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12/03/2014 | FRANCE | N°13/03820

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 12 mars 2014, 13/03820


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRÊT DU 12 MARS 2014



(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/03820



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Novembre 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007013122





APPELANTE



Société SETNET CORPORATION

prise en la personne de ses représentants légaux

[Ad

resse 3]

FLORIDE, ETATS UNIS



Représentée par Me Joëlle VALLET-PAMART, avocat au barreau de Paris, toque : D1476,

assistée de Me Jérôme ROUSSELLE, avocat au barreau de Paris, toque : R169

substitu...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT DU 12 MARS 2014

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/03820

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Novembre 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007013122

APPELANTE

Société SETNET CORPORATION

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

FLORIDE, ETATS UNIS

Représentée par Me Joëlle VALLET-PAMART, avocat au barreau de Paris, toque : D1476,

assistée de Me Jérôme ROUSSELLE, avocat au barreau de Paris, toque : R169

substituant Me Christophe HERY

INTIMÉES

SA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DU RADIOTÉLÉPHONE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Christian VALENTIE, avocat au barreau de Paris, toque : C2441.

Assistée de Me Frédérique DUPUIS TOUBOL, avocat au barreau de PARIS, toque : R255

(BIRD & BIRD AARPI)

SAS HEWLETT-PACKARD FRANCE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Mathieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de Paris, toque : C2477,

assistée de Me Stéphane BENOUVILLE et de Me Dimitri LECAT, avocats au barreau de Paris, toque : J007

(FRESHFIELDS BRUCKHAUS DERINGER LLP)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 janvier 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président de chambre

Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère

Madame Anne-Marie GABER, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Marie-Annick MARCINKOWSKI

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président, et par Madame Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Vu le jugement rendu contradictoirement le 16 novembre 2012 par le tribunal de commerce de Paris.

Vu l'appel interjeté le 26 février 2013 par la société de droit américain Setnet Corporation.

Vu les dernières conclusions de la société Setnet Corporation, signifiées le 03 janvier 2014.

Vu les dernières conclusions de la SA Société Française du Radiotéléphone (ci-après SFR), signifiées le 07 janvier 2014.

Vu les dernières conclusions de la SAS Hewlett-Packard France, signifiées le 07 janvier 2014.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 07 janvier 2014.

Vu les notes de procédures adressées en délibéré par le conseil de la SAS Hewlett-Packard France les 29 janvier, 03 février et 07 février 2014.

Vu les notes de procédure adressées en délibéré par le conseil de la SAS SFR les 30 janvier et 03 février 2014.

Vu les conclusions de procédure aux fins de réouverture des débats, signifiées par la société Setnet Corporation le 31 janvier 2014 et les notes de procédure adressées en délibéré par le conseil de la société Setnet Corporation les 31 janvier, 06 février et 13 février 2014.

M O T I F S D E L ' A R R Ê T

Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ;

Considérant qu'il suffit de rappeler que la société Setnet Corporation, fondée en 1994 par MM [X] [H] et [D] [U], édite des logiciels de messagerie unifiée destinés aux opérateurs téléphoniques et offrant la possibilité de centraliser, stocker et consulter des messages divers sur un serveur unique accessible par différents types de terminaux ;

Qu'elle commercialisait une suite de produits sous la dénomination 'Cellcentric', plate-forme de télécommunication permettant aux opérateurs de téléphonie fixe ou mobile comme aux fournisseurs d'accès Internet de proposer à leurs clients des services de messagerie unifiée ;

Que les sociétés Setnet Corporation et SFR ont débuté leurs relations commerciales en 1999 pour intégrer la suite 'Cellcentric' dans l'environnement technique de la SA SFR par l'intermédiaire d'un premier intégrateur, la société Axians puis, à partir de 2002, de la SAS Hewlett-Packard France ;

Que les sociétés Setnet Corporation et Hewlett-Packard France ont ainsi conclu le 28 mars 2002 un partenariat pour la fourniture à la SA SFR des produits et services demandés, la SAS Hewlett-Packard France ayant le droit de distribuer et consentir des sous-licences de la suite 'Cellcentric', comme composantes de la solution Hewlett-Packard France vendue à la SA SFR ;

Que le nombre de licences d'usage des logiciels devant être acquises par la SA SFR auprès de la SAS Hewlett-Packard France pour le compte de la société Setnet Corporation était déterminé par le nombre maximum d'utilisateurs simultanés déclaré par la SA SFR ;

Qu'estimant que ce système de facturation des licences était complexe et peu satisfaisant, la SA SFR a demandé la détermination d'un autre mode de calcul ; qu'ainsi au début de l'année 2004 des négociations ont eu lieu entre les parties pour aboutir au mois de février 2004 à un projet d'accord soldant le passé et proposant pour l'avenir de facturer les licences sur la base du nombre des utilisateurs inscrits au-delà de 100.000 (sur la base du nombre d'utilisateurs inscrits fin 2003) ; qu'après discussion un nouveau projet a été établi sous l'intitulé de Memorandum Of Understanding (ci-après MOU), lequel a servi de base aux relations postérieures entre les parties ;

Que sur cette base la SA SFR a réglé à la SAS Hewlett-Packard France la somme de 525.000 € HT pour la période antérieure au 31 décembre 2003, dont 90 % ont été rétrocédés à la société Setnet Corporation et a déclaré mensuellement le nombre d'utilisateurs inscrits qui constituait désormais la base de facturation ;

Que doutant de la véracité des déclaration unilatérales de la SA SFR et estimant que cette société utilisait sa technologie sans payer les licences correspondantes, la société Setnet Corporation a fait assigner le 13 février 2007 les sociétés Hewlett-Packard France et SFR devant le tribunal de commerce de Paris en contrefaçon de ses logiciels et en dommages et intérêts ;

