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30/05/2013 | FRANCE | N°12/06662

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 30 mai 2013, 12/06662


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 30 MAI 2013



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/06662



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Février 2012 - Tribunal de Commerce de PARIS - 13ème chambre - RG n° 08/074057



APPELANT :



Monsieur [B] [J] [P]

né le [Date naissance 5] 1955 à Tunis (Tunisie)

de nationalité française
>demeurant [Adresse 4]

[Localité 1]



représenté par : la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE (Me Jacques PELLERIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0018)

assisté de : Florenc...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 30 MAI 2013

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/06662

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Février 2012 - Tribunal de Commerce de PARIS - 13ème chambre - RG n° 08/074057

APPELANT :

Monsieur [B] [J] [P]

né le [Date naissance 5] 1955 à Tunis (Tunisie)

de nationalité française

demeurant [Adresse 4]

[Localité 1]

représenté par : la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE (Me Jacques PELLERIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0018)

assisté de : Florence AMSLER (avocate au barreau de LYON)

APPELANTE :

SA LES HOTELS DE PARIS SA

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 8]

prise en la personne du Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité audit siège

représentée par : la SCP Jeanne BAECHLIN (Me Jeanne BAECHLIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0034)

assistée de : Me Cédric DE KERVENOAEL de la SELARL Cabinet Z (avocat au barreau de PARIS, toque : E0833)

INTIME :

Monsieur [M] [E]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 5] (92)

de nationalité française

demeurant [Adresse 6]

[Localité 3]

représenté par : la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE (Me Jacques PELLERIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0018)

assisté de : Florence AMSLER (avocate au barreau de LYON)

INTIME :

Monsieur [I] [Y]

né le [Date naissance 4] 1955 à Tunis (Tunisie)

de nationalité française

demeurant [Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par : la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE (Me Jacques PELLERIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0018)

assisté de : Florence AMSLER (avocate au barreau de LYON)

INTIME :

Monsieur [G] [N]

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 7] (92)

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par : la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE (Me Jacques PELLERIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0018)

assisté de : Florence AMSLER (avocate au barreau de LYON)

Monsieur [T] [D]

né le [Date naissance 3] 1947

de nationalité française

demeurant [Adresse 5]

[Localité 1]

représenté par : la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE (Me Jacques PELLERIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0018)

assisté de : Florence AMSLER (avocate au barreau de LYON)

Monsieur [K] [U]

né le [Date naissance 2] 1936 au [Localité 9] (93)

de nationalité française

demeurant [Adresse 7]

[Localité 8]

représenté par : la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE (Me Jacques PELLERIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0018)

assisté de : Florence AMSLER (avocate au barreau de LYON)

SA LES HOTELS DE PARIS

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 8]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représenté par assisté de : la SCP Jeanne BAECHLIN (Me Jeanne BAECHLIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0034)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 4 Avril 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François FRANCHI, Président, et Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François FRANCHI dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller

Madame Evelyne DELBES, Conseillère appelée d'une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l'article R.312-3 du Code de l'Organisation Judiciaire

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER,

MINISTERE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au Ministère Public.

ARRÊT :

- contradictoire,

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur François FRANCHI, Président et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier présent lors du prononcé.

La Société LES HOTELS DE PARIS a pour objet, de manière directe ou indirecte, et notamment par voie de prestations de services et de concessions de marques, toute activité relative à I'acquisition et à l'exploitation de fonds de commerce, d'hôtels ou de résidences hôtelières, ainsi que toute activité relative à la réhabilitation et à la construction d'hôtels.

Créée en 1992, le concept des HOTELS DE PARIS repose sur la notion d'hôtels de charme, à savoir des hôtels de capacité moyenne (une cinquantaine de chambres) à la décoration plutôt soignée.

Cette société actuellement cotée au second marché de la Bourse de [Localité 8] est le produit de la fusion intervenue entre la Société GESTIMMO FINANCE, société spécialisée dans le conseil en financement et investissement notamment par le biais de la réhabilitation et la construction d'hôtels de catégorie 3 et 4 étoiles, et la Société LES HOTELS DE PARIS, la première ayant absorbé la seconde et pris sa dénomination.

Elle est dirigée par M. [A] [V] en sa qualité de Président Directeur Général.

Après avoir ouvert deux premiers hôtels en propre en 1994, la société a lancé un certain nombre de programmes hôteliers parisiens en faisant appel à des conseillers financiers dont les clients, investisseurs privés, cherchaient des produits de défiscalisation en raison de leur fort taux d'imposition.

Fut ainsi proposée par la Société LES HOTELS DE PARIS, la participation à la création d'un hôtel neuf dénommé PARIS BERCY, hôtel situé à 100 mètres de la mairie du 12ème arrondissement, face au Square [B] Morin, à l'angle du [Adresse 9], l'établissement proposé devant être géré par la Société CHOICE HOTELS INTERNATIONAL, premier groupe hôtelier au monde en 1994, qui entendait affilier I'établissement sous son enseigne QUALITY HOTEL dès lors que la Société LES HOTELS DE PARIS n'exploitait pas encore en propre, ou par le biais de contrats de prestations de services d'établissements hôteliers.

L'opération hôtelière consistait en l'acquisition d'un terrain nu de 232 m² sur lequel devait être érigée une construction neuve, comprenant un niveau de sous-sol à l'usage des locaux techniques et de salle de petits déjeuners, un rez de chaussée avec réception, salon, bureau du Directeur, bagagerie, salle de réunion, ainsi qu'une cour intérieure paysager, puis huit niveaux desservis chacun par un ascenseur sur lesquels étaient réparties 48 chambres.

