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20/06/2013 | FRANCE | N°12/14228

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 20 juin 2013, 12/14228


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 20 JUIN 2013



(n° 434, 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/14228



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Juillet 2012 -Tribunal de Commerce de LILLE





APPELANTES



SAS CARREFOUR HYPERMARCHES

agissant poursuites et diligences de son président en exercice domicilié en cett

e qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 2]



SAS CARCOOP FRANCE

agissant poursuites et diligences de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]
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Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 20 JUIN 2013

(n° 434, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/14228

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Juillet 2012 -Tribunal de Commerce de LILLE

APPELANTES

SAS CARREFOUR HYPERMARCHES

agissant poursuites et diligences de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 2]

SAS CARCOOP FRANCE

agissant poursuites et diligences de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentées par la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE (Me Luca DE MARIA avocat au barreau de PARIS, toque : L0018)

Assistées de Me Caroline DEMEYERE (avocat au barreau de Lille)

INTIMEE

SAS SODIDOUAI SAS

inscrite au RCS de DOUAI sous le n° 520 323 668. Représentée par son Président en exercice et tous représentants légaux, domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Laurence TAZE BERNARD de la SCP IFL Avocats (avocat au barreau de PARIS, toque : P0042)

Assistée de Me François REYE (avocat au barreau de Poitiers)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Mai 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Evelyne LOUYS, Présidente de chambre

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseillère

Mme Maryse LESAULT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Evelyne LOUYS, président et par Mme Sonia DAIRAIN, greffier.

FAITS CONSTANTS':

La SAS SODIDOUAI exploite à DOUAI (FLERS EN ESCREBIEUX) un hypermarché à l'enseigne E. LECLERC et, conformément à un usage de la profession, fait réaliser par ses salariés des relevés des prix pratiqués par les enseignes concurrentes.

Ces prix sont relevés au moyen d'un appareil permettant la lecture optique des codes-barres des produits concernés.

La SAS CARREFOUR HYPERMARCHES (CARREFOUR) et/ou la SAS CARCOOP France (CARCOOP) s'opposent à toute démarche de relevés de prix dans leurs surfaces commerciales.

Par actes du 30 avril 2012 et du 19 juin 2012, la société SODIDOUAI, considérant que pour que les prix soient fixés par le libre jeu du marché, il fallait que les acteurs économiques soient informés des prix pratiqués par la concurrence, a assigné la société CARREFOUR et la société CARCOOP, sur le fondement de l'article L. 410-2 du code de commerce, aux fins de les voir condamner à laisser pratiquer des relevés de prix par les préposés de la société SODIDOUAI et par le moyen d'un lecteur optique de codes-barres, et ce sous astreinte.

Par ordonnance contradictoire du 12 juillet 2012, le juge des référés du tribunal de commerce de Lille':

- a ordonné la jonction des affaires enrôlées sous le n° 2012002946 (SODIDOUAI c/ CARREFOUR HYPERMARCHES) et n° 2012004489 (SODIDOUAI c/ CARCOOP France),

- a débouté la société CARREFOUR et la société CARCOOP de leur demande de sursis à statuer,

- a condamné la société CARCOOP solidairement avec la société CARREFOUR à laisser pratiquer des relevés de prix par les préposés de la société SODIDOUAI et par le moyen d'un lecteur optique de codes-barres et ce sous astreinte de 5'000 euros par infraction constatée,

- s'est réservé la liquidation éventuelle de ladite astreinte,

- a condamné solidairement la société CARREFOUR et la société CARCOOP à payer à la société SODIDOUAI la somme de 6'000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers frais et dépens de l'instance.

Les sociétés CARREFOUR et CARCOOP ont interjeté appel de cette décision le 25 juillet 2012.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 mai 2013.

