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30/05/2013 | FRANCE | N°12/03389

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 30 mai 2013, 12/03389


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 30 MAI 2013



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/03389



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Février 2012 - Tribunal de Commerce de PARIS - 13ème chambre - RG n° 2010005342



APPELANT :



Monsieur [L] [K]

né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 3] (72)

de nationalité française
>demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]



représenté par : la SCP AUTIER (Me Jean-Philippe AUTIER) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0053)

assisté de : Me Dominique MONDOLONI de la ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 30 MAI 2013

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/03389

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Février 2012 - Tribunal de Commerce de PARIS - 13ème chambre - RG n° 2010005342

APPELANT :

Monsieur [L] [K]

né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 3] (72)

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par : la SCP AUTIER (Me Jean-Philippe AUTIER) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0053)

assisté de : Me Dominique MONDOLONI de la SDE WILLKIE, FARR ET GALLAGHER LLP (avocat au barreau de PARIS, toque : J003)

INTIMEE :

SAS CDR CREANCES

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par : la SCP Jeanne BAECHLIN (Me Jeanne BAECHLIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0034)

assistée de : Me Frédéric LALANCE de la SCP RAMBAUD MARTEL (avocat au barreau de PARIS, toque : P0134)

INTIMEE :

SAS CDR ENTREPRISES

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par : la SCP Jeanne BAECHLIN (Me Jeanne BAECHLIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0034)

assisté de : Me Frédéric LALANCE de la SCP RAMBAUD MARTEL (avocat au barreau de PARIS, toque : P0134)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Mars 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François FRANCHI, Président, et Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François FRANCHI dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller

Monsieur Joël BOYER, Conseiller appelé d'une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l'article R.312-3 du Code de l'Organisation Judiciaire

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER,

MINISTERE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au Ministère Public.

ARRÊT :

- contradictoire,

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur François FRANCHI, Président et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier présent lors du prononcé.

En 1987, [L] [K] a participé à la création de la Banque SAGA dont il est resté actionnaire et directeur général jusqu'en 1992.

Établissement de crédit, la Banque SAGA s'est rapidement spécialisée dans le développement aéronautique à destination de l'Outre-mer. Elle a ainsi crée et ultérieurement développé Air Outre-mer (AOM) puis acquis le contrôle de MINERVE auprès du Crédit Lyonnais et du Club Méditerranée. Dans le cadre des lois permettant la défiscalisation des investissements dans les DOM-TOM, plusieurs sociétés ont ainsi été acquises ou créées (EWA, AAF, FINANSAIR, ASN) pour permettre l'acquisition, la location et l'exploitation d'aéronefs.

Les investisseurs quant à eux étaient le plus souvent réunis au sein de groupements d'intérêt économique (GIE) correspondant à autant de projets de financement.

La Banque SAGA intervenait en tant que prêteur pour assurer le financement des opérations.

Au cours de l'exercice 1990, ALTUS FINANCE a acquis 354 0000 actions de la Banque SAGA dont 177.000 auprès de [L] [K], par un accord en date du 26 novembre 1990, pour un prix de 212.400.0130 FRF, soit un prix par action de 1.200 FRF.

L'accord conclu le 26 novembre 1990 prévoyait la mise en place d'une Garantie, signée le 1er janvier 1991, selon laquelle le prix de cession des actions payé par ALTUS FINANCE ferait l'objet d'une révision au 30 avril 1992 et sa réfaction, s'il y avait lieu, serait égale a la différence entre, d'une part, le prix auquel ALTUS FINANCE avait payé les actions de la Banque SAGA, soit 1.200 FRF par action, et, d'autre part, une somme correspondant a la moyenne des résultats nets consolidés de la Banque SAGA, après impôt, au titre des exercices 1990 et 1991, multiplié par 8 et divisé par 1.060.000 actions d'une valeur nominale de 100 FRF chacune. (Pièce 1).

Le 21 janvier 1992, la Commission Bancaire, à l'initiative d'ALTUS FINANCE, rendait un rapport d'étape dans lequel elle faisait état de la nécessité de passer des provisions dans les comptes de la Banque SAGA, à hauteur de 923 millions de FRF, et d'un résultat, au titre de l'exercice 1991, de l'ordre de 90 millions de FRF, ce résultat tenant compte d'un dividende estimé de 60 millions de FRF, correspondant aux investissements réalisés dans les fonds APOLLO (Pièce 2).

Le 3 février 1992, à l'initiative d'ALTUS FINANCE, [L] [K] démissionnait de ses fonctions de Directeur Général de la Banque SAGA.

Le 5 mars 1992, la Commission Bancaire rendait son rapport définitif concluant à la nécessité de passer des provisions complémentaires, pour un montant de 132,5 millions de FRF, et faisait état du dividende à recevoir de la société LAND FREE II au titre de l'exercice 1991.

Il précisait que, depuis la rédaction du rapport d'étape, ALTUS FINANCE avait cédé à la MACIF, trois filiales de la Banque SAGA, la société SAGA Développement et deux sociétés immobilières, dégageant ainsi une plus-value de l'ordre de 300 millions de FRF (Pièce 3).

Conformément à ses termes, l'engagement de Garantie conclu le 18 janvier 1991 et prévu dans l'accord du 26 novembre 1990 était mis en 'uvre par ALTUS FINANCE et le 13 mars 1992, en application dudit engagement, [L] [K] transmettait à ALTUS FINANCE 100.000 titres supplémentaires de la Banque SAGA pour compenser l'écart entre le prix payé par ALTUS FINANCE en novembre 1990 et le prix auquel le calcul prévue dans la Garantie aboutissait (Pièce1).

ALTUS FINANCE exigeait par la suite une nouvelle réfaction du prix, au vu des comptes consolidés de la Banque SAGA au titre des exercices 1990 et 1991, que [L] [K] a vigoureusement contestée.

