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30/05/2013 | FRANCE | N°11/15929

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 30 mai 2013, 11/15929


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 30 MAI 2013



(n° , 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 11/15929



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Juillet 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/19074





APPELANT



Monsieur [Q] [T]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentant : l

a SCP GALLAND - VIGNES (Me Marie-Catherine VIGNES), avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Ayant pour avocat plaidant : Me Francis ALLAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0373





INTIMÉE



SA SOCIETE GENE...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 30 MAI 2013

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/15929

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Juillet 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/19074

APPELANT

Monsieur [Q] [T]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : la SCP GALLAND - VIGNES (Me Marie-Catherine VIGNES), avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Ayant pour avocat plaidant : Me Francis ALLAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0373

INTIMÉE

SA SOCIETE GENERALE, prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration et Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentant : la SELARL HJYH Avocats à la cour (Me Patricia HARDOUIN), avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée de : Me Etienne GASTEBLED de la SCP LUSSAN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0077

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Mars 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente

Madame Caroline FÈVRE, Conseillère

Madame Muriel GONAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Sébastien PARESY

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par M. Sébastien PARESY, greffier présent lors du prononcé.

***************

Le 8 juillet 1996, Monsieur [Q] [T] a ouvert un compte courant dans les livres de la Société Générale.

A la suite d'une étude d'un projet d'investissement établie par la Société Générale, Monsieur [Q] [T] a adhéré, le 19 avril 2001, au contrat collectif d'assurance vie Séquoia souscrit par la Société Générale auprès de sa filiale Sogecap, en effectuant un versement initial de 305.000 euros, provenant de son patrimoine personnel, lequel a été investi sur des supports en unités de compte.

Selon une offre préalable du 2 mai 2001, la Société Générale a consenti à Monsieur [Q] [T] un prêt 'in fine'de 304.898,03 euros, remboursable en 8 ans avec intérêts au taux nominal de 6,40 % l'an, qui a servi à abonder le contrat d'assurance vie Séquoia nanti en garantie du prêt.

Selon un avenant du 8 août 2003, le taux des intérêts du prêt 'in fine' a été baissé à 4,80 % l'an.

Après des rachats partiels pour un montant de 9.068,53 euros au 31 décembre 2008, Monsieur [Q] [T] a procédé au rachat quasiment total de son contrat d'assurance vie le 9 juin 2009 pour un montant de 700.103,05 euros, y laissant la somme de 2.942,80 euros.

Par acte d'huissier en date du 8 décembre 2009, Monsieur [Q] [T] a fait assigner la Société Générale en nullité du contrat de prêt et, subsidiairement, en paiement de dommages et intérêts pour défaut de conseil et d'information .

Par jugement en date du 8 juillet 2011, le tribunal de grande instance de Paris a déclaré irrecevable la demande d'annulation du contrat de prêt formée par Monsieur [Q] [T] et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes, rejeté le surplus des demandes, condamné Monsieur [Q] [T] aux dépens.

La déclaration d'appel de Monsieur [Q] [T] a été remise au greffe de la cour le 31 août 2011.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 19 mars 2012, Monsieur [Q] [T] demande de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté qu'il présentait la qualité d'emprunteur profane à l'époque de la conclusion des contrats,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déclaré irrecevable en sa demande d'annulation du contrat de prêt et l'a débouté de toutes ses demandes,

- débouter la Société Générale de toutes ses demandes,

- condamner la Société Générale au respect de ses engagements contractuels et à lui verser la somme de 401.594 euros correspondant à l'enrichissement énoncé par la banque, soit 351.347 euros, augmentée de la perte subie de 50.247 euros, cette somme étant assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2011, date prévue pour la constatation de l'enrichissement,

- subsidiairement, prononcer la nullité du contrat de prêt personnel immobilier n° 101133005504 de la Société Générale,

- infiniment subsidiairement, dire que la Société Générale n'a pas respecté son devoir de mise en garde, de conseil et d'information et la condamner à lui payer des dommages et intérêts,

