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08/04/2014 | FRANCE | N°11/06048

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 08 avril 2014, 11/06048


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 08 Avril 2014

(n° , 05 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/06048



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Mai 2011 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section encadrement RG n° 08/14757





APPELANT

Monsieur [Z] [R]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne,

assisté de

Me Laurent TIXIER, avocat au barreau de PARIS, toque : K0071

substitué par Me Ludovic MALGRAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J002







INTIMÉE

SA SANOFI AVENTIS FRANCE

[Adresse 2...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 08 Avril 2014

(n° , 05 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/06048

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Mai 2011 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS section encadrement RG n° 08/14757

APPELANT

Monsieur [Z] [R]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne,

assisté de Me Laurent TIXIER, avocat au barreau de PARIS, toque : K0071

substitué par Me Ludovic MALGRAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J002

INTIMÉE

SA SANOFI AVENTIS FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Olivier CAPILLON, avocat au barreau de PARIS, toque : E1308

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Janvier 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Claudine PORCHER, présidente

Mme Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Madame Aline BATOZ, vice présidente placée faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 10 décembre 2013

qui en ont délibéré

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claudine PORCHER, présidente et par Madame Caroline CHAKELIAN , greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [Z] [R] a été engagé par la SA SANOFI AVENTIS FRANCE le 1er mars 1976. Il exerçait en dernier lieu les fonctions de directeur régional, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, en contrepartie d'un revenu moyen mensuel brut de 5 649,82 €.

Monsieur [R] a été licencié par courrier du 29 septembre 2006 énonçant le motif du licenciement dans les termes suivants :

« Monsieur,

Nous vous confirmons les termes de notre entretien du 26 septembre 2006 en nos bureaux, au cours duquel vous ont été exposés les motifs qui nous amenaient à envisager votre licenciement.

En effet, par courrier en date du 12 septembre 2006, votre supérieur hiérarchique vous rappelait une nouvelle fois les carences managériales constatées dans l'exercice de votre fonction, carences qui ne peuvent être tolérées dans la tenue de votre poste de Directeur Régional.

Face à ce constat, nous vous avons proposé, lors d'un entretien qui s'est tenu le 13 septembre 2006 avec votre responsable ressources humaines, un poste de visiteur hospitalier, dans le réseau Neurologie, disponible sur la région Picardie.

Après réflexion, vous nous avez informé que vous refusiez cette proposition.

Aucun autre poste correspondant à vos qualifications n'étant actuellement disponible dans la région Nord, et dans la mesure où vous nous avez indiqué ne pas être mobile sur une autre région, nous sommes contraints de vous signifier votre licenciement, lequel prendra effet dès première présentation de ce courrier à votre domicile. A cette date, vous cesserez de faire partie de l'effectif de l'entreprise.

Votre préavis de trois mois débutera à la première présentation de ce courrier. Nous entendons vous dispenser d'activité au cours de celui-ci ; vous serez néanmoins rémunéré jusqu'à son terme aux échéances normales de paie ».

Le 8 janvier 2007, la société SANOFI AVENTIS France et Monsieur [R] ont conclu une transaction mettant fin au litige les opposant. Une indemnité transactionnelle, forfaitaire et globale d'un montant de 92 000 € a été versée au salarié qui, en contrepartie, renonçait à engager toute action à l'encontre de la société SANOFI AVENTIS France au titre de l'exécution et de la cessation de son contrat de travail.

Monsieur [R] a contesté la validité de cette transaction en saisissant la juridiction prud'homale le 10 décembre 2008.

Par jugement du 17 mai 2011, la section Encadrement du conseil de prud'hommes de Paris, présidée par le juge départiteur, a débouté Monsieur [R] de sa demande.