PRETENTIONS ET MOYENS DES SOCIETES CARREFOUR ET CARCOOP':

Par dernières conclusions du 13 mai 2013, auxquelles il convient de se reporter, la société CARREFOUR et la société CARCOOP font valoir':

In limine litis, sur le sursis à statuer,

- qu'elles demandent le sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt de la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) saisie le 19 mars 2012,

- que la décision à rendre par ladite Cour aura nécessairement une influence sur le présent litige dès lors que le recours porté devant elle porte sur le droit même revendiqué par la société SODIDOUAI,

- qu'à l'appui de sa requête devant la CEDH, la société CARREFOUR invoque une violation du droit de propriété, et que l'ingérence consacrée par la Cour de cassation, dans l'arrêt du 4 octobre 2011, n'est pas intervenue dans les conditions prévues par la loi et ne répond pas aux critères de proportionnalités tels qu'exigés par les dispositions de l'article 1er du protocole additionnel n°1,

- que la société CARREFOUR se prévaut également, devant la CEDH, du droit au respect du domicile, droit fondamental en raison duquel un huissier, pourtant habilité à dresser constat, ne peut procéder, dans un lieu privé, qu'avec l'assentiment du propriétaire ou sur autorisation préalable du juge, afin de préconstituer une preuve en application de l'article 145 du code de procédure civile, et que dans le cas contraire, l'huissier, et donc a fortiori une personne non habilitée à dresser constat, se rendrait coupable du délit de violation de domicile,

- que la société SODIDOUAI n'a jamais justifié d'une quelconque pratique anti-concurrentielle à l'encontre de la société CARREFOUR ou CARCOOP,

- que la règle n'est pas définitivement posée par la Cour de cassation en droit interne français, puisqu'elle serait susceptible d'être modifiée à la suite d'une décision de la Cour Européenne des Droits de l'Homme,

- qu'elles rappellent la teneur des moyens soulevés par la société CARREFOUR devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme, à savoir le droit de propriété et le droit au respect du domicile,

En toute hypothèse, la Cour ne pourra que dire n'y avoir lieu à référé et infirmer de ce chef l'ordonnance entreprise,

- que les demandes à l'égard de la société CARREFOUR sont à l'évidence irrecevables, en application des articles 32 et 122 du code de procédure civile, le magasin de CARREFOUR de FLERS-EN-ESCREBIEUX étant exploité par la société CARCOOP et non par la société CARREFOUR, qui n'a donc pas qualité pour déférer aux demandes de la société SODIDOUAI,

- qu'en toute hypothèse, les demandes sont mal fondées,

- qu'il y a absence d'urgence,

- qu'il existe une contestation sérieuse au fond et que le trouble manifestement illicite n'est pas démontré,

- que la société SODIDOUAI ne peut non plus se fonder sur la notion d'usage, un tel usage de relevés de prix par le personnel d'une enseigne concurrente, étant et ayant toujours été contesté, pour les raisons qu'elles exposent,

- qu'il est évident que l'enseigne LECLERC refusant elle-même l'accès de sociétés panélistes indépendantes aux fins de relevés de prix, elle ne peut revendiquer un quelconque usage,

- que la Cour de cassation n'a pas tranché la question de l'existence d'un usage.

Elles demandent à la Cour':

In limine litis,

- de surseoir à statuer dans l'attente de la décision à rendre par la Cour Européenne des Droits de l'Homme sur la requête déposée par la société CARREFOUR en date du 19 mars 2012,

- d'infirmer de ce chef l'ordonnance entreprise en ce qu'elle les a déboutées de toute demande de ce chef,

- de débouter la société SODIDOUAI de toute demande contraire,

En toute hypothèse,

- de dire manifestement irrecevables les prétentions de la société SODIDOUAI à l'égard de la société CARREFOUR, laquelle n'exploite pas le magasin de FLERS EN ESCREBIEUX,

- de constater en toute hypothèse l'absence d'urgence et l'absence de trouble manifestement illicite,

- de donner acte à la société CARCOOP de son accord pour laisser pratiquer des relevés de prix dans son point de vente par les préposés de la société SODIDOUAI moyennant le choix d'un jour précis et ce, conformément à l'arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 4 octobre 2011,

- de dire en conséquence n'y avoir lieu à référé,

- d'infirmer de ce chef l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

- de débouter la société SODIDOUAI de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner la société SODIDOUAI au paiement d'une somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

PRETENTIONS ET MOYENS DE LA SOCIETE SODIDOUAI':

