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21/01/2019 | FRANCE | N°16/17151

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 3, 21 janvier 2019, 16/17151


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 3



ARRET DU 21 JANVIER 2019



(n° 2019/ , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/17151 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZNQB



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Mai 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/08937





APPELANT



Monsieur Salvatore X...

[...]

[...]

n

é le [...] à VENTIMIGLIA (ITALIE)



Représenté par Me Benoît Y... de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assisté de Me Dalila Z... avocat au barreau...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 3

ARRET DU 21 JANVIER 2019

(n° 2019/ , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/17151 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZNQB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Mai 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/08937

APPELANT

Monsieur Salvatore X...

[...]

[...]

né le [...] à VENTIMIGLIA (ITALIE)

Représenté par Me Benoît Y... de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assisté de Me Dalila Z... avocat au barreau de PARIS -Toque C385, substituant Me Alice G... avocat au barrreau de CAEN

INTIMEES

SA ALLIANZ IARD

1 Cours Michelet

[...] / FRANC

N° SIRET : 542 11 0 2 91

Représentée par Me Marcel H... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0450

Assistée de Me Raphaël A..., de la SELAS PORCHER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0450

Etablissement RSI - ILE DE FRANCE

[...]

Défaillant

SA SOCIETE ANONYME DE DEFENSE ET D'ASSURANCE - SADA SA à Directoire et conseil de surveillance

[...]

N° SIRET : B 5 80 201 127

Représentée par Me Laure I..., avocat au barreau de PARIS, toque : C2364

Assistée de Me Julien J..., avocat au barreau de PARIS, toque C2364

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Novembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thierry RALINCOURT, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry RALINCOURT, Président de chambre

Mme Marie-Françoise B... MIRAMON Présidente de chambre

Mme Clarisse GRILLON, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Zahra BENTOUILA

ARRÊT : Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour 14 Janvier 2019 et prorogé au 21 Janvier 2019, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Thierry RALINCOURT, Président de chambre et par Zahra BENTOUILA, Greffière présent lors du prononcé.

******

Le 4 décembre 2008, Salvatore X..., né le [...] et alors âgé de 39 ans, a été victime d'un accident corporel de la circulation dans lequel a été impliqué un véhicule conduit par Jacques C... et assuré auprès de la société SADA Assurances.

Par jugement du 16 mai 2011, le tribunal de grande instance de Paris a, essentiellement :

- dit que la faute de conduite commise par Salvatore X... réduit de 40% son droit à indemnisation,

- condamné in solidum la société SADA Assurances et son assuré à payer à Salvatore X... une provision de 10.000€.

Par arrêt du 22 avril 2013, la cour d'appel de Paris a confirmé le partage de responsabilité et alloué à Salvatore X... une provision complémentaire de 50.000€ à valoir sur l'indemnisation de son préjudice.

Salvatore X... a sollicité le bénéfice de la garantie individuelle du conducteur stipulée dans le contrat d'assurance de son scooter souscrit auprès de la société ALLIANZ.

Il a fait l'objet d'une expertise amiable contradictoire par le Docteur D..., missionné par la société ALLIANZ, le Docteur E..., missionné par la société SADA Assurances et le Docteur F..., médecin conseil de la victime, dont le rapport a été clos le 13décembre 2013.

Sur appel, interjeté par Salvatore X..., d'un jugement rendu le 10/05/2016 (instance n° 14-08937) par le tribunal de grande instance de Paris, la présente Cour a, par arrêt du 12/02/2018, essentiellement :

-liquidé le préjudice corporel de Salvatore X... à l'exception des frais de véhicule adapté,

- statué sur le recours en contribution exercé par la société ALLIANZ à l'encontre de la société SADA Assurances, co-obligée,

- avant dire droit sur la demande de Salvatore X... en indemnisation de frais de véhicule adapté, invité les parties à présenter leurs observations sur:

$gt; l'éventuelle adaptation, aux séquelles de Salvatore X..., d'un scooter à trois roues avec stationnement sans béquillage,

$gt; le surcoût d'un tel véhicule, dans une version de cylindrée minimale, la plus proche de 50 cm3,

$gt; le coût d'obtention de l'autorisation administrative de conduire un scooter de cette catégorie,

- à ces fins, ordonné la réouverture des débats.