La Société LES HOTELS DE PARIS, assurait le suivi de la construction de façon à livrer aux investisseurs et au Groupe CHOICE HOTELS INTERNATIONAL un immeuble clef en main, prêt à l'exploitation.

L'opération de défiscalisation était réalisée par le biais de la création de deux sociétés à savoir une société en participation dénommée SEP PARIS BERCY, qui était propriétaire de l'immeuble et une SARL dénommée PARIS BERCY, gérante statutaire de la SEP et exploitant du fonds de commerce hôtelier.

L'appel à une société en participation avait pour intérêt d'utiliser une société fiscalement transparente de nature occulte permettant pour ses associés de partager les pertes directement au prorata de leurs apports, chacun d'eux déclarant sur l'ensemble de leurs revenus, à l'exception des revenus fonciers et des plus values mobilières leurs parts négatives de résultat, d'autant que le mode d'amortissement [dégressif] avait été choisi à dessein pour augmenter lesdites pertes.

Le 19 décembre 1995, la SEP PARIS BERCY a commencé son activité.

Son capital social s'élevait à 20 500 000 francs divisés en 164 parts de 125 000 francs chacune.

M. [A] [V] a été nommé comme dirigeant des 2 sociétés :

- la SEP PARIS BERCY,

- la SA PARIS BERCY.

La société LES HOTELS DE PARIS a assuré l'organisation commerciale et administrative d'exploitation hôtelière près de la SA PARIS BERCY et a conclu avec cette dernière un contrat d'assistance générale en vue de l'acquisition et de l'exploitation de l'hôtel.

Conformément aux engagements pris, I'hôtel PARIS BERCY a été construit et ouvert au public au mois de septembre 1997.

*

En 1997, les murs de l'hôtel ont été vendus pour un montant de 27 155 000 francs

(4 139 753€) à deux sociétés de crédit bail qui ont conclu, avec la SARL PARIS BERCY, un contrat de crédit bail sur 15 ans, les loyers du crédit bail étant fixés à 2 622 626 francs par an.

Au cours de l'année 1999, la société GESTIMMO FINANCE a changé de dénomination et est devenue la SA LES HOTELS DE PARIS.

Le ler septembre 1999, une convention a été conclue entre la SARL et la SA LES HOTELS DE PARIS au terme de laquelle cette dernière gère l'hôtel.

La SARL PARIS BERCY acquérait 12 960 actions de la SA LES HOTELS DE PARIS et 105 parts de la SEP au prix global de 1 399 845 francs.

*

La société en participation allant devenir bénéficiaire, il était décidé de :

1- réaliser une opération d'apports des titres de la SEP au sein de la SARL PARIS BERCY puisque l'existence de la SEP ne se justifiait plus et par assemblée en date du 19 décembre 2001, les 50 investisseurs ont unanimement apporté les titres qu'ils détenaient dans la société en participation PARIS BERCY à la SARL PARIS BERCY.

La dissolution de la SEP pouvait alors intervenir du fait de la réunion de toutes les parts de la Société Participation en une seule main et de la caducité du contrat de participation.

2- proposé au cours de la même assemblée une fusion entre la SA LES HOTELS DE PARIS et la Société PARIS BERCY de façon à rendre liquide les participations détenues dans la SARL PARIS BERCY puisque la SA LES HOTELS DE PARIS était cotée sur le second marché mais cette fusion fut rejetée par l'Assemblée Générale.

*

Par consultation écrite en date du 17 septembre 2002, les associés de la SARL PARIS BERCY furent alors invités à voter la transformation de la société de SARL en société anonyme dotant par là même l'entreprise d'un Commissaire aux Comptes chargé de certifier les comptes de la société, cette transformation ayant pour objet de minimiser les droits de mutation des titres de la société puisqu'un nombre important d'associés envisageait de céder leurs participations à la Société PARIS LOUVRE SA.

De fait, une cession des titres de 41 sur 50 investisseurs s'opérait de gré à gré au cours de l'année 2002 au profit de la SA PARIS LOUVRE, au prix unitaire de 1 163,74€ sur la base d'une valorisation de la société à hauteur de 4 116 123 €, diminuée des encours financiers du crédit bail de 1 779 342 €.

Cinq investisseurs refusaient compte tenu de ces éléments, la moins value générée par cette offre sortant à 17 911,44 € pour chaque part cédée au lieu d'une plus value escomptée et annoncée par la société GESTIMMO FINANCE aux actionnaires en 1995 de 503 012 francs soit 76 683,69€.

*

Lors de l'assemblée générale du 20 avril 2007, la société HÔTEL DE PARIS proposait aux actionnaires de procéder au rachat anticipé du crédit bail et de vendre les murs de l'hôtel pour un montant de 4 300 000 € à la société FONCIERE DU TROCADERO dirigée par M. [V] et de conclure un bail de sous-location pour 12 ans moyennant un loyer de 350 000 € par an.

En juin 2007, le capital de la société PARIS BERCY est détenu à 86,85 % par la société PARIS LOUVRE dont M. [V] est le PDG.

Par assemblée générale extraordinaire, la SA PARIS BERCY a voté sa dissolution du fait de son absorption par la société COMPAGNIE FINANCIERE DU TROCADERO, société qui exploite 6 hôtels sur [Localité 8] intramuros et qui détenait notamment la filiale portant l'immobilier dans lequel était exploité l'hôtel.

