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23/05/2017 | FRANCE | N°14/13665

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 23 mai 2017, 14/13665


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 23 Mai 2017

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/13665



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Novembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY section encadrement RG n° F13/05478





APPELANTE

Madame [P] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1969 à [Locali

té 2] (93)

comparante en personne, assistée de Me France LENAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R121



INTIMES

SA RAJA

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

en présence de Mme ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 23 Mai 2017

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/13665

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Novembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY section encadrement RG n° F13/05478

APPELANTE

Madame [P] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 2] (93)

comparante en personne, assistée de Me France LENAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R121

INTIMES

SA RAJA

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

en présence de Mme [T] KAPEL MARCOVICI , Présidente , et Mme Sandra BISMUTH, DRH, représentée par Me Anne-françoise NAY-LAPLASSE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 256,

Monsieur [D] [V]

[Adresse 5]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Jocelyne GOMEZ VARONA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1534

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Mars 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bruno BLANC, Président

Mme Soleine HUNTER FALCK, Conseillère

Mme Anne PUIG-COURAGE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,

- signé par Monsieur Bruno BLANC, Président, et par Madame Chantal HUTEAU, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

Madame [P] [C] a été embauchée par la Société RAJA à compter du 21 janvier 1997, en qualité d'assistante de direction chargée de la communication auprès de Madame [V] '[J], Président Directeur Général de la société. Cette société est spécialisée dans la distribution d'emballages aux entreprises.

Elle a été promue le 1er juin 2001 Chargée de communication, puis, le 1erjanvier 2005, Responsable de la communication, échelon V/3 de la convention collective de la distribution du commerce en gros des papiers cartons, en charge de la communication institutionnelle de la société.

En son dernier état, sa rémunération mensuelle était fixée à 6987,19 euros bruts.

Madame [C] a saisi le Conseil de Prud'hommes d'une demande de résiliation

judiciaire de son contrat de travail le 25 octobre 2013.

A cette date, elle totalisait 17 ans d'ancienneté .

Madame [P] [C] était arrêtée par son médecin traitant le 4 novembre 2013, ce dernier ayant indiqué sur le volet sécurité « Episode dépressif majeur - Burn out -

Etat de stress post traumatique ».

Les demandes de Madame [P] [C] étaient les suivantes :

- Dire et juger que madame [C] est victime de harcèlement moral de la part de

monsieur [V] ;

- Dire et juger que la Société RAJA a manqué à son obligation de sécurité résultat ;

- Résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ;

- Dire et juger que ladite résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul, ou

à tout le moins sans cause réelle et sérieuse ;

- Indemnité compensatrice de préavis 20 976,00 € Brut ;

- Congés payés sur préavis 2 097,60 € Brut ;

- Indemnité conventionnelle de licenciement 62 345,33 € ;

- Dommages-intérêts pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse

(24 mois) 167 808,00 € ;

- Dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité

résultat (12 mois) 83 904,00 € ;

- Rappel de congés payés acquis et non pris 8 343,03 € ;

- Remise des documents sociaux ;

- Astreinte par jour de retard à compter des 15 jours suivant le prononcé du jugement

50,00 € ;

- Article 700 du Code de Procédure Civile 5 000,00 € ;

- Condamner également monsieur [V], le cas échéant in solidum avec la société

RAJA à payer à madame [C] :

- Dommages-intérêts pour harcèlement moral 12 mois 83 904,00 € ;

- Article 700 du Code de Procédure Civile 5 000,00 € ;

- En tout état de cause Ordonner la publication du jugement dans les magazines "Le monde

des fondations" et "Elle" ;

- Exécution provisoire (article 515 du code de procédure civile ) ;

- Capitalisation des intérêts (article 1154 du code civil) ;

- Dépens .

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Madame [P] [C] du jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Bobigny le 20 novembre 2014 qui l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée aux dépens.

Entre-temps, le 9 septembre 2014, Madame [P] [C] était convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, puis licenciée le 29 septembre 2014, licenciement annulé suite à la déclaration de grossesse de la salariée avant que cette grossesse ne s'avère finalement non viable.

Le 9 décembre 2014, Madame [P] [C] était convoquée à un nouvel entretien préalable à un éventuel licenciement.