Que par un premier jugement du 27 mai 2010, le tribunal de commerce de Paris a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. [J] [I] sur le MOU qui apparaît comme la base des accords existant entre les sociétés Setnet Corporation et SFR entre janvier 2004 et l'arrêt de leurs relations en 2006 ;

Que par un second jugement du 01 juillet 2011, le tribunal de commerce de Paris a dit que la société Setnet Corporation était titulaire des droits de propriété intellectuelle fondant son action au vu tant les législations américaines que françaises, et que ses demandes étaient donc recevables ;

Que le 21 juin 2012 M. [Q] [F] et Mme [C] [Y] épouse [B] sont intervenus volontairement à l'instance en qualité d'actionnaires de la société Setnet Corporation avant de se désister de leur instance et action le 27 septembre 2012 ;

Considérant que le jugement entrepris a, en substance :

- constaté le désistement d'instance et d'action de M. [Q] [F] et de Mme [C] [Y] épouse [B], intervenants volontaires et son acceptation par les autres parties,

- débouté la société Setnet Corporation de toutes ses demandes,

- condamné la société Setnet Corporation à payer 200.000 € à la SAS Hewlett-Packard France et 200.000 € à la SA SFR à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société Setnet Corporation à payer 150.000 € à la SAS Hewlett-Packard France et 150.000 € à la SA SFR en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire de sa décision sans constitution de garanties ;

I : SUR LA PROCÉDURE :

Considérant que suite à un incident survenu au cours de l'audience de plaidoiries du 29 janvier 2014, les conseils des sociétés Hewlett-Packard France et SFR ont demandé que soient écartées des débats les pièces n° 214 à 216 de la société Setnet Corporation qui ne leur ont jamais été communiquées ;

Considérant que la société Setnet Corporation a signifié en cours de délibéré des conclusions de réouverture des débats et de révocation de l'ordonnance de clôture afin que ses pièces n° 214 à 216 puissent être communiquées et contradictoirement débattues ou subsidiairement, que les parties puissent s'exprimer par notes en délibéré pour débattre contradictoirement de ces pièces ;

Qu'elle fait valoir qu'elle a communiqué ces pièces par RPVA le 06 janvier 2014 mais que suite à des difficultés de communication sur ce réseau, ces pièces ne sont jamais parvenues aux parties adverses ;

Considérant que les sociétés Hewlett-Packard France et SFR s'opposent à la révocation de l'ordonnance de clôture et à la réouverture des débats ;

Considérant ceci exposé, qu'il n'est pas contesté que les pièces n° 214 à 216 de la société Setnet Corporation n'ont jamais été communiquées aux autres parties, qu'elles ne figurent d'ailleurs pas dans le dernier bordereau de communication de pièces signifié le 03 janvier 2014 par la société Setnet Corporation, lequel s'arrête à la pièce n° 213 communiquée le 03 janvier 2014 ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 444 du code de procédure civile, la réouverture des débats n'est obligatoire que lorsque les parties n'ont pas été à même de s'expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur ont été demandés par la juridiction en application des dispositions de l'article 442 ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, la demande de réouverture des débats n'étant demandée que par la partie appelante pour pouvoir procéder à la communication de ses pièces n° 214 à 216 ;

Considérant en outre que la réouverture des débats n'emporte pas révocation de l'ordonnance de clôture et laisse l'affaire au stade du jugement en l'absence de renvoi à la mise en état ; que l'article 783 du code de procédure civile dispose qu'après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office ;

Considérant dès lors qu'il convient en premier lieu de se prononcer sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 07 janvier 2014 ;

Considérant que l'article 784 du code de procédure civile dispose que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ;

Considérant qu'en l'espèce il n'est justifié d'aucune cause grave survenue postérieurement au 07 janvier 2014 ;

Considérant en effet que si la société Setnet Corporation a demandé le 06 janvier 2014 au conseiller de la mise en état un report de l'ordonnance de clôture fixée au 07 janvier 2014 ce n'était qu'en raison de la communication, le 03 janvier 2014, de la pièce n° 213 et non pas en raison de la communication, qui serait intervenue le jour même, de trois nouvelles pièces par RPVA ; que la cour relève qu'à aucun moment que ce soit jusqu'à la clôture de l'information ou entre l'ordonnance de clôture et la date de l'audience de plaidoiries, il n'a été fait état, notamment par la signification d'un bordereau récapitulatif de pièces, de la communication par la société Setnet Corporation de trois nouvelles pièces numérotées de 214 à 216 ;

Considérant enfin qu'il résulte des dispositions de l'article 135 du code de procédure civile, que les pièces produites aux débats doivent être communiquées en temps utile pour permettre aux parties adverses de conclure avant l'ordonnance de clôture, ce qui en tout état de cause, n'était pas le cas des pièces que la société Setnet Corporation voulait communiquer la veille de l'ordonnance de clôture ;

Considérant dès lors que la société Setnet Corporation sera déboutée de sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture et que ses pièces n° 214 à 216 seront écartées des débats ; qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas davantage lieu d'ordonner la réouverture des débats ni d'autoriser les parties à débattre de ces pièces par des notes en délibéré ;

II : SUR LES DEMANDES DE LA SOCIÉTÉ SETNET CORPORATION :

Les moyens et l'argumentation de la société Setnet Corporation :

Considérant que la société Setnet Corporation rappelle qu'elle a commercialisé à partir de la fin du siècle dernier une plate-forme de télécommunications 'Cellcentric' permettant aux opérateurs de téléphonie fixe et mobile, et aux fournisseurs d'accès Internet, de proposer à leurs clients des services de messagerie unifiée ;

