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28/09/2018 | FRANCE | N°17/00557

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 6, 28 septembre 2018, 17/00557


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS








COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 4 - Chambre 6





ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2018





(n°139-2018, 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00557





Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Décembre 2016 - Tribunal de Commerce de PARIS - 6ème chambre - RG n° [...]








APPELANTE

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SA coopérative BRED BANQUE POPULAIRE


ayant son siège social [...]


prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège





Représentée par Me Anne A... de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, a...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 6

ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2018

(n°139-2018, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00557

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Décembre 2016 - Tribunal de Commerce de PARIS - 6ème chambre - RG n° [...]

APPELANTE

SA coopérative BRED BANQUE POPULAIRE

ayant son siège social [...]

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Anne A... de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assistée de Me Aline X... de la SCP PETOIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0130

INTIMÉE

SA ELOGIE-SIEMP, venant aux droits de la société ELOGIE

ayant son siège social [...]

N° SIRET : B 552 038 200

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Michel Y... de la Z... , avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Assistée de Me Sylvie B..., avocat au barreau de PARIS, toque: D1251

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Juin 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Mme Annie DABOSVILLE, Présidente de chambre

Mme Madeleine HUBERTY, Conseillère

Mme Marie-José DURAND, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Madeleine HUBERTY, Conseillère, dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Iris BERTHOMIER

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Annie DABOSVILLE, Présidente de chambre et par Mme Iris BERTHOMIER, greffière présente lors du prononcé à laquelle a été remise la minute par le magistrat signataire.

FAITS, PRÉTENTIONS DES PARTIES ET PROCÉDURE

Par acte d'engagement du 22 mai 2009, la SEMIDEP, a confié à la SOCIÉTÉ LEVAUX, entreprise générale, un marché de travaux ayant pour objet la construction d'une résidence étudiante de 208 chambres, d'un foyer de jeunes travailleurs de 93 chambres et de deux logements de fonction dans la ZAC de la Vache à l'Aise à BOBIGNY (93000).

Par acte du 20 août 2010, la SOCIÉTÉ LEVAUX a obtenu auprès de la BRED BANQUE POPULAIRE une garantie à première demande remplaçant la retenue de garantie au visa de l'article 102 du code des marchés publics. La BRED BANQUE POPULAIRE s'est engagée dans la limite de la somme de 822 305,49€.

La garantie expirait dans les conditions prévues à l'article 103 du code des marchés publics, soit un mois au plus tard après l'expiration du délai de garantie de parfait achèvement prévu au marché, qui était d'une année.

La réception a été prononcée avec réserves le 31 décembre 2010.

La SEMIDEP a usé de la faculté qui lui était réservée de prolonger le délai de garantie.

Par courrier en date du 29 décembre 2011, elle a notifié à l'entreprise la prolongation du délai de garantie jusqu'au 31 juillet 2012, pour lever les réserves. Le 30 décembre 2011, elle a adressé une copie de ce courrier à la BRED BANQUE POPULAIRE pour l'aviser de la prolongation du délai de garantie.

Le 10 avril 2012, la SEMIDEP a mis l'entreprise en demeure de lever les réserves restantes dans un délai de 30 jours.

Le 7 mai 2012, le tribunal de commerce d'EVRY a ouvert une procédure de redressement judiciaire pour l'entreprise générale, qui a été convertie en liquidation judiciaire à la date du 25 juin 2012.

Par courrier recommandé avec AR en date du 20 juillet 2012, la SEMIDEP a procédé à une déclaration de créance pour un montant de 245 932,38€ TTC, cette déclaration de créance prenant en compte un solde de marché non réglé à hauteur de 588 892,07€ TTC.

Par courrier recommandé avec AR en date du 14 novembre 2012, la SEMIDEP a sollicité auprès de la BRED BANQUE POPULAIRE la mise en jeu de la garantie à première demande en rappelant le plafond convenu pour la garantie et la nécessité de financer les travaux de levée de réserves.