Par dernières conclusions signifiées le 19 avril 2013, auxquelles il convient de se reporter, celles transmises par RPVA le 22 mai 2013 l'ayant été après l'ordonnance de clôture de sorte qu'elles sont irrecevables, la société SODIDOUAI fait valoir':

- que les décisions de justice s'enchaînent pour reconnaître l'existence d'un usage du relevé de prix chez un concurrent, que la Cour de cassation a, dans un arrêt du 4 octobre 2011, consacré la licéité de cette pratique, laquelle est le corollaire de la libre détermination des prix par le jeu de la concurrence énoncé à l'article L. 410-2 du code de commerce,

- que, sur le sursis à statuer, la demande tendant à cette fin doit être rejetée, car outre par l'arrêt précité, la règle est définitivement posée en droit interne par la Cour de cassation, qui a dit, par arrêt du 13 mars 2012, n'y avoir lieu de renvoyer au Conseil Constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité posée par la société CARREFOUR, demandant si les relevés de prix ne portaient pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété, par rapport à l'objectif poursuivi, qu'il n'existe, en effet, aucune disproportion entre les intérêts en présence,

- que l'atteinte alléguée par la société CARREFOUR à son droit de propriété est toute relative, et qu'en outre, la CEDH n'exerce son contrôle en matière «'d'utilité publique'» et donc a fortiori d'ordre public qu'en ce qui concerne l'existence d'une base raisonnable quant au jugement à partir duquel l'Etat a défini la situation «'d'utilité publique'» et la législation y afférente,

- qu' il n'existe aucune atteinte disproportionnée au droit à la protection du domicile, car il ne s'agit pas de l'obtention d'une preuve susceptible d'être produite en justice, et que les décisions fondées sur la violation de l'article 8 de la Convention portaient sur les locaux administratifs de sociétés et non sur des magasins ouverts au public,

- qu'elle démontre l'existence d'un usage commercial, que de nombreuses juridictions ont retenue, et qui résulte de la cassation, sans renvoi, par l'arrêt du 4 octobre 2011, le jugement de première instance ayant retenu cet usage,

- que sa demande est, au principal, fondée sur l'article L. 4010-2 du code de commerce, que la Cour de cassation a, le 4 octobre 2011, consacré un droit d'accès direct aux prix de la concurrence, que ne respecte pas le recours préconisé par les sociétés CARREFOUR-CARCOOP aux sociétés panélistes,

- qu'il y a absence de cause justificative au refus des sociétés CARREFOUR-CARCOOP,

- qu'elle formule des demandes indemnitaires car elle a subi un préjudice du fait de l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de fixer ses prix en connaissance de cause de ceux pratiqués par les sociétés CARREFOUR-CARCOOP,

- que, à propos de la mise en cause conjointe des sociétés CARREFOUR et CARCOOP, ce n'est que deux mois après l'assignation du 30 avril 2012 que la société CARREFOUR a soutenu ne pas être l'exploitante de l'hypermarché de FLERS, mais que la consultation du site internet de la société CARREFOUR ne mentionne aucunement ce fait, qu'il est constant que la société CARREFOUR constitue la tête de réseau du Groupe est donc parfaitement justiciable des consignes qu'elle donne,

- que, à propos de la demande reconventionnelle de «'la société CARREFOUR-CARCOOP'», elle estime qu'en matière de concurrence, l'égalité des armes est de mise et que c'est en conséquence à bon droit, face aux manquements de «'CARREFOUR'», que les centres E. LECLERC lui interdisent l'accès à leurs magasins en vue de relevés de prix par CARREFOUR ou IRI, qu'en outre, la demande des appelantes portant sur des relevés de prix effectués par la société IRI doit être rejetée car «'nul ne plaide par procureur'»,

- que, à propos de la compétence du juge des référés, le texte applicable est l'article 873 du code de procédure civile, étant précisé que l'urgence n'est pas une condition du «'référé cessation d'un trouble manifestement illicite'».

