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04/03/2014 | FRANCE | N°10/08679

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 04 mars 2014, 10/08679


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 04 Mars 2014

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/08679



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Septembre 2010 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section encadrement RG n° 03/14740





APPELANT

Monsieur [H] [J]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne

assisté de Me Eli

sa CACHEUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C1726







INTIMÉE

Association CROIX ROUGE FRANÇAISE

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Marc FORIN, avocat au barreau de PA...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 04 Mars 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/08679

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Septembre 2010 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section encadrement RG n° 03/14740

APPELANT

Monsieur [H] [J]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne

assisté de Me Elisa CACHEUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C1726

INTIMÉE

Association CROIX ROUGE FRANÇAISE

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Marc FORIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0773

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Décembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claudine PORCHER, présidente et Madame Marie-Aleth TRAPET conseiller, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Claudine PORCHER, présidente

Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Monsieur Guy POÎLANE, conseiller

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claudine PORCHER, présidente et par Madame Caroline CHAKELIAN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [H] [J] a été engagé à compter du 22 octobre 1992 en qualité de médecin à temps partiel pour effectuer des gardes de nuit et week-end à l'hôpital des [1] pour le compte de la CROIX ROUGE FRANCAISE.

Le 17 novembre 2003, il a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS d'une demande tendant à obtenir la régularisation de sa situation quant au respect des dispositions de la convention collective de la Croix-rouge relatives au calcul de l'ancienneté et du salaire et faire injonction à l'employeur de se conformer au contrat de travail.

Le 3 décembre 2003, Monsieur [H] [J] a été élu délégué du personnel.

Le 4 décembre 2003, il a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement avec mise à pied à titre conservatoire fixé au 12 décembre auquel il ne s'est pas présenté.

Par lettre recommandée datée du 18 décembre 2003, présentée le 22 décembre et distribuée à son destinataire le 5 janvier 2004, la CROIX ROUGE FRANCAISE a notifié à Monsieur [H] [J] une sanction de mise à pied correspondant aux quatre nuits restant à effectuer sur décembre 2003, motivée par une intervention intempestive auprès du personnel infirmier le 3 décembre 2003 et par un comportement au sein de l'établissement rendant impossible une organisation rationnelle et fiable des gardes des réanimateurs.

Par lettre du 6 janvier 2004, Monsieur [H] [J] a indiqué à son employeur que l'attitude de la direction du centre chirurgical à son égard rendait impossible la poursuite de son activité au sein de l'établissement et l'a informé de son refus de travailler suivant le nouveau contrat imposé par la direction tout en contestant par ailleurs la sanction infligée.

Le 23 janvier 2004, la CROIX ROUGE FRANCAISE a convoqué Monsieur [H] [J] à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé au 30 janvier 2004.

Le 12 février 2004, le comité d'établissement a émis un avis favorable au licenciement de Monsieur [J] envisagé par la CROIX ROUGE FRANCAISE.

Le 16 février 2004, la CROIX ROUGE FRANCAISE a saisi l'inspection du travail d'une demande d'autorisation du licenciement de Monsieur [H] [J].

Par lettre du 24 mars 2004, Monsieur [H] [J] a notifié à son employeur la rupture de son contrat de travail aux torts et griefs de ce dernier.

Par décision du 5 avril 2004, l'inspecteur du travail s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande d'autorisation de licenciement au motif de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié du 23 mars 2004.

Cette décision a été annulée le 6 octobre 2004 par le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale qui a accordé l'autorisation de licencier Monsieur [H] [J].

Le 13 octobre 2004, la CROIX ROUGE FRANCAISE a notifié à Monsieur [H] [J] son licenciement pour faute grave.

Par jugement du 23 novembre 2005, confirmé par la cour administrative d'appel le 24 septembre 2007, le tribunal administratif de PARIS a rejeté la requête en annulation de la décision du 6 octobre 2004 présentée par Monsieur [J].

Le 24 novembre 2008, le Conseil d'État a annulé ces décisions au motif que si la lettre du 6 janvier 2004 ne prenait pas acte explicitement, Monsieur [J] avait exprimé son refus de travailler aux nouvelles conditions et constaté la rupture de son contrat de travail par une nouvelle lettre du 23 mars 2004.

Ensuite de cet arrêt, le conseil de prud'hommes de PARIS, a, par jugement rendu par le juge départiteur le 1er septembre 2010, annulé la sanction de mise à pied du 18 décembre 2003 et dit n'y avoir lieu à imputation de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.

Il a condamné la CROIX ROUGE FRANCAISE à payer à Monsieur [H] [J], avec intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2003 :

951,32 € de rappel de salaire et 95,13 € de congés payés afférents,

33 041,63 € de rappel de salaire en application des barèmes et échelons d'ancienneté prévus par la convention collective de la Croix Rouge Française et 3304 € de congés payés afférents.

Il a également condamné la CROIX ROUGE FRANCAISE aux dépens et à payer à Monsieur [H] [J] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 1er octobre 2010, Monsieur [H] [J] a interjeté appel de cette décision.

Il reproche à son employeur de profondes modifications de son contrat de travail concernant la temps de travail et l'organisation des plannings, un traitement discriminatoire dans le refus d'appliquer les dispositions de la convention collective aux médecins à temps partiel, une mise à pied conservatoire le jour de son élection en qualité de délégué du personnel et la notification consécutive d'une sanction disciplinaire injustifiée et destinée à l'évincer, manquements rendant la rupture imputable à la CROIX ROUGE FRANCAISE.

Il demande de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné l'association CROIX ROUGE FRANCAISE aux rappels de salaire et congés payés en application des barèmes et échelons d'ancienneté prévus par la convention collective et annulé la mise à pied disciplinaire du 18 décembre 2003 avec toutes conséquences de droit.

