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15/10/2014 | FRANCE | N°12/07360

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 15 octobre 2014, 12/07360


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2014



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/07360



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Mars 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 03/17882



APPELANTS



Madame [V], [F] [M] agissant à titre personnel et ès-qualités d'administrateur légal de ses 3 enfants mineurs, hér

itiers de M. [J] [B] décédé

[Adresse 7]

[Localité 1]



Monsieur [D], [K], [N] [B] représenté par sa mère Mme [V] [B], administrateur légal de ses enfants mineurs

[Adres...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2014

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/07360

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Mars 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 03/17882

APPELANTS

Madame [V], [F] [M] agissant à titre personnel et ès-qualités d'administrateur légal de ses 3 enfants mineurs, héritiers de M. [J] [B] décédé

[Adresse 7]

[Localité 1]

Monsieur [D], [K], [N] [B] représenté par sa mère Mme [V] [B], administrateur légal de ses enfants mineurs

[Adresse 7]

[Localité 1]

Monsieur [A], [E], [L] [B] représenté par sa mère Mme [V] [B], adminstrateur légal de ses enfants mineurs

[Adresse 7]

[Localité 1]

Mademoiselle [U], [G], [C], [Z] [B] représentée par sa mère Mme [V] [B], administrateur légal de ses enfants mineurs

[Adresse 7]

[Localité 1]

Représentés par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND - VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010, avocat postulant

Assistés de Me Pierre CYCMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0141, avocat plaidant

INTIMÉS

Monsieur [H] [T]

[Adresse 1]

[Localité 9]

SCI BDG BOULEVARD DE CLICHY prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentés par Me Nicolas GARBAN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0795, avocat postulant

Assistés de Me Mathilde BACHELIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0795, avocat plaidant substituant Me Nicolas GARBAN

Monsieur [W] [O]

[Adresse 9]

[Localité 8]

Représenté par Me Denis TALON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0428, avocat postulant

Assisté de Me Sophie DUBOIS substituant Me Denis TALON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0428, avocat plaidant

Syndicat des copropriétaires 30 BOULEVARD DE CLICHY 75018 PARIS représenté par son Syndic la SARL PAGESTI

[Adresse 10]

[Localité 5]

Représenté par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050, avocat postulant

Assisté de Me Emmanuel BRUDER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1369, avocat plaidant

SAS MARCHAL SYNGEST prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050, avocat postulant

Assistée de Me Catherine BEURTON, avocat au barreau de PARIS, toque : D1612, avocat plaidant

SA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Stéphane BRIZON, avocat au barreau de PARIS, toque : D2066

Compagnie d'assurances AREAS DOMMAGES ès-qualités d'assureur du SDC du 30 boulevard de Clichy prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, avocat postulant

Assistée de Me Séverine CARDONEL, avocat au barreau de PARIS, toque : E1105, avocat plaidant substituant Me Patrice CHARLIE, avocat au barreau de PARIS, toque D 1172

SAS GFA prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 5] et [Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Assistée de Me Jean-pierre DUGAL, avocat au barreau de PARIS, toque : B0628, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Juin 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Chantal BARTHOLIN, présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, présidente

Madame Odile BLUM, conseillère

Monsieur Christian BYK, conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Orokia OUEDRAOGO

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, présidente, et par Madame Orokia OUEDRAOGO, greffière.

********

M. [J] [B] aux droits duquel se trouvent Mme [B] et ses enfants, ci après les consorts [B], était propriétaire de locaux commerciaux composés d'un caveau au sous sol avec accès au rez de chaussée pour l'avoir acquis suivant acte authentique du 24 janvier 2003 de Mme [Y] en même temps que d'autres lots dépendant d'un immeuble situé 30 boulevard de Clichy 75018 Paris ;

Les locaux ont été donnés à bail commercial pour une destination de cabaret spectacles, la société GFA étant devenue locataire à la suite de l'acquisition du fonds en 2000 ;

Par acte d'huissier du 3 décembre 2003, M [J] [B] a sollicité la résiliation du bail en invoquant le défaut d'exploitation et d'entretien des locaux ; une expertise a été ordonnée par jugement du 29 janvier 2004 afin de rechercher la cause des infiltrations apparues dans les locaux loués, la société locataire étant autorisée à consigner la moitié des loyers ; par ordonnance du 27 avril 2006, le juge de la mise en état a autorisé la locataire à consigner la totalité des loyers .