La société PARIS BERCY était uniquement propriétaire du fonds de commerce de 1'hôtel situé [Adresse 9] et dans une position délicate puisqu'elle doit faire face à des charges d'exploitation plus élevées que ses produits d'exploitation. (pièce 45)

Par assemblée générale en date du 31 décembre 2012, la société LES HOTELS DE PARIS a fusionné avec la société COMPAGNIE FINANCIERE DU TROCADERO ainsi que toutes ses filiales, la nouvelle entité détenant 28 hôtels, pour la plupart murs et fonds, au sein de la capitale parisienne dont les murs et le fonds de commerce de l'hôtel PARIS BERCY.

A cette occasion, la société PARIS BERCY était valorisée à 2 504 142 €.

En rémunération de cet apport, les actionnaires de la société PARIS BERCY se sont vus attribués pour une action de PARIS BERCY 24 actions de la CIE FINANCIERE DU TROCADERO, étant précisé que ces actions ont une valeur nominale de 1€ chacune.

Aussi, pour une action de PARIS BERCY d'une valeur nominale de 39,33 e représentant un capital investi de 19 627,81 €, les investisseurs possédaient 24 actions de la CIE FINANCIERE DU TROCADERO d'une valeur nominale de 24 €.

Les 5 investisseurs sollicitaient alors du Tribunal de Commerce de Paris qu'il condamne la SA LES HOTELS DE PARIS, dont Monsieur [V] est le Président, à leur racheter leurs parts et actions et à les indemniser au motif que celle-ci aurait commis une faute à leur encontre, demandant au tribunal de :

- Dire et juger que la Société LES HOTELS DE PARIS a commis une faute constituée par un manquement à son obligation de moyen envers les investisseurs de I'hôtel PARIS BERCY,

- Dire et juger que les investisseurs ont subi un préjudice constitué par la perte de chance de pouvoir sortir de l'investissement immobilier en réalisant une plus value significative,

En conséquence,

- Condamner la Société LES HOTELS DE PARIS à racheter leurs parts et actions et à les indemniser de leur préjudice selon les valorisations fournies.

Dire et juger que le montant de ces condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- Ordonner la capitalisation des intérêts,

- Condamner la société LES HOTELS DE PARIS à payer à chacun des demandeurs la somme de 5.000 € sur le fondement de I'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Condamner la même aux entiers dépens de l'instance.

*

Par jugement en date du 13 février 2012, le Tribunal de Commerce de Paris, a :

- condamné la SA LES HOTELS DE PARIS à verser à :

o Monsieur [M] [E] la somme de 78.511,24 €,

o Monsieur [I] [Y] la somme de 39.255,62 €,

o Monsieur [G] [N] la somme de 62.809,00 €,

o Monsieur [T] [D] la somme de 78.511,24 €,

o Monsieur [K] [U] la somme de 78.511,24 €

avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation,

- débouté les parties pour toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires au présent jugement, et notamment dit Monsieur [H] [P] irrecevable en ses demandes,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné la SA LES HOTELS DE PARIS à payer à chacun des demandeurs la somme de 5.000,00 € en application de I'article 700 du code de procédure civile, et la condamne aux dépens.

Le Tribunal de Commerce a jugé que :

- la société LES HOTELS DE PARIS avait fait preuve d'une certaine déloyauté dans la dissolution de la SEP sans prévenir les demandeurs,

- la société LES HOTELS DE PARIS était toujours restée, depuis la construction d'origine jusqu'à son dénouement, pilote de l'opération, et qu'en vendant les actifs immobiliers de la société PARIS BERCY, elle avait privé cette dernière de tout espoir de dégager une plus value de cession de titres,

- la société LES HOTELS DE PARIS n'avait jamais versé aux débats l'expertise des murs de l'hôtel ayant, selon elle, déterminé le prix de vente,

- la société LES HOTELS DE PARIS, via son groupe, avait privilégié la vente des murs de l'hôtel au prix le plus bas alors que les demandeurs étaient fondés à en attendre le contraire et qu'il y a donc confusion des genres en ce que la société LES HOTELS DE PARIS n'a pas respecté l'obligation de moyen et de bonne foi souscrite à l'égard des demandeurs.

La société LES HOTELS DE PARIS a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 10 avril 2012.

M. [P] a, quant à lui, interjeté appel de ce jugement par déclaration du 13 avril 2012.

Une instance de même nature a été engagée par les investisseurs contre la société LES HOTELS DE PARIS dans une opération identique intitulée [Adresse 8], laquelle a donné lieu à un jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 13 février 2012 au terme duquel le Tribunal de Commerce a condamné la société LES HOTELS DE PARIS à payer aux investisseurs le montant de leurs investissements, outre une indemnité au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile, jugement définitif dès lors que la société LES HOTELS DE PARIS n'a pas formé de recours à son encontre.

*

Vu les conclusions des parties.

Vu le rabat de clôture, la nouvelle clôture au jour de l'audience et la poursuite, à la demande des parties, des débats sans désemparer ;

*

La société LES HOTELS DE PARIS soutient les arguments suivants :

1- Sur la recevabilité des demandes formées par Monsieur [P] :

Monsieur [P] ayant cédé les titres dont il disposait dans la SARL PARIS BERCY dont il n'est plus actionnaire et accepté sans réserve le prix d'acquisition de ses titres, s'avère irrecevable à agir à l'encontre de la SA LES HOTELS DE PARIS aux fins que celle-ci l'indemnise du préjudice constitué pour lui par la perte d'une chance de pouvoir sortir de l'investissement auquel il a souscrit. Il a en effet accepté volontairement de sortir de cette opération et la perte d'une chance de sortir a dès lors totalement disparue.