Que de 1999 à 2006 la SA SFR lui a commandé six projets informatiques, ainsi qu'à la SAS Hewlett-Packard France (à partir de 2002) en tant qu'intégrateur, pour développer et améliorer ses nouvelles offres de gestion et d'accès aux courriels pour ses abonnés 'grand public' et 'professionnels' ;

Que pour chaque projet, elle faisait une proposition commerciale sur la base de laquelle la SA SFR adressait à l'intégrateur une lettre d'intention de commande, à la suite de quoi l'intégrateur émettait un bon de commande ; qu'elle adressait alors à la SAS Hewlett-Packard France une facture pour être réglée de ses prestations et de ses licences ;

Que les parties s'étaient entendues sur la cession à la SA SFR, par l'intermédiaire de la SAS Hewlett-Packard France, d'un nombre limité de droits d'utilisation de ses logiciels par sessions simultanées et que depuis 1999, la SA SFR n'avait que sa technologie 'Cellcentric' permettant à ses abonnés grand public d'accéder à leur messagerie électronique sur un portail ou un fournisseur d'accès Internet tiers ;

Que la rémunération de la SAS Hewlett-Packard France était fixée sous forme d'un pourcentage (fixé à 20 %) des droits de licence payés par la SA SFR ;

Que le 28 avril 2003 la SAS Hewlett-Packard France, invoquant de prétendues difficultés, suspendait unilatéralement l'exécution de l'accord de partenariat des 19/28 mars 2002 pour obtenir de nouvelles propositions commerciales ;

Que fin juillet 2003 la SAS Hewlett-Packard France reconnaissait l'existence de dépassements des licences sur les serveurs de la SA SFR ;

Qu'en 2004 les sociétés Hewlett-Packard France et SFR élaboraient un nouvel accord dénommé Memorandum Of Understanding (MOU) qu'elle acceptait le 11 mai 2004 ; que cet accord prévoyait un nouveau mode de détermination du prix des licences ;

Que par la suite les sociétés Hewlett-Packard France et SFR se sont progressivement dégagées de leur relation avec elle jusqu'à l'année 2006 ;

Qu'elle soutient que le MOU ne constituait pas une transaction régularisant le dépassement constaté en 2003 et revoyant les modalités de comptage des licences et que rien ne lui interdit de faire juger que la somme de 525.000 € qui lui a été payée pour les dépassements de licence jusqu'en décembre 2003 ne correspond pas à la réalité et doit faire l'objet d'un paiement complémentaire si les déclarations de la SFR sont fausses ;

Qu'à titre subsidiaire si la cour devait conférer au MOU la valeur de transaction, elle fait valoir que cet accord doit être annulé en cas d'erreur sur l'objet ou de vice du consentement ;

Qu'elle soutient ainsi que le MOU est nul en vertu de l'article 1129 du code civil pour indétermination de la chose objet de l'obligation puisque le nombre de licences est déterminé par le nombre d'utilisateurs inscrits ('Users') selon son article 2a et que la notion d'utilisateur inscrit et celle de table de comptage ne sont pas définies ;

Que le MOU est également nul en raison du vice du consentement au sens de l'article 1109 du code civil pour erreur, dol ou violence en raison de la force économique de la SA SFR dont le but poursuivi était de lui imposer un mode facturation favorable à la SA SFR et qui lui était préjudiciable ;

Qu'il a été fait pression sur elle en utilisant la position de force de la SA SFR, en invoquant des limites budgétaires et en menaçant d'arrêter le service à défaut d'accord, pour imposer abusivement des modifications substantielles et bouleverser l'économie du contrat ;

Que les données erronées, déclarées unilatéralement par la SA SFR en décembre 2003, ont été déterminantes et ont servi de base pour fixer le prix des licences, l'induisant en erreur sur le décompte des redevances dues et sur le nouvel accord de licence négocié sur des fausses bases, en raison de la pression et des mensonges de la SA SFR ;

Qu'à titre subsidiaire l'accord de licences par utilisateur inscrit a été, entre 2004 et 2006, entaché d'irrégularités dans la mesure où les termes confus du MOU ne lui permettaient pas de savoir comment la SA SFR calculait le nombre d'utilisateurs ;

Qu'elle ajoute que le rapport d'expertise diligenté en première instance ne permet pas de répondre aux questions posées au tribunal, les conclusions de l'expert ne donnant pas de solution claire quant aux interprétations du terme 'Users' tel que défini à l'article 2a du MOU et à la pertinence du 'Tool' prévu à l'article 2b, utilisé pour compter le nombre d''Users' ;

Que les conclusions de l'expert permettent de constater qu'il n'existe aucun accord sur la notion d'utilisateur inscrit, sur le caractère intangible ou non des utilisateurs inscrits, sur la notion de table et par conséquent sur le comptage des utilisateurs ;

Que subsidiairement, les conclusions de l'expert ne sont pas pertinentes dans la mesure où son interprétation de la définition de l'utilisateur inscrit ajoute des conditions supplémentaires aux stipulations contractuelles du MOU en restreignant ce terme aux seules personnes ayant procédé à des étapes particulières d'inscription ou au paiement de certains services alors que ce terme doit s'entendre de toute personne devenue abonnée à un service SFR offrant sa technologie ;

Qu'en outre c'est à tort que l'expert a considéré que les utilisateurs à prendre en compte pour le calcul des licences étaient ceux ayant procédé à leur enregistrement et qui ne s'étaient pas désinscrits alors que l'article 2a du MOU ne prévoyait ni la possibilité de faire évoluer le nombre des utilisateurs inscrits, ni d'en effacer certains ;

Qu'en raison de la nullité du MOU ou tout au moins de son inapplicabilité, il convient de ne retenir que l'accord de licence limité et exprimé en sessions simultanées prévoyant qu'une session simultanée s'ouvre lorsque l'abonné se connecte sur le portail ou par le web pendant 15 minutes, débutant par la connexion de l'abonné au portail ou par le web et s'achevant par sa déconnexion ;