Cette décision a été frappée d'appel par le salarié qui demande à la cour de constater qu'à aucun moment, il n'a été informé du projet de réorganisation de la société SANOFI AVENTIS FRANCE, la transaction du 8 janvier 2007 n'évoquant pas même ce projet, de prononcer en conséquence la résolution de la transaction du 8 janvier 2007 et, sur le fond, de juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la SA SANOFI AVENTIS FRANCE à lui payer, avec intérêts au taux légal à compter du 26 mars 2009, une somme de 1 213 611,10 €, outre 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'employeur conclut à la confirmation du jugement entrepris et sollicite une somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées lors de l'audience des débats.

SUR QUOI, LA COUR,

Sur la mise en cause de la validité de la transaction

Monsieur [R] soutient que son consentement à la signature, le 8 janvier 2007, d'une transaction lui allouant une indemnité transactionnelle de 92 000 €, a été surpris et vicié par la société SANOFI AVENTIS FRANCE justifiant son annulation et sa demande d'indemnisation à hauteur de 1 213 611,10 €.

Le salarié estime qu'après plus de trente années d'ancienneté, il était en droit d'attendre de son employeur une information parfaitement loyale sur le devenir de l'entreprise et sur ce à quoi il était appelé à renoncer. Il souligne que son employeur avait un intérêt financier évident à lui faire conclure une transaction dans un délai extrêmement court. La société aurait fait preuve d'empressement à compter de septembre 2006 pour priver le salarié de toute information utile en le dispensant notamment de préavis, la transaction ayant été signée quelques jours avant l'annonce officielle d'un plan de sauvegarde de l'emploi, sans même qu'un article de ce document ne précise ce à quoi il aurait été prêt à renoncer. Monsieur [R] invoque l'existence de « man'uvres » de la SA SANOFI AVENTIS FRANCE de nature à vicier son consentement.

La SA SANOFI AVENTIS FRANCE conteste l'existence d'un dol. Elle fait valoir que Monsieur [R] a été licencié pour un motif personnel tiré de carences professionnelles et d'un refus d'être affecté à un nouveau poste, qu'aux termes de la transaction du 8 janvier 2007, il lui a été alloué une indemnité transactionnelle représentant 13,5 mois de salaire, laquelle s'ajoutait aux indemnités de rupture perçues par Monsieur [R], à savoir une indemnité de préavis de trois mois et une indemnité de licenciement de 146 023,15 €.

Selon l'employeur, ce serait pour tenter de contourner la difficulté procédurale majeure tenant au caractère irrévocable de la transaction valablement signée que Monsieur [R] invoquerait l'existence d'un dol viciant son consentement à la transaction.

Considérant qu'en vertu de l'a rticle 2053, alinéa 2, du code civil, une transaction peut être rescindée dans tous les cas où il y a dol ou violence ; que selon l'article 1116 du code civil, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ;

Considérant que celui qui se prévaut d'un dol doit prouver l'existence de man'uvres de la part de son cocontractant et que, sans ces man'uvres, il n'aurait pas contracté ;

Considérant que les man'uvres alléguées par Monsieur [R] consisteraient dans la dissimulation au salarié du projet de réorganisation de la société conduisant à un plan de cessation anticipée d'activité, alors qu'il n'aurait jamais refusé le poste qui lui avait été proposé ni signé la transaction, s'il avait été informé de ces éléments de contexte ; que la société se serait « bien gardée de convoquer à l'entretien préalable de licenciement un représentant du personnel, lequel très vraisemblablement informé de toute la situation sociale de l'entreprise, aurait pu aborder le sujet et compromettre ainsi son consentement à renoncer à toute instance et action, et à être indemnisé à cette hauteur » ; qu'elle ne lui aurait communiqué aucune information en cours de préavis ;

Considérant qu'il est constant que le 19 septembre 2006, Monsieur [R] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement qui s'est tenu le 26 septembre 2006, prélude à la décision de la SA SANOFI AVENTIS FRANCE qui a notifié au salarié son licenciement par lettre du 29 septembre 2006 ; que la signature de la transaction est intervenue le 8 janvier 2007, le préavis il avait été dispensé ayant expiré le 29 décembre 2006 ;

