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28/05/2015 | FRANCE | N°14/03278

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 28 mai 2015, 14/03278


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 28 mai 2015



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/03278



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Décembre 2013 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/12274





APPELANTE



ASSOCIATION DES PARALYSES DE FRANCE (ADP)

prise en la personne de ses représentants légaux


[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Représentée par Me...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRET DU 28 mai 2015

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/03278

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Décembre 2013 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/12274

APPELANTE

ASSOCIATION DES PARALYSES DE FRANCE (ADP)

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant

Représentée par Me Zoé RIVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0097, avocat plaidant

INTIME

SYNDICAT CGT UNION DEPARTEMENTALE

pris en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, avocat postulant

Représenté par Me André CHAMY, avocat au barreau de MULHOUSE, avocat plaidant substitué par Me Damien LEMPEREUR

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 février 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Nicolas BONNAL, Président

Madame Martine CANTAT, Conseiller

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Nicolas BONNAL, Président et par Madame FOULON, Greffier .

**********

Statuant sur l'appel interjeté par l'association des paralysés de France (l'APF) contre un jugement rendu le 17 décembre 2013 par le tribunal de grande instance de Paris qui, saisi par l'Union Départementale des syndicats CGT du Territoire de Belfort (l'UD-CGT) de demandes tendant essentiellement à l'annulation et au retrait sous astreinte d'une note de service établie par l'APF et mise en 'uvre à compter de la rentrée scolaire 2011 au sein de l'Institut [Établissement 1] et de Formation Professionnelle (IEM-FP) «'[K] [E]'» situé à [Localité 1] (90), ainsi qu'à la condamnation de l'APF à lui verser la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts, a':

- dit que la fin de non-recevoir soulevée en défense s'analysait en une exception de nullité,

- rejeté cette exception de nullité,

- annulé la «'note de service'» du 29 mars 2011 relative aux personnels enseignants salariés de l'Institut [Établissement 1] et de Formation Professionnelle «'[K] [E]'» de l'association des paralysés de France,

- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte,

- condamné l'APF à payer à l'Union Départementale CGT la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné l'APF aux dépens, en autorisant les avocats en ayant fait la demande à procéder selon les modalités prévues par l'article 699 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

Vu les dernières conclusions transmises le 08 décembre 2014 pour l'APF, appelante, qui demande à la cour de':

- réformer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté l'UD-CGT de sa demande indemnitaire,

- déclarer irrecevables et à tout le moins mal fondées les demandes présentées par l'UD-CGT,

- dire et juger que l'UD-CGT ne justifie d'aucun préjudice,

en conséquence':

- débouter l'UD-CGT de toutes ses demandes, fins et prétentions, en ce compris son appel incident,

- condamner l'UD-CGT au paiement d'une somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens,

Vu les dernières conclusions transmises le 12 juin 2014 pour l'UD-CGT, intimée qui forme un appel incident et demande à la cour de':

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a annulé la note de service,

- l'infirmer sur la demande au titre des dommages et intérêts,

- déclarer son action recevable et bien fondée,

- dire et juger que la note de service mise en place à partir du mois de septembre 2011 est nulle et de nul effet,

- ordonner son retrait pur et simple, ce sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter de «'l'ordonnance'» à intervenir,

- condamner l'APF à lui verser la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts,

- condamner l'APF à lui verser la somme de 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

La cour faisant expressément référence aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties,

SUR CE, LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

L'APF gère différents établissements médico-sociaux qui sont assujettis à la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif, signée le 31 octobre 1951.

Elle emploie des enseignants au sein de certains de ses établissements, tels les instituts d'éducation motrice de formation professionnelle (IEM-FP).

Conformément à un accord d'entreprise signé le 18 juin 1973 et réactualisé le 05 avril 1977, les horaires et congés de ces enseignants sont fixés en référence à ceux applicables dans l'Education nationale.

Ledit accord stipule qu'il peut être révisé ou dénoncé dans les mêmes conditions que la convention collective de 1951.

Il prévoit en outre que les litiges et les difficultés d'application peuvent être soumis à une commission composée paritairement des représentants des employeurs désignés par l'APF et de représentants de salariés désignés par les organisations syndicales représentatives et signataires, les décisions de cette commission prenant effet à la date de leur signature sauf indication contraire.

C'est précisément dans ce cadre que pour tenir compte des sujétions particulières inhérentes à une fonction d'enseignement dans un IEM-FP, qui mobilisent les enseignants en dehors du temps obligatoire de face à face pédagogique, une commission réunie à cet effet le 14 mai 1997 a décidé, faute de pouvoir comme au sein de l'Education nationale financer ces sujétions, d'une décharge horaire hebdomadaire de 2 heures de cours pour un enseignant à temps complet, venant ainsi en minoration de l'horaire en présence des élèves.

