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14/10/2014 | FRANCE | N°11/07092

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 14 octobre 2014, 11/07092


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 14 Octobre 2014

(n° , 05 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/07092



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Avril 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 09/15504





APPELANT

Monsieur [K] [X]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparant en personne

assisté de Me Sébastien LHEUREUX, avoc

at au barreau de PARIS, toque : G0264





INTIMEE

SARL ETUDE VERIFICATION COORDINATION DE TRAVAUX DE BATIMENT (E.V.T.B.)

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Fabienne NASICA,...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 14 Octobre 2014

(n° , 05 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/07092

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Avril 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 09/15504

APPELANT

Monsieur [K] [X]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparant en personne

assisté de Me Sébastien LHEUREUX, avocat au barreau de PARIS, toque : G0264

INTIMEE

SARL ETUDE VERIFICATION COORDINATION DE TRAVAUX DE BATIMENT (E.V.T.B.)

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Fabienne NASICA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1887

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mai 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claudine PORCHER, Président de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Claudine PORCHER, président

Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Madame Aline BATOZ, vice-président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 17 mars 2014

Greffier : Mme Caroline CHAKELIAN, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claudine PORCHER, présidente et par Madame Caroline CHAKELIAN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [K] [X], engagé à compter du 2 juillet 1984 en qualité de vérificateur TCE 2ème échelon par la société ETUDES ET VERIFICATION DE TRAVAUX DE BATIMENT EVTB et occupant en dernier lieu le poste de vérificateur principal généraliste, a été convoqué le 5 octobre 2006 à un entretien préalable fixé au 16 octobre et mis à pied à titre conservatoire avant d'être licencié, le 19 octobre 2006, pour faute grave motivée par des erreurs répétées et un comportement inacceptable à l'égard de son employeur.

Contestant la validité de son licenciement, Monsieur [K] [X] a saisi, le 27 novembre 2009, le conseil de prud'hommes de PARIS qui, par jugement rendu le 18 avril 2011, après avoir requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, a condamné la SARL EVTB à lui payer 10 466 € d'indemnité compensatrice de préavis et 1 046 € de congés payés afférents, 18 838,08 € d'indemnité conventionnelle de licenciement et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et exécution provisoire dans la limite de neuf mois de salaire fixé à 3 488,80 € ainsi qu'à 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile déboutant les parties du surplus de leurs demandes.

Le 24 juin 2011,Monsieur [K] [X] a interjeté appel de cette décision.

Il invoque, à compter de 2004, une dégradation soudaine de ses conditions de travail visant à le pousser à la démission et ayant eu des répercussions importantes sur son état de santé, le caractère infondé et de plus imprécis des griefs retenus à l'appui de la mesure de licenciement survenu alors qu'il avait été déclaré inapte temporaire à son poste par le médecin du travail, le préjudice financier et moral subi et, en tout état de cause, un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, une discrimination salariale dont il a fait l'objet, l'absence de maintien de son salaire en période de maladie ainsi que le défaut de restitution de ses effets personnels.

Il demande de confirmer le jugement déféré du chef des condamnations prononcées au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l'infirmer en ce qu'il a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse et de condamner la société EVTB au paiement des sommes de :

* à titre principal

- 41 865 € au titre de l'illicéité du licenciement

* à titre subsidiaire

- 41 865 de dommages et intérêts pour licenciement abusif

* en tout état de cause

- 20 932 € de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité de résultat

- 41 865 € en réparation du préjudice moral, de carrière et de retraite subi du fait de la discrimination salariale

- 5 000 € de dommages et intérêts pour défaut de restitution des effets personnels

- 5 919,46 € de complément d'indemnité maladie et 591,94 € de congés payés afférents

- 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société EVTB invoque un désinvestissement total, au bout de vingt ans, de Monsieur [X] dans son travail pour des raisons inexpliquées, un déclenchement des hostilités par ce dernier suite à un avertissement motivé par un retard, des dossiers non traités ou erronés et des absences injustifiées, des accusations de harcèlement non fondées et une altercation violente avec son employeur rendant impossible toute poursuite du contrat même à titre temporaire, l'absence de discrimination salariale et de complément de salaire dû sur les périodes d'arrêt maladie et d'effets personnels à restituer.

Elle demande d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il n'a pas retenu la faute grave et de condamner Monsieur [X] au remboursement des sommes allouées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité de licenciement, de débouter ce dernier de ses prétentions nouvelles et de mettre à sa charge une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits et de la procédure, des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions visées par le greffier, reprises et complétées à l'audience des débats.

SUR CE, LA COUR,

Sur la nullité du licenciement

A l'appui de sa demande en nullité du licenciement fondée sur les dispositions des articles L 1152-1, L 1152-3 et L 1152-4 du code du travail relatives aux agissements de harcèlement moral, Monsieur [X] invoque une détérioration de la relation de travail dès le début de l'année 2004 se traduisant par une remise en cause constante de son professionnalisme, un dénigrement permanent de son travail et une discrimination salariale ainsi qu'une dégradation de son état de santé.

Il produit les lettres recommandées de son employeur, des avertissements du 15 mars 2004, 25 mai 2004,13 octobre 2004, 20 mai 2005, une attestation d'une ancienne salariée et des documents médicaux établissant ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

L'employeur soutient que les avertissements sont motivés par le non-respect par Monsieur [X] de ses horaires de travail, des dossiers non traités dans les délais impartis ou erronés et des absences injustifiées, que ses courriers constituaient la nécessaire réponse à la multiplication des lettres agressives et mensongères du salarié et qu'aucun des documents médicaux produits par ce dernier ne fait état d'une quelconque relation entre l'état de santé de ce dernier et son activité professionnelle.