Considérant que la méconnaissance, alléguée pour la première fois près de deux années après la signature de la transaction litigieuse, de l'existence d'un plan de cessation anticipée d'activité de l'entreprise ne peut résulter de man'uvres de dissimulation imputables à la SA SANOFI AVENTIS FRANCE, alors qu'il est établi par les pièces produites et les débats :

- que la société n'a pas cherché à se séparer rapidement de Monsieur [R] dès lors que son licenciement n'a été prononcé qu'à la suite de son refus d'accepter l'un des deux autres postes qui lui avaient été proposés, seules ses capacités de management ayant été contestées,

- que le fait que Monsieur [R] n'ait pas été assisté lors de l' entretien préalable au licenciement résulte de la seule décision du salarié qui avait été régulièrement informé dans la lettre le convoquant à cet entretien fixé une semaine plus tard qu'il pourrait se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise,

- que dès le 25 octobre 2006, la SA SANOFI AVENTIS FRANCE avait annoncé son projet de restructuration accompagné de suppressions d'emploi et de la mise en place de mesures d'âge par un communiqué de presse repris le même jour par de grands quotidiens nationaux, en l'occurrence Le Monde et Les Echos, de manière spécialement visible, sous un titre accrocheur imprimé en gros caractères gras et dépourvu de toute ambiguïté : « Avec un chiffre d'affaires en baisse, Sanofi compte supprimer 500 postes en France »,

- que Monsieur [R], qui n'a procédé à la restitution de son matériel informatique que le 11 janvier 2007, avait bénéficié de son accès Intranet jusqu'au 1er janvier 2007, date à laquelle son compte informatique a été désactivé comme cela résulte d'un message électronique émanant de Monsieur [C] [K], membre du personnel en charge des connexions des salariés de la société, ce qui lui avait permis d'accéder au portail de la société et de prendre connaissance des informations diffusées par voie numérique,

- que le salarié a fait lui-même état, dans son courrier du 10 juillet 2007 par lequel il évoquait une difficulté liée à la soumission d'une fraction de l'indemnité transactionnelle à l'impôt sur le revenu et à cotisations sociales que l'employeur lui avait annoncée en septembre 2006, du dispositif de « CAA individualisé promis verbalement lors de nos entretiens », reconnaissant alors par là explicitement qu'il y avait été fait référence lors des négociations ayant abouti à la signature de la transaction du 8 janvier 2007 ;

Considérant que l'information dont Monsieur [R] soutient qu'elle lui aurait été cachée avait au contraire été rendue publique par la SA SANOFI AVENTIS FRANCE elle-même deux mois et demi avant la signature de la transaction litigieuse ; qu'en outre, Monsieur [R] n'était pas privé de contact avec ses collègues nécessairement intéressés à la vie de l'entreprise et aux informations diffusées par l'entreprise et par les médias ;

Considérant qu'il est par ailleurs établi que les mesures d'accompagnement n'ont été définies que plus tard, à l'issue des négociations entre les partenaires sociaux ; que le plan de sauvegarde de l'emploi n'a été conclu que le 5 mars 2007 ;

Considérant que Monsieur [R] n'ayant pas été licencié pour un motif économique mais pour un motif personnel, il n'y avait pas lieu de se référer dans la transaction aux discussions relatives au plan social en cours d'élaboration ;

Considérant que le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [R] de sa demande, à raison de ce que le salarié ne démontrait pas qu'au jour de la signature de la transaction, il serait resté, par le fait de man'uvres de la société Sanofi, dans l'ignorance de l'existence du plan social annoncé le 15 octobre 2006 et depuis lors en cours d'élaboration et qu'il manquait à établir en quoi et comment son consentement aurait été surpris ou vicié par la société Sanofi lors de la conclusion de la transaction du 8 janvier 2007.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

AJOUTANT,

DEBOUTE les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA SANOFI AVENTIS FRANCE aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 11/06048
Date de la décision : 08/04/2014

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°11/06048 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-04-08;11.06048 ?
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