Pour mettre un terme à ces contestations, les parties ont conclu, le 14 août 1992, un accord aux termes duquel :

Monsieur [K] cédait à Altus Finance 99.014 actions supplémentaires pour un prix de 1 franc, cette dernière devenant ainsi actionnaire à plus de 50 % de la société anonyme Banque Saga ;

Altus Finance consentait à Monsieur [K] une clause de retour à meilleure fortune via un mécanisme d'ajustement de prix, clause pouvant être exercée par Monsieur [K] auprès de Altus Finance devenue CDR Entreprises le 23 février 1996 au plus tard le 15 septembre 1997.

Monsieur [K] et Altus Finance /CDR Entreprises avaient :

- d'une part prévu qu'un1itige pourrait survenir entre les parties ;

- d'autre part anticipé que des éléments de calcul de l'ajustement de prix pourraient ne pas être connus au jour de sa mise en 'uvre.

Convenant que :

- Si au-delà d'un délai de deux mois après la survenance d'un litige concernant tout ou partie de l'accord transactionnel du 14 août 1992, les parties n'avaient pu trouver un accord amiable, un arbitrage devait avoir lieu ; si cet arbitrage n'avait pu être mis en place quatre mois après le désaccord, les parties pouvaient saisir le Tribunal de Commerce de Paris de leur différend (cf. article 5 de 1'accord transactionnel du 14 août 1992 pièce 4) ; pour les éléments c1, c2, d et f de la formule de calcul, c'est-à-dire la valeur nette de cession de certaines participations (cf. annexe l de l'accord transactionnel du 14 août 992 - pièce adverse Q) ;

- Dans l'hypothèse où ces participations n'auraient pas été cédées à la date de la mise en 'uvre de la clause de retour à meilleure fortune, les parties disposaient d'un délai de 3 mois pour trouver un accord amiable en ce qui concerne leur valorisation ;

- A défaut d'accord amiable à 1'expiration de ce délai, Monsieur [K] disposait encore d'un délai de 12 mois maximum (6 mois renouvelable une fois) pour proposer une offre ferme d'acquisition pour chacune de ces participations, ce qui permettrait de les valoriser ;

- Si Monsieur [K] n'avait pas apporté d'offre, les participations seraient évaluées amiablement, et 2 mois après un échec d'une valorisation à l'amiable, un arbitrage devait avoir lieu, et si cet arbitrage n'avait pu aboutir quatre mois après le désaccord, les parties pouvaient saisir 1e Tribunal de Commerce de Paris de leur différend.

Les éléments cl, c2, d et f de la formule pouvaient donc être valorisés amiablement pendant 17 mois, puis par arbitrage pendant 4 mois et enfin judiciairement après que 21 mois se soient écoulés depuis la mise en 'uvre de la clause de retour à meilleure fortune.

L'ajustement de prix pouvait être mis en 'uvre en totalité, mais non pour partie, et ce, au plus tard le 15 septembre 1997, et son calcul dépendait d'une formule définie à l'Annexe I où les éléments de celle-ci correspondaient à la valeur de certaines participations de la Banque SAGA, à des reprises de provisions et à des calculs d'intérêts (Pièce 5 : Annexe à l'accord Transactionnel du 14 août1992).

Conformément aux termes de l'Annexe I à l'accord transactionnel du 14 août 1992, le mécanisme d'ajustement de prix prévu était mis en 'uvre par [L] [K] le 7 juillet 1997 (Pièce n° 6 : Lettre de [L] [K] du 7juillet1997) mais ce dernier expliquait que le CDR l'avait pendant plus d'un an renvoyé d'une entité du CDR à l'autre : CDR Holding, CDR Créances et CDR Entreprises. Ainsi :

* le 9 juillet 1997, en réponse au courrier par lequel [L] [K] avait mis en 'uvre le mécanisme d'ajustement de prix prévu à l'Annexe I de l'accord transactionnel du 14 août 1992, Monsieur [A], destinataire dudit courrier, lui indiquait qu'il avait communiqué sa demande au président du directoire du CDR Entreprises, seul compétent (Pièce n° 7 : Lettre de M. [A] du 9juillet 1997).

* le 17 décembre suivant, en l'absence de réaction de sa part, [L] [K] écrivait au président du directoire du CDR Entreprises pour s'enquérir de la suite donnée à sa demande (Pièce 8 : Lettre de [L] [K] du 17décembre 1997).

* le 6 mars 1998, le président du directoire de CDR Entreprises lui répondait en lui indiquant que son interlocuteur était le CDR Créances, le renvoyant donc a mieux se pouvoir auprès de cette entité du CDR (Pièce n° 9 : Lettre du CDR Entreprises du 6 mars 1998).

* le 13 mars 1998, [L] [K] s'adressait donc au CDR Créances et le 12 mai suivant Monsieur [E], secrétaire général adjoint du CDR Créances, l'informait de ce que le dossier venait seulement de lui être confié (Pièce 10 : Lettre de [L] [K] du 13 mars 1998 et Pièce 11 : Lettre du CDR Créances du 12 mai 1998).

* Parallèlement, le 24 mai 1998, le Juge d'instruction, qui avait été désigné sur la plainte d'ALTUS FINANCE à la suite des rapports de la Commission Bancaire, rendait une ordonnance de renvoi de [L] [K]', avec d'autres, devant le Tribunal correctionnel sous la prévention d'abus des biens et du crédit, au préjudice de la Banque SAGA, pour avoir, en qualité de directeur général et d'administrateur de ladite banque, accordé des prêts et crédits par signature à des entreprises dans lesquelles il aurait eu des intérêts, à des conditions anormales.

* Le 30 juin 1998, CDR Créances écrivait à [L] [K] que le premier objet des accords intervenus est le remboursement des dettes importantes qui sont les siennes et que les dispositions de la clause de retour à meilleure fortune sont simplement une partie des dispositions des accords intervenus, dont l'application pourrait ; le cas échéant, conduire à une incidence financière en ce qui concerne le montant de ses dettes.» (Pièce 12 : Lettre du CDR Créances du 30juin 1998).