La salariée se verra licenciée pour faute grave par courrier recommandé du 27 janvier 2015, l'amenant à compléter ses demandes d'une demande subsidiaire au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse de ce licenciement.

Vu les conclusions en date du 14 mars 2017, au soutien de ses observations orales, par lesquelles Madame [P] [C] demande à la cour de :

A titre principal,

- Dire et juger que Mme [C] a été victime de harcèlement moral de la part de M. [D] [V] avec la complicité passive, puis active de RAJA ;

- Dire et juger que la société RAJA a manqué à son obligation de sécurité et de

résultat ;

- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ;

- Dire et juger que ladite résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement

nul, ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse ;

Subsidiairement,

- Dire et juger que le licenciement notifié le 27 janvier 2015 est nul, ou à tout le

moins sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

- Condamner la société RAJA à payer à Mme [P] [C] :

* Dommages-intérêts pour licenciement nul, ou à tout le moins sans cause réelle et

sérieuse : 167.808,00 euros nets (24 mois) ;

* Dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de

sécurité de résultat : euros (12 mois) : 83.904,00 euros ;

* Dommages et intérêts pour résistance abusive : 30.000 euros ;

* remise des documents sociaux sous astreinte de 50 euros par jour de retard à

compter des 15 jours suivant le prononcé du jugement à intervenir ;

* Article 700 du code de procédure civile : 5.000,00 euros ;

- Condamner également M. [D] [V] à payer à Mme [P] [C] :

* Dommages et intérêts pour harcèlement moral (12 mois), le cas échéant in solidum avec la société RAJA : 83.904,00 euros ;

* Article 700 du code de procédure civile : 5.000,00 euros ;

- Le débouter de sa demande de dommages et intérêts abusivement formulée à rencontre de Mme [C] à hauteur de 150.000 euros ;

En tout état de cause,

- ordonner la capitalisation des intérêts sur les sommes susmentionnées sur le fondement de l'article 1154 du Code civil ;

- La condamnation aux entiers dépens.

Vu les conclusions en date du 14 mars 2017, au soutien de ses observations orales, par lesquelles la société RAJA demande à la cour de :

- Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bobigny ;

- Dire et juger que les accusations de harcèlement moral sont dénuées de tout fondement;

- Dire et juger que la société RAJA n'a pas manqué à son obligation de sécurité de résultat;

- Débouter Madame [P] [C] de sa demande de dommages et intérêts pour

manquement à l'obligation de sécurité de résultat ;

- Débouter Madame [P] [C] de sa demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur ;

- Dire et juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- Débouter Madame [P] [C] de sa demande pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse ;

- Débouter en conséquence Madame [P] [C] de l'intégralité de ses demandes de toute nature ;

- Condamner Madame [P] [C] au paiement de la somme de 5.000,00 euros au

titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- La condamner aux entiers dépens.

Vu les conclusions en date du 14 mars 2017, au soutien de ses observations orales, par lesquelles Monsieur [D] [V] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame [P] [C]

de l'intégralité de ses demandes ;

- Infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [D]

[V] de sa demande reconventionnelle ;

Statuant à nouveau,

- Déclarer recevable et bien-fondé Monsieur [D] [V] en sa demande reconventionnelle et condamner Madame [P] [C] à la somme de 150.000€ à titre de dommages et intérêts ;

- Condamner Madame [P] [C] à verser à Monsieur [D] [V] la somme de 6.000€ à titre de participation à ses frais de justice irrépétibles ;

- Condamner Madame [P] [C] aux éventuels dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le harcèlement moral :

Considérant qu'aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Qu l'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, le juge doit apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il appartient à l'employeur de prouver que les faits en cause ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Que Madame [P] [C] soutient qu'à partir de 2010, Mme [I] , présidente de la société, a nommé son fils, M. [D] [V] (qui était alors administrateur du Groupe RAJA et avait déjà occupé plusieurs postes de travail au sein de RAJA sans être capable de s'y maintenir longtemps) en tant que porte-parole de la Fondation RAJA-Danièle Marcovici ;

