qu'ensuite, les nombreuses pièces comptables et financières, assorties des constats alarmants des experts et commissaires aux comptes, tels que rappelés ci dessus, confirment à suffire une dégradation constante, grave et chronique des comptes de la SA A... et de ses filiales, à la limite d'un dépôt de bilan, et les difficultés financières durables rencontrées consécutivement par la société Art et Fragrance ;

Que les bilans produits sur la situation postérieure à 2009 révèlent à ce jour la persistance d'une fragilité financière et économique du groupe A... ;

Que le motif économique est donc avéré et la suppression du poste de la salariée effective ;

Mais considérant que selon l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts d'adaptation et de formation ont été réalisés et que le reclassement ne peut être opéré dans l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient ; que les offres de reclassement doivent être écrites et précises ;

Et considérant en l'espèce que la société A... s'est contenté d'adresser le 30 janvier 2009, une lettre circulaire générale, rédigée en des termes identiques, à tous les salariés dont les postes étaient supprimés, indépendamment de leur ancienneté, leur qualification, leur compétence et comportant une liste de postes vacants ;

Que force est de constater que cette liste, qui proposait pêle mêle des postes très différents en termes de responsabilité ou de fonctions ou encore de technicité, n'était accompagnée d'aucune offre personnalisée adaptée aux compétences et capacités de la salariée, qui ne s'est vue soumettre aucune proposition d'adaptation ou de formation à tel ou tel emploi ;

Que dès lors, la salariée n'a pas eu la possibilité de se prononcer, en toute connaissance de cause sur les postes proposés ;

Que l'employeur n'a donc pas loyalement rempli son obligation de reclassement de sorte que le licenciement intervenu est dénué de cause réelle et sérieuse ;

3- sur les conséquences financières

Considérant que l'ensemble des éléments produits aux débats et relatifs à l'âge, l'ancienneté et au préjudice subi par la salariée justifie que lui soit acordée une indemnisation fixée à 20. 000 euros ;

4- sur la priorité de réembauchage

Considérant que Mme X... a fait connaitre à son employeur, le 19 mai 2009, souhaiter bénéficier de la priorité de réembauchage ;

Et considérant qu'il est établi que la société A... a procédé à l'embauche, au mois d'avril 2010, d'une assistante commerciale ADV sans proposer le poste à Mme X... ; qu'aucun élément n'indiquant que ce poste était soumis à la maitrise de la langue anglaise, comme l'affirme l'employeur, la salariée est fondée à obtenir une réparation d'un montant de 4. 400 euros ;

5- sur le rappel de salaire

Considérant que Mme X..., en contrepartie de ses fonctions d'assistante administration des ventes, dont elle était chargée depuis mars 2005, a perçu une rémunération inférieure de 200 euros à celle allouée à ses collègues occupant le même emploi et ayant la même classification ;

Que l'employeur n'apporte aucun élément objectif de nature à expliquer cette différence de salaire, et notamment ne justifie pas cette disparité par le fait que Mme X... contrairement à ses collègues, ne maîtrisait pas la langue anglaise et que cet élément entrait en ligne de compte dans le calcul de la rémunération ;

Que Mme X... est donc bien fondée à obtenir un rappel de salaire depuis mars 2005 soit sur 4 années, la somme de 9. 600 euros outre les congés payés afférents ;

Considérant que l'équité n'exige pas que les parties soient en l'espèce indemnisées des frais irrépétibles exposés à l'occasion de la présente affaire de sorte que les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées ;

Que la société A... supportera les entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Condamne la société A... à verser à Mme X... les sommes suivantes :

-20. 000 euros pour violation de son obligation de reclassement,
-4. 400 euros : indemnité pour non respect de la priorité de réembauchage
-9. 600 euros : rappel de salaires outre 960 euros pour les congés payés

Déboute les parties de toutes autres demandes,

Laisse à chacune d'elles la charge de ses frais non répétibles

Condamne la société A... aux dépens.
LE GREFFIER P/ LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6- chambre 6
Numéro d'arrêt : 11/02214
Date de la décision : 30/01/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2013-01-30;11.02214 ?
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