A partir de la fin juin 1998, CDR créances s'opposait, selon M.[K] systématiquement à chacune de ses demandes de communication d'information et de pièces nécessaires au calcul de l'ajustement de prix dans l'espoir de réduire les conséquences financières de l'accord du montant des condamnations pénales attendues. (Pièce 13 : Lettre de [L] [K] de juin 1998, Pièce 14 : Lettre de [L] [K] du 20 juillet 1998, Pièce 15 : Lettre du CDR Entreprises du 30 juillet 1998, Pièce 16 : Lettre du CDR du 28juillet 1998, Pièce 17 : Lettre du CDR Finance du 30juiIlet 1998).

Le 6 août 1998, [L] [K] engageait une action en référé d'heure à heure visant à obtenir, de la part du CDR Holding, du CDR Entreprises et du CDR Créances la communication, sous astreinte, de documents relatifs à la valeur de cession de certains des actifs antérieurement détenus par la Banque SAGA et pris en compte pour le calcul de la clause de retour à meilleure fortune (Pièce n° 18 : assignation en référé du 6 août 1998).

Le 1er septembre 1998, le CDR communiquait quelques unes des pièces demandées, précisant par LRAR du 03 09 1998 que les autres seraient communiquées ultérieurement (Pièce 19).

Le 11 septembre 1998, [L] [K] demandait que ladite communication intervienne avant le 17 septembre, date à laquelle la procédure de référé avait été renvoyée (Pièce 20 : Lettre de [L] [K] du 11 septembre 1998).

Le 30 septembre 1998, le CDR communiquait à [L] [K] des pièces supplémentaires relatives au prix de cession des titres des sociétés ENVERGURE et FINAMENAGEMENT et s'engageait à lui faire parvenir la documentation relative aux risques fiscaux au titre des fonds turbo et aux risques clients sur les GIE Avions, ainsi qu'un exemplaire complet des documents adressés à la Banque COLBERT par l'administration fiscale (Pièce 21 : Lettre du CDR du 30 septembre 1998).

Le 15 octobre 1998, le Président du Tribunal de grande instance de Paris a rendu son ordonnance aux termes de laquelle il constatait les communications effectuées le 30 septembre 1998 et fixait un délai maximum de 15 jours, expirant le 1er novembre 1998, pour la remise des documents supplémentaires (Pièce n° 22 : Ordonnance de référé du 15

octobre 1998).

Le 21 octobre1998, sans communiquer le moindre document supplémentaire, le CDR écrivait à [L] [K] pour lui indiquer qu'il estimait avoir communiqué les documents et informations nécessaires au calcul de la clause de retour à meilleure fortune (Pièce 23 : Lettre du CDR du 21 octobre 1998).

* Le 23 mars 1999, le CDR lui adressait un calcul établi de manière unilatérale aux termes duquel le CDR concluait à un ajustement négatif de 269.900.000 FRF (Pièce 24).

* Le 14 avril 1999, le Tribunal correctionnel de Paris a relaxé [L] [K] des chefs d'abus des biens sociaux pour lesquels il avait été poursuivi, considérant en effet que les faits qui lui avaient été reprochés ne pouvaient caractériser une telle infraction.

Le 24 mai 2000, la Cour d'appel de Paris infirmait le jugement et condamnait [L] [K] pour abus des biens et du crédit au préjudice de la Banque SAGA et à verser au CDR, venant aux droits de la Banque SAGA, la somme de 322.740.459 FRF, solidairement avec [I] [S] et [O] [P], et, seul, une somme de 2.236.932 FRF, ces sommes correspondant aux pertes constatées dans les livres de la Banque SAGA par suite des opérations de crédit dont la cour a estimé qu'elles constituaient des abus des biens et du crédit au préjudice de la banque pour avoir été consenties à des entreprises dans lesquelles [L] [K] avait des intérêts et qui ne présentaient pas de garanties suffisantes (Pièce 28).

Sur pourvoi de [L] [K], l'arrêt était cassé sur les seuls intérêts civils.

* En 2001, [L] [K] confiait au cabinet KPMG la mission de procéder, sur la base des éléments disponibles, à une estimation de l'ajustement de prix résultant de la formule prévue à l'annexe I de l'accord transactionnel du 14 août 1992 et le rapport préliminaire établi le 31 mai 2001 concluait, en l'état des informations et pièces disponibles, à un ajustement de prix de 125.033.000 FRF en faveur de [L] [K].

Le rapport comportait toutefois, en Annexe 3, une liste des pièces supplémentaires nécessaires au calcul définitif de l'ajustement de prix.

Le rapport et son Annexe étaient transmis au CDR le 28 juin 2001 (Pièce 25).

A réception, le CDR sollicitait un délai d'un mois, soit jusqu'au 3 août 2001, pour répondre à la demande de communication supplémentaire, ce que [L] [K] acceptait mais l'échéance survenait sans que le moindre document supplémentaire soit communiqué par le CDR (Pièce 26 et 27).

* Le 21 novembre 2002, la Cour d'appel de Paris autrement composée, saisi sur renvoi après cassation de l'arrêt du 24 mai 2000, fixait le montant des dommages intérêts dus par [L] [K] au CDR Créances (venant aux droits de la Banque SAGA) à la somme de 31.734.398,34€.

* Le 1er avril 2004 : le Président du CDR, [R] [F], écrivait au conseil de [L] [K] qu'il demandait au conseil du CDR de poursuivre l'examen des conditions d'une éventuelle transaction, en tenant compte de l'arrêt que doit rendre le 7 avril 2004 la chambre criminelle de la Cour de Cassation sur le pourvoi de son client contre l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du .21 novembre 2002 » (Pièce n° 32 : Lettre du CDR a M. [Z] d'avril 2004).