Que cette situation s'est finalement révélée extrêmement périlleuse et nocive pour la salariée qui prétend que, en tant que fils de la présidente de RAJA, M. [V] n'a en réalité jamais accepté d'être sous sa direction , ce qu'il n'a pas manqué par la suite de lui « faire payer » ;

Qu'à partir du mois de septembre 2012,la situation prenait une tournure anormale, Madame [P] [C] exposant qu'elle était régulièrement destinataire d'emails et de sms de M. [V] au contenu volontairement agressif, menaçant et dénigrant ce que n'ignorait pas l'entreprise ;

Que cette situation a conduit à son arrêt de travail du 4 novembre 2013 pour un épisode dépressif majeur ;

Considérant qu'il est établi que Monsieur [D] [V] a été engagé par la société RAJA à temps partiel le 1ernovembre 2010 en qualité de « Chargé de communication», responsable de la Fondation RAJA ;

Qu'à cette date, il était placé sous la subordination de Madame [P] [C] en sa qualité de Responsable de la communication Groupe ;

Que Monsieur [D] [V] a été nommé le 1erjanvier 2012 Délégué Général de la Fondation et relevait dès lors directement de Madame [T] [I], Présidente de la Fondation et ne rapportait plus à Madame [P] [C]. ;

Que le fait de ne plus travailler sous la hiérarchie de Madame [P] [C] a conduit cette dernière à mal vivre le nouveau positionnement hiérarchique du fils de la dirigeante;

Que dans ces conditions, les moyens soutenus par l'appelante ne font que réitérer, sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels, se livrant à une exacte appréciation des faits de la cause, et à une juste application des règles de droit s'y rapportant, ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation;

Qu'il sera seulement souligné qu'aucune pièce ne démontre qu'il ait été demandé à la salariée d'anticiper la reprise de son activité professionnelle à la suite de la maladie subie fin 2011 et que le certificat médical en date du 14 mars 2014, rédigé deux ans après les faits allégués, ne fait que reprendre les allégations de la salariée ;

Que, par ailleurs, les courriels agressés à Madame [P] [C] par Monsieur [V] répondant en termes vifs aux courriels de la salariée, eux mêmes musclés, ne présentent aucun caractère pouvant recevoir la qualification de harcelant ;

Que Madame [P] [C] échouant dans la nécessité d'établir l'existence de faits susceptibles de caractériser un harcèlement, le jugement sera confirmé ;

Sur le licenciement :

Considérant que la lettre de licenciement, à laquelle il est expressément fait référence, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce, est ainsi motivée :

'...Au cours de cet entretien, nous vous avons fait part des griefs formulés à votre encontre concernant

votre comportement inacceptable eu égard à la nature du poste que vous occupez au sein de notre entreprise, générant dès lors un trouble manifeste mettant en cause la poursuite même de votre collaboration et, par conséquent, de votre contrat de travail.

En effet, votre fonction de Responsable de la Communication constitue une fonction importante au

sein de l'entreprise et suppose une proximité naturelle avec les dirigeants de l' entreprise et notamment sa Présidente, mais aussi et surtout une loyauté absolue de votre part.

Ceci étant, nous sommes revenus sur les différents événements qui se sont déroulés ces derniers mois et ia procédure que vous avez initiée devant le Conseil de Prud'hommes portant de graves accusations à rencontre de Monsieur [D] [V], fils de notre Présidente, devenu Délégué Général de la Fondation RAJA, et aussi des dirigeants de notre groupe, y compris Madame [T] [I] elle-même.

Les échanges et débats à l'occasion de cette procédure ont été d'une grande violence, mettant gravement en cause, au-delà de notre entreprise, les comportements personnels de ses dirigeants.

Le Conseil de Prud'hommes ne vous a pas suivie et vous avez été déboutée de l'ensemble de vos

demandes,

Vous avez formé appel intégral pour tous vos chefs de demandes de cette décision.

Bien entendu, le droit d'agir en justice constitue un droit fondamental et il ne s'agit pas pour nous de mettre en cause ce principe essentiel.

Mais, la poursuite de la procédure que vous avez initiée signifie que vous entendez maintenir les

graves accusations qu'elles portaient, mais également vos demandes formalisées tant par vos écritures de première instance que lors des plaidoiries dont, notamment celle ayant trait à la publication de la décision à intervenir dans la presse de grande diffusion.