Selon dernières conclusions sur réouverture des débats notifiées le 20/06/2018, il est demandé à la Cour par Salvatore X... de :

- évaluer les frais de véhicule adaptés à 48.752,15 € ou subsidiairement 32.893,62€,

-Condamner la société SADA à lui verser une somme de 29.251,29 € ou subsidiairement de 19.736,17€,

- condamner la société ALLIANZ à lui verser une somme de 19.500,86 € ou subsidiairement de 13.157,45€,

- condamner in solidum les sociétés SADA et ALLIANZ à lui verser une nouvelle indemnité de 1.500€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Selon dernières conclusions sur réouverture des débats notifiées le 22/10/2018, il est demandé à la Cour par la société SADA Assurances de :

- faire application du coefficient de réduction du droit à indemnisation après avoir évalué les postes de préjudice,

- rejeter la demande de Salvatore X... au titre du coût d'acquisition d'un véhicule automobile adapté et/ou d'un scooter trois roues,

- en tout état de cause limiter la réparation au seul surcoût éventuel entre un véhicule automobile et un véhicule adapté ou un scooter et un scooter adapté, sans béquillage, ou avec béquillage adapté,

- le cas échéant ordonner un sursis à statuer pour production des justificatifs,

- dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et rejeter la demande de l'appelant.

Selon conclusions sur réouverture des débats notifiées le 25/06/2018, il est demandé à la Cour par la société ALLIANZ de :

- dire et juger que le rapport d'expertise ne retient pas la nécessité d'obtenir un véhicule adapté, et donc rejeter les prétentions du demandeur,

- à titre subsidiaire, limiter les réparations au seul surcoût éventuel entre un scooter neuf et un scooter adapté (stationnement sans béquillage),

-condamner Salvatore X... au paiement d'une indemnité de 2.000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS de l'ARRET

Les Docteurs D..., E... et F..., experts, ont émis l'avis suivant sur le préjudice corporel subi par Salvatore X..., essentiellement :

- blessures provoquées par l'accident : fracture complexe comminutive du plateau tibial spino-bi-tubérositaire avec complications (infection nosocomiale),

- consolidation fixée au 11 juillet 2013,

- taux d'atteinte à l'intégrité physique et psychique : 25 % (enraidissement important du genou suite aux changements de prothèses, enraidissement de la cheville droite, aggravation lymphoedème préexistant),

- besoin d'un véhicule automatique si l'intéressé a le permis de conduire; nécessité d'acquérir un véhicule adapté.

Salvatore X... fait valoir, concernant l'indemnisation du poste de frais de véhicule adapté :

- qu'avant l'accident et alors qu'il se déplaçait uniquement en scooter de moins de 50 cm3 qui ne nécessite pas de permis de conduire, il n'aurait jamais envisagé d'obtenir son permis de conduire ni de faire l'acquisition d'une automobile,

- que, dorénavant, ses séquelles l'empêcheraient de conduire un scooter :

$gt; d'une part parce que, sur le plan physique, il serait incapable de le béquiller,

$gt; d'autre part et essentiellement parce que, sur le plan psychologique, il serait incapable de remonter sur un scooter en raison de son appréhension à la conduite d'un deux roues, mais aussi des risques de chutes et de fractures consécutives qui, compte tenu de ses antécédents, risqueraient d'entraîner une amputation de sa jambe.

- que l'indemnisation sur la base du coût d'acquisition d'un scooter à trois roues permettant le stationnement sans béquillage reviendrait à l'obliger à minimiser son dommage, en méconnaissance du principe de non mitigation.