Il sollicite son infirmation pour le surplus et la condamnation de l'association CROIX ROUGE FRANCAISE à lui payer :

127 200 € d'indemnité pour violation du statut protecteur

7 952,35 € d'indemnité compensatrice de préavis et 795 € de congés payés afférents

29 150 € d'indemnité conventionnelle de licenciement

50 000 € d'indemnité pour licenciement nul

5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'association CROIX ROUGE FRANCAISE fait valoir que les manquements invoqués ne sont pas établis et en tout état de cause pas suffisamment graves pour justifier une prise d'acte de rupture par le salarié.

Elle demande d'infirmer la décision entreprise du chef des condamnations prononcées à son encontre, de la confirmer pour le surplus et de condamner Monsieur [H] [J] à lui payer 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits et de la procédure, des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions visées par le greffier, reprises et complétées à l'audience des débats.

Sur ce, la Cour,

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient soit, dans le contraire, d'une démission.

Il résulte des pièces produites que le 29 septembre 2003, la CROIX ROUGE FRANCAISE a informé Monsieur [H] [J] de ce qu'à compter de ce jour, l'établissement du planning de gardes de nuit et de week-ends relève exclusivement de la direction de l'hôpital des [1] et lui a demandé de lui communiquer ses dates prévues pour le mois de novembre 2003.

L'établissement des plannings concerne la gestion et l'organisation de l'entreprise incombant à l'employeur et ce dernier était en droit de le reprendre dès lors que la pratique instaurée depuis plusieurs années au sein de l'établissement et notamment à la suite d'une réunion organisée en février 2000 à ce sujet entre la direction et les médecins composant l'équipe de garde confiant la répartition des gardes de nuits et de week-ends à un médecin coordinateur engendrait des dysfonctionnements gravement préjudiciables au regard de l'activité exercée.

Monsieur [J] qui, en tout état de cause, ne saurait se prévaloir de l'article 7 d'une clause d'un contrat, stipulant que ses vacations interviendraient conformément au tableau de service transmis par le médecin coordinateur de l'équipe à la direction de l'établissement, qu'il a expressément refusé de signer, ne rapporte pas la preuve d'une faute de l'employeur dans sa décision de reprendre l'établissement des plannings des gardes.

Il n'est aucunement justifié au regard des disponibilités qu'il a adressées à l'employeur et des plannings établis que sa durée de travail en a été modifiée du fait de ce dernier et les quelques dates non satisfaites, au demeurant pour des raisons de respect de durée entre deux gardes consécutives, ont été remplacées par l'employeur.

Dès lors le simple changement d'organisation, instauré dans l'intérêt du service, concernant l'ensemble des médecins de garde et intervenu bien avant l'élection de Monsieur [J] en qualité de délégué syndical ne peut justifier une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.

Si le fait d'une intervention intempestive le 3 décembre 2003 auprès du personnel infirmier, assistant un patient en arrêt cardiaque déjà pris en charge par deux praticiens, reproché à Monsieur [J], n'est pas, faute d'éléments de preuve, établie, celui d'un comportement du salarié au sein de l'établissement rendant impossible une organisation rationnelle et fiable des gardes des réanimateurs caractérisé par une communication tardive de ses disponibilités et ses revirements de dates est attesté par les courriers échangés entre les parties.

Si la sanction pécuniaire infligée pour ce fait le 18 décembre 2003 est, comme l'a considéré à juste titre le conseil de prud'hommes, excessive et disproportionnée et doit être en conséquence annulée, elle ne peut justifier une prise d'acte de la rupture par Monsieur [J] de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

Enfin, c'est par des motifs pertinents, adoptés en l'absence d'éléments nouveaux par la cour, que le conseil de prud'hommes a considéré que la revendication tenant au respect des dispositions de la convention collective de la Croix-rouge relative au calcul de l'ancienneté dont Monsieur [J] a saisi le conseil de prud'hommes bien avant sa désignation en tant que délégué syndical, sans pour autant solliciter la résiliation de son contrat et sans justifier d'une quelconque réclamation préalable en plus de onze années d'exercice et qui pose un problème juridique concernant tous les médecins salariés à la garde n'empêchait nullement la poursuite de la relation de travail.

Aucun des faits reprochés par Monsieur [J] n'étant de nature à justifier une prise d'acte de la rupture de son contrat aux torts de l'employeur, la rupture intervenue à son initiative produit les effets d'une démission.

Il convient en conséquence de débouter Monsieur [J] de ses demandes au titre d'un licenciement nul et d'une violation de son statut protecteur.

Il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné l'association CROIX ROUGE FRANCAISE au paiement des salaires concernant la mise à pied disciplinaire outre les congés payés afférents.

Il n'est pas contesté que Monsieur [J] bénéficie des dispositions de la convention collective de la CROIX ROUGE FRANCAISE au même titre que tous les salariés de l'association.

L'article 26-3 de cette convention prévoit expressément que les médecins exerceront pour chacune des gardes dans l'établissement une indemnité équivalente à celle fixée pour les médecins exerçant dans les hôpitaux publics.

L'article 26.7.2 stipule que pour les praticiens à temps partiel, les avancements au titre de l'ancienneté sont régis dans les mêmes conditions que celles fixées pour les établissements publics.

Rien en permet d'exclure du bénéfice de ces dispositions les médecins salariés de garde.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré qui a fait droit à la demande en rappel de salaire de Monsieur [J] au titre de son ancienneté sur la base d'un calcul présenté par ce dernier et non sérieusement critiqué par la CROIX ROUGE FRANCAISE.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Condamne Monsieur [H] [J] aux dépens.

Dit n'y avoir lieu à allocation de somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 10/08679
Date de la décision : 04/03/2014

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°10/08679 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-04;10.08679 ?
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