Il est donc irrecevable à agir.

2- Sur l'absence d'obligation de conseil contractée par la SA LES HOTELS DE PARIS :

L'opération de défiscalisation n'a jamais été proposée directement à des particuliers, celle-ci étant présentée à des conseillers financiers et à des conseillers en gestion de patrimoine qui eux-mêmes, après avoir analysé le produit proposé, invitaient leurs propres clients investisseurs à y adhérer. La présence de ces conseillers financiers est d'importance puisque la société LES HOTELS DE PARIS n'a pas démarché directement les intimés mais des conseillers financiers professionnels qui ont présenté l'opération à leurs clients.

3- Sur l'absence d'engagement d'achat des actions et de sortie de l'opération contractée par la SA LES HOTELS DE PARIS :

3/1- L'analyse des pièces adverses numérotées 1 et 2, constituées de la plaquette de présentation du projet PARIS BERCY, démontre qu'à aucun moment, la SA LES HOTELS DE PARIS ne s'est engagée à assurer la sortie de l'opération et à procéder à l'acquisition des titres souscrits.

A la page 14 du document de présentation, sous le paragraphe : 'Conditions de sortie de l'opération', il est indiqué la chose suivante : 'La sortie de l'opération pourrait se réaliser de deux manières :

1 °) vente des murs et du fonds de commerce suivie d'une dissolution de la SEP...

2°) cession des parts de la SEP...'

Cette partie du document avait essentiellement pour objet d'informer les investisseurs sur les modes possibles de cession de leurs participations et de leur faire part de la fiscalité appliquée suivant le mode de cession choisi.

3/2- le dénouement de l'opération n'était pas la préoccupation majeure des investisseurs au moment de leurs souscriptions et surtout elle ne constituait pas un préalable à leur décision de souscrire.

3/3- à aucun moment, ni dans le document de souscription, ni dans la plaquette de

présentation du projet, il n'a été question pour la SA LES HOTELS DE PARIS de prendre un engagement d'acquérir les titres des investisseurs.

4- Sur l'absence de faute de la SA LES HOTELS DE PARIS :

4/1- s'agissant de l'omission de prévenir les actionnaires que la dissolution de la SEP engendrait un arrêt de la déductibilité fiscale des pertes de la société :

4/1/1- la société LES HOTELS DE PARIS n'était pas le conseil financier des actionnaires qui bénéficiaient de leur propre conseil et la société LES HOTELS DE PARIS n'a pas mis en 'uvre la dissolution de la SEP à laquelle elle était totalement étrangère.

4/1/2- La dissolution de la SEP a fait l'objet d'une assemblée générale à laquelle les actionnaires ont été dûment convoqués et ont voté favorablement à l'unanimité.

4/1/3- le courrier du 25 avril 2003 du directeur administratif et financier de la SA LES HOTELS DE PARIS rappelait que la dissolution de la SEP coupait le lien fiscal qui existait entre la société exploitante de la SA PARIS BERCY et les investisseurs et que la transparence fiscale prenait fin de facto, celle-ci étant imposée au régime forfaitaire libératoire de l'impôt sur les sociétés.

4/2- S'agissant de la privation des investisseurs de tout espoir de dégager une plus-value de cession de titres par la vente des actifs immobiliers de la SARL PARIS BERCY :

4/2/1- la société LES HOTELS DE PARIS n'est à aucun moment intervenue dans la vie sociale de l'entreprise, les assemblées se tenant en totale indépendance et autonomie.

4/2/2- la vente a été opérée et votée dans le cadre d'une assemblée générale du 20 avril 2007 (pièce n° 4) à laquelle les associés qui n'avaient pas encore cédés leur titre à la SA PARIS LOUVRE, ont été dûment convoqués et ont participé.

4/2/3- les intimés sont actionnaires d'une société qui possède toujours l'actif immobilier dont ils dénoncent qu'il aurait été vendu à un tiers et à vil prix.

4/3- S'agissant de vente à bas prix des murs de l'hôtel :

Le reproche fait à la société LES HOTELS DE PARIS d'avoir vendu l'immeuble à vil prix est d'une part totalement infondé sur le plan juridique puisque la société LES HOTELS DE PARIS n'a vendu aucun immeuble et d'autre part totalement inexacte sur le plan des faits puisque la SA PARIS BERCY, avant de procéder à la cession de son immeuble, s'est entourée de toutes les précautions de façon à ne pas encourir le moindre reproche de ce chef.

- La cession s'est opérée à un prix de 4.300.000 € qui correspond à la valeur du bien.

- Une expertise a été réalisée par Monsieur [Z] [X] au mois de novembre 2006, soit quelques mois avant que la cession ne soit réalisée et cette expertise révèle une valeur vénale par taux de rendement, en prenant comme assiette de calcul la valeur locative potentielle calculée sur 4 ans, de 4.300.000 €.

5- Sur I'absence de lien de causalité entre les agissements reprochés à la 'SA LES HOTELS DE PARIS et l'existence d'un éventuel préjudice.

L'absence de progression de chiffre d'affaires de l'hôtel et partant de valorisation de l'immeuble ne sont pas le fait de la SA LES HOTELS DE PARIS mais d'une conjoncture particulièrement difficile pour ce qui concerne les hôtels de cette catégorie.