Salvatore X... demande l'indemnisation suivante:

- coût d'obtention du permis de conduire les automobiles 1.610,00€

- surcoût constitué par l'acquisition d'une automobile avec boîte

de vitesses automatique en remplacement du scooter antérieur:

11.645,50€ - 3.249€ 8.396,50€

- surcoût du renouvellement du véhicule tous les 6 ans à partir

de l'âge de 50 ans avec capitalisation viagère:

8.396,50€ / 6 ans * 27,68738.745,65€

- total48.752,15€.

A titre subsidiaire, Salvatore X... demande l'indemnisation suivante:

- coût d'obtention du permis de conduire les scooters à 3 roues 1.910,00€

- surcoût constitué par l'acquisition d'un scooter à 3 roues avec

béquillage automatique en remplacement du scooter antérieur

et surcoût d'assurance (pour 6 ans) :

(7.899€ + 866,50€) - 3.249€ 5.518,50€

- surcoût du renouvellement du véhicule tous les 6 ans à partir

de l'âge de 50 ans avec capitalisation viagère:

5.518,50€ / 6 ans * 27,68725.465,12€

- total32.893,12€.

La société SADA fait valoir en réplique:

- qu'avant la réouverture des débats, elle demandait à la cour de confirmer le sursis à statuer, faute de justificatifs probants, quant à la réussite à l'examen du permis de conduire automobile et au coût d'adaptation d'un véhicule standard au handicap de Salvatore X...,

- que, dès lors que l'appelant lui-même considère qu'il ne peut ni physiquement, ni psychologiquement, conduire un scooter à trois roues, même sans béquillage, et dès lors que ce type de véhicule présente une cylindrée très importante nécessitant un permis de conduire et est difficile à conduire, nécessitant des efforts physiques importants, la demande qu'il présente à ce titre ne peut qu'être rejetée,

- que devrait de même être rejetée sa demande tendant à financer l'acquisition d'un véhicule automobile tous les six ans, alors que seule l'adaptation dudit véhicule au handicap de l'appelant pourrait être indemnisée,

- que bien que la Cour ait rouvert les débats pour obtenir des observations sur l'éventuelle adaptation aux séquelles de Salvatore X... d'un scooter à trois roues avec stationnement sans béquillage, sur le surcoût d'un tel véhicule dans une version de cylindrée minimale la plus proche de 50cm3, et sur le coût d'obtention de l'autorisation administrative de conduire un scooter de cette catégorie, il apparaît que le demandeur ne produit aux débats :

$gt; ni devis pour l'achat d'un tel véhicule,

$gt; ni devis pour l'achat d'un scooter classique permettant de calculer le surcoût,

$gt; ni étude sur la possibilité d'adapter une béquille spécifique (même centrale) avec vérin électrique et commande au guidon ou interrupteur de déclenchement de la béquille au point mort, technique utilisée par un paraplégique,

- que l'octroi des sommes élevées réclamées par Salvatore X... contreviendrait au principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime,

- que la demande devrait être rejetée ou à tout le moins sensiblement réduite en son montant.

La société ALLIANZ conclut principalement au rejet de la demande au motif que le rapport d'expertise n'a pas retenu de poste de préjudice pour aménagement de véhicule.

Subsidiairement, elle conclut à la limitation de l'indemnisation au seul surcoût entre l'acquisition d'un scooter neuf et un scooter adapté à la situation du demandeur, dès lors qu'il ne serait pas démontré que le demandeur ait besoin d'un véhicule équipé d'une boite de vitesses automatique avec pédalier inversé.

En droit, en application du principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime, cette dernière doit être replacée dans une situation aussi proche que possible de celle dans laquelle elle se serait trouvée si le fait dommageable ne s'était pas produit.

En fait, il n'est pas contesté par les assureurs intimés:

- qu'avant (et au moment de) l'accident, Salvatore X... se déplaçait en utilisant un scooter de 50 cm3,

- qu'il ne pourrait plus utiliser un tel véhicule puisque ses séquelles le mettraient dans l'incapacité de le béquiller.