L'expert a déposé son rapport le 2 février 2009.

Sont intervenus dans la cause l'ancienne propriétaire des locaux Mme [R] veuve [Y] puis à son décès, son héritier M [W] [O], le syndicat des copropriétaires du 30 boulevard de Clichy, la société Paul Marchal mandataire de Mme [Y], la SCI BDG Boulevard de Clichy acquéreur du lot du rez- de- chaussée et les compagnies d'assurances AREAS dommages et MMA iard.

Par jugement du 8 mars 2012, le tribunal de grande instance de Paris a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire:

-prononcé la résiliation du bail aux torts de [J] [B] pour manquement à son obligation de garantir la jouissance paisible,

-condamné M [J] [B] à payer à la SAS GFA la somme de 298 210, 66 euros en réparation du trouble de jouissance,

-ordonné que les sommes consignées à la Caisse des dépôts et consignations en vertu des décisions des 29 janvier 2004 et 27 avril 2006 soient restituées à la société GFA,

-débouté les parties de leurs autres demandes,

-condamné M [J] [B] à payer à la SAS GFA une somme de 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Les consorts [B] - Mme [B] à titre personnel et ès-qualités d'administratrice légale de ses enfants mineurs - sont appelants de cette décision ; ils demandent à la cour par conclusions signifiées le 12 mai 2014 de :

Les dire recevables en leur action et surseoir à statuer en l'attente du rapport de M [Q] inspecteur sanitaire de la ville de [Localité 10] ,

Dire que la société GFA a manqué gravement à ses obligations contractuelles, ce qui justifie le prononcé de la résiliation du bail, l'expulsion de la société GFA et de tous occupants de son chef, sans délai et par la force huit jours après la signification du jugement( sic) ; la séquestration de son mobilier dans tel garde meubles au choix du preneur et à ses frais,

Fixer à la somme de 3000 € le montant de l'indemnité d'occupation due par la société GFA jusqu'au départ effectif des lieux,

Déconsigner les loyers séquestrés au profit des consorts [B] et condamner la société GFA au paiement des loyers et charges,

A titre subsidiaire,

Limiter l'indemnisation du préjudice revendiqué par la société GFA à la somme de 53 357 euros prix d'achat du fonds,

En tout état de cause,

Condamner la société GFA, la SCI SBG Boulevard de Clichy, M [O], ès-qualités, la société Paul Marchal, ès-qualités, le syndicat des copropriétaires du 30 boulevard e Clichy à payer aux consorts [B] la somme de 30 000 € à titre de dommages intérêts, en réparation de leur préjudice, celle de 25 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamner la société GFA aux dépens.

La SAS GFA par conclusions signifiées le 14 février 2014 demande de :

Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail, ordonné la déconsignation au profit de GFA des loyers et charges séquestrés auprès de la caisse des dépôts et consignations, et pour le surplus:

Ordonner le remboursement de tous les loyers et charges payés par la société GFA au bailleur depuis le 3ème trimestre 2003, et dire que la société GFA n'est redevable d'aucun loyer ni charges,

Condamner le bailleur au paiement de la somme de 629 100, 10 € au profit de la société GFA au titre des pertes d'exploitation, du remboursement des loyers et frais fixes, des frais de travaux effectués avant et après expertise, et de la valeur du fonds de commerce,

Condamner la bailleur au paiement d'une somme de 20 000 € au profit de la société GFA pour procédure abusive,

Condamner les consorts [B] au paiement de la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société BDG Boulevard de Clichy et M [H] [T] par conclusions signifiées le 2 octobre 2012 demandent de dire que l'action des consorts [B] viole les stipulations de l'acte authentique de vente du 18 février 2005 et confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M [B] de ses demandes à cet égard,

Infirmer le jugement pour le surplus et

Condamner solidairement les consorts [B] à payer à la société BDG Boulevard de Clichy et à M [T] la somme de 10 000 € au titre du préjudice subi du fait de l'abus de droit commis par M [B],