Selon cette décision, «'tout changement intervenant dans les rémunérations des personnels d'enseignement ou leurs conditions de travail telles qu'elles sont indiquées ci-dessus et dans les missions des IEM de Formation Professionnelle nécessitera[it] la révision de la présente décision interprétative applicable à compter du 1/9/97'».

Dans le cadre de l'application de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail, l'APF a conclu le 11 mai 1999 avec les organisations syndicales représentatives un «'accord complémentaire relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des établissements de l'APF appliquant la convention collective du 31 octobre 1951'» excluant de son champ d'application le personnel enseignant sous contrat de travail avec l'APF et le personnel contribuant à la formation professionnelle théorique et pratique des jeunes en IEM-FP et en IEM, qui restaient soumis à l'accord d'entreprise du 18 juin 1973 modifié le 05 avril 1977.

Au cours des années 2009-2010 ont été engagées des négociations entre l'employeur et les syndicats représentatifs, selon l'appelante en vue d'apporter un éclairage sur les modalités de mise en 'uvre de l'organisation du temps de travail spécifique aux enseignants dans le souci d'unifier les pratiques des établissements concernés et selon l'intimée, pour annualiser le temps de travail des enseignants, réduire leur temps de travail de 39 heures à 35 heures et augmenter les heures hebdomadaires de suivi des élèves dues en compensation de la minoration des heures de cours définie par décision de la commission de conciliation en date du 14 mai 1997.

Les négociations n'ayant pas abouti, l'APF se prévalant de ses prérogatives d'employeur a établi une note de service intitulée «'DUREE DU TRAVAIL DES PERSONNELS ENSEIGNANTS DES IEM-FP DE L'APF ' PRECISIONS QUANT AUX MODALITES D'APPLICATION'» ayant pour objet de fixer de manière harmonisée les modalités qu'elle demandait d'appliquer dans l'ensemble des IEM-FP à compter de la rentrée 2011.

Un des établissements de l'APF, l'IEM-FP «'[K] [E]'» situé à [Localité 1], a convoqué le 29 mars 2011 un «'comité d'établissement extraordinaire'» auquel étaient conviés également les délégués syndicaux, sur l'ordre du jour suivant':

- «'information et consultation des membres du C.E. et des Délégués Syndicaux sur les modalités que l'association demande d'appliquer dans l'ensemble de ses IEM-FP relativement à la durée du travail des personnels enseignants salariés à l'APF à compter de la rentrée 2011'»';

- «'Dénonciation des pratiques non conformes à ces nouvelles modalités, dans un souci d'harmonisation'».

Au cours de cette réunion, les membres du comité d'entreprise ont émis à l'unanimité un avis défavorable.

La direction de l'IEM-FP «'[K] [E]'» a mis en 'uvre la note de service litigieuse à la rentrée scolaire 2011.

C'est dans ces conditions que par assignation délivrée le 08 juin 2012, l'UD-CGT a saisi le tribunal de grande instance de Paris de la procédure qui a donné lieu au jugement entrepris.

MOTIFS

Sur l'exception de nullité':

L'APF réitère devant la cour l'argumentation développée devant les premiers juges, selon laquelle d'une part, le nom du représentant légal de l'UD-CGT ne figure pas dans l'acte introductif d'instance et d'autre part, ce n'est pas le représentant légal de l'union syndicale, c'est-à-dire son secrétaire général selon l'article 26 de ses statuts, qui a décidé d'agir en justice mais la commission exécutive par décision du 14 mai 2012.

L'APF se prévaut ainsi d'une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte introductif d'instance pour défaut de pouvoir du représentant légal du syndicat d'agir en justice, même si devant la cour, elle déduit encore à tort de cette nullité alléguée une irrecevabilité de l'action.

Il doit être rappelé que si en application des dispositions de l'article 117 du code de procédure civile, le défaut de pouvoir d'une personne figurant au procès comme représentant d'une personne morale constitue une irrégularité de fond affectant la validité même de l'acte, en revanche, le défaut de désignation de l'organe représentant légalement une personne morale dans un acte de procédure, lorsque cette mention est prévue à peine de nullité, ne constitue qu'un vice de forme.

Ainsi que l'a rappelé le tribunal, l'assignation délivrée par l'UD-CGT, de même que ses conclusions, mentionne expressément qu'elle est représentée par son représentant légal.