- dans l'un ou l'autre de ces deux derniers cas, condamner la Société Générale à lui verser la somme de 50.247 euros et sur la somme de 304.898 euros un intérêt calculé au taux légal depuis le 20 avril 2011 avec application des modalités de l'article1154 du Code civil,

- en tous les cas, condamner la Société Générale à lui verser la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 31 janvier 2013, la Société Générale demande de :

. Sur la demande en paiement de la somme de 401.594 euros formée à titre principal par Monsieur [T]

- dire que la demande de condamnation en paiement de la somme de 401.594 euros de Monsieur [T] est une prétention nouvelle formée pour la première fois en cause d'appel à laquelle il a expressément renoncé,

- dire que cette prétention ne présente pas, en tout état de cause, de lien suffisant avec sa demande originaire faite à titre principal,

- déclarer irrecevable cette demande de Monsieur [T],

- subsidiairement, dire que la prétention nouvelle de Monsieur [T] est atteinte par la prescription décennale en application de l'article L.110- 4 du code de commerce et déclarer irrecevable comme prescrite sa demande en paiement formée à titre principal,

- à titre infiniment subsidiaire, dire que la demande principale de Monsieur [T] est infondée dans la mesure où le prétendu engagement invoqué constitue une simple simulation contractuelle, et débouter Monsieur [T] de sa demande en paiement de la somme de 401.594 euros,

. Sur la demande d'annulation du contrat de prêt formée à titre subsidiaire par Monsieur [T] sur le fondement du dol

- dire que cette demande est manifestement prescrite,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré la demande d'annulation du prêt prescrite,

- en toute hypothèse, si la cour devait considérer la demande d'annulation du prêt recevable, dire qu'elle n'a pratiqué aucune manoeuvre dolosive susceptible d'avoir trompé Monsieur [T],

- débouter Monsieur [T] de sa demande d'annulation du prêt et de sa demande en dommages et intérêts,

. Sur la demande de condamnation au paiement de dommages et intérêts sur le fondement de l'obligation d'information

- dire qu'elle n'a commis aucun manquement à ses obligations,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [T] de sa demande en paiement de la somme de 50.247 euros à titre de dommages et intérêts majorée du taux d'intérêt légal sur la somme de 305.000 euros depuis le 20 avril 2001,

et, en tout état de cause, confirmer le jugement entrepris en toute ses dispositions et notamment en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action en nullité du crédit d'investissement accordé à Monsieur [T] et en ce qu'il l'a débouté de l'ensemble de ses demandes, y ajoutant, condamner Monsieur [T] à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 février 2013.

CELA ETANT EXPOSE,

LA COUR

Considérant que Monsieur [Q] [T] soutient qu'il est un opérateur et un emprunteur profane lors de la conclusion des contrats en cause, n'ayant aucune compétence financière en sa qualité d'artisan boulanger à la retraite exerçant, par ailleurs, une activité de loueur en meublé ; que la Société Générale a établi une étude d'investissement adaptée à ses besoins présentant une grande fiabilité lui annonçant une rentabilité de 351.347 euros en 8 ans, sans faire allusion aux fluctuations du marché financier et à la possibilité que le résultat escompté ne soit pas atteint, laquelle a eu une influence déterminante sur son consentement ; qu'il prétend que ce document précis et détaillé a une valeur contractuelle et engage la banque qui doit l'indemniser du préjudice subi, lequel est constitué de l'enrichissement annoncé de 8 % l'an de 351.347 euros, augmenté de la perte subie sur le capital investi de 50.247 euros ; qu'il estime que sa demande n'est pas nouvelle et procède de sa demande initiale, qui tend à faire sanctionner le comportement de la banque ;