Malgré des relances en date du 25 avril 2013 et du 28 novembre 2013, la BRED BANQUE POPULAIRE n'a pas consenti à mettre en oeuvre la garantie à première demande, qui avait été consentie à l'entreprise générale le 20 août 2010.

Parallèlement, sur la demande de la SEMIDEP, une expertise a été ordonnée par décision du 17 janvier 2013 du tribunal de grande instance de PARIS.

Certains dommages ont été pris en charge par l'assureur dommages ouvrage.

Par acte en date du 22 juillet 2015, la SOCIÉTÉ ELOGIE (venant aux droits de la SEMIDEP) a assigné la BRED BANQUE POPULAIRE devant le tribunal de commerce de PARIS, afin d'obtenir, en principal, le paiement de la somme de 655 629,93€ HT, au titre de la garantie à première demande.

Dans son jugement rendu le 22 décembre 2016, le tribunal de commerce de PARIS a statué en ces termes :

- Déboute la BRED BANQUE POPULAIRE de sa demande de rejet des prétentions de la SOCIÉTÉ ELOGIE;

- Condamne la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la SOCIÉTÉ ELOGIE la somme de 583631,85€ au titre de la garantie à première demande du 20 août 2010,

- Déboute la SOCIÉTÉ ELOGIE de sa demande d'intérêts;

- Déboute la SOCIÉTÉ ELOGIE de ses demandes de dommages intérêts pour frais de maîtrise d'oeuvre et résistance abusive;

- Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement;

- Condamne la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à la SOCIÉTÉ ELOGIE la somme de 5000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile;

- Condamne la BRED BANQUE POPULAIRE aux dépens.

La BRED BANQUE POPULAIRE a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 5 janvier 2017.

********************

Dans ses conclusions régularisées le 21 juin 2017, la BRED BANQUE POPULAIRE sollicite l'infirmation du jugement. Elle fait valoir que :

' la mise en oeuvre de la garantie a été sollicitée de façon tardive, car postérieurement à l'expiration de la garantie. La garantie a pris fin le 31 août 2012, car l'existence de réserves n'a pas été notifiée au garant pendant le délai de garantie. Le courrier du 30 décembre 2011 ne saurait valoir notification de l'existence de réserves, dès lors qu'il n'avait pour objet que de notifier la prolongation de la garantie à première demande. Le fait que la SEMIDEP ait notifié des réserves à l'entreprise, pendant le délai de la garantie de parfait achèvement, est indifférent, dès lors que le garant n'a pas été informé de l'existence de ces réserves en temps utile. Si l'entreprise doit poursuivre les travaux permettant la levée des réserves, même après l'expiration du délai de la garantie de parfait achèvement, il n'en résulte pas automatiquement la prolongation de la durée de la garantie à première demande, celle-ci étant une garantie autonome.

' subsidiairement, la mise en oeuvre de la garantie était subordonnée à la production d'un certificat administratif indiquant le montant estimé des travaux de levée des réserves. La lettre, en date du 14 novembre 2012, sollicitant la mise en oeuvre de la garantie ne comportait pas un tel certificat et ne précisait même pas le montant des travaux. La déclaration de créance du 20 juillet 2012 ne saurait équivaloir à ce certificat administratif, d'autant qu'elle n'a pas été signée et qu'elle ne comprend aucun justificatif, ni chiffrage détaillé.

' très subsidiairement, la garantie à première demande ayant pour seul objet les travaux de levée de réserves, les honoraires figurant dans la déclaration de créance (poste 5) ne sauraient être pris en compte. Par ailleurs, le montant de 583 631,85€ TTC figurant sur la déclaration de créance présente un caractère incertain. En effet, certains travaux ont été pris en charge par l'assureur dommages ouvrage (plomberie et chauffage). Au surplus, la garantie ne peut en aucun cas porter sur le coût de l'inachèvement du chantier. Or, la déclaration de créance montre que la SEMIDEP n'avait pas payé la totalité des travaux pour un montant supérieur (588892,07€ TTC) au montant des travaux de levée des réserves. Le solde du marché doit être soustrait du montant des travaux de levée des réserves.