Le 7 avril 2004 la Cour de cassation fixait le montant des dommages intérêts dus par [L] [K] au CDR Créances à la somme de 29.103.765,08 € (Pièce n° 29 : arrêt de la Cour de Cassation du 7 avril 2004) et en exécution partielle de l'arrêt, CDR Créances s'est fait attribuer des bons de capitalisation dont [L] [K] était titulaire pour une somme de 14.154.270,68 €.

Le 28 avril 2009, le CDR exigeait le paiement de la somme de 18.961.436,09 € (Pièce n°30 : Signification 28 avril 2009de l'arrêt de la cour de cassation).

[L] [K] assignait le 29 décembre 2009 le CDR devant le Tribunal de commerce de Paris pour faire établir un rapport actualisé au 14 juin 2010par rapport à celui du Cabinet KPMG et reflétant les sommes qui, en l'état des informations disponibles, faisait apparaître un ajustement de prix positif de 52.778.000 € au 31 mars 2010.

Devant le Tribunal de commerce, sans jamais répondre au fond sur le montant de l'ajustement ou produire la moindre pièce qui eut permis de finaliser ce calcul, le CDR se prévalait de l'article L. 1110-4 du Code de commerce et faisait valoir qu'en application de ce texte, l'action de [L] [K] était prescrite.

Par un jugement en date du 13 février 2012, le Tribunal de commerce a fait droit à la fin de non recevoir du CDR et dit l'action de Monsieur [L] [K] du 29.12.2009 en exécution forcée de la clause de retour à meilleure fortune stipulée dans l'accord transactionnel du 14. 08.1992 prescrite. Le premier juge a estimé que l'article 2234 du Code civil était inapplicable en l'espèce puisque des pourparlers ou des propositions afin d'arriver à une transaction qui ne sont pas contestés par le CDR, ne peuvent remplacer une convention entre les parties suspendant effectivement la prescription, considérant alors que ni la loi ni la convention n'ont suspendu la prescription et il est certain qu'aucun événement imprévisible ou irrésistible n'a empêché M. [K] d'agir, pour en déduire que, quelques soient les hypothèses retenues, l'action de M. [K] est prescrite à la date de son assignation et que M. [K] est donc irrecevable en ses demandes à l'encontre de CDR Entreprises et CDR Créances.

Monsieur [K] a fait appel du jugement.

* Il demande à la cour de :

- Infirmer le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

- Dire son action recevable,

Subsidiairement,

- Dire les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises irrecevables à se prévaloir de la prescription ;

Condamner les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises, solidairement sinon in solidum, à lui payer, en deniers ou quittance, la somme de 52.778.000€, sauf à parfaire,

Dire que les sommes dues au titre de l'ajustement de prix seront actualisées au jour du paiement au taux légal de l'intérêt et ce, jusqu'à entier paiement ;

Ordonner, au besoin sous astreinte de 100.000€ par jour de retard, la communication par les sociétés CDR Entreprises et CDR Créances de l'ensemble des éléments visés a l'Annexe 2 au rapport du Cabinet KPMG du 14 juin 2010, outre les éléments relatifs au transfert des fonds APPOLO par la Banque SAGA AOM, au montant des dividendes des dits fonds au titre des années 1992 et 1993 perçus par AOM et à la valeur de réalisation des dits fonds par leur cession a un tiers de manière à parfaire le calcul de l'ajustement de prix ;

Condamner solidairement sinon in solidum les sociétés CDR Entreprises et CDR Créances à lui payer la somme de 150.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner les sociétés CDR Entreprises et CDR Créances, solidairement sinon in solidum, aux entiers dépens.

Il soutient plusieurs arguments :

1- la non détermination du prix de l'ajustement :

Suite à l'arrêt de la Cour de cassation du 07 avril 2004, la compensation pouvait avoir lieu même si certains éléments du calcul de l'ajustement de prix, savoir, entre autres, le $gt;, qui reposait sur érence entre les provisions figurant actuellement (c'est- à-dire à la date du protocole) dans /es comptes de la banque au titre des sommes prêtées aux sociétés EWA et à ses filiales AAFC et aux GIE et sociétés (ou aux associés desdites sociétés), qui ont tous acquis des aéronefs dans le cadre d'opérations de défiscalisation, desdites provisions se montant à 10 5000. 000 FRF) d'une part ; et les sommes en capital et intérêts qui ne seraient pas recouvrables sur lesdits concours$gt;$gt;, n'avaient pu être déterminés faute de disposer des éléments permettant ce calcul.

Le calcul de cet élément nécessitait (rapport du Cabinet KPMG du 14 juin 2010 : Pièce n°31), de tenir compte, éances restant dues des conséquences financières des décisions judiciaires rendues sur les dossiers EWA et AAFC$gt;$gt;. Or, ces éléments n'ont été connus, s'agissant de EWA, qu'en juin 2008 par été EWA$gt;$gt;, faisant suite a la signature d'un protocole transactionnel entre le liquidateur de EWA et le CDR (Pièce n° 33 : Jugement du 25juin 2008 constatant l'extinction du passif ; Pièce n° 34 : Jugement d'homologation de la transaction signée entre le liquidateur de EWA et le CDR du 6' mars 2007 ; Pièce n° 35 : Requête aux fins d'homologation du 25 septembre 2006).

2- l'absence de prescription :

Elle n'était pas acquise au CDR à la date de l'assignation le 29 décembre 2009, dès lors que l'action de [L] [K] tendait au recouvrement d'une créance de prix qui n'était pas encore devenue exigible.

En effet, l'action engagée par [L] [K] devant le Tribunal de commerce par l'assignation en date du 29 décembre 2009, tend au paiement d'un complément de prix au titre de la clause d'ajustement de prix prévue au protocole du 14 août 1992. Mais sa créance, même s'il avait effectivement exercé l'option prévue au protocole et demandé à bénéficier de l'ajustement du prix par lettre du 7 juillet 1997, n'était pas déterminée ni exigible et elle n'a donc pas pu commencer à se prescrire.