Considérant que la Société Générale fait valoir que la simulation d'un investissement de 4 millions de francs, provenant pour moitié du patrimoine personnel de Monsieur [T] et pour l'autre moitié d'un emprunt, n'a pas de valeur contractuelle, ce qui a été reconnu par ce dernier dans l'assignation qu'il lui a fait délivrer 8 décembre 2009 ; qu'elle ne pouvait pas garantir un rendement, qui n'était qu'une hypothèse, en l'absence de mandat de gestion et compte tenu de la gestion libre faite par Monsieur [T] qui a arbitré seul ses placements pour choisir des fonds en actions plus rémunérateurs ; qu'elle excipe de l'irrecevabilité de la demande en paiement de la somme de 401.594 euros, nouvelle en appel dans son quantum et son objet, puisqu'elle tend à obtenir l'exécution du contrat dont il était demandé la nullité en première instance ; qu'elle estime que le principe d'immutabilité de la demande interdit à Monsieur [T] de présenter cette demande contradictoire avec sa demande antérieure relevant d'un fondement juridique différent, alors même qu'il avait renoncé à cette demande dans son assignation en reconnaissant que l'étude n'avait pas de valeur contractuelle ; qu'elle ajoute que cette demande est prescrite en application de l'article L.110- 4 du code de commerce compte tenu de la date de l'engagement, dont il est demandé l'exécution, du 19 avril 2001 et de la demande faite, pour la première fois en appel, par conclusions du 29 novembre 2011;

Considérant qu'aux termes de son assignation introductive d'instance, Monsieur [T] a demandé la nullité du prêt pour dol, au motif que la Société Générale l'aurait trompé sur le rendement de 8 % l'an du contrat d'assurance vie Sequoia, qui devait lui permettre de rembourser le capital prêté, et une indemnisation d'un montant de 50.247 euros, outre les intérêts au taux légal sur la somme 305.000 euros depuis le 20 avril 2001, en réparation du préjudice subi, et, à défaut, la même somme à titre de dommages et intérêts pour défaut de conseil et d'information de la banque ; qu'il n'a jamais renoncé expressément à un quelconque droit à demander une autre indemnisation ;

Considérant que la demande en paiement de la somme de 401.594 euros tend toujours à obtenir la condamnation de la banque sur un fondement contractuel déjà visé dans l'assignation sur un nouveau moyen, qui est recevable en appel en application de l'article 563 du Code de procédure civile ; que la demande de Monsieur [T], qui tend aux mêmes fins que la précédente, indépendamment de son quantum qui peut changer en appel, sur un nouveau moyen, est recevable ;

Considérant que s'agissant de la fin de non recevoir tirée de la prescription, la demande en paiement de Monsieur [T] contre la Société Générale, quelqu'en soit le fondement contractuel et le montant, a été introduite par une assignation du 8 décembre 2009 ; que les contrats incriminés ayant été souscrits les 19 avril 2001 et le 2 mai 2001, la prescription de l'article L110- 4 du code commerce, dans sa version applicable au litige, n'est pas acquise ;

Considérant que la Société Générale est ainsi mal fondée en ses exceptions d'irrecevabilité de ce chef de demande de Monsieur [T] ;

Considérant que l'étude faite par la Société Générale, dont se prévaut Monsieur [T], n'est pas datée, ni signée des parties ; que, certes elle indique que le capital disponible sera de 7.329.684 francs au terme du contrat le 2 avril 2009, mais qu'elle précise bien qu'elle est fondée sur une 'hypothèse de capitalisation de 8 %' ; que l'hypothèse n'est pas une garantie et suppose une vérification ; qu'il n'y a pas d'engagement contractuel de la banque sur un rendement net de 8 % l'an jusqu'au terme du contrat, au demeurant incompatible avec l'absence de détermination du support d'épargne qui n'est pas alors précisé et qui le sera ultérieurement lors de la signature du contrat Sequoia, le 19 avril 2001, qui, lui, fixe les obligations des parties ; que, par ailleurs, Monsieur [T] a rapidement pû vérifier que l'hypothèse envisagée n'était pas acquise au moyen des relevés de situation annuelle, lesquels montrent une évolution négative du contrat Sequoia en 2001 de - 21,68 % et en 2002 de - 33,32 % ; qu'il est ainsi mal fondée à soutenir que la banque s'est engagée contractuellement à lui servir un rendement net de 8 % l'an et à lui en demander le paiement ;