6- Sur la perte de chance :

Si les intimés invoque un préjudice tiré de ce qu'ils ne soient pas sortis de cette opération à un prix qu'ils ont évalué à partir de la plaquette de présentation qui leur avait été donnée, il n'y avait aucune obligation de sortie qui ait été contractée au terme de la plaquette d'investissement ; seuls des scenarii avait été évoqués sans que n'ait été pris un quelconque engagement à cet égard et leur évaluation de prix s'avère fantaisiste, le dossier de présentation de la société SEP PARIS BERCY et ses tableaux prévisionnels et simulations ne constituant pas un engagement de rentabilité et la plaquette le précisant clairement : 'Reconnaît avoir été informé que les coûts et les résultats prévisionnels ont été établis sur des bases réalistes mais ne sont nullement garanties, des dépenses supérieures ou des recettes inférieures aux prévisions augmenteraient les engagements financiers des

associés'.

7- Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile :

L'appelant sollicite de la cour 6.000 € chacun sur le fondement de I'article 700 du Code de Procédure Civile.

*

Messieurs [E], [Y], [N], [D] et [U] demandent la confirmation du jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 13 février 2012 en ce qu'il a retenu la faute de la société LES HOTELS DE PARIS à leur encontre constituée par son manquement à son obligation de moyen et de bonne foi. Toutefois, les concluants demandent la réformation du jugement sur le quantum des condamnations.

Par ailleurs, M. [P], qui a interjeté appel de ce jugement, demande sa réformation en ce qu'il l'a déclaré irrecevable et, à l'instar des autres investisseurs, demande la condamnation de la société LES HOTELS DE PARIS à lui payer le montant des sommes qu'il a investi initialement augmenté du manque à gagner constitué par l'absence de rentabilité de 1'investissement.

Ces intimés soutiennent les arguments suivants :

1- Sur la faute dans l'omission d'information de l'investisseur sur la nature du produit :

Ils invoquent plusieurs dispositions :

1/1- l'article L541-4 du code monétaire et financier concernant les conseillers en investissement financiers et l'article L533-11 du même code concernant les prestataires de service d'investissement dès lors que la SA LES HOTELS DE PARIS, ex société GESTIMMO FINANCES, se présente comme une société spécialisée dans le conseil en financement et investissement, encore qu'il soit écrit que la présence aux côtés de l'investisseur d'un conseiller en gestion de patrimoine ne peut exonérer la société de sa responsabilité, d'autant qu'elle est l'auteur des plaquettes de présentation du produit de défiscalisation.

- L'article L541-4 du Code Monétaire et Financier qui dispose que :

" Tout conseiller en investissement financier doit exercer son activité avec la compétence, le soin et la diligence qui s'impose au mieux des intérêts de leurs clients afin de leur proposer une offre de service adaptée et proportionnelle à leurs besoins et à leurs objectifs."

- De plus, l'article L533-11 du Code Monétaire et Financier indique, s'agissant des prestataires de service d'investissement, que :

"Lorsque ces derniers fournissent des services d'investissement et des services connexes à des clients, ils agissent de manière honnête, loyal et professionnel servant au mieux les intérêt des clients".

- L'article L550-3 du Code Monétaire et Financier qui prévoit que, préalablement à toute publicité ou à tout démarchage, un document destiné à donner toute information utile au public sur l'opération proposée, sur la personne qui en a pris l'initiative et sur le gestionnaire doit être établi dans les conditions déterminées par décret.

Lorsque l'épargnant n'a pas reçu le document d'information préalablement à la conclusion du contrat, ou lorsque les clauses de ce contrat ne sont pas conformes au contenu du document d'information, le Juge peut lui accorder des dommages et intérêts ou prononcer la résolution du contrat.

Le projet du document d'information et les projets de contrat type sont déposés auprès de l'autorité des marchés financiers qui exercent dans les conditions fixées par le présent code son contrôle auprès de l'ensemble des entreprises qui participent à l'opération et détermine si celle-ci présent le minimum de garantie exigée d'un placement destiné au public.

2- Au visa de ces articles et sous l'empire de la loi de 1983, la jurisprudence, de façon constante, considère que le conseil en investissement financier engage sa responsabilité dès lors qu'en tant que professionnel du placement, il laisse croire à "ses clients"qu'il "y a une sécurité absolue de"son investissement et de rentabilité.

La jurisprudence retient que tel est le cas lorsque la plaquette publicitaire ne fait pas apparaître clairement la nature risquée du placement et ne mentionne explicitement aucun aléa.

1/2- l'appel public à l'épargne puisque l'opération PARIS BERCY peut être assimilée à une opération de ce type dès lors que :

* les investisseurs étaient des personnes privées, épargnant, n'ayant aucun lien professionnel avec l'opération et que la société LES HOTELS DE PARIS a mis en 'uvre de nombreux moyens de communication pour attirer les capitaux.

Or, à aucun moment la société LES HOTELS DE PARIS ne justifie avoir souscrit à son obligation de déclaration auprès de la commission des opérations de Bourse et de ce seul fait, elle a engagé sa responsabilité.

* il était proposé une opération de défiscalisation dégageant des plus-values puisqu'un retour sur investissement était mis en avant, et l'opération s'apparente ainsi à un placement.

* l'absence de garantie des résultats prévisionnels annoncés ne retire pas au placement sa caractéristique puisque le retour sur investissement calculé était de 101%, outre les économies d'impôt liées à la défiscalisation et aucune de ces simulations ne mentionne la moindre réserve sur l'éventualité de ne pas sortir de l'opération à ces conditions, la plaquette de présentation consacrant plus de 4 pages sur 17 aux conditions de sortie de l'opération dont 3 uniquement consacrées à la fiscalité des plus values de cession des parts, des murs et du fonds.

* il s'agit d'un placement à moyen terme puisque la brochure porte sur une simulation d 'investissement les 6 premières années'.

