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18/12/2015 | FRANCE | N°14/16193

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 2, 18 décembre 2015, 14/16193


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 2



ARRÊT DU 18 DÉCEMBRE 2015



(n° 2015-347, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/16193



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Juin 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/02250





APPELANT



LE FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TER RORISME ET AUTRES INFRACTIONS (FGTI

) agissant en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée et assistée par Me Alain LABERIBE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1217





INTIMÉE


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Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 2

ARRÊT DU 18 DÉCEMBRE 2015

(n° 2015-347, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/16193

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Juin 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/02250

APPELANT

LE FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TER RORISME ET AUTRES INFRACTIONS (FGTI) agissant en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée et assistée par Me Alain LABERIBE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1217

INTIMÉE

LA SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS (SNCF) prise en la personne de son représentant légal

RCS 552 049 447

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Vincent RIBAUT de la SCP RIBAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assistée de Me Florence GARCIA, avocat au barreau de PARIS, toque : R77 substituant Me Michel BERTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R 77

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 novembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Dominique GREFF-BOHNERT, présidente de chambre

Madame Isabelle CHESNOT, conseillère

Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Malika ARBOUCHE

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Dominique GREFF-BOHNERT, présidente et par Monsieur Guillaume LE FORESTIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le 29 janvier 2010, Monsieur [M] qui se trouvait sur le quai du RER à la gare [Établissement 1] a été soudainement ceinturé et entraîné sur les voies par Monsieur [I]. Tous deux ont chuté sur les rails au moment où le train entrait en gare et sont décédés.

Par décision du 7 septembre 2011, la CIVI du tribunal de grande instance d'Evry a homologué les accords conclus entre le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (ci-après FGTI) et Madame [N], tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante de sa fille mineure [L] [M], respectivement concubine et fille de Monsieur [M], pour l'allocation d'une somme de 30 000 € à chacune.

Par acte du 4 février 2013, le FGTI a fait citer la SNCF devant le tribunal de grande instance d'Evry aux fins de remboursement des indemnités allouées.

Le tribunal de grande instance d'Evry a rendu le 24 juin 2014 son jugement au terme duquel il déclare le FGTI recevable mais mal fondé en son action, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamne le FGTI aux dépens.

Par déclaration du 28 juillet 2014, le FGTI a fait appel de cette décision.

L'appelant demande à la cour, au terme de ses conclusions signifiées le 26 janvier 2015, de :

-le dire recevable et bien fondé en son appel comme en toutes ses demandes, fins et conclusions ;

-dire la SNCF mal fondée en son appel incident comme en toutes ses demandes et l'en débouter;

-réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a dit mal fondé en ses demandes ;

Statuant à nouveau,

-dire et juger que la SNCF, en sa qualité de gardienne du train, est responsable du décès de Monsieur [F] [M] ;

-constater qu'en vertu des décisions de la CIVI, des indemnités d'un total de 60 000 € ont été réglées à Madame [Z] [N] et [L] [M] en réparation de leurs préjudices ;

-en conséquence, condamner la SNCF à lui rembourser, en sa qualité de subrogé dans les droits des victimes, la somme de 60 000 € avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

-condamner la SNCF à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner la SNCF aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Laberibe, avocat, qui pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La SNCF par conclusions notifiées par RPVA le 1er décembre 2014 conclut en ces termes:

Vu les articles 706-11 du code de procédure pénale, 1384 alinéa 1er du code civil, L.2251-1 et suivants du code des transports,

- dire et juger irrecevable le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions en son appel et son action à l'encontre de la SNCF,

- dire et juger recevable et bien fondée la SNCF en son appel incident,

en conséquence,

- infirmer le jugement du 23 juin 2014 en ce qu'il a déclaré recevable le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions en son action,

- dire et juger le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions mal fondé à agir à l'encontre de la SNCF,

- dire et juger, en toute hypothèse, que la soudaineté et l'irrésistibilité de l'agression (crime) dont a été victime Monsieur [M] exonèrent la SNCF de toute responsabilité, - débouter le fonds de garantie de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

- ce faisant, confirmer le jugement du 24 juin 2014 en ce qu'il a débouté le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions de ses demandes,

- condamner le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions au paiement de la somme de 4.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Vincent RIBAUT, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance clôturant l'instruction de l'affaire a été rendue le 7 octobre 2015.

