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04/03/2014 | FRANCE | N°10/11670

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 5, 04 mars 2014, 10/11670


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 5



ARRÊT DU 04 MARS 2014



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/11670



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Avril 2010 -Tribunal de Commerce de MEAUX - RG n° 2008/02966





APPELANTE



S.A. AXA FRANCE IARD représentée par son Directeur Général

dont le siège sociale est :
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[Localité 1]



Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assistée par Me Guy-claude ARON, avocat au barreau de PARIS, ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 5

ARRÊT DU 04 MARS 2014

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/11670

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Avril 2010 -Tribunal de Commerce de MEAUX - RG n° 2008/02966

APPELANTE

S.A. AXA FRANCE IARD représentée par son Directeur Général

dont le siège sociale est :

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assistée par Me Guy-claude ARON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0383

INTIMÉES

SOCIETE MPI MASSON

dont le siège sociale est :

[Adresse 1]

[Localité 2]

S.C.I. QUAI DE LA PIE

dont le siège sociale est :

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentées par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

Assistées par Me Olivier LIGETI de l'AARPI ALMATIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0560

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Janvier 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre, et Monsieur Michel CHALACHIN, Conseiller, entendu en son rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre

Monsieur Michel CHALACHIN, Conseiller

Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Aouali BENNABI

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, président et par Madame Stéphanie ARNAUD, faisant fonction de greffier présent lors du prononcé.

Le 30 novembre 2005, la société MPI MASSON a souscrit auprès de la société AXA FRANCE IARD (AXA) un contrat d'assurance multirisque professionnel, à effet du 17 novembre 2005, visant notamment à garantir les risques sur un ensemble immobilier à usage d'atelier et de bureaux qu'elle louait à [Localité 4], pour son compte et pour celui du propriétaire des bâtiments, la SCI QUAI DE LA PIE.

Au cours de l'année 2006, les lieux loués ont fait l'objet de quatre sinistres causés par des gens du voyage : malgré les mesures de sécurité mises en place, ils se sont installés sur le site et ont saccagé l'ensemble des biens se trouvant sur les lieux ;

Une première plainte pour occupation illicite a été déposée par la SCI QUAI DE LA PIE le 16 janvier 2006 et communiquée à l'agent général d'AXA et à l'expert mandaté par l'assureur ;

D'autres plaintes ont été déposées par la suite, et l'assureur a été tenu informé des événements ;

Les occupants des lieux ont été expulsés à la fin du mois de novembre 2006, laissant les locaux totalement dévastés ;

Par la suite, les deux sociétés se sont rapprochées de leur assureur afin d'obtenir l'indemnisation de leur préjudice ;

L'assureur a souhaité limiter la prise en charge du sinistre au montant prévu en cas de vol, alors que les assurées voulaient étendre la garantie aux actes de vandalisme et obtenir ainsi une indemnisation plus importante ;

Par acte du 9 juin 2008, les sociétés MPI MASSON et QUAI DE LA PIE ont assigné la société AXA devant le juge des référés du tribunal de commerce de Meaux, qui a constaté l'existence d'une contestation sérieuse ;

Par acte du 29 octobre 2008, elles l'ont assignée devant le tribunal de commerce de Meau ;.

Par jugement du 6 avril 2010, cette juridiction a reçu les sociétés MPI et QUAI DE LA PIE en leur demande, reçu la société AXA en sa demande reconventionnelle, au fond l'a dit mal fondée et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, condamné la société AXA à payer à la société MPI MASSON la somme de 72.000 euros HT en principal, augmentée des intérêts légaux à compter du 19 février 2008, date de mise en demeure, condamné la société AXA à payer à la SCI QUAI DE LA PIE la somme de 395.160,89 euros HT en principal, augmentée des intérêts légaux à compter du 19 février 2008, date de mise en demeure, ordonné l'exécution provisoire et condamné la société AXA à payer à chacune des sociétés MPI MASSON et QUAI DE LA PIE la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par déclaration du 3 juin 2010, la société AXA a interjeté appel du jugement ;