Considérant que Monsieur [Q] [T] soutient ensuite que son consentement a été vicié par le dol commis par la banque qui a usé de manoeuvres trompeuses pour lui faire souscrire le contrat d'assurance vie Sequoia sur la base d'une étude personnalisée, lui faisant croire à un enrichissement de 351.347 euros en 8 ans sur la base d'une capitalisation de 8 % par an, sans tenir compte des frais, ni des prélèvements sociaux et libératoires portant le rendement du placement à 14% -15% pour maintenir la performance nette de 8 % l'an ; que c'est cette étude qui l'a convaincu de l'intérêt du montage complexe proposé par la banque associant un prêt 'in fine' et un contrat d'assurance vie qu'il n'était pas en mesure d'appréhender en l'absence de compétence dans le domaine financier, ni d'en percevoir les risques en l'absence de mise en garde ; que c'est la Société Générale qui lui a fait souscrire le prêt et le contrat d'assurance vie, de sorte que c'est elle qui est seule responsable du dol commis sans que la compagnie d'assurance ne soit en rien concernée ; qu'il reproche aux premiers juges d'avoir considéré que sa demande sur ce fondement est prescrite, alors qu'il n'a pû découvrir le dol qu'en 2005 quand il a eu des soupçons au vu des résultats du contrat d'assurance et qu'il a interrogé la banque sur les solutions possibles pour remédier à la baisse des résultats attendus ;

Considérant que la Société Générale fait valoir que la demande de nullité du contrat de prêt du 2 mai 2001 pour dol est atteinte par la prescription quinquennale ; que Monsieur [T] ne peut pas soutenir qu'elle lui aurait volontairement dissimulé que l'étude remise avant l'octroi du crédit ne comportait pas de garantie de rendement, laquelle n'est pas stipulée, jusqu'en 2005 et qu'il ne savait pas que la valeur de son contrat pouvait baisser, alors que dès 2001-2002, les supports d'investissement choisis par Monsieur [T] ont subi une baisse importante liée à la crise de la bulle internet et qu'il en a eu connaissance par ses relevés de situation ; que, sur le fond, il n'est rapporté la preuve d'aucune manoeuvre dolosive destinée à tromper Monsieur [T] ayant déterminé son consentement ; que l'étude faisait référence à une simple hypothèse compatible avec l'évolution du marché boursier depuis la création du CAC 40 en 1987 jusqu'au jour de la souscription du contrat le 19 avril 2001 et ne bénéficiait d'aucune garantie de performance, s'agissant d'une gestion libre de Monsieur [T], qui n'est pas un investisseur profane et a réalisé des arbitrages en faveur d'OPCVM sur des supports principalement en actions en toute connaissance de leur volatilité ;

Considérant que l'action en nullité relative pour vice du consentement se prescrit par cinq ans en application de l'article 1304 du code civil ;

Considérant que cette prescription court à compter du jour où la victime du dol a connu ou aurait dû connaître le vice affectant le contrat ;

Considérant que Monsieur [T] se prévaut de manoeuvres dolosives de la Société Générale lui ayant fait croire que le taux de rendement de 8 % l'an mentionné dans l'étude préalable à l'investissement était garanti et devait lui permettre de rembourser son prêt ;

Considérant que le contrat de prêt du 2 mai 2001 et le contrat d'assurance vie souscrit le 19 avril 2001 par Monsieur [T] par l'intermédiaire de la Société Générale, qui a ainsi la qualité de courtier en assurance, sans être un prestataire de service d'investissement financier en l'absence de mandat de gestion, et supporte les seules obligations qui en découlent, sont juridiquement distincts et ne prévoient pas que l'un sera remboursé par l'autre ; que le contrat d'assurance vie de groupe proposé par la Société Générale ne comporte aucune garantie de rendement et que la notice d'information remise par la banque à l'adhérent stipule expressément en caractère gras que 'la Sogecap (personne morale distincte de la Société Générale) ne s'engage que sur le nombre d'unités de compte mais pas sur leur valeur, celle-ci étant sujette à des fluctuations à la hausse et à la baisse en fonction de l'évolution des marchés', excluant toute garantie de rendement ; que Monsieur [T] a reconnu en avoir pris connaissance au moment où il a signé le bulletin d'adhésion ;

