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12/09/2013 | FRANCE | N°12/01441

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 12 septembre 2013, 12/01441


FP/AM



Numéro 13/3326





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 12/09/2013







Dossier : 12/01441





Nature affaire :



Demande en décharge ou en réduction des droits de douane à l'importation















Affaire :



SARL STOCK MAN



C/



DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS

















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Grosse délivrée le :

à :

















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS













A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 12 septembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au ...

FP/AM

Numéro 13/3326

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 12/09/2013

Dossier : 12/01441

Nature affaire :

Demande en décharge ou en réduction des droits de douane à l'importation

Affaire :

SARL STOCK MAN

C/

DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 12 septembre 2013, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 26 mars 2013, devant :

Madame PONS, Président, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Monsieur AUGEY, Conseiller

Madame BENEIX, Conseiller

assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

SARL STOCK MAN

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège de la société

représentée par la SCP MARBOT - CREPIN, avocats à la Cour

assistée du Cabinet MONOD - AMAR - BOUDRANT, avocats au barreau de PARIS

INTIMEE :

DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Monsieur [M]

représentée et assistée de la SCP RODON, avocats à la Cour

sur appel de la décision

en date du 28 MARS 2012

rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE BAYONNE

Par acte d'huissier en date du 7 juin 2011, la SARL Stock Man a fait assigner la Direction Régionale des Douanes et des Droits Indirects de Bayonne devant le tribunal d'instance de Bayonne en contestation d'un avis de mise en recouvrement (AMR) émis le 23 septembre 2010 sur la base d'un procès-verbal d'infraction du 16 mars 2009 rédigé suite à un contrôle de ses importations de transpalettes à main, pour un montant de 147 560,00 € dont 9 712,00 € de droits de douane, 113 393,00 € de droits anti-dumping et 24 459,00 € de TVA.

Par jugement du 28 mars 2012, le tribunal a :

- validé l'avis de recouvrement,

- condamné la SARL Stock Man à payer à la Direction régionale des Douanes et des Droits Indirects de Bayonne la somme de 113 393 € (cent treize mille trois cent quatre vingt treize euros) au titre des droits anti-dumping,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que chacune des parties conservera les dépens par elle exposés.

Par déclaration reçue au greffe le 23 avril 2012 la SARL Stock Man a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières écritures déposées le 4 mars 2013, elle demande à la Cour :

- d'infirmer le jugement du 28 mars 2012,

- principalement de dire et juger nul et de nul effet ou à défaut non fondé, l'avis de mise en recouvrement notifié par la Douane le 27 septembre 2010 à la société Stock Man,

- subsidiairement, de dire que les droits anti-dumping ne pourraient au plus s'appliquer qu'aux pompes hydrauliques d'origine chinoise,

- de renvoyer la Douane à se pourvoir de nouveau après administration de la preuve du prix des pompes hydrauliques incorporées dans les transpalettes à main importés par elle,

- si la Cour le préfère, poser la question préjudicielle suivante à la Cour de justice de l'Union Européenne :

« Lorsque l'une seulement des deux pièces essentielles du transpalette à main importé dans l'Union Européenne a été fabriquée en République Populaire de Chine, l'application

des règlements CE 128/2005 du 27 janvier et CE 1174/2005 du 18 juillet 2005 doit-elle s'interpréter en ce sens que seule la pièce essentielle fabriquée en République Populaire de Chine est soumise au droit anti-dumping ' '',

- de surseoir à statuer dans l'attente de la réponse,

- de constater en toute hypothèse que les droits de douane et la TVA ont été réglés,

- de laisser les dépens à la charge de la Douane et de la condamner à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle critique d'une part, la régularité des poursuites engagées par l'administration des douanes, d'autre part, le bien-fondé de la réclamation.

Dans ses dernières écritures remises le 20 février 2013, la Direction Régionale des Douanes et des Droits Indirects de Bayonne demande à la Cour de confirmer le jugement du tribunal d'instance de Bayonne du 28 mars 2012 en ce qu'íl a condamné la société Stock Man à payer à l'Administration des douanes une somme de 113 393 € correspondant aux droits anti-dumping et de dire n'y avoir lieu à condamnation aux dépens au regard des dispositions de l'article 367 du code des douanes.

SUR CE :

Il n'est pas contesté par les parties que la société Stock Man dont le siège social est à [Localité 1] (64), commercialise des transpalettes c'est-à-dire des chariots élévateurs manuels d'origine chinoise et, depuis 2005 par l'intermédiaire d'une société thaïlandaise GT Mover, des élévateurs d'origine thaïlandaise.