Que le mode de calcul du nombre de sessions simultanées s'effectue par un algorithme de comptage accepté et validé par la SA SFR et qu'au-delà de la quantité de sessions simultanées, la SA SFR n'avait aucun droit légitime d'utilisation de ses technologies ;

Qu'elle n'a jamais pu avoir accès aux logs sur lesquels cet algorithme de comptage devait être mis en oeuvre pour déterminer le nombre de sessions simultanées et qu'à ce jour la SA SFR a détruit ces logs, interdisant tout contrôle a posteriori ;

Qu'elle fait valoir que les dépassements par la SA SFR de ses licences sont constitutifs d'actes contrefaisants, la prétendue limite physique de 500.000 utilisateurs ne concernant que les services professionnels et non les services proposés au grand public (constituant le plus grand nombre) et n'étant qu'un leurre ;

Qu'elle conclut à l'infirmation du jugement entrepris qui l'a débouté de ses demandes et réclame aux sociétés Hewlett-Packard France et SFR :

- la somme de 10.000.000 € en réparation du préjudice causé par les manquements contractuels graves et répétés de ces deux sociétés,

- la somme de 16.350.000 € à titre de régularisation des licences impayées,

- la somme de 1.653.000.000 € en réparation du manque à gagner subi par elle,

- la somme de 27.000.000 € en réparation de la perte de la valeur de la société Setnet Corporation,

- la somme de 200.000.000 € en réparation de la perte de valeur de la technologie 'Cellcentric' ;

- une mesure d'expertise pour analyser son manque à gagner, la perte de chance de se développer sur le marché de l'Internet mobile de 1999 à 2006 et la perte de valeur de la suite logicielle 'Cellcentric',

- la somme de 10.000.000 € à titre de provision à valoir sur les dommages et intérêts qui seront déterminés dans le cadre de l'expertise judiciaire ;

Les moyens et l'argumentation des sociétés Hewlett-Packard France et SFR :

Considérant que la SA SFR réplique que la technologie 'Cellcentric' n'était qu'une solution technique parmi d'autres, qu'elle commercialisait des offres de services courriels reposant également sur d'autres produits et qu'elle n'utilise plus cette technologie depuis le 30 septembre 2006 ;

Que cette technologie ne concernait que ses abonnés ayant préalablement et volontairement souscrit à l'un de ses services Multimail ou SFR Office ('utilisateurs inscrits'), ce qui ne représentait qu'une infime partie de ses abonnés et que la seule présence d'un lien sur un portail ne permet pas de déduire que l'utilisateur est un utilisateur inscrit ;

Qu'elle a confié la réalisation de la solution technique à un intégrateur, d'abord la société Axians puis à partir de 2002 la SAS Hewlett-Packard France dans le cadre d'un partenariat conclu entre cette société et la société Setnet Corporation et à partir du 01 janvier 2005, après que la SAS Hewlett-Packard France a cessé de poursuivre l'exécution des prestations de support, la société Logica CMG jusqu'à l'arrêt, en 2006, des services SFR Office ;

Que jusqu'en 2004 l'évaluation de la redevance de licence tenait compte de 19 indicateurs différents selon les applications, leur multiplication créant un mode de comptabilisation complexe, inadapté et difficile à appliquer ; que certaines licences étaient surévaluées et le mode de comptage des sessions simultanées ne correspondait pas à l'utilisation réelle des applications par ses abonnés ;

Que face au constat, fin 2003, d'un dépassement du nombre de licences concédées, les parties se sont mises d'accord sur une évaluation de ce dépassement et qu'elle a régularisé la situation en versant la somme de 525.000 € au titre des redevances de licences complémentaires ;

Que l'accord de 2004 définit un mode de comptabilisation des licences fondé sur le nombre d'utilisateurs inscrits et a été appliqué par les parties jusqu'à la fin de leurs relations en septembre 2006 sans aucune contestation de la société Setnet Corporation qui a accepté de percevoir le prix correspondant aux redevances ;

Que le MOU a bien un objet déterminé et déterminable et a été valablement négocié sans être affecté d'aucun vice du consentement, l'accord étant matérialisé par des échanges de courriels et de lettres même s'il n'a pas été signé ; qu'il a été conclu sans aucune manoeuvre, contrainte ou pression à l'encontre de la société Setnet Corporation qui a elle-même suggéré l'ouverture de négociations et établi la première version du MOU ;

Qu'elle a bien exécuté cet accord qui prévoit une comptabilisation par utilisateur s'étant préalablement inscrit à une de ses offres payantes de messagerie SFR Office ou Multimail et que le nombre total de ses abonnés ne peut donc pas se confondre avec le nombre d'utilisateurs de ces offres de messagerie ;

Qu'elle a de façon régulière communiqué à la société Setnet Corporation le nombre d'utilisateurs inscrits, cette société étant donc informée sur l'évolution du nombre des utilisateurs de ces services de messageries et ayant accepté les modalités de déclaration et de comptage de ces utilisateurs ;

Qu'elle a ainsi utilisé la solution logicielle distribuée par la société Setnet Corporation conformément aux droits qui lui avaient été concédés, aucune preuve des dépassements n'étant rapportée ;

Qu'elle conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Setnet Corporation de l'ensemble de ses demandes ;

Considérant que la SAS Hewlett-Packard France précise être intervenue en qualité d'intégrateur du logiciel 'Cellcentric' dans les projets développés par la société Setnet Corporation pour la SA SFR au début de l'année 2002, concluant un accord de coopération le 28 mars 2002 qui ne lui imposait aucune obligation de comptage ou de contrôle de l'utilisation effective du logiciel 'Cellcentric' par la SA SFR ;