Elle demande à la Cour':

- de déclarer les sociétés CARREFOUR et CARCOOP mal fondées en leur appel, les en débouter,

- de confirmer l'ordonnance dont appel et ce faisant,

- d'écarter toute demande de sursis à statuer,

- d'écarter toute exception d'incompétence,

- de condamner les sociétés CARREFOUR et CARCOOP à laisser pratiquer des relevés de prix par ses préposés et par le moyen d'un lecteur optique codes-barres et ce sous astreinte de 5'000 euros par infractions constatées,

Alternativement ou cumulativement, vu l'usage constant relatif aux relevés de prix chez les concurrents,

- de condamner les sociétés CARREFOUR et CARCOOP à laisser pratiquer des relevés de prix par ses préposés et par le moyen d'un lecteur optique de codes-barres et ce sous astreinte de 5'000 euros par infractions constatées,

Dans tous les cas y ajoutant,

- de déclarer irrecevable et subsidiairement mal fondée la demande des sociétés CARREFOUR et CARCOOP tendant à lui faire ordonner de supporter les relevés de prix que voudrait faire la société IRI,

- de condamner solidairement les sociétés CARREFOUR et CARCOOP à lui verser à titre provisionnel la somme de 50'000 euros à titre indemnitaire,

- de condamner solidairement les sociétés CARREFOUR et CARCOOP à lui verser la somme de 15'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner solidairement les sociétés CARREFOUR et CARCOOP aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera poursuivi conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

SUR QUOI, LA COUR,

Sur le sursis à statuer':

Considérant que les appelantes demandent de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), au motif que la société SODIDOUAI fonde ses demandes sur l'arrêt de la Cour de cassation du 4 octobre 2011, contre lequel la société CARREFOUR a formé un recours devant la CEDH';

Que les sociétés CARREFOUR et CARCOOP ne peuvent méconnaître le fait que toutes les voies de recours de droit interne à l'encontre de l'arrêt du 4 octobre 2011'ont été épuisées ; que par ailleurs, la Cour de cassation, dans un arrêt du 13 mars 2012, a dit n'y avoir lieu de transmettre au Conseil Constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité déposée par la société CARREFOUR le 20 décembre 2011';

Considérant que si l'on ne peut considérer que cette saisine serait dans tous les cas sans incidence sur la question de la licéité de la pratique des relevés de prix par les salariés d'un concurrent, pour autant, il n'y a lieu de surseoir à statuer';

Considérant, en effet, que l'article L. 410-2 du code de commerce, interprété comme commandant, pour la fixation des prix par le jeu de la libre concurrence, que les concurrents puissent comparer leurs prix et, en conséquence, puissent en faire pratiquer des relevés par leurs propres salariés dans leurs magasins respectifs, ne porte manifestement pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété, par rapport à l'objectif poursuivi';

Que s'agissant du droit à la protection du domicile, l'argument présenté par la société CARREFOUR à la CEDH repose sur une définition extensive du droit au respect du domicile des personnes morales, lequel concerne au premier chef les locaux administratifs des sociétés ou tout autre lieu dans lequel des documents de nature professionnelle pourraient être saisis'; que les actions de relevés de prix sont réalisées dans des lieux librement accessibles et ne peuvent être assimilées à des perquisitions requérant une protection renforcée';

Qu'il s'ensuit que les moyens soumis à la CEDH par la société CARREFOUR, tirés du droit de propriété et du droit à la protection du domicile, n'apparaissent pas suffisamment sérieux pour faire obstacle à un examen immédiat du trouble manifestement illicite invoqué par la société SAINT MALO';

Que la demande de sursis à statuer sera rejetée';

Sur la recevabilité des demandes, en tant que dirigées contre la société CARREFOUR':

Considérant que si la société CARREFOUR soutient que le magasin litigieux, situé à [Localité 5], est exploité par la seule société CARCOOP, force est de constater que la consultation du site internet «'Carrefour'» («'localisation magasin et itinéraire'»), sur la place de [Localité 3], fait apparaître un seul magasin, «'Carrefour [Localité 4]'», à [Localité 6]), sans aucune mention de la société CARCOOP, créant de ce fait une apparence en laissant croire que ce magasin est exploité par elle';

Que les deux sociétés, CARREFOUR et CARCOOP, ont leur siège social à la même adresse, [Adresse 1]';