Les transpalettes chinoises sont frappés depuis le règlement n° 1174/2005 pris par la commission européenne le 18 juillet 2005 de droits anti-dumping alors que les transpalettes d'origine thaïlandaise bénéficient d'un régime préférentiel dans le cadre du système de préférence généralisé organisé par le code des douanes communautaires.

La société Stock Man a importé du 04 septembre 2006 au 28 décembre 2007 des transpalettes à main de Thaïlande fournis par la société thaïlandaise GT MOVER, d'une valeur totale de 242 812 €. Ces importations ont donné lieu à des déclarations en douane modèle IM4 (importation définitive).

C'est la société GT Mover qui a établi pour les importations de Thaïlande faites par Stock Man des certificats FORM A attestant que les transpalettes répondaient aux critères renforcés d'origine thaïlandaise préférentielle et la société Stock Man a sollicité et obtenu, à l'occasion de ces importations, le bénéfice du régime tarifaire préférentiel accordé par la Communauté européenne dans ses échanges avec la Thaïlande pour les produits originaires de ce pays.

En 2007, la Douane a entamé un contrôle a posteriori sur les importations de transpalettes

de Thaïlande déclarées par Stock Man en 2006 et 2007.

Une enquête globale a été menée au niveau européen par l'OLAF (Office européen de Lutte Anti Fraude), organisme dépendant de la Commission européenne, plusieurs pays européens étant concernés.

Eu égard aux éléments transmis par les autorités thaïlandaises et par l'OLAF, l'administration des douanes, considérant que les transpalettes exportés par la société GT MOVER, fournisseur de la société Stock Man, sont principalement d'origine chinoise et que les irrégularités relevées à l'encontre de la société Stock Man s'analysent en des sollicitations indues du régime préférentiel SPG et en des fausses déclarations d'origine, lui a, suivant procès-verbal du16 mars 2009, notifié les conclusions du contrôle et ces infractions réputées importations sans déclaration de marchandises prohibées, prévues et réprimées par les articles 426-3 et 414 du code des douanes et entraînant le paiement de 9 712 € de droits de douane, 24 459 € de TVA et 113 393 € de droits anti-dumping.

Un premier AMR a été émis par l'administration des Douanes le 27 mars 2009 et après contestation de la société Stock Man rejeté par les Douanes, le tribunal d'instance de Bayonne, sur saisine de la société Stock Man, a, par jugement du 8 septembre 2010, annulé cet AMR au motif que l'administration des douanes n'établissait pas que l'agent signataire de cet avis remplissait les qualités requises par l'article 345 alinéa 2 du code des douanes pour le signer et le rendre exécutoire.

Le 23 septembre 2010, l'administration des douanes, a alors délivré un nouvel AMR à la société Stock Man.

Cet AMR a été contesté le 11 octobre 2010 par la société Stock Man qui invoquait la nullité de l'AMR pour ne comporter qu'une signature, la nullité des poursuites en faisant valoir que ces poursuites étaient fondées sur un rapport de l'OLAF qui ne lui avait pas été remis lors de l'établissement du procès-verbal, qui n'a été reproduit que par extraits dans ce procès-verbal, que les annexes sur lesquelles reposent essentiellement les poursuites ne lui ont pas été communiquées et qui contestait au fond la créance.

Une première réponse lui était faite le 21 octobre 2010 par le receveur régional des douanes sur la nullité de l'AMR, ce dernier lui indiquant que pour le surplus une réponse lui serait apportée le 18 avril 2011 au plus tard par le directeur régional des Douanes de [Localité 1].

Une décision de rejet de la contestation intervenait le 11 avril 2011.

Sur la nullité de l'AMR du 23 septembre 2010

La société Stock Man invoquant les dispositions de l'article 345 alinéa 2 du code des douanes, estime que l'AMR doit comporter deux signatures, celle du directeur régional des Douanes ou du comptable des Douanes mais aussi celle d'un agent ayant au moins le grade de contrôleur ce qui n'a pas été le cas en l'espèce une seule signature y étant apposée, celle du contrôleur principal de sorte que cet AMR doit être déclaré nul.

L'administration des Douanes estime que l'AMR contesté qui comporte le grade et la qualité de son signataire est valable et ne nécessite pas l'apposition obligatoire de deux signatures.

D'après elle, l'article 345 précise tout simplement que l'AMR est signé par le receveur ou sous l'autorité de ce dernier par tout inspecteur ou contrôleur de la recette et que le document peut être également signé par le directeur régional qui ne peut déléguer sa signature.

