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06/02/2018 | FRANCE | N°16/09750

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 06 février 2018, 16/09750


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 06 FEVRIER 2018



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/09750



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juillet 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/15255





APPELANT



Monsieur [T] [Q] né le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 1] (Sénégal)



[Adresse 1]

[Adresse 2] - SENEGAL



représenté par Me Patrick TOSONI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1010







INTIME



Le MINISTÈRE PUBLIC agissant en la personne de Madame le PROCUREUR GÉNÉRAL p...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 06 FEVRIER 2018

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/09750

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juillet 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/15255

APPELANT

Monsieur [T] [Q] né le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 1] (Sénégal)

[Adresse 1]

[Adresse 2] - SENEGAL

représenté par Me Patrick TOSONI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1010

INTIME

Le MINISTÈRE PUBLIC agissant en la personne de Madame le PROCUREUR GÉNÉRAL près la Cour d'Appel de PARIS

élisant domicile en son parquet au [Adresse 3]

représenté par Madame SCHLANGER, avocat général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 décembre 2017, en audience publique, l'avocat de l'appelant et le ministère public ne s'y étant pas opposé, devant Mme Dominique SALVARY, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Dominique GUIHAL, présidente

Mme Dominique SALVARY, conseillère

M. Jean LECAROZ, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dominique GUIHAL, présidente et par Mme Mélanie PATE, greffier présent lors du prononcé.

Par jugement du 10 juillet 2015, le tribunal de grande instance de Paris a débouté Monsieur [T] [Q], né le [Date naissance 1] 1994 à[Localité 1] (Sénégal), de son action déclaratoire, dit que celui-ci n'est pas français, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil, rejeté le surplus des demandes de M. [T] [Q], déclaré irrecevable la demande reconventionnelle formée à l'encontre de Monsieur [H] [Q], condamné [T] [Q] aux dépens et rejeté sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 27 avril 2016, [T] [Q] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de conclusions signifiées le 14 novembre 2017, [T] [Q] demande à la cour d'infirmer le jugement, de dire qu'il est de nationalité française, de rejeter les demandes contraires, de condamner l'Etat aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile et à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du même code.

Par conclusions signifiées le 23 octobre 2017, le ministère public demande à la cour de constater que les conditions de l'article 1043 du code de procédure civile ont été respectées, de confirmer le jugement de première instance, de constater l'extranéité de M. [T] [Q] et d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil.

MOTIFS

Considérant qu'en application de l'article 30 du code civil, la charge de la preuve incombe à l'appelant qui n'est pas personnellement titulaire d'un certificat de nationalité française dont la délivrance lui a été refusée le 15 mars 2013 par le greffier en chef du Service de la nationalité des Français nés et établis hors de France ;

Considérant que [T] [Q] se dit français sur le fondement de l'article 18 du code civil pour être le fils de Monsieur [H] [Q], né le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 2] (Sénégal), lui-même de nationalité française pour être né de M. [T] [Q], né en [Date naissance 3] à [Localité 2] (Sénégal), ce dernier ayant conservé la nationalité française lors de l'indépendance du Sénégal le 20 juin 1960 pour avoir établi son domicile de nationalité hors de l'un des Etats qui avaient eu antérieurement le statut de territoire d'outre-mer de la République française ;

Considérant que pour établir son état civil et le lien de filiation existant entre lui et [H] [Q] sont versés aux débats :

- la copie littérale délivrée le 2 mars 2015 d'un acte de naissance dressé le 03 août 2004 sous le numéro 2004/597 par l'officier de l'état civil de Guinaw Rails sud (Sénégal), indiquant que le [Date naissance 1] 1994 est né [T] [Q] de [H] [Q] et [U] [V], et, en mention marginale : 'JAI n° 9138 du 23.06.04",

- un extrait du registre des actes de naissance, délivré le 2 mars 2015, portant les mêmes indications en y ajoutant la mention d'un jugement délivré par le juge de paix de Pikine le 23 juin 2004 sous le numéro 9138,

- la transcription de cet acte de naissance faite le 20 juin 2008 au consulat de France à Dakar à la demande de [H] [Q] portant les mêmes indications que ci-dessus, précision étant apportée que Mme [U] [V] est l'épouse de M. [H] [Q] ;

Considérant que toute mention figurant sur un acte d'état civil fait en pays étranger en exécution d'une décision de justice étrangère ne peut faire foi au sens de l'article 47 du code civil qu'à la condition que cette décision soit produite et remplisse les conditions pour sa régularité internationale ;

Considérant, de même, que la transcription à l'état civil français, c'est à dire l'opération par laquelle un officier de l'état civil français reproduit sur ses registres, soit un acte d'état civil précédemment dressé ailleurs, soit une décision judiciaire touchant à l'état civil, ne dispense pas le titulaire de l'acte transcrit de produire l'acte originel et, le cas échéant, la décision ayant présidé à son établissement de telle sorte qu'elle soit soumise aux mêmes vérifications ;

Considérant que M. [T] [Q] verse en cause d'appel un extrait certifié conforme des minutes du greffe du tribunal départemental de Pikine 'd'un jugement d'autorisation d'inscription d'acte de naissance n° 9138 rendu sur requête par le tribunal (...) en son audience publique du 23 juin 2004", reproduisant littéralement le dispositif de la décision dans les termes suivants :

' Déclare que le(la) nommé(e) [T] [Q], fils(fille) de [H] et de [U] [V] est né à [Adresse 4] le [Date naissance 1] 1994.