Il n'a d'ailleurs jamais été en possession de tous les éléments lui permettant d'évaluer le montant de l'ajustement de prix, le CDR n'ayant jamais communique l'intégralité des pièces nécessaires à son calcul malgré la mise en 'uvre le 06 août 1998 d'une action en référé d'heure à heure visant à obtenir, de la part du CDR Holding, du CDR Entreprises et du CDR Créances la communication, sous astreinte, de documents relatifs à la valeur de cession de certains des actifs antérieurement détenus par la Banque SAGA et pris en compte pour le calcul de la clause de retour a meilleure fortune.

3- Subsidiairement, la suspension de la prescription par impossibilité d'agir :

A supposer que la prescription ait pu commencer à courir avant que sa créance ait été déterminée, Monsieur [L] [K] considère que le cours de celle-ci a été suspendu des lors qu'il était dans l'impossibilité d'agir exposant que :

- Ce n'est qu'en 2001 que, sur la base des informations disponible, [L] [K] a pu faire établir un calcul estimatif du montant de l'ajustement de prix par le cabinet KPMG, le rapport préliminaire du 31 mai 2001 concluant, «en l'état des informations et pièces disponibles», a un ajustement de prix de 125.033.000 FRF en faveur

de [L] [K] et comportant, en Annexe 3, une liste des pièces supplémentaires nécessaires au calcul définitif de l'ajustement de prix.

- Le rapport préliminaire du cabinet KPMG et son Annexe ont été transmis au CDR le 28 juin 2001 à partir de cette date, le CDR n'a plus jamais fourni la moindre information qui eut permis d'aboutir au calcul définitif de l'ajustement de prix, paralysant ainsi, de manière consciente, le processus de calcul prévu par le mécanisme de retour à meilleure fortune envisagé dans l'accord transactionnel du 14 août 1992.

- Le second rapport établi par le Cabinet KPMG en date du 14 juin 2010 (Pièce n° 31) fait encore apparaître, en Annexe 2, une liste d'éléments nécessaires pour permettre le calcul définitif de l'ajustement de prix dont certains éléments ne seront connus qu'en juin 2008 (Pièce n° 33 : Jugement du 25 juin 2008 constatant l'extinction du passif).

4- Plus subsidiairement, l'interruption de la prescription :

4/1- du fait de l'accord des parties :

Monsieur [L] [K] s'appuie sur la décision du CDR, à laquelle [L] [K] s'est associé de fait, de lier le sort des sommes dues au titre de l'ajustement de prix au paiement des dommages intérêts dus au titre de l'action civile engagée par le CDR devant la juridiction pénale, pour dire que :

Cette décision a empêché la première de se prescrire tant que la seconde peut encore être poursuivie en interrompant le cours de la prescription selon les prévisions de l'article 2234 du Code civil.

Ce n'est que lorsque le CDR lui-même a rompu la trêve en 2009 que [L] [K] a pu engager l'action qui a donné lieu à l'assignation du 29 décembre 2009 puisqu'alors la cause qui l'avait jusqu'alors empêché d'agir, savoir l'accord des parties sur le maintien d'un statu quo, avait disparue.

Ainsi, la prescription, qui aurait commence à courir des le 7 juillet 1997, a été suspendue dès le 30 juin 1998, date à laquelle le CDR a lié le sort de l'ajustement de prix au résultat de l'action pénale engagée jusqu'au 28 avril 2009, date à laquelle le CDR a fait signifier l'arrêt du 7 avril 2004. Aussi, moins d'une année ayant couru avant son interruption, il disposait d'un peu plus de 9 ans pour agir lorsque la cause d'interruption cessait le 28 avril 2009. Et ayant agit le 29 décembre 2009, il était dès lors parfaitement recevable.

4/2- du fait des man'uvres déloyales du CDR :

Arguant de man'uvres déployées par le CDR pour l'induire en erreur et retarder son action, Monsieur [L] [K] invoque une fraude privant le CDR du droit de se prévaloir de la prescription.

Au titre des man'uvres dont le CDR aurait fait usage, dès juillet 1997, pour empêcher l'ajustement de prix, il vise :

* le renvoi de sa demande d'une structure du CDR à l'autre.

* le lien imposé entre l'ajustement de prix et les éventuelles condamnations pénales prononcées contre lui.

* l'attentisme du CDR à partir de 2004 et ce, pendant 5 ans.

5- Plus subsidiairement encore :

Monsieur [K], dans l'hypothèse selon laquelle la prescription aurait été acquise au CDR, soutient que celui-ci ne pouvait s'en prévaloir à son égard dès lors que par son comportement antérieur, le CDR avait créé une situation sur laquelle il était en droit de se fonder, de sorte qu'en cherchant, à partir de 28 avril 2009, à faire exécuter les causes de l'arrêt du 7 avril 2004, le CDR a adopté une position incompatible avec le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui.

Et il observe qu'il s'agit d'une fin de non recevoir au sens de l'article 122 du Code de procédure civile qui interdit au CDR de se prévaloir de la prescription.

La lettre du CDR Créances du 30 juin 1998, lui a laissé croire que l'ajustement de prix viendrait en compensation d'éventuelles condamnations mises à sa charge de sorte qu'il était prématuré, tant que ces condamnations n'étaient pas définitives, de procéder à l'ajustement de prix.

La lettre du CDR à M. [Z] du 1er avril 2004 (Pièce n° 32) est une réitération à la veille du prononcé de l'arrêt du 7 avril 2004 de cet état de chose.

L'abstention pendant 5 années du CDR à lui réclamer la moindre somme au-delà de la conversion d'une mesure conservatoire sur des bons de capitalisation lui appartenant allait dans le même sens.