L'article 345 du code des douanes dans sa version applicable aux faits de l'espèce dispose que l'avis de mise en recouvrement est signé et rendu exécutoire par le directeur régional des Douanes ou le comptable des Douanes ainsi que sous l'autorité et la responsabilité de ce dernier, par un agent ayant au moins le grade de contrôleur.

Il résulte de cette rédaction que l'avis de mise en recouvrement doit être signé soit par le directeur régional des Douanes soit par le comptable des Douanes ou, sous la responsabilité de ce dernier, par un agent ayant le grade de contrôleur.

Il ne doit donc comporter que la signature d'une des personnes mentionnées à l'article 345.

En l'espèce, l'avis de mise en recouvrement du 23 septembre 2010 a été signé par Mme [X] [N], contrôleur principal des douanes, personne habilitée à le faire au regard des dispositions de l'article 345.

Dès lors, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté ce moyen de nullité.

Sur la violation des droits de la défense

La société Stock Man estime que l'avis de mise en recouvrement étant postérieur au 1er janvier 2010, date d'entrée en vigueur des articles 67 A, 67 B et 67 C du codes des douanes, les dispositions de ces articles devaient être respectées.

D'après elle, ils ne l'ont pas été puisque :

- le rapport de l'OLAF n'a été communiqué à son conseil qu'après le procès-verbal de notification d'infraction du 16 mars 2009 et après le premier AMR du 27 mars 2009, annulé ultérieurement par le tribunal d'instance,

- les annexes du rapport de l'OLAF et en particulier l'annexe 29 ne lui ont jamais été communiquées.

Elle estime que conformément à la jurisprudence résultant de l'arrêt de la Cour de justice de la communauté européenne du 18 décembre 2008 (arrêt Soprope), le droit du redevable à fournir ses observations doit pouvoir s'exercer avant décision de l'administration et de façon utile ce qui suppose que le redevable soit parfaitement informé de la teneur des griefs articulés à son encontre et des preuves de ces griefs avant décision défavorable de la douane et qu'il soit invité à répondre en temps utile.

Elle ajoute qu'indépendamment des articles 67 A à C du code des douanes, le droit d'être entendu, principe conventionnel dont il convient de contrôler l'application, n'a pas été respecté.

En effet, un élément essentiel à charge ne lui a pas été communiqué, avant ses déclarations contenues dans le procès-verbal du 16 mars 2009, à savoir le rapport complet de l'OLAF avec ses annexes et donc la preuve de la composition exacte des transpalettes qu'elle a importés et à partir de laquelle la douane estime que la part thaïlandaise est trop peu importante pour conférer une origine thaïlandaise non préférentielle, de sorte que ses déclarations ne pouvaient être utiles.

Elle estime dès lors que l'avis de mise en recouvrement est nul.

L'administration des douanes conteste cette analyse en faisant valoir que :

- le rapport de l'OLAF a été communiqué dans son intégralité à la société Stock Man alors qu'aucune disposition du code de douanes n'impose cette communication ;

- s'agissant des annexes, constituées de plus de 1100 documents pour la plupart en langues anglaise, thaïlandaise et chinoise, elle était dans l'impossibilité matérielle de les communiquer, outre le fait que la plupart de ces pièces contiennent des mentions relatives à d'autres sociétés ce qui nécessitait une traduction et l'occultation des mentions relatives aux sociétés du secteur ;

- au regard de l'article 338 du code des douanes, la non-communication du rapport de l'OLAF avant la notification de l'infraction n'est pas une cause de nullité du procès-verbal ;

- pendant toute la procédure d'enquête la société Stock Man a eu la possibilité de s'expliquer et de se faire entendre ;

- préalablement informée du contrôle, puis renseignée sur ses motifs, et enfin invitée à assister à la rédaction du procès-verbal et à y formuler des observations, elle a eu l'occasion de préparer et faire entendre ses moyens de défense à de multiples reprises ;

- en l'espèce, la mise en place de la procédure du droit d'être entendu est postérieure à l'établissement du procès-verbal de notification de l'infraction et en outre, au regard des exclusions prévues par l'article 67 D E et F du code des douanes, le droit d'être entendu ne s'applique pas en l'espèce.

La société Stock Man ne sollicite pas la nullité du procès-verbal du 16 mars 2009 pour un autre motif que celui tenant à la double signature ci-dessus rejeté, mais invoque la nullité de la procédure pour violation du principe conventionnel du respect des droits de la défense.

En effet le respect des droits de la défense rappelé dans l'arrêt Soprope de la CJCE, aujourd'hui CJUE, constitue un principe général du droit communautaire qui trouve à s'appliquer dès lors que l'administration se propose de prendre à l'encontre d'une personne un acte qui lui fait grief.

