La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2013 | FRANCE | N°11/11376

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 1, 30 mai 2013, 11/11376


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1



ARRET DU 30 MAI 2013



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/11376



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/09283





APPELANTE



SARL MORGAN CIE

prise en la personne de ses représentants légaux



ayant son siège [Adresse 3]<

br>


représentée par Maître Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

assistée de Maître Monique AMSELLEM, avocat au barreau de PARIS, toque : D1377 substituée par Maître V...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRET DU 30 MAI 2013

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/11376

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/09283

APPELANTE

SARL MORGAN CIE

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 3]

représentée par Maître Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

assistée de Maître Monique AMSELLEM, avocat au barreau de PARIS, toque : D1377 substituée par Maître Vincent REYNAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : C957

INTIMEE

Madame [Q] [Z] épouse [S]

demeurant [Adresse 2]

représentée par la SCP FISSELIER en la personne de Maître Alain FISSELIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

assistée de Maître Catherine BOUSQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : G0323

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 avril 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne-Marie LEMARINIER, conseillère.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Chantal SARDA, présidente

Madame Christine BARBEROT, conseillère

Madame Anne-Marie LEMARINIER, conseillère

Greffier lors des débats : Madame Fatima BA

Greffier lors du prononcé : Madame Marie-Annick MARCINKOWSKI

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Chantal SARDA, présidente, et par Madame Marie-Annick MARCINKOWSKI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

Suivant acte du 18 avril 2008, la Sarl Morgan a promis de vendre à Mme [Q] [Z] épouse [S], qui s'est réservée la faculté d'accepter, les lots 29,31 et 22 de la division de l'immeuble sis, [Adresse 1], moyennant le prix de 573 000 €, sous la condition suspensive, à la charge du promettant, de l'entérinement lors de la prochaine assemblée des copropriétaires de la subdivision du lot numéro 4 devenant alors les lots numéros 29 - 30 - 31 - 32.

Mme [Z] a remis un chèque d'un montant de 28 650 € à titre d'indemnité d'immobilisation qui a fait l'objet d'un séquestre amiable.

La promesse de vente stipulait que l'acte authentique devait être établi au plus tard le 30 juin 2008, par M. [E], notaire et séquestre de l'indemnité d'immobilisation.

Par lettre des 22 avril et 27 mai 2008, la société Morgan a notifié la promesse de vente à Mme [Z] et lui a adressé une convocation à l'assemblée générale des copropriétaires appelée à statuer sur la division du lot numéro 4, pour le 16 juin 2008.

Selon procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 16 juin 2008 confirmé par une nouvelle assemblée générale en date du 25 septembre 2008, la subdivision du lot 4 a été refusée.

Par acte du 9 juin 2009, Mme [Z] a fait assigner la société Morgan et Cie aux fins de la voir condamner au paiement de dommages et intérêts en réparation des travaux qu'elle a financés et de son préjudice moral et matériel.

Par jugement rendu le 19 mai 2011, le Tribunal de grande instance de Paris a, avec exécution provisoire, condamné la société Morgan et Cie à payer à Mme [Q] [Z] les sommes de :

- 11 000 € à titre de dommages et intérêts pour les travaux financés avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2008, et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,

- 5000 € à titre de dommages-intérêts, toutes causes confondues, pour le préjudice complémentaire subi,

- 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

Appelante de cette décision, la Sarl Morgan et Cie, aux termes d'écritures signifiées le 27 septembre 2012, demandait à la Cour de réformer la décision entreprise et de condamner Mme [Z] à lui rembourser les sommes payées en exécution du jugement rendu, de la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions et de la condamner au paiement de la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

Aux termes d'écritures signifiées le 4 octobre 2012, Mme [Q] [Z] épouse [S] demandait à la Cour de :

- confirmer le jugement rendu le 19 mai 2011 en ce qu'il a condamné la société Morgan au paiement de la somme de 11 000 € à titre de dommages et intérêts augmentés des intérêts au taux légal et capitalisation à compter du 8 juin 2008 et lui a accorder l'indemnisation de son préjudice complémentaire,

- l'infirmer s'agissant du quantum des dommages-intérêts et, statuant à nouveau sur ce point, condamner la société Morgan à lui payer la somme de 24 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et matériel,

- débouter la société Morgan de toutes ses demandes,

- la condamner au paiement de la somme de 8000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

Par arrêt rendu le 29 novembre 2012, cette Cour a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à conclure sur l'application en la cause des dispositions de l'article 1589 - 2 du code civil et, particulièrement sur le point de savoir :

' Si la promesse unilatérale du 18 avril 2008 qui est sous seing privé a été enregistrée et à quelle date,

' Si cette promesse a été déposée au rang des minutes d'un notaire,

' Si cette formalité équivaut à l'enregistrement de la promesse exigée par l'article 1589 - 2 du Code civil précité,

et à produire, le cas échéant, la copie de l'acte de dépôt dont s'agit.

Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 5 avril 2013, la Sarl Morgan cie demande à la Cour au visa de l'article 1589 -2 du code civil de :

- à titre principal, constater la nullité de la promesse unilatérale de vente du 18 avril 2008,

en conséquence réformer le jugement entrepris et dire mal fondées les demandes de Mme [Z] fondées sur cette promesse,

- subsidiairement sur le fond, réformer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

- en tout état de cause, condamner Mme [Z] à lui rembourser les sommes payées en exécution du jugement du 19 mai 2011, la débouter de toutes ses demandes fins et conclusions et la condamner au paiement de la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 10 avril 2013, Mme [Q] [Z] épouse [S] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement rendu le 19 mai 2011 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a condamné la société Morgan au paiement de la somme de 11 000 € à titre de dommages-intérêts au titre des travaux qu'elle a financés, dont le paiement est justifié, avec intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2008, date de la facture, et capitalisation des intérêts, et lui a accordé l'indemnisation du préjudice complémentaire qu'elle a subi,

- infirmer le jugement uniquement sur le quantum des dommages-intérêts alloués au titre de son préjudice complémentaire et statuant à nouveau sur ce point, condamner la société Morgan à lui payer la somme de 24 000 €,

- débouter la société Morgan de toutes ses demandes,

- la condamner à lui payer la somme de 8000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

CECI ETANT EXPOSE,

LA COUR,

Considérant que par acte du 18 avril 2008, la Sarl Morgan a promis de vendre à Mme [Q] [Z] épouse [S], qui s'est réservée la faculté d'accepter, les lots 29,31 et 22 de la division de l'immeuble sis, [Adresse 1], moyennant le prix de 573 000 €, sous la condition suspensive, à la charge du promettant, de l'entérinement lors de la prochaine assemblée des copropriétaires de la subdivision du lot numéro 4 devenant alors les lots numéros 29 - 30 - 31 - 32 ;

Qu'il n'est pas contesté que l'acte en cause, aux termes duquel l'engagement de vendre du promettant est définitif alors que le bénéficiaire dispose d'un délai pour lever ou non l'option d'achat, est une promesse unilatérale de vente ;

Considérant selon l'article 1840 A du code général des impôts, devenu article 1589 - 2 du Code civil, qu'est ' nulle et de nul effet toute promesse unilatérale de vente afférente à un immeuble si elle n'est pas constatée par un acte authentique ou par un acte sous seing privé enregistré dans le délai de 10 jours à compter de la date de son acceptation par le bénéficiaire' ; que cette disposition est d'ordre public et que le bénéficiaire doit rapporter la preuve de sa mise en oeuvre, par l'une ou l'autre des parties, dans le délai requis ;

Considérant que la promesse de vente indique au paragraphe « Enregistrement » que « l'enregistrement des présentes, requis au droit fixe, sera effectué par le mandataire, aux frais du bénéficiaire, 10 jours au plus tard après la signature des présentes. » ; qu'il ne peut être inféré de cette clause, alors que le paragraphe de la promesse de vente réservé à l'indication du nom du « mandataire » n'en mentionne pas et est barré, que cette formalité incombait au seul promettant ; que dans le silence de l'acte, il doit être considéré que cette formalité incombait à la partie la plus diligente de sorte qu'aucune faute, de ce chef, n'est imputable plus à l'une qu'à l'autre des parties à la convention ;

Que le fait qu'il ait été prévu à l'acte que le versement effectué par le bénéficiaire ferait l'objet d'un séquestre entre les mains de M. [E], notaire du promettant, ne permet pas d'en inférer, alors qu'il n'est pas le rédacteur de la promesse de vente sous seing privé, que ce professionnel aurait manqué à son devoir d'information ; que pour les mêmes motifs, en l'absence de mandataire désigné à l'acte, l'intermédiaire immobilier choisi par le vendeur n'a pas commis de manquement en ne procédant pas à l'enregistrement de la promesse de vente ;