Il sera renvoyé aux conclusions susvisées pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de l'action :

La SNCF soutient que les termes de l'article 706-11 du code de procédure pénale ne prévoient la recevabilité de l'action subrogatoire du FGTI que dans deux cas : à l'encontre 'des personnes responsables du dommage causé par l'infraction' et à l'encontre des 'personnes tenues à un titre quelconque d'assurer la réparation totale ou partielle du dommage causé par l'infraction', qu'il en résulte que le FGTI ne dispose pas d'une action introduite à l'encontre d'une personne qui n'a pas encore été déclarée tenue à réparation, qu'une telle action n'existe que s'il préexiste un titre déclarant la personne tenue à réparation. Elle prétend par ailleurs que le FGTI est irrecevable à agir dans la mesure où le dommage a été causé par l'infraction criminelle qui a été commise par Monsieur [I] mais ne donnera pas lieu à une décision judiciaire de responsabilité puisque celui-ci est décédé.

L'action subrogatoire du FGTI prévu à l'article 706-11 du code de procédure pénale est recevable dès lors que ce recours est bien fondé sur une infraction ayant ouvert droit à indemnisation des victimes par la CIVI, ce qui est le cas en l'espèce, le FGTI ayant à la demande de la CIVI indemnisé la concubine et la fille de M. [M] des dommages causés par le décès de celui-ci dans des circonstances qui permettent de penser que Monsieur [I] a commis une infraction pénale ayant entraîné ce décès.

L'article 706-11 précité offre aussi au FGTI la possibilité d'agir à l'encontre de personnes qui ne sont pas pénalement responsables de l'infraction mais qui peuvent être tenues d'assurer la réparation totale ou partielle du dommage causé par l'infraction sans que nécessairement, cette obligation à réparation fasse l'objet d'un titre quelconque préexistant, ces personnes disposant du droit de contester leur implication dans le dommage dans le cadre de l'instance ouverte sur le recours subrogatoire du FGTI et ce texte ne limitant pas la nature de l'obligation à réparation ni le choix des personnes à actionner.

En conséquence, le jugement déféré qui a déclaré l'action recevable doit être confirmé.

Sur la responsabilité de la SNCF :

Il est constant que le train a été au moins pour partie l'instrument du dommage. Le FGTI recherche alors la responsabilité de la SNCF en sa qualité de gardienne du train sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1er du code civil.

La SNCF ne peut s'exonérer de cette responsabilité qu'en établissant que l'événement a présenté pour elle les caractères de la force majeure que sont l'extériorité, l'imprévisibilité et l'irrésistibilité.

Les premiers juges ont fait une exacte appréciation des faits et une juste application de la loi en décidant que le comportement de Monsieur [I], à l'origine du dommage, avait eu pour la SNCF un caractère imprévisible et irrésistible sauf à préciser que l'extériorité de ce comportement par rapport au gardien de la chose n'a pas été caractérisée tant elle est évidente, que le geste brutal et inattendu de Monsieur [I] qui a entraîné sa propre perte a été totalement irrationnel et d'une telle rapidité qu'aucune mesure de surveillance n'aurait pu le prévenir ou l'empêcher sauf à installer des façades de quai dans toutes les stations sans exception, un tel comportement ne dépendant pas de la configuration de la station ni de l'affluence des utilisateurs, installation que l'on ne peut à ce jour exiger de la SNCF compte-tenu de l'ampleur des travaux qu'elle nécessiterait et dont la faisabilité technique n'est pas démontrée.

Les premiers juges ont alors pu, à bon droit, dire que la SNCF doit être exonérée de la présomption de responsabilité qui pèse sur elle en sa qualité de gardienne du train, instrument du dommage. Aussi, le jugement déféré doit être confirmé.

Le FGTI qui succombe supportera les dépens de la procédure d'appel.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SNCF les frais irrépétibles engagés pour la présente procédure. Il lui sera accordé la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement rendu le 24 juin 2014 par le tribunal de grande instance de Paris en toutes ses dispositions ;

Condamne le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions à verser à la SNCF la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions aux entiers dépens de la procédure d'appel, avec distraction au profit de Maître Vincent Ribaut conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 14/16193
Date de la décision : 18/12/2015

Références :

Cour d'appel de Paris C2, arrêt n°14/16193 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-12-18;14.16193 ?
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