Que de plus, la société CARREFOUR développe, pour le compte de la société CARCOOP, la même argumentation que celle qu'elle a soumise aux différentes juridictions, dont elle cite la jurisprudence, lorsqu'elle exploite directement ses magasins, et dont elle a, seule, saisi la Cour Européenne des Droits de l'Homme, à l'exclusion de la société CARCOOP';

Qu'elle constitue, ainsi, manifestement la tête de réseau du groupe Carrefour, qui donne aux sociétés du groupe les consignes en matière de relevés de prix par les concurrents, ce dont elle doit répondre, en même temps que les sociétés directement exploitantes';

Que les demandes, en tant que dirigées contre la société CARREFOUR, sont, par conséquent, recevables';

Sur la demande de relevés de prix':

Considérant que selon l'article 873, alinéa 1er, du code de procédure civile, le juge des référés peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite';

Que ce texte n'impose ni le constat de l'urgence ni celui de l'absence de contestation sérieuse';

Qu'il ne s'agit pas d'une question de compétence du juge des référés, mais de ses pouvoirs'; qu'il n'y a donc lieu de statuer sur une «'exception d'incompétence'»';

Considérant que selon l'article L. 410-2 du code de commerce, «'sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les prix des biens, produits et services relevant antérieurement au 1er janvier 1987 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 sont librement déterminés par le jeu de la concurrence.'»';

Que la fixation des prix par le libre jeu de la concurrence commande 'et ce sans qu'il y ait lieu de constater l'existence d'un usage- que les concurrents puissent comparer leurs prix et en conséquence en faire pratiquer des relevés par leurs salariés dans leurs magasins respectifs, ces relevés ne portant pas une atteinte disproportionnée, par rapport à l'objectif de police économique poursuivi, au droit de propriété et au droit à la protection du domicile, ainsi qu'il a été dit';

Que le droit de tout concurrent de comparer les prix par des relevés de prix pratiqués par ses préposés ne saurait être restreint «'au choix d'un jour précis'» par le distributeur concurrent';

Que l'opposition, non contestée, par la société CARREFOUR et par la société CARCOOP aux relevés de prix qu'entend voir pratiquer la société SODIDOUAI constitue un trouble manifestement illicite';

Que l'ordonnance entreprise, qui a ordonné les mesures propres à faire cesser ce trouble, à l'encontre des deux sociétés, CARREFOUR et CARCOOP, sera confirmée'en toutes ses dispositions, sauf à dire que les condamnations sont prononcées in solidum et non solidairement ;

Sur les autres demandes':

Considérant que les sociétés CARREFOUR et CARCOOP ne demandent pas, dans le dispositif de leurs conclusions, qui seul lie la Cour, «'d'ordonner à la société SODIDOUAI de supporter les relevés de prix que voudrait faire la société IRI'»'; qu'il n'y a lieu de statuer sur ce point';

Considérant, sur la demande reconventionnelle formée par la société SODIDOUAI, tendant à l'octroi d'une provision, que le préjudice résultant pour elle de l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de fixer ses prix en connaissance de cause de ceux pratiqués par son concurrent, est incontestable'; qu'il convient de lui allouer à ce titre une provision de 10'000 euros à titre de dommages et intérêts ;

PAR CES MOTIFS'

REJETTE la demande de sursis à statuer,

DÉCLARE recevables les demandes en tant que dirigées contre la SAS CARREFOUR HYPERMARCHES,

CONFIRME l'ordonnance entreprise, sauf à préciser que les condamnations de la SAS CARREFOUR HYPERMARCHES et de la SAS CARCOOP France sont prononcées in solidum et non solidairement,

Y ajoutant,

CONDAMNE IN SOLIDUM la SAS CARREFOUR HYPERMARCHES et de la SAS CARCOOP France à payer à la SAS SODIDOUAI la somme provisionnelle de 10'000 euros à titre de dommages et intérêts,

CONDAMNE IN SOLIDUM la SAS CARREFOUR HYPERMARCHES et de la SAS CARCOOP France à payer à la SAS SODIDOUAI la somme de 15'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE IN SOLIDUM la SAS CARREFOUR HYPERMARCHES et de la SAS CARCOOP France aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 12/14228
Date de la décision : 20/06/2013

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°12/14228 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-06-20;12.14228 ?
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