Que des difficultés sont apparues quant au mode de comptage des sessions simultanées, différent pour chacun des 19 modules du logiciel 'Cellcentric' et que c'est dans ce contexte qu'à l'initiative de la société Setnet Corporation, les parties ont conclu en 2004 un accord formellement accepté par la société Setnet Corporation le 11 mai 2004 constituant une transaction pour la période antérieure au 31 décembre 2003 pour laquelle une somme forfaitaire de 525.000 € était payée par la SA SFR et où les parties convenaient d'un système de comptage et de déclarations périodiques de l'utilisation du logiciel 'Cellcentric' sur la base des seuls utilisateurs inscrits ;

Que l'accord de 2004 ne prévoyait pas davantage à sa charge une obligation de vérification ou de contrôle des déclarations de la SA SFR, d'autant plus qu'elle n'a jamais eu accès aux logs du logiciel 'Cellcentric' ;

Que l'accord de 2004 est parfaitement valable, la société Setnet Corporation, à l'origine des négociations, n'ayant été victime d'aucune violence économique ni d'aucun vice du consentement pour erreur ou dol alors surtout que cet accord a été appliqué sans difficulté par les parties jusqu'à la fin de leurs relations ;

Qu'elle a mis fin à son intervention dans les projets de la SA SFR au début de l'année 2005 et qu'il ne peut lui être reproché aucun acte de contrefaçon en l'absence d'un quelconque dépassement de licences ;

Que le rapport d'expertise établit que la thèse de la société, Setnet Corporation selon laquelle un 'User' serait un abonné SFR n'est pas techniquement possible, d'autant plus que la capacité de stockage de l'unique plate-forme de production SFR configurée et dimensionnée pour exploiter le logiciel 'Cellcentric' ne pouvait pas supporter plus de 500.000 utilisateurs ;

Que ce rapport établit également que dès le 30 juin 2004 elle a régulièrement et systématiquement transmis à la société Setnet Corporation le nombre d'utilisateurs inscrits mentionné dans les déclarations reçues de la SA SFR et passé commande des licences supplémentaires nécessaires, qu'elle n'a jamais concédé à la SA SFR davantage de licences qu'elle n'en avait achetées auprès de la société Setnet Corporation et que la SA SFR a toujours disposé de davantage de licences qu'il n'y avait d'utilisateurs inscrits à ses services exploitant le logiciel 'Cellcentric' ;

Qu'elle conclut en conséquence à la confirmation du jugement entrepris ;

Sur quoi, la cour :

Considérant qu'il ressort des pièces produites aux débats que la SA SFR a utilisé la suite logicielle 'Cellcentric' de la société Setnet Corporation pour trois de ses offres de messageries courriels : InEdit, Multimail et SFR Office ; qu'à partir de 2002 l'intégration de ces logiciels était assurée par la SAS Hewlett-Packard France dans le cadre d'un accord de coopération signé entre cette société et la société Setnet Corporation les 19 et 28 mars 2002 ;

Considérant qu'en vertu de cet accord la société Setnet Corporation consentait à la SAS Hewlett-Packard France les licences pour distribuer et utiliser la suite 'Cellcentric' auprès de la SA SFR moyennant une commission de 20 % au profit de la SAS Hewlett-Packard France en sa qualité d'intégrateur de la suite ;

Considérant que les parties ont entamé des négociations à partir du début de l'année 2004 pour parvenir à un nouveau mode de comptabilisation des licences relatives à cette suite logicielle ;

Considérant que ces négociations sont matérialisées par des échanges de courriels qui ne démontrent pas que la société Setnet Corporation aurait été la victime de pressions de nature économique ou de manoeuvres dolosives de nature à vicier son consentement par violence, dol ou erreur au sens des articles 1109 et suivants du code civil ;

Considérant en effet que la SA SFR était en droit de vouloir renégocier son contrat de licences dont elle estimait le mode de comptabilisation inadapté et trop complexe (19 indicateurs pour chacun des logiciels de la suite 'Cellcentric') et qu'elle n'a jamais imposé unilatéralement à la société Setnet Corporation un nouveau contrat en recourant à un chantage par la menace d'une rupture brutale de leurs relations commerciales ;

Considérant en effet qu'à la lecture du courriel adressé le 03 février 2004 à la SAS Hewlett-Packard France par la société Setnet Corporation, il apparaît que c'est cette dernière qui a pris l'initiative de ces négociations après avoir évalué à 1.500.000 € le montant des dépassements des licences à cette date : 'Nous savons toutefois que SFR ne paieras (sic) jamais une telle somme pour le service, et préférera fermé (sic) le service plutôt que de payer. Nous sommes donc prêt (sic) à entrer dans une phase de négociation à condition qu'elle ai (sic) lieu au plus tôt' ;

Considérant que c'est encore la société Setnet Corporation qui a établi le premier projet d'accord qu'elle a fait parvenir le 25 mars 2004 à la SAS Hewlett-Packard France en indiquant qu'elle souhaitait aboutir à un accord définitif au plus tôt et en tout état de cause avant le 01 avril 2004, accentuant sa pression par la menace d'une action en justice ainsi que cela ressort de la lettre adressée le 19 mars 2004 par la SAS Hewlett-Packard France à la SA SFR : 'nous voulons vous informer par la présente que SetNet nous indique qu'il sont prêts à initialiser une action en justice dès lundi prochain [22 mars]' ;

Considérant enfin que la version finale du MOU, au demeurant proche de sa version initiale, a été expressément acceptée par la société Setnet Corporation dans un courriel adressé le 11 mai 2004 à la SAS Hewlett-Packard France, intitulé 'Final agreement with HP' ;