Par la production de ses statuts, elle a justifié que celui-ci était son secrétaire général, qui en vertu de l'article 26 dispose d'un mandat permanent afin d'agir et de la représenter en justice.

La circonstance que la décision d'agir en justice ait préalablement été prise à l'unanimité par la commission exécutive de l'UD-CGT par une délibération du 14 mai 2012 au demeurant validée et signée par le secrétaire général n'a pas privé celui-ci des pouvoirs statutaires qu'il tient de son mandat permanent, quand bien même, par maladresse de langage, l'UD-CGT a, selon l'extrait de cette délibération, donné pouvoir à Me [N] de «'la représenter'».

Il s'ensuit qu'aucune irrégularité de fond n'affecte l'acte introductif d'instance signifié le 08 juin 2012 et que nonobstant le vice de forme affectant ce dernier, le représentant légal de l'UD-CGT a été parfaitement identifié par l'APF qui n'allègue d'ailleurs aucun grief.

En conséquence, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception de nullité soulevée par l'APF.

Sur la note de service':

L'UD-CGT fait essentiellement valoir sur la forme que l'APF a édicté la note de service litigieuse sans respecter les formalités de consultation et de communication des instances représentatives du personnel et sur le fond que les règles établies unilatéralement par l'employeur imposent une modification des contrats de travail, de la durée du travail effectif ainsi que de la prise en compte des jours fériés et portent atteinte aux droits des salariés.

Elle précise notamment que seul est applicable l'accord d'entreprise du 18 juin 1973 réactualisé le 05 avril 1977 qui fixe les horaires et congés des enseignants en référence à ceux applicables dans l'Education nationale, de sorte que l'employeur ne pouvait modifier la durée de travail effectif des enseignants sans dénoncer préalablement ledit accord.

L'APF répond que contrairement à la motivation du tribunal, le décret n° 2000-753 du 1er août 2000, dit «'décret MELENCHON'» est bien applicable au personnel enseignant de l'Education nationale, de même que le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 qui a introduit les 35 heures dans la fonction publique de l'Etat et dans les établissements publics locaux d'enseignement (EPLE).

Elle expose en particulier que les négociations entreprises en 2009-2010 n'avaient pas pour finalité d'élaborer un nouvel accord collectif «'destiné à dénoncer un accord précédent'» mais de permettre aux syndicats et à tous les acteurs concernés de s'exprimer sur la pratique de leur activité et qu'aucun accord n'étant ressorti de cette concertation, elle a, dans le cadre de sa responsabilité d'employeur, pris l'initiative d'indiquer aux directeurs des structures concernées comment procéder pour respecter tant les dispositions de l'accord du 05 avril 1977 que celles relatives à la durée légale du travail issues notamment du décret n° 2000-815 du 25 août 2000.

C'est ainsi qu'elle a établi pour ses enseignants des règles relatives à la détermination du volume annuel de travail et à la répartition des heures de face à face pédagogique et des heures de préparation.

Elle soutient que ces règles, qui ne sont que l'adaptation de dispositions existantes et d'un régime en place depuis des années, n'ont entraîné aucun changement du temps de travail effectif ni de rémunération, ce qui est contesté par l'UD-CGT qui lui oppose en outre que le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 n'est pas applicable aux enseignants.

Les obligations de l'employeur en matière d'information et de consultation des institutions représentatives du personnel ne sont pas les mêmes selon qu'il procède par voie de négociation ou par décision unilatérale.

Il doit donc d'abord être déterminé si l'APF était en droit de fixer des règles relatives à l'organisation et à la durée de travail de ses enseignants salariés par décision unilatérale. La question du respect par l'employeur de ses obligations en matière d'information et de consultation ne sera traitée ultérieurement que si nécessaire.

Avant l'élaboration et la diffusion de la note de service litigieuse, ces règles résultaient de l'accord d'entreprise du 18 juin 1973 réactualisé le 05 avril 1977 qui fixe les horaires et congés des enseignants en référence à ceux applicables dans l'Education nationale et de la décision prise le 14 mai 1997 par la commission paritaire instaurant une décharge hebdomadaire de 2 heures de cours au profit des enseignants en IEM-FP pour tenir compte des sujétions particulières inhérentes à leur fonction.

Par voie de conséquence, elles résultaient également des dispositions légales adoptées dans l'Education nationale postérieurement à l'accord d'entreprise.