A titre subsidiaire,

Annuler les constatations expertales afférentes aux désordres dont l'origine serait postérieure au jugement fixant la mission de l'expert,

Dire que les consorts [B] ne démontrent ni faute ni préjudice ni lien de causalité entre la faite et le préjudice invoqués,

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M [B] de sa demande indemnitaire à l'encontre de la société BDG Boulevard e Clichy et de M [T],

Infirmer le jugement pour le surplus,

Condamner solidairement les consorts [B] à payer à la société BDG Boulevard de Clichy et à M [T] la somme de 10 000 € au titre du préjudice subi du fait de l'abus de droit commis par M [B],

En toute hypothèse,

Condamner la partie succombante à payer à la société BDG Boulevard de Clichy la somme de 8000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.

Le syndicat des copropriétaires du 30 Boulevard de Clichy demande par conclusions signifiées le 9 octobre 2012 de rejeter l'ensemble des demandes des consorts [B] à son encontre, de confirmer le jugement entrepris en qu'il n'a retenu aucune responsabilité du syndicat, très subsidiairement si la cour devait en décider autrement, condamner la société AZREAS dommages et la société MMA assureurs du syndicat des copropriétaires à garantir le syndicat de toute condamnation, et condamner les consorts [B] à lui verser la somme de 3 600 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.

La société AREAS conclut les 4 et 6 septembre 2012, et les 2 et 3 octobre 2012 que l'appel des consorts [B] ne la vise pas, que cet appel est abusif et demande de condamner Mme [B] tant à titre personnel que comme administratrice de ses enfants mineurs à lui payer la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.

La société MMA IARD, par conclusions signifiées le 01 avril 2014 , demande de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a mis hors de cause la société MMA IARD venue aux droits de AZUR assurances du fait de l'absence de grief pouvant être retenu à l'encontre, du syndicat des copropriétaires, de condamner toute partie succombante à lui verser la somme de 1 200 € par application de l'article 700 du code de procédure civile .

M [W] [O], par conclusions signifiées le 28 mars 2014, demande d'ordonner sa mise hors de cause, de déclarer les consorts [B] irrecevables et en tout cas mal fondés en leur demande de condamnation à son encontre, de rejeter la demande de la société Marchal tendant à la condamnation in solidum de lui-même et des consorts [B] à lui verser la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de dire la société GFA irrecevable et mal fondée à solliciter sa condamnation, de condamner les consorts [B] à lui payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner tout succombant aux dépens.

La société Marchal Syngest, venant aux droits de la société Paul Marchal SA, par conclusions signifiées les 26 septembre, 2, 3 et 8 octobre 2012 demande de prononcer la nullité des conclusions d'appel des consorts [B] et de l'assignation du 2 août 2012 à son égard, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M [B] de ses demandes à son encontre, de condamner solidairement les consorts [B] à lui payer la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, de condamner in solidum M [O] et les consorts [B] solidairement entre eux à lui payer la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner in solidum tout succombant aux dépens de première instance et d'appel .

SUR CE,

La société Marchal Syngest demande la nullité de l'assignation du 2 août 2012 à son égard sans produire celle-ci alors qu'elle a été mise en cause en première instance par Mme [Y] par assignation du 30 septembre 2004 et que partie en première instance et intimée en cause d'appel, elle devait être assignée, faute d'avoir constitué avocat sur la déclarations d'appel . Sa demande tendant à la nullité des conclusions des consorts [B] ne relève pas au surplus de la compétence de la cour mais du conseiller de la mise en état exclusivement compétent pour statuer sur cette demande .

Sur la demande de sursis à statuer :

Mme [B] et ses enfants demandent qu'il soit sursis à statuer jusqu'au dépôt du rapport de M [Q] inspecteur sanitaire assermenté de la ville de [Localité 10] qui intervient dans le cadre de la réhabilitation du secteur où se trouve l'immeuble objet du bail aux motifs que celui-ci aurait mis en évidence d'autres causes aux fuites constatées dans l'immeuble ;

Or la cour dispose d'une expertise contradictoire et détaillée de M [P] dont les consorts [B] n'ont pas sollicité le rejet dans le dispositif de leurs conclusions et qui suffit à éclairer la cour sans qu'il y ait lieu d'attendre le rapport de M [Q] qui n'a pas valeur d'une expertise judiciaire.