Considérant que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont écarté les accusations de violences portées par la société Setnet Corporation en relevant que les négociations commerciales se sont déroulées normalement ;

Considérant qu'en ce qui concerne l'accusation de dol et d'erreur, le seuil de mesurage des comptages fixé à 100.000 utilisateurs repose sur le chiffre avancé lors des négociations par la SA SFR de 100.000 utilisateurs inscrits fin 2003 ; que rien ne permet d'affirmer que ce chiffre n'aurait pas été conforme à la réalité, étant en particulier relevé qu'il est invoqué par la société Setnet Corporation elle-même dans son courriel du 25 mars 2004 : 'SFR devra payer 750K Euros pour 100K users supplémentaires' ;

Considérant en effet que le chiffre de 300.000 utilisateurs allégué par la société Setnet Corporation dans ses conclusions ne repose que sur un courriel qui lui a été adressé le 02 janvier 2004 par la SA SFR faisant état de 309.073 abonnés M3B ; que la SA SFR soutient que ce chiffre, arrêté au 28 novembre 2003, ne correspond pas au nombre d'utilisateurs inscrits début 2004 du fait de l'arrêt, fin 2003, d'une de ses offres (InEdit) ayant entraîné la suppression de 260.000 abonnés dont seulement 27.000 ont choisi une autre offre ;

Considérant en tout état de cause que la société Setnet Corporation connaissait ce courriel et ces chiffres dès janvier 2004, donc antérieurement à l'ouverture des négociations et qu'il n'y a eu lieu de la part de la SA SFR aucune dissimulation ni réticence dolosive susceptibles d'entacher de dol ou d'erreur le consentement de la société Setnet Corporation ;

Considérant enfin que si la société Setnet Corporation soulève la nullité du MOU pour absence d'objet en vertu des dispositions de l'article 1129 du code civil pour imprécision et indétermination du nombre de licences devant être acquises, il apparaît que ses critiques portent en réalité sur la détermination du prix pour laquelle l'article 1129 précité est inapplicable ;

Considérant qu'il suffit, conformément aux dispositions de l'article 1591, que le prix soit déterminable et que tel est le cas en l'espèce, le MOU stipulant un mode de calcul du prix de 5 € par user pour la tranche de 100.000 à 200.000 users et de 3,5 € par user pour la tranche de 200.000 à 500.000 users ;

Considérant en outre que l'obligation des parties porte bien sur une chose déterminée quant à son espèce au sens de l'article 1129 du code civil, à savoir le droit d'usage par la SA SFR des licences de la suite logicielle 'Cellcentric' et qu'en conséquence le MOU n'est pas nul pour absence d'objet ;

Considérant dès lors que c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté la société Setnet Corporation de ses demandes d'annulation du MOU et qu'ils ont dit que même si cet accord n'a pas fait l'objet d'une convention signée, il a été régulièrement appliqué par les parties jusqu'à la fin de leurs relations commerciales le 30 septembre 2006 et constitue le fondement de leurs relations contractuelles à compter du 01 janvier 2004 ;

Considérant qu'en ce qui concerne l'application de cet accord, son article 1 stipule que pour le solde des licences au 31 décembre 2003 la SA SFR versera à la SAS Hewlett-Packard France la somme de 525.000 € dont 472.950 € reviennent à la société Setnet Corporation, telle que réclamée par celle-ci ; qu'il est expressément stipulé que 'ce paiement sera considéré comme un solde de tout compte pour toutes les licences SetNet dues par SFR et ce pour TOUS les types de licences' ;

Considérant que ce point du contrat constitue bien, pour la période antérieure au 01 janvier 2004, une transaction au sens des articles 2044 et suivants du code civil ; qu'en application de l'article 2052 cette transaction a, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort et ne peut être attaquée pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion ;

Considérant dès lors qu'en l'absence de nullité du MOU pour cause de dol ou de violence, ainsi qu'analysé précédemment, la société Setnet Corporation n'est pas recevable à réclamer des sommes au titre de ses licences pour la période antérieure au 01 janvier 2004 ;

Considérant qu'en ce qui concerne la période allant de 2004 à 2006, le MOU stipule en son article 2 que les licences seront commandées par 'bulks' de 10.000 'users' grâce à un 'tool' qui fera un 'select count' tous les deux mois sur le nombre d''users' au dernier jour de chaque bimestre ;

Considérant que l'article 2a définit un 'user' comme étant un utilisateur inscrit au service uniquement et précise qu''aucune autre notion de user 'actifs' ou 'simultanés' ne peut être insérée ultérieurement' ;

Considérant que compte tenu des divergences des parties sur le sens technique qu'il convenait de donner aux termes anglo-saxons employés dans cet accord, c'est à juste titre que les premiers juges ont ordonné le 27 mai 2010 une mesure d'expertise sur les interprétations possibles du terme 'users' tel que défini à l'article 2a et sur la pertinence du 'tool' prévu à l'article 2b pour compter le nombre d''users' afin d'estimer leur nombre à la fin de chaque période bimestrielle entre le 01 janvier 2004 et le 30 septembre 2006 ;

Considérant que l'expert, M. [J] [I], a mené ses opérations dans le respect du principe du contradictoire, qu'il a le 18 mai 2011 adressé aux parties sa synthèse, a recueilli leurs dires et y a répondu avant de déposer son rapport définitif le 05 novembre 2011 ;

Considérant que l'expert a en particulier tenu compte des rapports techniques privés rédigés antérieurement à la demande des parties (notes techniques LIPSKI pour la société Setnet Corporation, MIGAYRON pour la SA SFR et BITAN pour la SAS Hewlett-Packard France) et du constat dressé le 26 septembre 2006 par l'APP à la demande de la société Setnet Corporation France ;