C'est ainsi que l'article 30 du décret n° 92-1189 du 06 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel a fixé le «'maximum de service hebdomadaire'» de ces derniers comme suit':

«'1. Pour l'enseignement des disciplines littéraires et scientifiques et les enseignements professionnels théoriques': dix-huit heures';

2. Pour les enseignements pratiques': vingt-trois heures.'»,

sous réserve des règles spécifiques applicables aux professeurs de lycée professionnel exerçant les fonctions de chef de travaux ou des fonctions d'assistance technique auprès des chefs de travaux.

Ces dispositions ont été modifiées par le décret n° 2000-753 du 1er août 2000 qui a supprimé la distinction entre les enseignements théoriques et pratiques en fixant à dix-huit heures d'enseignement dans leurs disciplines le service hebdomadaire de tous les professeurs de lycée professionnel.

A cet égard, il doit être précisé que c'est à la suite d'une erreur de plume que les premiers juges ont indiqué à plusieurs reprises que les parties s'opposaient sur l'application de ce dernier décret, alors que manifestement ils voulaient en réalité citer le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature.

Conformément à l'accord d'entreprise précité qui fixe les horaires et congés des enseignants employés par l'association en référence à ceux applicables dans l'Education nationale, il a été tenu compte de plein droit au sein de l'APF des nouvelles règles relatives au service hebdomadaire des professeurs de lycée professionnel édictées par les décrets des 06 novembre 1992 et 1er août 2000, le nombre hebdomadaire d'heures d'enseignement en présence des élèves dû par ses enseignants en IEM-FP étant arrêté à 16 heures, soit 18 heures ' 2 heures à la faveur de la décision de la commission paritaire du 14 mai 1997.

Pour soumettre dans la note de service litigieuse ses enseignants à un temps de travail annualisé et en tirer les conséquences quant à la répartition horaire de leurs obligations de service, l'APF s'est fondée sur les dispositions des alinéas 1 et 2 de l'article 1 du décret n° 2000-815 du 25 août 2000, qui prévoient dans sa version initiale que «'la durée du travail effectif est fixée à trente-cinq heures par semaine dans les services et établissements publics administratifs de l'Etat ainsi que dans les établissements publics locaux d'enseignement'» et que «'le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 600 heures maximum, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées'».

Toutefois, l'article 7 dudit décret prévoit que «'les régimes d'obligations de service sont, pour les personnels en relevant, ceux définis dans les statuts particuliers de leur corps ou dans un texte réglementaire relatif à un ou plusieurs corps'».

Il en résulte que les dispositions de son article 1 auxquelles se réfère l'APF ne sont pas applicables aux enseignants, qui relèvent d'un régime d'obligations de service particulier, défini notamment par les décrets (modifiés) n° 50-581 du 25 mai 1950 portant fixation des maximums de service hebdomadaire du personnel enseignant des établissements d'enseignement du second degré, n° 50-582 du 25 mai 1950 portant fixation des maximums de service hebdomadaire du personnel des établissements publics d'enseignement technique, n° 72-580 du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs agrégés de l'enseignement du second degré, n° 72-581 du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés et n° 92-1189 du 06 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel.

L'APF ne l'ignorait pas, puisque l'accord précité qu'elle a conclu le 11 mai 1999 avec les syndicats dans le cadre de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail excluait bien de son champ d'application le personnel enseignant sous contrat de travail avec l'APF et le personnel contribuant à la formation professionnelle théorique et pratique des jeunes en IEM-FP et en IEM, qui restaient soumis à l'accord d'entreprise du 18 juin 1973 modifié le 05 avril 1977.

L'APF ne pouvait donc, pour «'adapter'» les règles relatives à la durée de travail des personnels enseignants de ses IEM-FP, se référer aux dispositions du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 prévoyant de réaliser le décompte du temps de travail sur la base d'une durée annuelle de travail effectif.

A ce premier titre, la note de service litigieuse doit être annulée.

En outre, faute de pouvoir se référer à de nouvelles dispositions légales en vigueur au sein de l'Education nationale, qui auraient été de plein droit applicables aux enseignants qu'elle emploie en vertu de l'accord d'entreprise du 18 juin 1973 réactualisé le 05 avril 1977, l'APF ne pouvait fixer des règles d'adaptation de la durée et de l'organisation du travail de ses enseignants sans procéder à la révision ou à la dénonciation dudit accord et de la décision de la commission paritaire du 14 mai 1997.