Sur la résiliation du bail :

Les consorts [B] soutiennent que la locataire a gravement manqué à ses obligations en ne dénonçant pas les locations gérances successivement consenties à la société TVB et l'EURL Tissier, et pour n'avoir pas tenu le caveau constamment ouvert comme le bail lui en faisait l'obligation, alors qu'aux dates des constatations effectuées par huissier (avril 2003, octobre et novembre 2003), les dégâts des eaux allégués ne rendaient pas l'exploitation commerciale impossible, que d'ailleurs la copropriété s'était engagée à faire les travaux nécessaires en août 2002, que M [B] s'est lui-même engagé à mettre en oeuvre des expertises amiables qui n'ont pu être réalisées en raison de l'inertie de la locataire, que l'expertise [P] a mis en évidence que la locataire a manqué à son obligation d'entretien de ses installations sanitaires et de plomberie qui sont à l'origine de nombreux dommages, que ces manquements justifient le prononcé de la résiliation du bail et l'allocation de dommages intérêts.

Or comme l'a relevé pertinemment le tribunal, aucune disposition du bail ne fait obligation au preneur de dénoncer l'acte de location gérance qui était d'ailleurs antérieur en ce qui concerne l'acte passé avec la sarl TVB à la date d'acquisition des murs par M [B].

Comme l'a également souligné le tribunal, M [B] en acquérant le 24 janvier 2003 divers lots de l'immeuble dont celui abritant le fonds, a été avisé d'un litige en cours opposant Mme [Y] précédente propriétaire à sa locataire qui l'a attraite d'heure à heure devant le juge des référés en août 2002 pour voir ordonner une expertise en raison des désordres affectant les locaux et notamment à la suite de la coupure d'eau effectuée par les pompiers le 3 juillet 2002 et se voir autoriser à réaliser les travaux estimés indispensables en cas d'urgence . Il n'est pas contesté qu'au cours de cette audience, Mme [Y] a pris l'engagement de réaliser les travaux nécessaires qui ont semble-t-il été commencés mais pas achevés, les désordres ayant persisté ainsi qu'il résulte des constats d'huissier dressés par la locataire les 23 mai et 16 juin 2003, de la déclaration de sinistre faite par la société occupante des lieux et enfin de la lettre recommandée adressée par la société GFA à M [B] le1er mars 2004 lui demandant en raison des importantes fuites d'eau en provenance des étages supérieurs ou de la colonne d'eau de l'immeuble de bien vouloir faire les travaux pour les faire cesser ;

Les consorts [B] ne justifient pas des diligences effectuées à la suite de cette lettre recommandée alors que le constat d'huissier du 16 juin 2003 indiquait que des travaux sont en cours d'exécution mais que de nombreux gravats jonchent le sol et que les lieux sont inexploitables en l'état,

Il s'ensuit que le tribunal a justement relevé que l'expertise [P] a conclu que la plupart des désordres sont dus à la vétusté des canalisations communes et à des inondations en provenance du rez- de- chaussée, et non à un défaut d'entretien par la locataire de ses propres installations, même si la pose de revêtements et le défaut de ventilation n'ont fait qu'accentuer les désordres et a, en conséquence, à bon droit débouté M [B] de sa demande de résiliation judiciaire du bail pour manquements du preneur à ses obligations.

Tels que décrits dans les constats d'huissier et le rapport d'expertise -le plafond et les murs regorgeant d'humidité, les désordres rendent les locaux parfaitement impropres à leur destination de cabaret spectacle recevant du public.

Mme [B] et ses enfants invoquent cependant que d'autres acteurs tels que le syndicat des copropriétaires, la propriétaire des locaux du rez- de- chaussée la société BDG boulevard de Clichy ou encore Mme [Y], la précédente propriétaire ont leur part de responsabilité dans la survenue des désordres et que l'immeuble étant inclus dans un périmètre de réhabilitation défini par la ville de [Localité 10], M [Q], inspecteur sanitaire assermenté, a mis en évidence d'autres causes à l'origine des désordres comme pouvant provenir d'un branchement cassé du sous sol, de la fuite d'une fontaine située place des Abbesses ou encore des travaux réalisés par la RATP de 2000 à 2003.