Considérant qu'il est établi que, dès 2001-2002, Monsieur [T] a su que son contrat Sequoia avait une performance négative par ses relevés de situation annuelle ayant porté à sa connaissance une performance négative en 2001 de - 21,68 % et en 2002 de - 33,32 % ; qu'il a alors su que la performance de 8 % l'an envisagée par l'étude précitée, dont il a déjà été dit qu'elle n'avait pas de valeur contractuelle, n'était pas garantie, pas plus que le produit de son épargne ;

Considérant que Monsieur [T] a agi en nullité pour dol, par assignation du 8 décembre 2009, soit plus de cinq ans après la date à laquelle il a eu connaissance de l'absence du rendement annuel attendu ; que sa demande est prescrite et donc irrecevable ;

Considérant enfin que Monsieur [T] soutient que la Société Générale a manqué à son obligation d'information et de conseil sur un montage complexe exposé dans une étude personnalisée fondée sur une hypothèse irréaliste, sans faire mention des frais et des commissions affectant la performance annoncée ; qu'elle ne l'a pas mis en garde sur les risques spéculatifs au regard de ses revenus et de son patrimoine, ni sur le risque d'endettement né du prêt qui a servi à financer l'acquisition d'un portefeuille ; qu'il estime que le défaut d'analyse du patrimoine par la banque et de mise en garde sur les risques encourus, le défaut d'informations claires et précises sur les caractéristiques du produit vendu et le défaut d'accompagnement sur les questions précises et importantes qu'il lui a posées pendant l'exécution du contrat démontrent la faute de la Société Générale qui ne lui a pas permis de souscrire les contrats proposés en toute connaissance de cause, ni d'assurer une gestion libre des supports choisis;

Considérant que la Société Générale fait valoir qu'elle n'a pas manqué à ses obligations pré-contractuelles et contractuelles d'information et de conseil ; que le crédit accordé était adapté aux capacités financières de Monsieur [T] qui l'a remboursé sans aucune difficulté et qui est seulement insatisfait de la performance de son placement sur le contrat Sequoia ; qu'il ne s'agit pas d'une opération spéculative et qu'elle n'a pas d'obligation de mise en garde en application de l'article L.140- 4 ancien du code de assurances ; qu'elle a remis la notice d'information à Monsieur [T] qui a reconnu en avoir pris connaissance et que les frais d'arbitrage et les droits d'entrée y sont clairement précisés ; qu'il ne peut pas lui reprocher une insuffisance du rendement des supports qu'il a choisis et gérés, dont la cause tient aux crises boursières de 2001 et des subprimes en 2008 imprévisibles pour tout professionnel normalement compétent ;

Considérant que l'étude personnalisée n'est ni un document publicitaire, ni un document contractuel et ne garantit pas un taux de rendement de 8 % l'an ; que ce sont les conventions signées par les parties qui déterminent les taux, commissions et frais ; qu'il est clairement exprimé par la notice du contrat d'assurance vie qu'il n'y a pas de garantie de rendement et que seul le nombre d'unités de compte est garanti par l'assureur, qui n'est pas la Société Générale, et encore que leur valeur est soumise aux fluctuations du marché ; qu'il est établi que Monsieur [T] n'a pas subi de perte en capital, ayant investi une somme totale nette de frais de 609.898,03 euros et perçu une somme totale de 709.171,58 euros au titre des rachats de son contrat en 2008 et 2009 ;

Considérant que le banquier prêteur a un devoir de mise en garde l'égard de l'emprunteur non averti en cas de crédit excessif lui faisant courir un risque d'endettement au-delà de ses capacités financières ;

Considérant que le contrat de prêt d'un montant de 304.898,03 euros n'est pas excessif au regard du patrimoine personnel de Monsieur [T] qui, s'il n'était pas imposable sur le revenu en 2000, avait manifestement un patrimoine immobilier puisqu'il reconnaît avoir une activité de loueur en meublée et que sa feuille d'imposition de l'année concernée démontre qu'il fait du déficit foncier, qu'il disposait de fonds personnels d'un montant de 305.000 euros investis sur le contrat d'assurance vie Sequioa nanti en garantie du prêt ;