Cette demande est la manifestation d'un acharnement et d'une volonté de porter atteinte à l'image de notre Groupe et de la Fondation, ce qui, est contraire à l'essence même de votre fonction puisque vous êtes en charge de la communication du Groupe. Aussi, la réitération par votre appel de cette volonté manifestée en première instance est à elle seule la justification de l'impossibilité d'une poursuite de votre contrat de travail, car comment accepter que vous puissiez être en charge de la Communication alors même que votre demande a pour but de nuire £ l'image de la société.

Votre longue indisponibilité pour maladie depuis le 4 novembre 2013 ne pouvant être comblée par la mise en place de solutions provisoires, compte tenu du caractère stratégique de la communication et du Département qui la porte pour notre développement, nous a conduits à procéder à votre licenciement pour nécessité de remplacement.

Cette décision vous a été notifiée par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 29

septembre 2014.

Par courrier en date du 8 octobre 2014, c'est-à-dire à l'expiration du délai fixé par le Code du travail,

vous nous avez informés de votre état de grossesse.

Nous en avons pris acte et, dans le respect de vos droits, nous avons procédé à votre réintégration

dans votre emploi à effet du 14 novembre 2014, annulant ainsi le licenciement qui vous avait été

notifié.

A compter de cette date, et donc postérieurement à l'audience devant le Conseil des prud'hommes vous avez repris l'intégralité de vos fonctions et responsabilités au sein de notre Département Communication, composé de 3 collaborateurs qui sont vos subordonnés, et qui ont tous pallié ensemble, pendant votre absence, les urgences nécessaires afin d'assurer une continuité de notre communication.

Vous avez donc eu accès dès le premier jour à votre bureau aux dossiers et à toutes les informations auprès de vos collaborateurs tout comme à celles stockées sur le serveur numérique, vous permettant ainsi d'avoir une parfaite connaissance de ce qui s'était passé pendant votre absence.

Nous avons donc mis à votre disposition, de manière loyale, les moyens nécessaires à l'exercice de

vos obligations professionnelles.

Malheureusement, contrairement à ce que nous espérions de votre part, à savoir une attitude conciliatrice et d'apaisement, nous étions alors dans l'attente de la décision judiciaire, chacune des

parties ayant fait valoir ses arguments, nous avons eu à déplorer un état d'esprit d'opposition et de mauvaise foi patente perturbant gravement le fonctionnement du Département Communication, tant dans sa gestion quotidienne que par l'absence de la reprise effective des actions suspendues

pendant votre maladie.

Ainsi, dès le lundi 17 novembre, 9h30, alors que vous avez repris votre fonction, le vendredi précédent (le 14 novembre}, vous adressiez un courriel à Monsieur [D] pour vous étonner que

celui-ci ne vous avait pas informé directement de son absence ledit jour, alors même qu'il en avait

informé une collaboratrice de votre Département car, lors de son appel, vous n'étiez pas encore

présente.

Vous avez adressé de nombreux courriels contestant l'accès effectif aux éléments mis à votre disposition sur l'outil informatique, prétendant avoir besoin, pour exercer vos fonctions, d'avoir accès à la boîte « mail » de Monsieur T R I C O I R E .

Nonobstant notre position après vérification que les dossiers étaient bien à votre disposition sur le

serveur, vous avez persévéré dans votre revendication afin d'obtenir le code d'accès à la boîte mail

personnelle de Monsieur [N] [D].

Nous ne pouvions vous donner ce code dès lors que Monsieur [D] était absent et que ses arrêts

étaient de courte durée impliquant un retour proche, sa boîte pouvant mêler des courriels personnels non classés.

Vous n'avez eu de cesse de réitérer votre demande, prétendant que rien n'avait été fait pour faciliter votre reprise.

Cette demande d'accès à la boite mail d'un seul de vos collaborateurs était, à l'évidence, faite de

mauvaise foi et ce dans un but de pression à son égard, probablement du fait de son témoignage en

votre défaveur dans le cadre de la procédure prud'homale.