En revenant par la suite sur la situation antérieure qu'il avait créée et en décidant de poursuivre le recouvrement des causes de l'arrêt du 7 avril 2004, le CDR a adopté un comportement contradictoire à son détriment.

6- Le bien fondé de sa demande de mise en jeu de la clause de retour à meilleure fortune :

Sur le fondement de l'article 1134 du Code civil qui oblige les parties à exécuter de bonne foi la convention qu'ils ont conclu et qui tient lieu de loi à leur égard - des termes de l'annexe de l'accord transactionnel du 14 août 19.92 et de l'évaluation non contestée du Cabinet KPMG actualisé au 14juin 2010 (Pièce n° 31), Monsieur [L] [K] demande la condamnation du CDR à lui payer la somme en principal de 52.778.000€.

*

Les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises, intimées, demandent à la cour de :

A titre principal :

Dire et juger prescrite l'action de Monsieur [L] [K] en exécution forcée de la clause de retour à meilleure fortune stipulée dans l'accord transactionnel du 14 août 1992.

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par 1e Tribunal de Commerce de Paris le 13 février 2012 et y ajoutant, condamner Monsieur [L] [K] à verser aux sociétés CDR Entreprises et CDR Créances la somme de 15.000 € chacune, en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens.

A titre subsidiaire :

Mettre les sociétés CDR Entreprises et CDR Créances en mesure de conclure sur le fond afin d'assurer un débat contradictoire devant la Cour d'Appel en rouvrant les débats.

Elles observent que :

Monsieur [K], au lieu de saisir un arbitre conformément à la procédure convenue, a saisi le juge des référés d'une demande de communication de documents.

Monsieur [K] a attendu le 29 décembre 2009, soit 12 ans et demi après avoir mis en 'uvre la clause de retour à meilleure fortune contenue pour les assigner en exécution forcée de cette clause, dont il évaluait provisoirement le montant à 18 M€ en principal majorés des intérêts a compter du 7 juillet 1997, capitalisés à compter du 7 juillet 1998.

Les parties disposaient de 17 mois à compter de la mise en 'uvre de la clause de retour à meilleure fortune pour saisir un arbitre, puis si cet arbitrage n'avait pu être mis en 'uvre dans un délai de 4 mois, les parties pouvaient saisir le Tribunal de Commerce de Paris de leur différend. Autrement dit, 21 mois après avoir mis en 'uvre la clause de retour à meilleure fortune le 7 juillet 1997, Monsieur [K] disposait alors encore de 99 mois (120 mois - 21 mois) pour saisir le Tribunal de Commerce de Paris.

Cette réclamation tardive, son montant porté par la suite à 53M€ et le fait qu'elle soit dirigée notamment contre CDR Créances, qui n'est pas débitrice de la clause de retour a meilleure fortune, s'expliquent par les démarches engagées par CDR Créances à l'encontre de Monsieur [K], dans le cadre d'un autre dossier, pour recouvrer les dommages et intérêts civils auxquels ce dernier a été condamné.

1- Sur la prescription :

Les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises indiquent que l'action de Monsieur [K] était prescrite à la date de son assignation, et ce quelles que soient les hypothèses retenues car :

Le délai de prescription de l'action en paiement de Monsieur [K] a commencé à courir le 7 juillet 1997 ou, au plus tard, le 23 mars 1999 et cette action est prescrite depuis le 8 juillet 2007 ou, à tout le moins, depuis le 24 mars 2009.

Même si l'on considère que la procédure de référé engagée par Monsieur [K] le 7 août 1998 aurait valablement interrompu le délai de prescription, son action demeure prescrite car le délai de prescription de 10 ans aurait recommencé a courir le jour où cette ordonnance a été rendue, soit le 15 octobre 1998 et dans cette hypothèse également, l'action de Monsieur [K] était prescrite à la date de son assignation, le 29 décembre 2009.

A supposer que le délai de prescription de 10 ans ait commence à courir à l'issue du délai de 21 mois, soit le 7 avril 1999, l'exécution forcée de la clause de retour à meilleure fortune devait être demandée avant le 8 avril 2009.

L'article L111-6 du Code des procédures civiles d'exécution, dispose que la créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation. Et si le montant de la créance détenue par Monsieur [K] n'était pas déterminé, il était aisément déterminable à la date de la mise en 'uvre de la clause de retour à meilleure fortune, le 7 juillet 1997, les parties ayant anticipe, dans l'accord transactionnel (annexe I) que certains éléments de calcul de l'ajustement de prix pourraient ne pas être connus au jour de sa mise en 'uvre et prévu, en conséquence, une procédure permettant leur valorisation amiable ou a défaut judiciaire.

2- Sur la suspension de la prescription :

Les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises considèrent que :

La règle selon laquelle la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement quelconque résultant soit de la loi, soit de la convention ou de la force majeure, ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription et la prescription de l'action de Monsieur [K] aurait donc tout de même été acquise le 8 juillet 2007.

Le courrier du 30 juin 1998 adressé par CDR Créances à Monsieur [K], antérieur de près de 6 ans à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation, le 7 avril 2004, ne peut en aucun cas être interprété comme une renonciation du CDR Créances à recouvrer les condamnations éventuellement prononcées à l'encontre de Monsieur [K] en contrepartie de 1'absence de mise en 'uvre de la clause de retour à meilleure fortune qui lui a été consentie par le CDR Entreprises. Il s'agit en effet de deux personnes morales distinctes.

Le courrier du 1er avril 2004 ne formalise pas davantage un engagement mutuel de la part du CDR et de Monsieur [K] de renoncer à se réclamer les sommes dont ils seraient réciproquement créanciers 1'un envers l'autre et fait état tout au plus d'une volonté réciproque des parties d'arriver à résoudre amiablement le litige qui les oppose.