Dans ses dernières conclusions du 5 octobre 2010 , elle poursuit l'infirmation du jugement et demande à la cour de condamner solidairement les sociétés MPI MASSON et QUAI DE LA PIE à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Aux termes de ces dernières conclusions signifiées le 20 décembre 2010, les sociétés MPI MASSON et QUAI DE LA PIE sollicitent la confirmation du jugement et la condamnation de la société AXA à leur payer la somme de 467.160,89 euros HT ( 72000 euros en faveur de MPI MASSON au titre de son préjudice pour perte d'usage et 395.160,89 euros en faveur de QUAI DE LA PIE au titre de son préjudice constitué notamment du coût de la remise en état et des pertes subies), avec intérêts à compter du 19 février 2008, outre la somme de 5 000 euros à chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 janvier 2014 ;

MOTIFS

Sur le caractère aléatoire du contrat.

Considérant que la société AXA rappelle que le dommage subi par les assurées n'est garanti que si le sinistre est le fruit d'un événement incertain ; elle affirme que si, à la suite de la première intrusion, les assurées avaient pris les mesures de sécurité nécessaires, elles auraient pu éviter la survenance des autres sinistres ; elle en conclut que le contrat d'assurance a été privé de son caractère aléatoire ;

Considérant que les intimées répondent qu'elles ont, dès le premier acte de vandalisme, pris des mesures de sécurité (installation de grillages, cadenas) mais aussi diverses autres mesures visant à faire expulser les intrus (plaintes au commissariat, constats d'huissier, démarches auprès du conseil général, de la préfecture et de la mairie, saisine du juge des référés) ; elles rappellent que la société AXA a été tenue informée des événements et les a assistées pendant toute la durée des sinistres ; or, l'assureur ne leur ayant jamais demandé de prendre des précautions particulières, il ne peut leur reprocher l'absence d'aléa;

Considérant que les sociétés MPI MASSON et QUAI DE LA PIE justifient avoir pris toutes les mesures nécessaires pour protéger les locaux de nouvelles intrusions après la première effraction, et avoir mis en oeuvre les procédures destinées à obtenir l'expulsion des intrus ;

Que l'assureur, qui était tenu informé des événements, ne démontre pas avoir préconisé une mesure particulière de sécurité qui n'aurait pas été respectée par les intimées;

Qu'il ne peut donc prétendre que le contrat aurait été privé de son caractère aléatoire ;

Sur les dispositions conventionnelles applicables.

Considérant que la société AXA soutient que les dispositions conventionnelles appliquées par le tribunal n'étaient plus en vigueur lors des sinistres et ne concernaient que les locaux situés à [Localité 2] ; elle explique que les dispositions applicables à l'immeuble de [Localité 4] ont été modifiées en 2005 et ont limité la garantie des actes de vandalisme à ceux commis isolément, soit indépendamment d'un autre risque couvert ; elle affirme que ces nouvelles conditions ont été transmises à l'assurée, qui a reconnu en avoir reçu un exemplaire ; elle en conclut que les intimées ne peuvent être indemnisées que sur le fondement de la garantie vol ;

Considérant que les intimées contestent avoir reçu les nouvelles conditions générales et spéciales invoquées par AXA ; elles soutiennent que seuls les documents remis lors de la signature du contrat d'assurance initial sont applicables ; elles ajoutent que l'obligation d'information et de conseil de l'assureur devait l'inciter à attirer leur attention sur le changement de garantie affectant le risque vandalisme ; elles sollicitent donc l'application du contrat qui prévoit une indemnisation différente et cumulable pour vol et pour vandalisme ; par ailleurs, dans l'hypothèse de l'application des nouvelles conditions contractuelles, pour que la garantie vol s'applique de manière exclusive, il aurait fallu que les actes de vandalisme résultassent directement d'un vol, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, dans la mesure où il y a eu occupation durable des lieux par les intrus ; enfin, l'assureur pourrait être tenu responsable des manquements de son agent général si la garantie vandalisme était exclue ;

Considérant que le tribunal a fait application des conditions générales n° 460606 A et de la convention spéciale dommages n° 460609 A qui avaient été remises à l'assurée lors de la souscription d'un contrat précédent, qui portait uniquement sur des biens situés à [Adresse 4] ;