Il verse notamment aux débats les courriers de Monsieur [X] et des attestations de son personnel.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les avertissements, dont le caractère infondé n'est pas établi, s'inscrivaient dans le cadre du pouvoir disciplinaire de l'employeur, que chacun des nombreux courriers, de plus en plus critiques et polémiques, du salarié, engendrait systématiquement une réponse de la société et vice versa.

Par ailleurs, l'unique 'attestation sur l'honneur'de Madame [Q], employée de la société du 25 avril 2005 au 28 février 2007, établie le 10 juillet 2010 soit, près de 4 ans après le départ du salarié faisant état d'un réel harcèlement moral subi par ce dernier en reprenant pour partie son argumentation se heurte aux témoignages de l'ensemble du personnel dont il y a lieu de noter, tout comme pour Monsieur [X], la grande ancienneté dans l'entreprise, et qui atteste de l'absence de tout comportement constitutif de harcèlement moral de la part de l'employeur à l'encontre de ce dernier ou de tout autre collaborateur.

Enfin, le document médical établi par le Service Médical de Santé au Travail, s'il porte mention, lors d'un examen du 9 février 2005, de ce que le salarié déclare subir un harcèlement moral et le constat, lors de nombreuses consultations spontanées, de la grande souffrance morale de Monsieur [X], n'en attribue pas expressément la cause aux conditions du travail et ne comporte aucun avis d'inaptitude définitive à son poste.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré qui n'a pas retenu de faits constitutifs de harcèlement et a écarté la demande en nullité du licenciement formée par Monsieur [X] sur ce fondement.

Par ailleurs il n'est pas établi que l'avis d'inaptitude temporaire à son poste de Monsieur [X], émis par le médecin du travail le 5 octobre 2006, a été porté à la connaissance de l'employeur avant l'engagement par ce dernier, par courrier du même jour, de la procédure de licenciement.

Sur la demande de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité de résultat

Aucun fait constitutif de harcèlement n'ayant été retenu à l'encontre de l'employeur, la demande de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité de résultat ne peut prospérer.

Sur la demande de dommages et intérêts pour discrimination salariale

Cette demande formée en cause d'appel, plus de six après le licenciement de sorte que toute réclamation en rappel de salaire est atteinte par la prescription quinquennale, n'est pas justifiée au regard des bulletins de paie de Monsieur [X] faisant état d'augmentations régulières de sa rémunération et des éléments produits par l'employeur de nature à établir que les augmentations des salariés auxquels l'appelant se compare reposent sur des promotions ou des modifications de leur charge de travail.

Il convient en conséquence de débouter Monsieur [X] de cette demande.

Sur le licenciement pour faute grave

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis et, l'employeur qui l'invoque pour licencier, doit en apporter la preuve.

Outre les manquements professionnels reprochés au salarié dans la lettre de licenciement et non sérieusement contestées, l'incident du 5 octobre 2006 au cours duquel Monsieur [X] s'est emporté, a refusé de quitter le bureau du gérant et a tenu des propos désobligeant à l'encontre de ce dernier ainsi qu'en attestent quatre collaborateurs ayant assisté à la scène, constitue un acte d'insubordination justifiant la rupture du contrat de travail mais, dès lors qu'il s'inscrit dans la ligne droite d'une relation conflictuelle tolérée depuis plus de deux ans, ne rend pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré qui a considéré que le licenciement de Monsieur [X] reposait sur une cause réelle et sérieuse et a fait droit à ses demandes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

Sur la demande au titre d'un complément d'indemnité maladie

Il n'est pas contesté que Monsieur [X] bénéficiait du maintien de son salaire durant ses périodes d'arrêt maladie.

Il résulte des bulletins de paie produits par le salarié que ce maintien n'a pas été assuré pour les mois de février, juin, juillet et octobre 2006 et qu'il lui reste dû pour ces périodes une somme de 5 919,46 € et 591,94 € de congés payés afférents.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande formée à ce titre, en cause d'appel, par Monsieur [X].

Sur la demande au titre d'un défaut de restitution des effets personnels

Cette demande, formée en cause d'appel, fait suite à un courrier officiel du 20 décembre 2011 adressé à l'employeur par le conseil du salarié et d'une lettre de ce dernier du 7 décembre 2012 listant les effets personnels de manière non exhaustive.

Elle intervient ainsi plus de 5 ans après le départ de Monsieur [X] de la société qui, de ce fait, peut raisonnablement soutenir n'avoir retrouvé aucun bien appartenant à ce dernier.

En tout état de cause, la tardiveté d'une telle demande démontre le caractère non essentiel des effets personnels réclamés et l'absence de préjudice subi.

Il convient en conséquence de débouter Monsieur [X] de cette demande.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

Condamne la société ETUDES ET VERIFICATION DE TRAVAUX DE BATIMENT EVTB à payer à Monsieur [X] la somme de 5 919,46 € de complément d'indemnité maladie et 591,94 € de congés payés afférents.

Déboute Monsieur [X] de ses autres demandes nouvelles en cause d'appel.

Condamne la société ETUDES ET VERIFICATION DE TRAVAUX DE BATIMENT EVTB aux dépens d'appel.

Dit n'y avoir lieu à allocation de somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 11/07092
Date de la décision : 14/10/2014

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°11/07092 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-14;11.07092 ?
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