Or le tribunal a justement considéré, au visa du rapport d'expertise particulièrement précis et détaillé et qui a été soumis au contradictoire de toutes les parties, que les désordres provenaient pour l'essentiel des canalisations anciennes dont les fontes sont fissurées et du défaut d'étanchéité de la courette ainsi que de probables remontées capillaires et que les inondations en provenance du rez- de- chaussée sont plus récentes bien qu'elles ont été elles mêmes à l'origine de nombreux désordres dans le sous sol à une date récente.

Le tribunal doit donc être approuvé en ce qu'il a relevé que M [B], devenu propriétaire des locaux et qui était copropriétaire dans l'ensemble immobilier à raison de 794 millièmes, n'a justifié d'aucune recherche de fuite, d'aucune inscription de travaux à l'assemblée générale de la copropriété destinés à mettre fin aux désordres constants affectant les lieux et qu'il a ainsi de façon caractérisée manqué à son obligation de délivrer des locaux en bon état de réparations et de servir à leur usage, ce qui est son obligation essentielle à laquelle il ne peut déroger ;

Il importe peu dès lors que d'autres acteurs, et notamment le syndicat de la copropriété dont M [B] détient d'ailleurs la majorité des millièmes, aient également pu avoir une part de responsabilité dans la survenance des désordres, ce qui n'est pas de nature à l'exonérer de sa propre obligation de délivrance.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail aux torts du bailleur.

Sur l'indemnisation du preneur :

La société GFA invoque que son préjudice est constitué de pertes d'exploitation, de frais fixes et des travaux ainsi que de la perte de la valeur du fonds.

S'agissant des pertes d'exploitation, la société GFA indique limiter sa réclamation aux pertes de redevances de location gérance qu'elle aurait pu conclure à la suite du départ de la société Tissier qui a quitté les lieux à la fin du 3ème trimestre 2003, les locaux ayant fait l'objet de contrats de location gérance successivement conclus avec les EURL Le Moulin, TVB et Tissier, cette dernière n'ayant jamais réglé les redevances. Elle demande la somme actualisée de 315 000 € pour la période allant du 3ème trimestre 2003 au dernier trimestre 2012.

Or la société GFA ne peut tout à la fois invoquer au soutien de sa demande de résiliation le défaut de délivrance de locaux en état de servir à leur destination et la perte de contrats de location gérance qu'elle n'aurait pu de toute façon souscrire au delà du 1° juillet 2003 en raison de l'état de dégradation de locaux qu'elle était tenue elle-même de délivrer en bon état de réparations à ses locataires gérants et qu'elle décrit comme inexploitables;

Elle peut simplement invoquer la perte de clientèle et donc du fonds dont elle est un élément essentiel en raison du défaut d'exploitation continue liée aux dégradations des locaux.

Elle estime que par valorisation du prix d'achat de 350 000 francs en mai 2000, soit 53 357 €, le fonds aurait atteint une valeur de 250 000 € en 2012, hors toute valorisation dans un quartier favorable à l'activité ;

Or elle ne produit aucun élément comptable permettant, fut ce dans les premières années d'activité, de connaître la rentabilité du fonds de sorte que le tribunal après avoir souligné que l'activité était en baisse en 1999, au moment de la vente, a justement estimé la valeur actualisée du fonds à la somme de 64 000 €.

Le tribunal sera également approuvé en ce qu'il a fait droit à la demande en remboursement des travaux effectués en pure perte sur le fonds à hauteur de 18 234, 78 € ainsi qu' en remboursement des loyers et charges dans la mesure ou le fonds n'a pu être exploité conformément à sa destination à compter du 3ème trimestre 2003; la société GFA est donc fondée à réclamer restitution de l'ensemble des loyers payés à compter de cette date pour partie entre les mains du bailleur pour la somme de 8485, 56 € et pour partie par consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations pour la somme de 5016, 43 €, ce qui représente une somme totale de 13 501, 99 € .