C'est en vain à cet égard qu'elle soutient que les règles décrites dans la note de service litigieuse n'ont entraîné aucun changement en matière de temps de travail effectif ou de rémunération, alors d'une part que ces règles mettent en place un temps de travail annualisé qui permet notamment à l'employeur de fixer à 3,89 heures par semaine le temps consacré par les enseignants en IEM-FP aux sujétions particulières de leur fonction d'enseignement, au titre desquelles la commission paritaire du 14 mai 1997 avait décidé de leur accorder une décharge hebdomadaire de 2 heures, et que d'autre part, elles instaurent un système de contrôle du temps de travail en dehors de la présence des élèves obligeant l'enseignant à renseigner un formulaire de suivi horaire hebdomadaire ou mensuel soumis à la validation de l'employeur.

Contrairement encore à son argumentation, l'APF s'était bien engagée en 2009-2010 dans un processus de révision de l'accord d'entreprise du 18 juin 1973 réactualisé le 05 avril 1977 et de la décision de la commission paritaire du 14 mai 1997, en soumettant aux organisations syndicales représentatives un projet d'accord d'entreprise relatif à la durée du travail des personnels enseignants des IEM et IEM-FP se référant déjà aux dispositions de l'article 1 du décret n° 2000-815 du 25 août 2000, ainsi qu'il ressort suffisamment des pièces n° 11 et 12 de l'intimée en dépit de leur caractère tronqué, étant observé à cet égard qu'un document plus complet avait été soumis au tribunal puisque celui-ci a été en mesure de citer entre guillemets, page 6 du jugement, un «'accord d'entreprise relatif à la durée du travail des personnels enseignants des IEM et IEM-FP de l'APF'».

Cette négociation tendant à la révision des accords d'entreprise concernant les enseignants n'ayant pas abouti, sans apparemment qu'un procès-verbal de désaccord n'ait été dressé dans les formes prévues par les articles L 2242-4 et R 2242-1 du code du travail, l'employeur avait l'obligation de dénoncer ces accords avant de modifier unilatéralement les règles applicables à ses enseignants en matière de durée et d'organisation du travail.

L'APF n'ayant jamais procédé à une telle dénonciation ainsi qu'elle le reconnaît, la note de service litigieuse doit être annulée à ce second titre.

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a annulé la note de service non datée intitulée «'DUREE DU TRAVAIL DES PERSONNELS ENSEIGNANTS DES IEM-FP DE L'APF ' PRECISIONS QUANT AUX MODALITES D'APPLICATION'» applicable dans l'ensemble des IEM-FP de l'APF à compter de la rentrée 2011 et d'ordonner son retrait pur et simple, dans les deux mois de la signification du présent arrêt et passé ce délai, sous astreinte de 500 € par jour de retard pendant trois mois, le jugement entrepris étant infirmé sur ce dernier point.

Sur la demande en dommages et intérêts':

L'établissement d'une note de service illicite imposant de nouvelles contraintes en termes de durée et d'organisation du travail a porté préjudice à l'intérêt collectif des enseignants sous contrat avec l'APF représenté par l'UD-CGT, sans qu'il soit besoin de caractériser l'intention de nuire de l'employeur.

Ce préjudice sera réparé par l'allocation à l'UD-CGT de la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts, la décision déférée étant infirmée également de ce chef.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens':

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance.

Il y a lieu en équité d'allouer à l'UD-CGT la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer devant la cour.

L'APF qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité soulevée par l'APF, en ce qu'il a annulé la note de service de l'association des paralysés de France intitulée «'DUREE DU TRAVAIL DES PERSONNELS ENSEIGNANTS DES IEM-FP DE L'APF ' PRECISIONS QUANT AUX MODALITES D'APPLICATION'» mise en 'uvre au sein de l'IEM-FP «'[K] [E]'» d'[Localité 1] et en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance';

L'infirme pour le surplus';

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Ordonne le retrait pur et simple de la note de service de l'association des paralysés de France intitulée «'DUREE DU TRAVAIL DES PERSONNELS ENSEIGNANTS DES IEM-FP DE L'APF ' PRECISIONS QUANT AUX MODALITES D'APPLICATION'» mise en 'uvre au sein de l'IEM-FP «'[K] [E]'» d'[Localité 1], dans les deux mois de la signification du présent arrêt et passé ce délai, sous astreinte de 500 € par jour de retard pendant trois mois';

Condamne l'association des paralysés de France à payer à l'Union Départementale des syndicats CGT du Territoire de Belfort la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts';

Condamne l'association des paralysés de France à payer à l'Union Départementale des syndicats CGT du Territoire de Belfort la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer devant la cour';

Condamne l'association des paralysés de France aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 14/03278
Date de la décision : 28/05/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°14/03278 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-28;14.03278 ?
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