En vertu de ce principe les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue quant aux éléments sur lesquels l'administration entend fonder sa décision. A cet effet, ils doivent bénéficier d'un délai suffisant.

Cette jurisprudence a une portée générale ce qui a conduit, lors de l'adoption de la loi de finances rectificative pour l'année 2009, à modifier le code des douanes en y insérant, aux articles 67 A et 67 D, le droit pour la personne exposée à une décision défavorable, de faire valoir ses observations dans un délai de 30 jours suivant la délivrance par l'administration d'un document lui faisant connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci et les informations sur lesquelles elle sera fondée.

S'agissant d'un AMR délivré suite à un procès-verbal d'infraction, l'administration des douanes ne peut utilement invoquer les exclusions prévues au 'e' de l'article 67 D qui ne s'appliquent qu'aux avis de mise en recouvrement notifiés conformément à l'article 345 du présent code aux fins de recouvrement des créances impayées à l'échéance, à l'exception de celles qui ont été constatées à la suite d'une infraction au même code et 'f' de ce même article relatif aux mesures prises en application soit d'une décision de justice, soit d'un avis de mise en recouvrement notifié conformément à l'article 345.

Par ailleurs, s'agissant des droits anti-dumping, la société Stock Man est fondée à invoquer le principe du respect des droits de la défense, principe général du droit qui doit être respecté en toutes matières, dès lors qu'un agent investi de l'autorité publique dresse un acte ou prend une décision faisant grief.

Il convient donc d'examiner si la procédure suivie au cas d'espèce a respecté le droit pour la société Stock Man d'être entendue et de voir ses observations prises en considération par l'administration.

Il n'est pas contesté comme le souligne l'administration des Douanes que faisant suite au contrôle relatif à la validité de certains certificats d'origine thaïlandais relatés par procès-verbal des 24 août 2007, 9 octobre 2007 et 5 novembre 2007 dont l'administration ne démontre pas qu'ils ont été portés à la connaissance de la société Stock Man avant le contrôle du 16 mars 2009, celle-ci a fait l'objet à cette date d'un premier procès-verbal à 14 heures avec prise de rendez-vous le 23 février 2009 et qu'à cette occasion M. [Z], gérant de la société, a répondu aux questions du service et qu'un second procès-verbal a été établi le même jour à 15 heures 15, l'informant des conclusions de ce contrôle. Il a assisté à la rédaction du procès-verbal et a fait une déclaration qui tient en six lignes et où il conteste sur deux lignes les infractions relevées en indiquant 'nous ne savions pas que ce sont des produits d'origine chinoise et nous contestons totalement le redressement des droits'.

Le procès-verbal de notification du 16 mars 2009 signé par M. [Z], comporte l'objet du contrôle à savoir l'authenticité et la validité des certificats FORM A expressément désignés et la détermination de l'origine réelle des transpalettes en cas d'invalidation, un rappel de la réglementation applicable et des contrôles réalisés a posteriori. Il précise les éléments d'information et de constatations extraits du rapport de l'OLAF ainsi que des annexes considérés comme probants. S'en déduisent les conclusions qui ont conduit le service à retenir les infractions douanières notifiées à la société Stock Man, dont le gérant a été invité à présenter ses observations qui ont été relatées.

Par courrier du 23 mars 2009, le gérant de la société Stock Man a écrit à l'administration pour solliciter le rapport complet de l'OLAF en français ainsi que ses annexes.

Par courrier du 25 mars 2009, l'administration des douanes lui répondait qu'elle ne pouvait donner suite à sa requête étant donné que les documents demandés comportaient des informations et renseignements individuels qui ne pouvaient être portés à sa connaissance parce qu'ils concernent des tierces personnes étrangères à l'affaire et, qu'en toute hypothèse, les extraits du rapport de l'OLAF et de l'annexe 29 qui fondent la matérialité des faits qui lui sont opposés, sont intégralement reproduits dans le procès-verbal de notification du 16 mars 2009.

Le premier AMR intervenait deux jours après soit le 27 mars 2009.

Ce n'est que dans le cadre de la première procédure de contestation judiciaire de cet AMR et quelques jours avant la promulgation de la loi de finances du 30 décembre 2009 introduisant dans le code des douanes les article 67A à D relatifs au droit d'être entendu, que l'administration des douanes indiquait par courrier du 9 décembre 2009 qu'elle acceptait de communiquer le rapport de l'OLAF.