Or, considérant que le contrat dont les intimées demandent l'application a été conclu postérieurement, le 30 novembre 2005, et portait à la fois sur les biens de [Localité 2] et sur de nouveaux locaux situés à [Localité 4] ;

Considérant que les conditions particulières de ce nouveau contrat contenaient la mention suivante, précédant la signature du souscripteur : 'Ces conditions particulières jointes aux conditions générales n° 460645 A et à la convention spéciale dommages n° 460646 A, dont le souscripteur reconnaît avoir reçu un exemplaire, constituent le contrat d'assurance' ;

Considérant que cette mention, que le souscripteur a approuvée en apposant sa signature sur les conditions particulières, démontre que ce dernier a bien reçu les nouvelles conditions générales et spéciales régissant les contrats 'multirisque de l'entreprise' proposés par la société AXA ;

Considérant que les intimées ne démontrent pas que l'agent général d'AXA aurait manqué à son obligation d'information et de conseil en n'attirant pas leur attention sur la modification de la garantie 'vandalisme', dès lors qu'elles ne rapportent pas la preuve de ce qu'elles auraient formulé une demande particulière auprès de lui concernant la couverture de ce risque ;

Considérant que, dans la mesure où le contrat précise que les locaux de [Localité 4] étaient 'en cours d'aménagement', il n'est pas démontré que les assurées aient manifesté le souhait de bénéficier d'une garantie renforcée contre les risques de vandalisme ;

Considérant que le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a fait application de dispositions contractuelles qui n'étaient plus en vigueur lors des sinistres ;

Considérant qu'il ressort de l'article 2.1 des conditions générales applicables en l'espèce que les actes de vandalisme ne sont couverts que lorsque les dégâts sont 'provoqués par un événement non couvert au titre des autres garanties accordées' ;

Que l'article 1.3 de la convention spéciale dommages prévoit que sont couverts les dommages causés au bâtiment, à ses embellissements et au mobilier professionnel lorsqu'ils sont consécutifs à un vol ;

Que le titre II de ce même document rappelle que la garantie est acquise en cas de destructions ou détériorations de biens 'résultant directement d'un vol' ;

Considérant qu'en l'espèce, la plupart des dégradations constatées après le départ des intrus étaient bien la conséquence directe de vols de matériels, comme l'a indiqué le directeur commercial de la SCI QUAI DE LA PIE aux services de police dans ses plaintes des 1er février et 13 mars 2006 : 'Les moteurs électriques d'un ou deux portails ont été volés...tous les volets à lamelles en aluminium de la façade du bâtiment donnant sur la rue ont été volés...les radiateurs sont volés ou arrachés...du mobilier comme des bureaux est cassé et volé...l'évier de la cuisine a été volé...le standard téléphonique a disparu...le serveur informatique a été volé...des morceaux de câblage sont manquants...les goulottes ont été vidées de leur câblage...' ;

Considérant que, dans la mesure où ces dégradations étaient consécutives à des vols, le risque 'vandalisme' ne pouvait être couvert en tant que tel, puisque les dégâts avaient été provoqués par un autre risque couvert par le contrat ;

Considérant, par ailleurs, que le fait que l'assureur ait réglé, le 11 mai 2007, une somme de 73.135 euros au titre de la garantie 'vandalisme' ne signifie pas qu'il avait admis que ce risque était couvert indépendamment du vol, cette indemnité ayant pu être versée à titre purement commercial, sans pour autant constituer une reconnaissance de garantie ;

Considérant que, dans la mesure où les assurées ont perçu en outre la somme de 9.557 euros correspondant au plafond de la garantie 'vol', elles ne peuvent prétendre obtenir la moindre indemnité supplémentaire ;

Que le jugement déféré doit donc être infirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant, par ailleurs, que l'équité commande de débouter les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré en toutes des dispositions,

Et statuant à nouveau, déboute les sociétés MPI MASSON et QUAI DE LA PIE de toutes leurs demandes ;

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 10/11670
Date de la décision : 04/03/2014

Références :

Cour d'appel de Paris C5, arrêt n°10/11670 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-04;10.11670 ?
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