Elle ne justifie en revanche du paiement de frais fixes qu'elle indique avoir exposés que par une liste jointe à une attestation de son expert comptable dont les honoraires sont nécessairement à sa charge, étant souligné qu'aucun document comptable n'a été produit aux débats et sera déboutée en conséquence de cette demande.

Le préjudice global de la société GFA s'élève donc à la somme de :

64 000 € + 18 234, 78 € + 13 501, 99 € = 95 736, 77 € .

Sur les demandes en dommages intérêts:

Mme [B] et ses enfants sollicitent l'allocation de dommages intérêts en raison des fautes commises à la fois par le syndicat de la copropriété du 30 boulevard de Clichy, Mme [Y] la précédente propriétaire ou encore la société BDG boulevard de Clichy.

Or, M [B] connaissait lors de l'achat des murs la situation du fonds et avait été informé du litige en cours avec la locataire de sorte qu'ayant renoncé dans l'acte de vente à rechercher la venderesse pour les suites de ce litige, Mme [B] et ses enfants sont mal fondés à diriger leur action contre le successeur de Mme [Y].

S'agissant du syndicat des copropriétaires dont la responsabilité dans la survenance des désordres a été pour partie pointée par l'expert, Mme [B] n'invoque aucune opposition de celui-ci à voir inscrire des travaux à l'ordre du jour d'une assemblée de nature à mettre fin aux dégradations des parties communes de l'immeuble et , faute de démontrer une attitude fautive du syndicat, sera en conséquence déboutée de sa demande à son égard ;

S'agissant de la société BDG boulevard de Clichy, il résulte du rapport d'expertise que les agissements de celle-ci qui a acquis les murs auprès de M [B] qui en était le précédent propriétaire sont à l'origine de certains désordres. Toutefois, l'acte de vente passé le 18 février 2005 entre M [B] et la société BDG indique précisément que le vendeur conservera à sa charge l'ensemble des procédures -dont celle l'opposant à la société GFA -, l'acquéreur ne devant pas être inquiété à ce sujet, précision étant faite dans l'acte que le dégât des eaux aurait pour origine le local vendu et que l'expertise est en cours.

Il s'ensuit que Mme [B] et ses enfants ne peuvent poursuivre la société BDG pour les conséquences déjà connues et soumises à expertise du dégât des eaux en provenance de local du rez- de- chaussée dont cette dernière a fait l'acquisition .

Mme [B] et ses enfants tout en demandant la condamnation à leur égard de la société Marchal Syngest administrateur de biens de Mme [Y] ne développe aucun moyen au soutien de leur demande dont ils seront en conséquence déboutés.

Il n'est pas démontré enfin que les consorts [B] ont abusé de leur droit d'agir en justice de sorte que le jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à dommages intérêts pour procédure abusive sera confirmé .

Sur les autres demandes :

Les consorts [B] supporteront les entiers dépens.

Ils paieront en outre à M [O], au syndicat des copropriétaires du 30 boulevard de Clichy et à la société BDG Boulevard de Clichy dont M [T] est le gérant la somme de 3000 € à chacun d'eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les autres demandes sur ce fondement étant rejetées en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Reformant le jugement déféré en ses seules dispositions relatives au motif de la résiliation du bail et au montant des dommages intérêts alloués au preneur,

Dit que la résiliation du bail liant M [B] aux droits duquel se trouvent Mme [B] à titre personnel et agissant ès-qualités d'administratrice légale de ses enfants mineurs, à la société GFA est prononcée aux torts du bailleur pour manquement à son obligation de délivrance,

Condamne les consorts [B] - Mme [B] à titre personnel et agissant ès-qualités d'administratrice légale de ses enfants mineurs - à payer à la société GFA la somme de 95 736, 77 €.

Ajoutant,

Condamne les consorts [B] - Mme [B] à titre personnel et agissant ès-qualités d'administratrice légale de ses enfants mineurs - à payer à M [O], au syndicat des copropriétaires du 30 boulevard de Clichy et à la société BDG Boulevard de Clichy la somme de 3000 € à chacun d'eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Condamne les consorts [B] - Mme [B] à titre personnel et agissant ès-qualités d'administratrice légale de ses enfants mineurs - aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 12/07360
Date de la décision : 15/10/2014

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°12/07360 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-15;12.07360 ?
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