Autorisons en conséquence l'inscription du présent jugement par l'officier de l'état civil de Guinaw Raols Sud sur les registres de naissances à la date de sa remise à la suite du dernier acte inscrit (...)' ;

Mais considérant que l'article 53 de la convention de coopération signée le 29 mars 1974 entre la France et le Sénégal fait obligation à toute personne qui invoque l'autorité d'une décision judiciaire à produire une expédition de la décision et non pas seulement un extrait ; que ces stipulations conditionnent également la reconnaissance en France d'une telle décision à la production de l'original de l'exploit de sa signification ou de tout autre acte qui tient lieu de signification et d'un certificat du greffier constatant qu'il n'existe contre la décision, ni opposition, ni appel, ni pourvoi en cassation ; que ces documents ne sont pas versés aux débats;

Considérant en outre que l'absence de production d'une expédition de la décision ne permet pas à la cour de s'assurer de la régularité internationale de la décision au regard de l'article 47 de la convention précitée et, notamment, de vérifier que la décision étrangère ne contient rien de contraire à la conception française de l'ordre public international ; qu'il en est ainsi de l'obligation de motivation alors que n'est produit aux débats aucun document de nature à servir d'équivalent et que seul le dispositif de la décision est communiqué ;

Considérant de surcroît que la filiation paternelle de l'appelant à l'égard de Monsieur [H] [Q] ne peut résulter, comme il le soutient, de la seule mention du nom de son père dans son acte de naissance produit en copie intégrale ; qu'en effet, conformément aux dispositions de l'article 311-14 du code civil, l'établissement de la filiation de M. [T] [Q] est régi par la loi personnelle de la mère le jour de sa naissance, soit, en l'espèce, la loi sénégalaise ; que si, en application de l'article 190 du code de la famille sénégalais, l'indication du nom de la mère sur l'acte de naissance suffit à établir la filiation maternelle, la filiation paternelle hors le cas d'une action judiciaire, résulte, soit de l'application de la présomption de paternité dans le mariage à l'égard du mari de la mère, soit de la possession d'état d'enfant, soit de la reconnaissance de l'enfant par le père conformément aux dispositions de l'article 193 qui dispose:

' Lorsqu'il n'est pas présumé issu du mari de sa mère, l'enfant peut être reconnu par son père.

La déclaration de reconnaissance est faite par le père à l'officier de l'état civil conformément aux dispositions de l'article 57 du présent code, après la naissance de l'enfant, ou même dès qu'il est conçu.

Cependant la déclaration de naissance faite à l'officier de l'état civil par le père déclarant sa paternité suffit à établir la filiation et vaut reconnaissance de sa part ;

Considérant que l'appelant fait tout d'abord valoir que la présomption de paternité du mari de sa mère s'applique en ce qui le concerne dès lors que sa naissance est intervenue plus de 180 jours après la célébration de leur mariage, le 1er juillet 1992 ;

Mais considérant que la preuve de ce mariage n'est pas établie par la seule production du livret de famille de Monsieur [H] [Q] et Madame [U] [V] ni même par l'indication, dans l'acte de naissance transcrit de M. [T] [Q] qu'il est né de [H] [Q] et [U] [V], 'son épouse', énonciation au demeurant absente dans l'acte de naissance étranger, alors que l'acte de mariage n'est pas versé aux débats ;

Considérant que M. [T] [Q] soutient par ailleurs que sa filiation paternelle résulterait de la demande, faite par son père, de transcription de son acte de naissance sur les registres français ;

Mais considérant que la demande de transcription de l'acte de naissance de l'enfant sur les registres français par M. [H] [Q] ne vaut reconnaissance ni en vertu de la loi française, ni en vertu de la loi sénégalaise ; que s'agissant en effet de cette dernière, la reconnaissance de l'enfant, après sa naissance, prendre obligatoirement la forme, selon le renvoi opéré par l'article 193 du code de la famille sénégalais à l'article 57 du même code, d' un acte comportant en tête l'indication : 'Reconnaissance d'enfant naturel' ; qu'aucun acte de reconnaissance n'est en l'espèce produit ;

Considérant enfin qu' il n'est pas allégué ni justifié d'une possession d'état d'enfant ;

Considérant qu'en l'absence de preuve d'un état civil certain et d'un lien de filiation légalement établi entre M. [T] [Q] et Monsieur [H] [Q], il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, la nationalité française n'étant revendiquée à aucun autre titre ;

Considérant que M. [T] [Q], qui succombe, sera condamné aux dépens; que sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera donc rejetée ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement ;

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil ;

Déboute M. [T] [Q] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le condamne aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 16/09750
Date de la décision : 06/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°16/09750 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-06;16.09750 ?
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