2- Sur la faute dans l'omission d'information sur le contenu du produit :

Les investisseurs soulignent que la SA LES HOTELS DE PARIS a proposé aux investisseurs d'apporter leurs parts de SEP dans la SARL sans jamais les informer que la dissolution de la SEP leur interdirait de déduire les déficits de leurs impôts sur le revenu, aucune information n'ayant été donnée aux investisseurs sur les conséquences fiscales de cette opération.

3- Sur la faute de gestion :

Du fait de son engagement initial et de sa gestion complète de l'opération les investisseurs considèrent que la Société HOTELS DE PARIS était et demeure débitrice à l'égard des investisseurs d'une obligation de mettre en 'uvre les moyens nécessaires pour permettre aux investisseurs de disposer d'un produit de défiscalisation, générant la plus value promise Or, la société HOTELS DE PARIS a finalement vidé la SARL PARIS

BERCY de ses actifs tant mobilier qu'immobilier par une vente à un prix minoré ; ce qui a exclu tout espoir de dégager une plus value de cession des titres et ce, d'autant plus que l'alourdissement de ses charges du notamment à la location des murs pour l'exploitation de l'hôtel dont elle était avant propriétaire et d'un redressement fiscal, faisait chuter les résultats de la société.

4 -Sur l'appel de M.[P] :

Ce dernier considère que la circonstance qu'il ait cédé ses titres à la COMPAGNIE FINANCIÈRE DU TROCADERO n'emporte pas renonciation, par lui, à engager la responsabilité de la société LES HOTELS DE PARIS pour faute et à solliciter des dommages et intérêts en indemnisation de son préjudice car il a, comme les autres investisseurs, été trompé par les documents publicitaires, racoleurs de la société LES HOTELS DE PARIS.

5- Sur le préjudice :

Les investisseurs soulignent que pour acquérir une part de la SARL PARIS BERCY, ils ont dû débourser 19 627,18 € et ils sont aujourd'hui propriétaire de 24 actions de la CIE FINANCIÈRE DU TROCADERO d'un montant de 24 €, étant précisé que la CIE FINANCIÈRE DU TROCADERO, ainsi que toutes les sociétés fusionnées, génèrent des pertes importantes : 293K€ en 2008 et 487K€ en 2009 et que plus aucune de ces sociétés ne dispose de son actif immobilier lequel a été vendu à bas prix à la Sté FONCIERE DU TROCADERO dirigée par M. [V].

Leur préjudice est ainsi constitué non seulement par la perte de chance de pouvoir sortir du montage financier en effectuant une plus value significative tel que cela leur avait été présenté par la société LES HOTELS DE PARIS, ex GESTIMMO FINANCE, mais aussi parle fait de ne plus pouvoir défiscaliser les déficits générés par la SA PARIS BERCY.

Il se calcule au moyen des éléments suivants :

- la restitution de l'investissement effectué,

- la perte de la rentabilité promise en 1995, soit 503 012 francs pour 4 parts, soit 125 753 francs par part SEP ou 10 actions de la SA.

- 5% d'intérêt par an à compter de 2001 sur les sommes qu'ils auraient dus percevoir à cette date, ce taux d'intérêt correspondant au rendement d'un placement 'bon père de famille'.

Ils demandent donc à la cour de :

- Dire et juger que la société LES HÔTELS DE PARIS a commis une faute constituée par un manquement à son obligation de moyen envers les investisseurs de l'hôtel PARIS BERCY,

- Dire et juger que les investisseurs ont subi un préjudice constitué par la perte de chance de pouvoir sortir de l'investissement immobilier en réalisant une plus value significative,

En conséquence,

- Confirmer le jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 13 février 2012 en ce qu'il a condamné la société LES HOTELS DE PARIS à leur payer des dommages et intérêts et l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Réformer le jugement sur le quantum des dommages et intérêts,

- Condamner la société SA LES HOTELS DE PARIS à payer aux investisseurs les sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :

A titre subsidiaire,

- Dire et juger que le montant du rendement escompté est au moins égale au taux

d'intérêt légal de 2001 à 2008,

En tout état de cause,

- Dire et juger que le montant de ces condamnations portera intérêts au taux légal

à compter,

- Ordonner la capitalisation des intérêts,

- Condamner la société LES HOTELS DE PARIS à payer à chacun des demandeurs la somme de 7 000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais d'appel,

- Condamner la même aux entiers dépens de l'instance.

*

SUR CE,

Sur le cadre juridique :

La cour constate que :

1- le montage de l'opération de défiscalisation mise en place étant le suivant :

M. [V] créait une société en participation (SEP) et une SARL.

La SEP construisait l'hôtel et était maître d'ouvrage des travaux ; l'opération étant financée par un emprunt.

La SARL (qui deviendra SA) était gérante de la SEP.

Les investisseurs devaient acheter des parts de la SEP - et donc devenir propriétaires indivis des murs de l'hôtel construit et du fonds de commerce - de la SARL ; ensuite ils réalisaient un déficit déductible de leur revenu puis devaient soit, revendre les parts de l'hôtel, soit vendre le bien immobilier et dissoudre la SEP avec une plus value.

La société s'encageait à assurer : 'L'ingénierie complète de l'opération [Localité 8] BERCY : construction, financement, commercialisation et gestion.

2- le montage financier de l'opération était le suivant :

Chaque investisseur devait payer a minima un montant de 128 750 [Localité 6] (19 627,81€) se décomposant comme suit :

- 125 000 francs pour acquérir 1 part de la société en participation,

- 1 250 francs pour acquérir 10 parts de la SARL,

- 2 500 francs au titre d'un apport en compte courant.