Considérant qu'il se déduit de ces seuls éléments que le prêt consenti par la Société Générale à Monsieur [T] n'est pas excessif, ce qui exclut tout manquement de la banque à son devoir de mise en garde incluant le devoir de conseil ;

Considérant qu'il convient d'ajouter qu'un prêt 'in fine' n'est pas un montage complexe; qu'il est aisément compréhensible même pour un emprunteur profane qui n'est pas pour autant analphabète, ni incapable de comprendre que le capital doit être remboursé au terme du prêt après paiement des intérêts contractuels pendant 8 ans, dont le montant est clairement fixé par le contrat ; que ce prêt a d'ailleurs été remboursé sans incident confirmant qu'il était adapté aux capacités financières de l'emprunteur ;

Considérant qu'au regard des obligations incombant à la Société Générale en sa qualité de courtier en assurance en 2001, il n'y a pas de manquement démontré en vertu du droit applicable au moment de l'adhésion de Monsieur [T], ce qui exclut les dispositions de l'article L.533-12 du Code monétaire et financier issu de la loi n° 2007-544 du 12 avril 2007 et l'arrêt du 15 mai 2007 pour l'article 314-14 du Règlement Général de l'AMF ;

Considérant que l'investissement de Monsieur [T] sur un contrat d'assurance vie investi en unités de compte n'est pas spéculatif ; qu'il n'a pas confié de mandat de gestion à la Société Générale ; qu'il a choisi et procédé à des arbitrages en fonction des résultats des supports choisis en se tournant vers des supports en actions dont il n'ignorait pas la volatilité pour en avoir été informé dès l'origine et avoir subi des pertes dès 2001-2002 ; qu'en l'absence de placement spéculatif, Monsieur [T] est mal fondé à reprocher à la Société Générale un manquement à une obligation de mise en garde et de conseil qui ne lui est pas dûe ; qu'il a été satisfait à l'obligation d'information par la remise des documents initiaux qui déterminent clairement les frais facturés ; que les quelques contradictions ou imprécisions dans la réponse de la Société Générale du 29 août 2007 sur les commissions appliquées pendant l'exécution du contrat ne caractérisent pas suffisamment un manquement de la banque à ses obligations susceptible d'avoir généré un quelconque préjudice à Monsieur [T] qui a racheté la quasi-totalité de son contrat en 2009 avec une plus-value et a remboursé la totalité de son prêt ;

Considérant que Monsieur [T] est mal fondé à reprocher à la Société Générale un défaut de rendement de son contrat Sequoia qu'elle n'a pas géré et qui tient principalement aux aléas du marché boursier en 2001-2002 à la suite de l'éclatement de la bulle internet et en 2008 à la suite de la crise des subprimes, ce qui n'est pas de nature à justifier, a posteriori, du caractère inadapté du contrat d'assurance vie proposé avec les objectifs de Monsieur [T] et ses capacités financières ;

Considérant qu'en l'absence de faute de la Société Générale, Monsieur [T] est mal fondée en son appel et sera débouté de toutes ses demandes ; que le jugement déféré sera confirmé ;

Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge de la partie intimée le montant de ses frais irrépétibles ; qu'il y a lieu de condamner Monsieur [T] à payer à la Société Générale la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile;

Considérant que Monsieur [T], qui succombe, supportera les dépens d'appel;

PAR CES MOTIFS

Déboute la Société Générale de ses exceptions d'irrecevabilité concernant la demande en paiement de la somme de 401.594 euros de Monsieur [Q] [T],

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [Q] [T] à payer à la Société Générale la somme de 2.000,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne Monsieur [Q] [T] aux dépens d'appel avec distraction au profit de l'avocat concerné dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 11/15929
Date de la décision : 30/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°11/15929 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-30;11.15929 ?
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