Considérant que si le MOU ne précise pas les tables et ne donne pas les critères de comptage, l'expert indique que les parties conviennent que le terme 'user' se définit par un téléphone ou une carte SIM utilisant le réseau SFR, une adresse électronique comme login et un code d'accès ;

Considérant que l'expert précise que l''user', défini au MOU comme un 'utilisateur INSCRIT au service uniquement', est l'utilisateur qui s'est inscrit volontairement aux services utilisant les logiciels de la suite 'Cellcentric', à savoir à partir de 2004 les services Multimail et SFR Office (le service InEdit ayant été fermé à la fin 2003) ; qu'il y a ainsi nécessairement un acte volontaire de la personne pour s'inscrire à ces services particuliers contrairement à l'interprétation de la société Setnet Corporation qui soutient que tout abonné SFR est forcément un utilisateur de sa suite logicielle et, par voie de conséquence, un 'user' ;

Considérant en outre que si la société Setnet Corporation soutient qu'il n'y a pas lieu de décompter les 'users' ayant résilié leur contrat SFR ('users deletés'), l'expert indique qu'en l'absence de stipulation contraire du mode d'affectation des licences, une personne qui résilie son contrat SFR perd le droit d'utilisation des services Setnet, sa licence étant attribuée à quelqu'un d'autre ;

Considérant dès lors que la SA SFR était en droit de ne compter que le nombre d'utilisateurs net, c'est-à-dire le nombre d'utilisateurs inscrits moins le nombre d'utilisateurs désinscrits ou deletés, le système de comptage M3BQ0S permettant de déterminer le nombre d''users deletés' ;

Considérant enfin que l'expert rappelle que le 'tool' a été défini comme un système de comptage qui fait une requête SQL ('select count') tous les deux mois sur le nombre d''users' qui se déclenche tout seul à la fin de chaque bimestre et que cette requête SQL 'select count' est pertinente et fonctionne pour faire le comptage des 'users' inscrits ;

Considérant dès lors que le MOU était parfaitement applicable et que sur les bases ci-dessus définies, l'expert a été en mesure d'effectuer le comptage bimestriel des 'users' de mars/avril 2004 à octobre 2006 tel qu'indiqué dans le tableau de son annexe 4, en fonction des chiffres communiqués à l'époque par la SA SFR à la société Setnet Corporation par l'intermédiaire de la SAS Hewlett-Packard France ;

Considérant que pendant cette période la société Setnet Corporation n'a jamais contesté ces chiffrages alors qu'elle aurait pu, si elle avait eu des doutes sur la sincérité des chiffres ainsi fournis, demander en son temps un audit technique qui aurait en particulier été utile pour vérifier les logs (fichiers contenant l'historique des événements), lesquels n'ont une durée de rétention que de 30 jours ;

Considérant qu'il apparaît qu'en réalité la contestation actuelle de la société Setnet Corporation se fonde sur le postulat désormais soutenu par elle en justice que tout abonné à SFR était automatiquement un utilisateur des licences Setnet, ce que l'expert a formellement écarté comme analysé précédemment ;

Considérant que sur la base de la définition technique qu'il convient de donner au terme 'user', l'expert estime que le comptage présenté par la SA SFR de 2004 à 2006 est plausible, que le nombre d''users' passe de 120.000 en mars/avril 2004 à 147.627 en septembre 2005 avant de chuter à 89.009 en novembre 2005 du fait de l'arrêt de l'utilisation de la technique Multimail, seuls subsistant les abonnés au service SFR Office dont le nombre reste relativement stable pour s'établir à 77.177 en octobre 2006 ; que ces chiffrages tiennent compte des 'users deletés' ou désinscrits ;

Considérant au surplus que les chiffres avancés par la société Setnet Corporation de 7.300.000 puis de 4.800.000 'users' ayant utilisé sa technologie chez SFR (soit l'ensemble des abonnés SFR) sont matériellement impossibles dans la mesure où la plate-forme mise en place au sein de la SA SFR pour intégrer la suite 'Cellcentric' ne pouvait accueillir plus de 500.000 utilisateurs ; ce qui est confirmé par le mode de détermination du prix des licences par tranches d''users' tel que figurant au MOU et qui s'arrête à un maximum de 500.000 'users' ;

Considérant que le rapport de M. [J] [I], complet et documenté, sera entériné par la cour ;

Considérant en conséquence qu'il en ressort que de 2004 à 2006 la SA SFR a payé les redevances correspondant bien au nombre d'utilisateurs inscrits à ses services utilisant les logiciels de la suite 'Cellcentric' après déduction des abonnés désinscrits et que dès lors l'accord de licences par 'utilisateur inscrit' n'a pas été violé par les sociétés SFR et Hewlett-Packard France ; qu'en l'absence de dépassements illicites des licences Setnet, aucun acte de contrefaçon n'est donc établi ;

Considérant que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Setnet Corporation de l'ensemble de ses demandes ;

III : SUR LES DEMANDES RECONVENTIONNELLES POUR PROCÉDURE ABUSIVE :

Considérant que la société Setnet Corporation soutient qu'elle n'a commis aucune faute, son imprudence en engageant une action en justice, à la supposer établie, ne constituant pas en elle-même un abus du droit d'agir en justice ;

Que si ses demandes avaient été dès l'origine abusives, le tribunal de commerce n'aurait pas fait droit à sa demande d'expertise et l'expert, une fois saisi, n'aurait pas accompli sa tâche ;

Qu'en tout état de cause aucun préjudice découlant de cette procédure n'est démontré par les sociétés Hewlett-Packard France et SFR ;

Qu'elle conclut à l'infirmation du jugement entrepris qui l'a condamnée pour procédure abusive et au débouté des sociétés Hewlett-Packard France et SFR de leurs demandes reconventionnelles ou, subsidiairement, de ramener le montant des dommages et intérêts à la somme d'1 € ;