' dans tous les cas, la garantie ne saurait excéder le montant de la déclaration de créance, soit la somme de 245 932,38€ TTC.

**********************

Dans ses conclusions régularisées le 7 juin 2018, la SOCIÉTÉ ELOGIE-SIEMP sollicite la confirmation du jugement sur la condamnation prononcée, mais son infirmation sur les prétentions accessoires qui ont été rejetées. Elle fait valoir que :

' la demande de mise en oeuvre de la garantie a été effectuée en temps utile. En effet, en vertu de l'article 103 du code des marchés publics, la garantie à première demande est libérée soit dans le délai d'un mois après l'expiration du délai de garantie, soit dans le délai d'un mois de la date de levée des réserves, dans le cas où des réserves ont été notifiées au garant. En l'occurrence, le courrier du 30 décembre 2011 a, à la fois, notifié la prolongation du délai de garantie de parfait achèvement et l'existence de réserves. La garantie était donc due, tant que toutes les réserves n'avaient pas été levées. La durée de la garantie à première demande n'est pas calquée sur celle de la garantie de parfait achèvement, mais conditionnée à la levée des réserves.

' la demande de mise en oeuvre de la garantie a respecté les modalités prévues, étant souligné qu'aucun certificat administratif ne peut être exigé de la SEMIDEP, puisque cette société d'économie mixte n'est pas une personne publique. L'estimation des travaux de levée des réserves a été communiquée à l'établissement bancaire, non par un certificat administratif mais par la déclaration de créance, qui a fait référence à la liste des réserves et à leur évaluation par la maîtrise d'oeuvre. La déclaration de créance est signée et, dans tous les cas, la garantie à première demande est autonome par rapport aux relations contractuelles, ce qui signifie que l'irrégularité éventuelle de la déclaration de créance est inopposable au bénéficiaire de la garantie.

' l'objet de la garantie intègre les services, c'est à dire les frais d'étude et de maîtrise d'oeuvre liés à la levée des réserves. Il s'ensuit qu'outre le montant strictement alloué pour la levée des réserves, la BRED BANQUE POPULAIRE doit également prendre en charge les frais de maîtrise d'oeuvre qui ont été évalués à la somme de 75 190,85€ TTC.

' les intérêts moratoires sont dus depuis le 1er décembre 2012, au taux prévu par l'article 98 du code des marchés publics.

' la BRED BANQUE POPULAIRE n'a jamais répondu aux multiples relances, qui lui ont été adressées. Elle a purement et simplement cherché à ne pas assumer son engagement, ce qui justifie sa condamnation au paiement de dommages intérêts pour résistance abusive. Au surplus, du fait de sa carence, les désordres se sont aggravés et le coût des travaux s'est alourdi d'un montant de 167642€ entre la demande énoncée en novembre 2012 et la ré-actualisation opérée en 2015.

' la compensation n'est pas opposable en raison du caractère autonome de la garantie à première demande qui ne dépend plus des liens entre les parties. De même, les indemnités versées par l'assureur dommages ouvrage ne doivent pas être prises en compte.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée le jeudi 24 mai 2018.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,

Selon l'acte d'engagement, valant garantie à première demande, souscrit le 20 août 2010 par la BRED BANQUE POPULAIRE (pièce 20 ELOGIE), celle-ci s'est engagée 'à payer à première demande, dans la limite du montant garanti, les sommes que la personne publique pourrait demander pour couvrir les réserves à la réception des travaux, fournitures ou services, ainsi que celles formulées pendant le délai de garantie du marché.

Le paiement interviendra dans un délai de 15 jours à compter de la réception par les services de la BRED BANQUE POPULAIRE d'un dossier comportant la photocopie des pièces suivantes :

1/si l'entreprise est en redressement ou liquidation judiciaire : jugement prononçant la liquidation judiciaire....

2/ autres cas (mises en demeure, certificat administratif, décision de mise en régie....)

3/ pièce à fournir dans les cas 1 et 2 : certificat administratif indiquant le montant estimé, du fait des réserves formulées, du surcoût d'achèvement des travaux ou services ou des livraisons de fournitures.