Le capital de la SEP BERCY devait être constitué de 150 parts de 125 000 francs, soit un total de 18 750 francs (2 858 419,07€).

Selon le projet, le prix de revient de l'hôtel devait être de 37 280 000 francs (dont

acquisition des murs pour un prix de 27 155 O00 francs (4 139 753€) avec un besoin

en fond de roulement de 1 200 000 francs (182 938,82€), soit un coût global de 40 000 000 francs financé par :

- soit un crédit hypothécaire, soit un crédit bail pour un montant de 21 250 000 francs,

- des fonds propres pour 18 750 000 francs (correspondant au montant des parts souscrites par les investisseurs).

3 - le montage commercial de l'opération était le suivant :

La société SA LES HOTELS DE PARIS ne proposait pas directement à des particuliers l'opération, celle-ci étant présentée à des conseillers financiers et à des conseillers en gestion de patrimoine qui eux-mêmes, après avoir analysé le produit proposé, invitaient leurs propres clients investisseurs à y adhérer.

Les arguments de vente de l'opération étaient :

- soit une vente des murs et du fonds de commerce suivi d'une dissolution de la SEP,

- soit une cession des parts de la SEP par les investisseurs.

Et selon un courrier de la société GESTIMMO FINANCE du 19 décembre 1995, l'étude prévisionnelle transmise aux investisseurs était établie sur une base réaliste de 45% de taux d'occupation en première année d'exploitation.

Enfin, la société GESTIMMO FINANCE indiquait, dans la présentation du projet que : "Ce type d'investissement reste donc bien l'un des placements les plus sûrs et les plus performants pour l'investisseur privé.

La cour constate ainsi que l'investissement proposé par Gestimmo Finance ne rentrent pas dans la définition des instruments financiers, des titres de capital ou de créances, des placements collectifs et des produits d'épargne mais dans les services d'investissements.

La cour constate encore que :

1- la Société GESTIMMO FINANCE est une société spécialisée dans le conseil en financement et investissement. Elle a absorbé la société HOTELS DE PARIS et pris sa dénomination.

Elle ne rentrerait donc que depuis l'entrée en vigueur de loi de sécurité financière n° 2003-706 du 1er août 2003 dans la catégorie des conseils en investissement financier de l'article L 541-1 du code monétaire et financier qui :

- interdit notamment au CIF de recevoir de ses clients des fonds autres que ceux destinés à la rémunération de son activité de conseil en investissements financiers (article L. 541-6 du code monétaire et financier).

- soumet le CIF à des règles de bonne conduite (article L541-8-1) fixées par la loi n° 2010 - 1249 du 22 octobre 2010 et notamment se comporter avec loyauté et agir avec équité au mieux des intérêts de leurs clients - s'enquérir auprès de leurs clients, avant de formuler un conseil, de leurs connaissances, expériences et objectifs d'investissements de manière à pourvoir les opérations adaptées - communiquer aux clients la nature juridique et l'étendue des relations entretenues avec les promoteurs de produits proposés.

2 - La société GESTIMMO FINANCES n'était pas soumise aux dispositions de l'article L.553-11 du code monétaire et financier en ce qu'il concerne les prestataires de services d'investissement et qu'il eut fallu que la société fut alors CIF.

3- il n'est pas possible de parler d'offre au public d'un placement financier relevant de la notion d'appel public à l'épargne dès lors que le régime défini par les articles L 411-1 du code monétaire et financier provient de l'ordonnance 2009- 80 du 22 janvier 2009.

Il convient d'écarter l'application à la cause des dispositions du code monétaire et financier et de s'en tenir au contenu des obligations souscrites telles qu'elles résultent des conventions passées.

Sur la faute :

La cour observe à cet égard que même si une opération de défiscalisation suppose un montage plus ou moins complexe, comportant nécessairement un aléa, et que les investisseurs ont effectivement bénéficié d'une défiscalisation partielle de leurs revenus dans le cadre du montage en cause, il n'en ressort pas moins des pièces produites et de l'exposé fait ci-devant que :

1 - le but de la société GESTIMMO FINANCE devenue Hôtels de Paris a consisté de fait à faire financer la construction d'un hôtel par le biais de la constitution d'une société d'investissement constitué par des personnes privées attirées dans l'opération par une offre de défiscalisation et une rentabilité du placement effectué.

Il est en effet patent, au regard des documents que la société Hôtel de Paris a diffusé par l'intermédiaire de son réseau commercial, qu'au-delà de l'obligation de mise en oeuvre d'une opération de défiscalisation qui constituait en apparence le but poursuivi par GESTIMMO FINANCES avant fusion, celle-ci s'est engagée, sous la dénomination Les Hôtels de Paris, à assurer la gestion de la structure porteuse des investissements défiscalisés et la rentabilité de l'investissement pour les investisseurs, les deux étant 'mixés' par la fusion.

2- la société GESTIMMO FINANCE devenue Les Hôtels de Paris a organisé le montage de façon à avoir et conserver le contrôle des entités mises en place dans le but de satisfaire d'abord les seuls besoins de leur cause et accessoirement celui de tiers qu'ils s'étaient liés et leur avaient prêté leurs concours, autrement dit les investisseurs, comme cela ressort des éléments suivants :

les contractants ont entendu leur conférer une interdépendance.