De plus, alors même que vous avez eu à préparer à votre retour, la réunion du Comité de Direction

du Groupe, nous avons été contraints de constater l'absence de votre nom en tant qu'organisatrice

sur les documents préparatoires à cette réunion pourtant établis par vous-même ou sous votre

contrôle par votre Département, alors que vous y avez toujours figuré en cette qualité les années

précédentes.

Vous vous êtes directement adressée par courriel à Madame [T] [I] le 4

décembre, plus de 15 jours après votre retour au sein de la Société, pour l'informer ne pas détenir

les clefs de votre bureau, la serrure ayant été selon vos propos « changée ». Cette question relève

des services généraux, auxquels vous auriez dû vous adresser directement. [O] [A] notre

responsable des services généraux vous a donné une nouvelle clé en vous informant qu'il n'y avait eu

aucun changement de serrure

L'ensemble de ces éléments démontrent que votre retour au sein de la Société s'est effectué dans un état d'esprit de particulière mauvaise foi pour pouvoir, par vos courriels et arguments fallacieux, étayer et nourrir votre dossier prud'homal en appel au lieu et place de reprendre une collaboration sereine par une activité normale au sein de la société.

Une telle attitude ne peut être conforme à celle d'un Cadre de votre niveau, qui a bénéficié de la part

des Cadres Dirigeants de la Société et de la Présidente d'une totale confiance

Au cours de l'entretien vous avez reconnu le caractère difficile de votre situation dans le contexte

actuel, sans nous convaincre que vos agissements relevaient d'une volonté de reprise sereine de votre activité.

L'ensemble de ces faits sont constitutifs d'une faute grave, rendant impossible toute poursuite du contrat de travail et votre nécessaire licenciement que nous vous notifions par la présente.

Toutefois, eu égard à votre longue collaboration passée, nous ne tirerons pas toutes les conséquences de cette qualification, en ne vous privant ni de votre préavis ni de votre indemnité de licenciement et en vous licenciant dès lors pour motifs réels et sérieux...';

Considérant que l'article L 1232-2 du Code du Travail subordonne la légitimité du licenciement à l'existence d'une cause réelle et sérieuse;

Qu'il appartient au juge d'apprécier le caractère réelle et sérieux des motifs contenus dans la lettre de licenciement;

Que , selon l'article L 1235-1 du Code du travail, le juge forme sa conviction ' au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il juge utile;

Que ce même article dispose que le doute profite au salarié;

Considérant que Madame [P] [C] a repris le travail le 14 novembre 2014, alors les parties étaient dans l'attente de la décision du Conseil de Prud'hommes de Bobigny ;

Qu'il ne peut être reproché à Madame [P] [C] d'avoir saisi le Conseil de Prud'hommes pour l'exercice du droit fondamental d'ester en justice ;

Que le licenciement notifié repose sur le comportement de l'appelante dès le jour de sa reprise de travail qui a cherché à nourrir , dés la visite médicale de reprise effectuée, un contexte relationnel délétère en soulevant une polémique sur les conditions d'information par Monsieur [N] [D] de son absence ou encore de nourrir un débat sur l'accès à la boîte mails de Monsieur [N] [D] ;

Que ce positionnement conflictuel, après une longue absence d'une année, ainsi que la teneur des courriels adressés à la présidente , démontrent une volonté d'envenimer une situation compliquée ;

Que dés lors, le licenciement de Madame [P] [C] est bien intervenu pour une cause réelle et sérieuse ;

Que Madame [P] [C] sera donc déboutée de toutes ses demandes indemnitaires liées au prétendu licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

Sur les autres demandes :

Considérant qu'aucun élément ne caractérise un abus de droit d'ester en justice imputable à Madame [P] [C] ;

Considérant qu'il n'apparaît pas inéquitable que chaque partie conserve la charge des frais irrépétibles exposés ;

PAR CES MOTIFS :

Déclare recevable l'appel interjeté par Madame [P] [C] ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Juge le licenciement de Madame [P] [C] fondé sur une cause réelle et sérieuse;

Déboute Madame [P] [C] de l'ensemble de ses demandes ;

Déboute la société RAJA et Monsieur [D] [V] de leurs demandes reconventionnelles ;

Condamne Madame [P] [C] aux dépens d'appel .

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 14/13665
Date de la décision : 23/05/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°14/13665 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-23;14.13665 ?
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