Pour replacer Salvatore X... dans la situation qui était la sienne avant l'accident, et donc pour lui permettre de disposer d'un moyen de locomotion adapté à ses séquelles, il n'apparaît pas nécessaire qu'il dispose d'une automobile, dès lors qu'il existe sur le marché des scooters à trois roues dont les dernières générations permettent le stationnement sans béquillage, manoeuvre interdite à l'intéressé par ses séquelles.

Salvatore X... invoque de manière inopérante son appréhension - légitime - à reprendre la conduite d'un bicycle en raison des risques de chute inhérents à ce type de véhicule, dès lors que ce risque est quasiment inexistant avec l'utilisation d'un scooter à trois roues, dont l'invention a été dictée par une recherche de stabilité, d'équilibre, et d'amélioration des capacités de freinage par rapport à un bicycle motorisé.

Les coûts d'acquisition d'un scooter à 3 roues et d'un scooter bicycle conforme à celui possédé par Salvatore X... avant l'accident, invoqués par ce dernier, sont conformes aux valeurs du marché et sont entérinés.

Salvatore X... ne justifie pas du coût, invoqué par lui, d'obtention du permis de conduire un scooter à 3roues avec béquillage automatique.

Il sera donc tenu compte du coût d'une formation pour véhicule de cylindrée de 125 cm3 conforme au devis produit par l'appelant (300€ - pièce n°27).

Enfin, Salvatore X... ne justifie par aucune pièce du surcoût allégué de la cotisation d'assurance d'un scooter à 3 roues par rapport à son scooter bicycle antérieur, de sorte qu'aucune indemnisation n'est retenue à ce titre.

L'indemnisation des frais de véhicule adapté est liquidée comme suit, avec renouvellement du véhicule tous les 6ans et application du barème de capitalisation publié par la Gazette du Palais en 2018 au taux de 0,50%, invoqué par Salvatore X...:

- coût d'obtention du permis de conduire les scooters à 3 roues 300€

- surcoût constitué par l'acquisition d'un scooter à 3 roues avec

béquillage automatique en remplacement du scooter antérieur:

7.899€ - 3.249€ 4.650€

- surcoût du renouvellement du véhicule tous les 6 ans à partir

de 2019, l'intéressé étant âgé de 50 ans :

4.650€ / 6 ans * 27,68721.457€

- total26.407€

- droit à indemnisation de 60%15.844€.

Dès lors que Salvatore X... divise sa demande à l'encontre des deux assureurs selon la répartition contributive fixée par le précédent arrêt du 12/02/2018 (60% et 40%), ladite indemnisation incombe:

- à la société SADA à concurrence de 9.506€,

- à la société ALLIANZ à concurrence de 6.338€.

La demande indemnitaire de Salvatore X... fondée sur l'article 700 du code de procédure civile est accueillie dans son principe et son montant.

PAR CES MOTIFS

la Cour

Condamne la société SADA Assurances à payer à Salvatore X... une somme de 9.506 € (neuf mille cinq cent six euros) en indemnisation des frais de véhicule adapté, avec intérêts au taux légal à compter du jour du présent arrêt, capitalisables annuellement,

Condamne la société ALLIANZ à payer à Salvatore X... une somme de 6.338 € (six mille trois cent trente-huit euros) en indemnisation des frais de véhicule adapté, avec intérêts au taux légal à compter du jour du présent arrêt, capitalisables annuellement,

Condamne les sociétés SADA Assurances et ALLIANZ in solidum à payer à Salvatore X... une indemnité de 1.500 € (mille cinq cents euros) par application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne les sociétés SADA Assurances et ALLIANZ in solidum aux dépens d'appel exposés depuis le 12/02/2018, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LA GREFFIERELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/17151
Date de la décision : 21/01/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C3, arrêt n°16/17151 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-21;16.17151 ?
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