3- la recherche prioritaire de son intérêt par la société GESTIMMO FINANCES / Les Hôtels de Paris se déduit des opérations juridiques et financières successivement menées dont le résultat, sous couvert de l'opération de défiscalisation, a permis de faire rentrer dans le patrimoine de Monsieur [V], via la société Compagnie Financière du Trocadéro l'immeuble hôtel financé par les investisseurs pour une valeur inférieure à la valeur de marché tandis que le profit des investisseurs, au-delà des économies d'impôts, se limitent à quelques milliers d'euros.

Il est en effet incontestable que la société Les HOTELS DE PARIS a finalement vidé la SARL PARIS BERCY de ses actifs tant mobilier qu'immobilier, ce qui a exclu tout espoir de dégager une plus value de cession des titres alors que le mode annoncé dans le prospectus GESTIMMO FINANCES de sortie de l'opération était soit une vente des murs et du fonds de commerce suivi d'une dissolution de la SEP, soit une cession des parts de la SEP par les investisseurs, opérations devenues non rentable au regard de l'alourdissement des charges de la SARL à raison de la location des murs pour l'exploitation de l'hôtel dont elle était avant propriétaire et d'un redressement fiscal faisant chuter les résultats de la société.

Et s'il ne saurait y avoir eu obligation de résultat de ce chef, il n'en demeure pas moins un choix clair de faire porter le risque sur l'investisseur.

- l'examen des faits montre la recherche d'une forme de clandestinité des opérations réalisées par le dirigeant réel, Monsieur [V], pour son propre compte ou celui des entités qu'ils contrôlent de façon exclusive, en ce que les opérations s'effectuaient par interposition de personnes et étaient soumises à l'aval des assemblées des associés plus à titre d'information qu'à titre d'autorisation au regard de la date des assemblées et du rôle de conseil et mandataire joué depuis toujours par la société Hôtel de PARIS.

A titre d'exemple, le procès-verbal du 20 avril 2007 de l'assemblée générale portant sur le rachat anticipé du crédit bail par la société FONCIERE DU TROCADERO montre la présence de 1/5° des titulaires d'actions et droits de vote (soit la SA PARIS LOUVRE et la Compagnie FINANCIERE DU TROCADERO lesquels appartiennent appartenant au même groupe que la bénéficiaire de l'opération).

Il ressort ainsi de ces éléments que la société GESTIMMO FINANCES / LES HOTELS DE PARIS ont fait preuve d'une réticence dolosive dans la conclusions du contrat d'investissement dans la SEP et la SARL PARIS BERCY aux dépens des investisseurs et dans l'exécution des engagements pris.

* la société GESTIMMO FINANCES / LES HOTELS DE PARIS est enfin restée sciemment silencieuse sur le but réel de l'opération laissant croire à un produit de pure défiscalisation, reposant sur un investissement non spéculatif alors qu'il s'agissait d'attirer des capitaux via l'aspect défiscalisation, non pour faire des investisseurs des partenaires financiers mais des prêteurs de deniers à risque, lesquels s'ils avaient connu la chose, auraient été dissuadés de s'engager, ce qui aurait du résulter d'une information personnalisée laquelle ne saurait être constituée par la remise d'une simple notice générale, comme en l'espèce, insistant sur la rentabilité du capital investi alors qu'il s'agissait dans les faits d'un simple objectif aléatoire, avait ce qui donne même un caractère trompeur à la plaquette remise.

* elle a conduit l'opération d'investissement à son propre avantage en faisant même perdre aux investisseurs l'avantage financier attendu, étant relevé qu'alors que le chiffre d'affaires est en augmentation, l'exercice de La SARL PARIS BERCY clos le 31 décembre 2006 faisait ressortir une perte de 156 256 €, ainsi que l'avantage fiscal pourtant mis en avant.

Sur la recevabilité des demandes de Monsieur [P] :

Dès lors que Monsieur [P] a accepté volontairement de sortir de l'opération et cédé les titres dont il disposait dans la SARL PARIS BERCY à la COMPAGNIE FINANCIÈRE DU TROCADERO, acceptant sans réserve le prix d'acquisition de ses titres, même si cette cession est intervenue plus de 10 ans après les faits retenus comme constituant la faute susceptible d'être indemnisée, il y a lieu de confirmer le jugement ayant déclaré ses demandes irrecevables. .

Sur la réparation du préjudice :

Les intimés demandent à la cour de dire que la société LES HÔTELS DE PARIS a commis une faute constituée par un manquement à son obligation de moyen envers les investisseurs de l'hôtel PARIS BERCY, qu'ils ont subi un préjudice constitué par la perte de chance de pouvoir sortir de l'investissement immobilier en réalisant une plus value significative.

La cour observe que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté mais constate ne pas être saisi d'une demande de ce type. Etant saisie d'un manquement à une obligation d'information loyale, elle allouera des dommages- intérêts aux intimés en réparation de leur préjudice, conformément à la demande faite.

Elle retiendra à ce titre les montants fixés par les premiers juges, considérant qu'il ne saurait être question d'obligation de résultat ou même de moyen en l'occurrence mais d'exécution de bonne foi des conventions par les contractants.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement en date du 13 février 2012 rendu par le tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions par substitution de motifs.

Condamne la SA LES HOTELS DE PARIS à payer à M. [M] [E], M. [I] [Y], M. [G] [N], M. [T] [D], Monsieur [K] [U], la somme de 7000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Déboute les parties pour toutes leurs autres demandes plus amples ou contraires au présent arrêt.

Condamne la SA LES HOTELS DE PARIS aux dépens, lesquels seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

B. REITZER F. FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 12/06662
Date de la décision : 30/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°12/06662 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-30;12.06662 ?
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