Considérant que Mme [Z] soutient encore que, l'acceptation devant être pure et simple, en sorte que le point de départ du délai de 10 jours à compter de l'acceptation de la promesse par le bénéficiaire ne pouvait commencer à courir avant la réalisation de la condition suspensive à la charge du promettant d'obtention, de la part de l'assemblée générale de la copropriété, de l'autorisation de subdivision du lot 4 en quatre lots ;

Mais considérant, alors qu'il est acquis que l'autorisation requise a été refusée et que la promesse n'a pas été soumise depuis à la formalité de l'enregistrement que celle-ci est, en tout état de cause, nulle en application des dispositions de l'article 1840 A du code général des impôts précité, les parties s'accordant à reconnaître que l'acte du 18 avril 2008 n'a pas davantage été déposé au rang des minutes d'un notaire ;

Considérant que l'acte nul ne peut produire aucun effet et qu'il a été dit plus haut que les professionnels auxquels Madame [Z] impute des manquements aux devoirs de leur charge, que ce soit le notaire ou l'agence immobilière de Lübeck, n'étaient pas partie à l'acte incriminé et que la formalité de l'enregistrement n'incombait pas davantage à la société Morgan qu'à elle-même en sorte que la faute de la promettante n'étant pas caractérisée de ce chef, la demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral qui lui a été ainsi causé ne peut qu'être rejetée sur ce fondement ;

Considérant qu'il résulte des débats que Madame [Z] , dès avant la signature de l'acte authentique de vente, et avant même la levée de la condition suspensive à la charge du promettant, d'obtention de l'autorisation de subdivision du lot objet de la vente, a obtenu la remise des clés et entamé des travaux importants inhérents, en particulier, à la subdivision du lot dont l'autre partie avait été vendue à un tiers ; qu'il résulte des pièces aux débats que la réalisation de ces travaux s'est faite avec l'accord du promettant et que la remise des clés a eu lieu spontanément de la part de la société Morgan qui a, pour permettre leur réalisation, demandé l'installation d'un compteur GDF avant le 11 juin 2008;

Considérant toutefois que Madame [Z] est mal fondée à solliciter, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, la réparation du préjudice que lui a causé la réalisation de travaux en pure perte dès lors qu'elle a elle-même commis une faute en procédant de façon prématurée et, sans attendre d'en être propriétaire à des travaux sur le bien d'autrui, quand bien même ces travaux avaient été autorisés, de sorte que sur ce fondement elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

Considérant qu'elle sollicite encore et à titre subsidiaire, la réparation de son préjudice sur le fondement de l'enrichissement sans cause dans la mesure où la société Morgan a profité gracieusement de travaux qui lui ont permis de valoriser l'appartement pour le vendre à des conditions optimales à un tiers ;

Mais considérant que l'action de in rem verso ne devant être admise que dans le cas où, le patrimoine d'une personne se trouvant sans cause légitime enrichi au détriment de celui d'une autre personne, celle-ci ne jouirait, pour obtenir ce qui lui est dû, d'aucune action de sorte qu'elle ne peut être exercée lorsque l'enrichissement et l'appauvrissement corrélatif trouvent leur justification dans un contrat, même si comme en l'espèce, ce dernier a été déclaré nul ; qu'il s'ensuit que Mme [Q] [Z] épouse [S] qui a été déboutée de sa demande tendant au remboursement du coût de travaux accomplis dans l'appartement objet de la promesse unilatérale de vente déclarée nulle, même s'ils ont corrélativement enrichi la société Morgan qui a tiré un profit en vendant au propriétaire de l'autre moitié du lot dont la division n'avait pas été autorisée la partie du lot rénovée sans frais, ne peut qu'être déboutée de sa demande de remboursement des frais ainsi exposés en pure perte ;

Considérant que la décision des premiers juges mérite infirmation et Mme [Z] doit être condamnée à restituer à la société Morgan les sommes que celle-ci lui aurait remises en exécution du jugement ;

Et considérant que Mme [Z] qui succombe supportera les dépens, en revanche pour des considérations d'équité, il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Infirmant la décision entreprise,

Dit la promesse unilatérale de vente du 18 avril 2008 nulle et de nul effet,

Déboute Mme [Q] [Z] épouse [S] de ses demandes à caractère indemnitaire,

La condamne à restituer à la société Morgan les sommes qu'elle aurait perçues en exécution de la décision infirmée,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne Mme [Q] [Z] épouse [S] aux dépens et dit qu'ils pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

La GreffièreLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 11/11376
Date de la décision : 30/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris G1, arrêt n°11/11376 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-30;11.11376 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award