Dans la réponse qu'elle a adressée le 25 mars 2009 en réponse à la société Stock Man, l'administration des Douanes considère que la matérialité des faits, c'est-à-dire la preuve de ce que les transpalettes importés par la société Stock Man ont une origine thaïlandaise non préférentielle ou sont d'origine chinoise et sont donc soumis à un droit anti-dumping, résulte du rapport de l'OLAF et de son annexe 29.

La lecture du rapport de l'OLAF démontre que pour établir l'origine de ces transpalettes les enquêteurs ont étudié les flux de pièces composant ces transpalettes importés de Chine par plusieurs sociétés thaïlandaises dont GT Mover et ont indiqué que, hormis les châssis, les parties de transpalettes importés constituent des ensembles complets permettant de monter les transpalettes.

Ils ont établi une liste détaillée de ces lots (annexe 29).

Cette même annexe comprend également d'après ce rapport, le calcul de la valeur ajoutée qui permet notamment de déterminer si un produit est ou non originaire d'un pays.

Le rapport de l'OLAF précise en page 20 que 'chaque état membre est instamment invité à rechercher les lots importés correspondants sur la base des informations fournies dans ce rapport (voir notamment annexe 29)'.

Il résulte d'un courrier adressé par les douanes le 9 décembre 2009 à l'avocat de la société Stock Man en réponse à la contestation du premier AMR que le rapport de l'OLAF lui a alors été communiqué.

En revanche, il n'est pas contesté que les annexes à ce rapport dont l'annexe 29 qui est plusieurs fois visée dans le rapport de l'OLAF servant de base aux poursuites ne lui ont jamais été communiquées.

Il résulte de ce qui précède que si des échanges contradictoires ont eu lieu dans la phase préalable à la notification d'infraction, aucun n'a permis à société Stock Man de pouvoir engager avec la douane une quelconque discussion sur la taxation envisagée.

En effet, s'agissant des auditions recueillies par les douanes lors du contrôle, au cours desquelles le gérant aurait dû pouvoir faire valoir ses observations, il n'a pas eu connaissance de l'intégralité des éléments fondant les poursuites puisque seuls des extraits du rapport de l'OLAF sont retranscrits dans le procès-verbal et aucune annexe n'y figure, alors que ces documents sont ceux sur lesquels s'appuie l'administration des douanes pour considérer que les transpalettes importés par la société Stock Man étaient majoritairement d'origine chinoise.

Dès lors, au regard des seuls extraits du rapport de l'OLAF qui lui ont été communiqués au jour du contrôle il n'a pu faire des déclarations utiles.

Par la suite, avant l'émission tant du premier AMR que du second aucun débat n'a pu avoir lieu dans la mesure où l'administration des douanes a fait délivrer le premier AMR deux jours après avoir notifié à la société Stock Man son refus de lui communiquer le rapport de l'OLAF puis s'est empressée treize jours après l'annulation le 8 septembre 2010 par le tribunal d'instance de Bayonne du premier AMR pour des raisons de pure forme, d'émettre un nouvel AMR, objet de la présente contestation, alors qu'elle n'avait pas communiqué les annexes au rapport sur lesquelles elle fondait sa poursuite.

Il apparaît dès lors que l'administration des douanes a pris sa décision sans laisser préalablement à la société Stock Man la possibilité d'être entendue utilement en ses explications. Celles qui ont été fournies a posteriori dans le cadre de la première contestation n'ont pas été réellement examinées, puisque dès l'annulation du premier AMR un second AMR a été émis et qu'un des éléments essentiels que constitue l'annexe 29 du rapport de l'OLAF n'a jamais été communiqué à la société Stock Man malgré sa demande.

L'administration des douanes ne peut s'abriter devant le volume de ces annexes et sur leur contenu pour refuser de les communiquer dès lors qu'elles concernent la société objet du contrôle.

Il apparaît ainsi que l'administration des douanes n'a pas respecté le principe général des droits de la défense en ne permettant pas à la société Stock Man de faire valoir ses explications avant que ne soit prise à son encontre par l'autorité publique une décision lui faisant grief.

Le jugement déféré doit dès lors être infirmé.

Au regard des dispositions de l'article 367 du code des douanes, il n'y a pas lieu à condamnation au titre des frais non taxables de procédure et chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle a exposés tant en première instance qu'en appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Annule l'avis de mise en recouvrement délivré le 23 septembre 2010 à l'encontre de la SARL Stock Man pour la somme de 147 560 € (cent quarante sept mille cinq cent soixante euros) ;

Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Peyron, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Mireille PEYRONFrançoise PONS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12/01441
Date de la décision : 12/09/2013

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°12/01441 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-12;12.01441 ?
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