.................................................................................................................................................

La BRED BANQUE POPULAIRE procédera au paiement dès lors qu'elle aura reçu l'ensemble des pièces énumérées ci-dessus, sans soulever aucune contestation quant à leur contenu.

Les sommes payées resteront acquises à la personne publique quel que soit le motif d'inexécution des travaux.....l'engagement de la BRED BANQUE POPULAIRE étant autonome par rapport aux éventuelles dettes de ce dernier.

La présente garantie prendra fin dans les conditions prévues à l'article 103 du code des marchés publics....'.

Sur la régularité temporelle de la demande de mise en oeuvre de la garantie à première demande;

La BRED BANQUE POPULAIRE soutient que le courrier, en date du 14 novembre 2012 (pièce 12 BRED), par lequel la SEMIDEP l'a informée de sa demande de mise en oeuvre de la garantie lui est parvenu, alors que la garantie avait expiré.

L'acte d'engagement du 20 août 2010 fait référence à l'article 103 du code des marchés publics pour définir la durée, pendant laquelle la banque doit honorer sa garantie.

Selon l'article 103 du code des marchés publics (version en vigueur lors de la conclusion du marché en mai 2009) ' la retenue de garantie est remboursée un mois au plus tard après l'expiration du délai de garantie.....les établissements ayant accordé leur caution ou leur garantie à premier demande sont libérés un mois au plus tard après l'expiration du délai de garantie. Toutefois, si des réserves ont été notifiées au titulaire du marché ou aux établissements ayant accordé leur caution ou leur garantie à première demande pendant le délai de garantie et si elles n'ont pas été levées avant l'expiration de ce délai, les établissements sont libérés de leurs engagements un mois au plus tard après la date de leur levée'.

Ainsi qu'il est soutenu par la SOCIÉTÉ ELOGIE, cette disposition distingue deux hypothèses : lorsque les travaux ont été réceptionnés sans réserve, la garantie expire au plus tard un mois après l'expiration du délai de garantie (soit la garantie de parfait achèvement). Lorsqu'il y a des réserves et que ces réserves ont été notifiées au garant, la garantie subsiste jusqu'à la levée des réserves, indépendamment de l'expiration du délai de garantie dû par l'entreprise.

La notification des réserves au garant est donc une condition du maintien de la garantie jusqu'à la levée des réserves.

La SOCIÉTÉ BRED BANQUE POPULAIRE soutient que la SEMIDEP ne lui pas notifié de réserves pendant le délai de garantie. La garantie expirait donc le 31 août 2012, soit un mois après la prolongation du délai de garantie de parfait achèvement décidée par le maître d'ouvrage, selon courrier en date du 29 décembre 2011 adressé à l'entreprise et dénoncé le 30 décembre 2011 au garant (pièces 27 et 28 ELOGIE).

La SOCIÉTÉ ELOGIE-SIEMP fait valoir que le courrier du 29 décembre 2011 (pièce 27 ELOGIE) notifie, à la fois, la prolongation du délai de garantie et l'existence de réserves.

Il résulte du texte de l'article 103 du code des marchés publics (version de 2006) que la garantie est maintenue jusqu'à la levée des réserves, lorsque ces réserves ont été notifiées au garant, pendant le délai de la garantie. Il s'en déduit que le bénéficiaire de la garantie, qui craint que l'entreprise ne procède pas à la levée de réserves subsistantes, doit aviser le garant de l'existence de ces réserves avant l'expiration de la période de garantie. Dès cette notification pratiquée en temps utile, la garantie est due jusqu'à ce qu'il y ait eu levée effective des réserves ou jusqu'à la mise en oeuvre de la garantie.

Par courrier en date du 30 décembre 2011, la SEMIDEP a communiqué à la BRED BANQUE POPULAIRE le courrier adressé le 29 décembre 2011 à l'entreprise, pour l'aviser de la prolongation du délai de parfait achèvement jusqu'au 31 juillet 2012. Il est clairement précisé, que sera trouvée ci jointe 'la copie du courrier adressé à ACH (entreprise générale venant aux droits de LEVAUX) concernant la prolongation de la garantie de parfait achèvement'.