Considérant que la SA SFR soutient que l'action judiciaire de la société Setnet Corporation caractérise un abus de droit en saisissant le tribunal d'une demande extravagante de 7.000.000.000 € appuyée sur des artifices dont elle n'ignorait pas le caractère fantaisiste ;

Qu'elle conclut à la confirmation partielle du jugement entrepris en demandant de porter la condamnation pour procédure abusive à la somme de 300.000 € outre la somme complémentaire de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Considérant que la SAS Hewlett-Packard France conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Setnet Corporation pour procédure abusive en demandant de la condamner au paiement de la somme complémentaire de 750.000 € en réparation du préjudice subi tant en termes de préjudice d'image que du fait des coûts engendrés par la mobilisation de ses équipes en interne du fait de la procédure abusive poursuivie en cause d'appel devant la cour, outre la somme de 1.500.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant ceci exposé, que le droit d'ester en justice peut dégénérer en abus en cas de faute lourde du demandeur, équipollente au dol ; qu'en l'espèce après avoir accepté pendant près de trois années l'application par les parties d'un accord négocié à son initiative et très largement rédigé par ses soins, sans exprimer la moindre contestation ni demander en cours d'exécution, si elle avait eu le moindre doute, une mesure d'audit, voire une expertise amiable ou judiciaire, la société Setnet Corporation a assigné les sociétés SFR et Hewlett-Packard sans élément sérieux quand au nombre allégué d'utilisateurs de ses logiciels, n'hésitant pas à réclamer dans son acte introductif d'instance à titre de dommages et intérêts des sommes d'un montant total particulièrement excessif de 7.660.000.000 € sans aucune justification d'un tel montant, sommes qu'elle a d'ailleurs en cours d'instance divisées par quatre sans plus de justification sérieuse ;

Considérant que le montant extrêmement élevé de ses premières demandes était susceptible de mettre en péril la situation financière des sociétés défenderesses dans la mesure où elles pouvaient être amenées, à la demande de leurs commissaires aux comptes, à devoir constituer à leur bilan des provisions d'un montant correspondant ;

Considérant dès lors que c'est à juste titre que les premiers juges ont dit qu'en agissant de la sorte, la société Setnet Corporation a manifestement engagé une procédure abusive ayant causé aux sociétés défenderesses un préjudice qu'ils ont correctement indemnisé en la condamnant à payer à chacun des deux défendeurs la somme de 200.000 € à titre de dommages et intérêts ; que le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef ;

Considérant que si la SA SFR ne présente pas de demande complémentaire de dommages et intérêts pour procédure abusive devant la cour, en revanche la SAS Hewlett-Packard France présente quant à elle une demande complémentaire en dommages et intérêts pour la poursuite abusive par la société Setnet Corporation de la procédure en appel ;

Considérant qu'il apparaît que la société Setnet Corporation, pourtant clairement informée par le jugement entrepris du mal fondé de ses demandes, a persisté dans ses errements procéduraux en interjetant appel, se contenant de reprendre devant la cour ses demandes et ses moyens ; qu'elle a ainsi fait dégénérer en abus son droit d'appel et a aggravé le préjudice déjà subi par la SAS Hewlett-Packard France en l'obligeant à soutenir sa défense devant la cour et à mobiliser une part non négligeable de son activité à cette fin, eu égard au montant toujours très important des dommages et intérêts réclamés solidairement aux deux sociétés intimées ; qu'au vu des éléments de la cause la cour évalue ce préjudice supplémentaire à la somme de 100.000 € ;

Considérant qu'ajoutant au jugement entrepris la société Setnet Corporation sera donc condamnée à payer à la SAS Hewlett-Packard France la somme complémentaire de 100.000 € à titre de dommages et intérêts pour appel abusif ;

IV : SUR LES AUTRES DEMANDES :

Considérant qu'il est équitable d'allouer à chacune des sociétés SFR et Hewlett-Packard France la somme complémentaire de 20.000 € au titre des frais par elles exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles de première instance ;

Considérant que les sommes au paiement desquelles la société Setnet Corporation est condamnée produiront intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du présent arrêt, la demande de capitalisation de ces intérêts présentée par la SAS Hewlett-Packard France étant sans objet dans la mesure où il n'existe aucun intérêt échu depuis un an ;

Considérant que la société Setnet Corporation sera pour sa part, déboutée de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que la société Setnet Corporation, partie perdante en son appel, sera condamnée au paiement des dépens d'appel, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur la charge des dépens de la procédure de première instance ;

P A R C E S M O T I F S

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement ;

Déboute la société Setnet Corporation de ses demandes de révocation de l'ordonnance de clôture, de réouverture des débats et de production de notes en délibéré ;

Écarte des débats les pièces n° 214 à 216 de la société Setnet Corporation ;

Entérine le rapport d'expertise déposé le 05 novembre 2011 par M. [J] [I] ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant :

Condamne la société Setnet Corporation à payer à la SAS Hewlett-Packard France la somme complémentaire de CENT MILLE EUROS (100.000 €) à titre de dommages et intérêts pour appel abusif ;

Dit que les sommes au paiement desquelles est condamnée la société Setnet Corporation produiront intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du présent arrêt ;

Déclare sans objet la demande de capitalisation des dits intérêts présentée par la SAS Hewlett-Packard France ;

Condamne la société Setnet Corporation à payer à chacune des sociétés SFR et Hewlett-Packard France la somme complémentaire de VINGT MILLE EUROS (20.000 €) au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens ;

Déboute la société Setnet Corporation de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Setnet Corporation aux dépens de la procédure d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 13/03820
Date de la décision : 12/03/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I1, arrêt n°13/03820 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-12;13.03820 ?
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