3 - Sur les man'uvres déloyales :

Les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises considèrent que Monsieur [K] n'a été empêché d'agir par de prétendues « man'uvres déloyales » puisqu'il aurait pu y résister simplement en les assignant et il ne peut justifier d'une impossibilité absolue d'agir imputable à CDR Entreprises et doit donc assumer les conséquences normales des règles de prescription.

4- Sur la connexité entre les créances du CDR CREANCES et de Monsieur [K] :

Les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises affirment qu'à aucun moment elles n'ont lié le sort de l'ajustement de prix au résultat de la procédure pénale initiée à son

encontre, ni pris l'engagement de ne pas poursuivre le recouvrement des condamnations pénales prononcées à l'encontre de Monsieur [K] des lors qu'il s'abstenait de mettre en 'uvre la clause de retour a meilleure fortune.

5- Sur la réouverture des débats :

Les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises considèrent que si par extraordinaire la Cour décidait d'infirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris le 13 février 2012, elle devrait les mettre en mesure' de conclure sur le fond dès lors que les parties n'ont pas débattu du fond du litige devant les premiers juges afin d'assurer un débat contradictoire devant la juridiction de second degré.

SUR CE,

La cour observe que les parties sont d'accord sur les points suivants :

- La mise en 'uvre par Monsieur [K] de l'exécution de la clause de retour à meilleure fortune contenue dans l'accord transactionnel du 14 août 1992 par le courrier du 7 juillet I997 au CDR et du 17 décembre 1997 au CDR Entreprises.

- La prise en compte d'éléments visés à 1'annexe I de1'accord transactionnel du 14 août 1992, dans le calcul de l'ajustement de prix.

- La remise des documents nécessaires au calcul de l'ajustement de prix sur l'assignation en référé de Monsieur [K] signifiée le 7 août 1998 et l'ordonnance rendue le 15 octobre 1998, le juge prenant acte que certains des documents réclamés par Monsieur [K] lui avaient déjà été remis, estimant que certains documents sollicités n'avaient pas, pour diverses raisons, à lui être remis, et constatant que certains documents réclamés allaient lui être remis.

- La mise en jeu de la clause de retour à meilleure fortune a bien eu lieu dans le délai prévue par le protocole.

- L'existence d'un différend portant sur une obligation de nature commerciale dont l'exécution forcée pouvait être demandée dans un délai de 10 ans sous l'empire des dispositions applicables antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2008 et de 5 ans sous l'empire de la loi nouvelle, et ce à compter de son exigibilité.

Partant de là, la cour estime que la prescription était de 10 ans en l'espèce car si la loi du 17 juin 2008, qui a modifié les textes relatifs à la prescription, a réduit à 5 ans la prescription commerciale.

Les dispositions transitoires de cette loi prévoient que les nouveaux délais de prescription commencent à courir à compter de l'entrée en vigueur de la loi, soit le 18 juin 2008, soit plus de 10 ans après la mise en jeu de la clause, tant auprès de CDR CREANCES que de CDR ENTREPRISES.

La loi nouvelle prévoit que si une prescription avait commence à courir, son délai est raccourci par la loi nouvelle, la durée totale de la prescription ne pouvant excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Certes, Monsieur [L] [K] soutient que son action tend au paiement d'une créance au titre d'un ajustement de prix et qu'elle ne pouvait dès lors commencer à se prescrire tant que celle-ci n'était pas devenue liquide et exigible, ce qui n'était pas le cas puisque les éléments nécessaires au calcul de l'ajustement de prix ne lui avait pas été communiqués et qu'ainsi sa créance d'ajustement de prix restait éventuelle.

Cependant, la cour considère que si le montant de la créance détenue par Monsieur [K] n'était pas déterminé, il était aisément déterminable à la date de la mise en 'uvre de la clause de retour à meilleure fortune, le 7 juillet 1997, les parties ayant anticipe, dans l'accord transactionnel (annexe I) que certains éléments de calcul de l'ajustement de prix pourraient ne pas être connus au jour de sa mise en 'uvre et prévu, en conséquence, une procédure permettant leur valorisation amiable ou a défaut judiciaire.

Et si la Cour de cassation a jugé que le point de départ exact du délai de prescription est en principe le jour où le créancier a commencé à pouvoir l'intenter et non du jour du fait générateur de l'obligation, soit au jour où l'ensemble des éléments nécessaires à son calcul avaient été déterminés, c'est pour fixer ce point au moment où le créancier peut utilement exercer son droit et dans le cas d'espèce, le mécanisme mis en place par les parties l'avait anticipé.

L'Annexe I au protocole du 14 août 1992 prévoit un mécanisme d'ajustement de prix, c'est-à-dire de détermination du prix de cession des participations de [L] [K] dans le capital de la Banque SAGA, dont le prix provisoire avait été fixé dans le protocole à un franc.

Dès lors, la prescription est acquise, sauf suspension ou interruption de celle-ci.

Et à cet égard,

- l'article 2234 du Code civil, dans sa rédaction issue de la Loi du 17 juin 2008, précise que la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure ; cependant la cour observe que :

'y a pas d'empêchement de la loi, ni de la force majeure ni de la convention, Monsieur [K] ne pouvant à cet égard parler que d'éléments de fait tirés du comportement du CDR dont il a été dit qu'elle n'était nullement insurmontable pour lui,

é d'agir peut être non seulement matérielle mais aussi morale et résulter d'un obstacle quelconque mais elle ne doit pas être imputable à la personne contre laquelle court la prescription et par exemple à sa carence.

- Monsieur [K] fait état d'une décision du CDR, à laquelle il s'est associé de fait, liant le sort des sommes dues au titre de l'ajustement de prix au paiement des dommages intérêts dus au titre de l'action civile engagée par le CDR devant la juridiction pénale, mais il apparaît que le courrier du 1er avril 2004 du Président du CDR, ne constitue pas un accord mais l'accord pour poursuivre l'examen des conditions d'une éventuelle transaction.