Le courrier du 29 décembre 2011 adressé à l'entreprise (objet du courrier du 30 décembre 2011 adressé à la BRED) indique expressément qu'il a pour objet de notifier 'la prolongation de l'année de garantie jusqu'au 31 juillet 2012, ce qui vous permettra de lever les réserves restantes, la caution bancaire attachée au parfait achèvement sera aussi prolongée dans les délais identiques'.

Cette dernière phrase suffit à démontrer que le courrier du 29 décembre 2011 n'a pas eu pour objet de notifier des réserves. En effet, s'il s'était agi de notifier des réserves, il n'aurait pas pu être indiqué que la garantie serait maintenue dans un délai 'identique', puisque, dans un tel cas, la garantie est maintenue jusqu'à la levée des réserves, selon l'article 103 du code des marchés publics, ainsi qu'il est pertinemment souligné par la SA ELOGIE dans ses conclusions (page 11).

Dans tous les cas, l'article 103 du code des marchés publics évoque bien la nécessité d'une notification des réserves, pour que la garantie soit maintenue jusqu'à leur levée. Si cette disposition ne précise pas les conditions formelles d'une telle notification, l'exécution de bonne foi de cette formalité implique, cependant, qu'elle soit aisément lisible, c'est à dire facilement comprise. Tel n'est manifestement pas le cas des courriers adressés le 30 décembre 2011 à la BRED BANQUE POPULAIRE, lesquels indiquent expressément, à deux reprises, que leur objet porte sur la 'prolongation de la garantie de parfait achèvement'. L'existence de réserves n'est évoquée que pour justifier cette prolongation et non pour dénoncer au garant l'existence de ces réserves, dont tout laisse penser qu'elles vont pouvoir être normalement levées dans le délai de la garantie de parfait achèvement 'prolongée'. Les courriers du 30 décembre 2011 ne peuvent donc pas valoir notification de réserves au garant.

Il en résulte que la SOCIÉTÉ ELOGIE ne démontre pas avoir notifié l'existence de réserves à la BRED BANQUE POPULAIRE, dans le délai de la garantie, qui expirait le 31 août 2012, à défaut de justifier de la notification préalable de l'existence de réserves. La mise en demeure de lever les réserves adressée à l'entreprise le 10 avril 2012 (pièce 6 ELOGIE) n'a pas été dénoncée à la BRED BANQUE POPULAIRE, dénonciation qui aurait pu valoir notification de l'existence de réserves au garant. Celle-ci n'a eu connaissance de l'existence de réserves non levées que lorsque la demande de mise en oeuvre de la garantie à première demande lui a été soumise par courrier en date du 14 novembre 2012 (pièce 12 ELOGIE), soit plus de 2 mois après l'expiration de la période de garantie.

Si le tribunal de commerce a estimé que la demande de mise en oeuvre de la garantie n'avait pas été sollicitée hors délai, il n'a pas précisé à quelle date était intervenue la notification des réserves permettant le maintien de la garantie jusqu'à la levée des réserves.

Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de mise en oeuvre de la garantie à première demande accordée le 10 août 2010, alors que cette garantie ne pouvait plus être mise en oeuvre comme étant expirée.

La SOCIÉTÉ ELOGIE doit, en conséquence, être déboutée de l'ensemble de ses prétentions.

Il est équitable de condamner la SOCIÉTÉ ELOGIE à payer à la BRED BANQUE POPULAIRE une somme de 5000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions;

Statuant à nouveau;

DÉBOUTE la SOCIÉTÉ ELOGIE-SIEMP de l'ensemble de ses prétentions;

CONDAMNE la SOCIÉTÉ ELOGIE-SIEMP à payer à la BRED BANQUE POPULAIRE une somme de 5000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNE la SOCIÉTÉ ELOGIE-SIEMP aux dépens avec distraction au profit de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 17/00557
Date de la décision : 28/09/2018

Références :

Cour d'appel de Paris G6, arrêt n°17/00557 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-28;17.00557 ?
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