- de même, il ne ressort pas des pièces que les sociétés CDR Créances et CDR Entreprises ont lié le sort de l'ajustement de prix au résultat de la procédure pénale initiée à l'encontre de Monsieur [K], les termes du courrier du 30 juin 1998 adressé par CDR Créances à Monsieur [K] ne faisant pas référence spécifiquement à ces deux actions et la lettre étant antérieure de prés de 6 ans à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation, le 7 avril 2004.

- enfin, la Cour de cassation a pu rappeler que les man'uvres déployées par le débiteur et qui ont dissuadé le créancier d'agir, constituent une fraude qui prive le débiteur du droit de se prévaloir de la prescription.

Sur ce point, il convient de tirer de l'exposé des faits le constat que le CDR, débiteur de la clause de retour à meilleure fortune, a clairement laissé courir le temps en ne répondant que très épisodiquement à la manifestation de volonté de Monsieur [K] de mettre en 'uvre la clause, le renvoyant d'une structure à l'autre, l'obligeant à un référé pour obtenir les documents nécessaires au calcul de l'ajustement, lui adressant le 23 mars 1999 un calcul établi de manière unilatérale au terme duquel l'ajustement était négatif de 269.900.000 FRF puis demandant un délai non respecté pour répondre sur le calcul du Cabinet KPMG pour le compte de Monsieur [K], ensuite parlant de poursuivre la recherche d'une transaction, ce qui suppose une rencontre et des propositions qui ne viendront pas, jusqu'à l'assignation de Monsieur [K] en exécution forcée au lendemain de la signification par le CDR de l'arrêt de cassation fixant de manière définitive le montant des dommages intérêts auxquels celui-ci était condamné au profit du CDR, c'est à dire pendant plusieurs années.

La cour considère que ce comportement surprenant ne pouvait qu'avoir pour objet de différer la mise en 'uvre de la clause et de retarder l'action de Monsieur [K] dans le même temps qu'elle ne satisfait pas à la bonne foi avec laquelle les conventions doivent être exécutées, tant pour respecter l'accord des parties et en exécuter les obligations que pour assurer la solution d'un différend sur l'application d'un contrat, dans un délai raisonnable, étant observé que le CDR n'hésite pas à fustiger l'incurie de Monsieur [K] pour ne pas avoir en 21 mois été capable de mettre en jeu la clause.

La cour observe au surplus qu'il est plus facile pour les intimés, entreprises ayant la garantie de l'Etat, de supporter la durée d'un tel litige que l'appelant, personne physique, et qu'il ne faut pas négliger dans l'appréciation des forces en présence et les enjeux en cause le fait que si Monsieur [K] avait la possibilité juridique de forcer le jeu, il était parallèlement parti à une procédure judiciaire opposant les mêmes, sur un autre fondement, dans le cadre d'un combat judiciaire ayant conduit à deux arrêts de cassation.

Dès lors, ces man'uvres qu'on les considère comme ayant suspendu ou interrompu la prescription, ayant perduré jusqu'à l'assignation, soit au moins entre le 30 juin 1998 et le 05 mai 2001, soit pendant 2 ans et 10 mois, la prescription n'est pas acquise et l'action de Monsieur [K] sera ainsi déclarée recevable.

- Sur la réouverture des débats :

La cour n'y fera pas droit observant que l'action de Monsieur [K] visait depuis l'assignation originelle à obtenir l'exécution forcée de la clause de retour à meilleure fortune et que ce sont les intimés qui ont fait le choix de limiter leur argumentation à la prescription.

- Sur la mise en 'uvre de la clause de retour à meilleure fortune :

Sur le fondement de l'article 1134 du Code civil qui oblige les parties a exécuter de bonne foi la convention qu'ils ont conclu et qui tient lieu de loi à leur égard - des termes de l'annexe de l'accord transactionnel du 14 août 19.92 et de l'évaluation non contestée du Cabinet KPMG actualisé au 14juin 2010 (Pièce n° 31), Monsieur [L] [K] demande la condamnation du CDR à lui payer la somme en principal de 52.778.000€.

La cour fera droit à la demande en condamnant CDR ENTREPRISES, signataire du protocole en deniers ou quittance. Elle dira que les sommes dues au titre de l'ajustement de prix seront actualisées au jour du paiement au taux légal de l'intérêt et ce, jusqu'à entier paiement.

Considérant contradictoire cette demande avec celle visant à voir ordonner, sous astreinte de 100.000€ par jour de retard, la communication par les sociétés CDR Entreprises et CDR Créances de l'ensemble des éléments visés à l'Annexe 2 au rapport du Cabinet KPMG du 14 juin 2010, outre les éléments relatifs au transfert des fonds APPOLO par la Banque SAGA a AOM, au montant des dividendes desdits fonds au titre des années 1992 et 1993 perçus par AOM et à la valeur de réalisation desdits fonds par leur cession a un tiers de manière à parfaire le calcul de l'ajustement de prix, elle ne fera pas droit à la demande d'astreinte.

- Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens :

La cour condamnera CDR Entreprises, seule, à payer à Monsieur [L] [K] la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement,

Rejette les conclusions, demandes, moyens et fins des sociétés CDR CREANCES et CDR ENTREPRISES,

Déclare l'action de Monsieur [L] [K] recevable,

Condamne du CDR ENTREPRISE à payer à Monsieur [L] [K] :

- la somme en principal de 52.778.000€, en deniers ou quittance, avec intérêt au taux légal de l'intérêt jusqu'à entier paiement,

- la somme de 15 000€ au trie de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Rejette tous autres moyens, fins et conclusions de l'appelant,

Condamne CDR ENTREPRISES aux entiers dépens lesquels seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

B. REITZER F. FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 12/03389
Date de la décision : 30/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°12/03389 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-30;12.03389 ?
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