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27/11/2003 | FRANCE | N°02/07501

France | France, Cour d'appel de Rennes, 27 novembre 2003, 02/07501


COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2003 Huitième Chambre Prud'Hom R.G:02/07501 X... C/ S.A.R.L. MAT DE MISAINE COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ: Mme Francine SEGONDAT, Président, Mme Catherine LEGEARD, Conseiller, Monsieur François PATTE, Conseiller, ARRÊT:

Vu le jugement rendu le 9 octobre 2002 par le Conseil de Prud'hommes de NANTES qui, saisi par Madame Claudie X... embauchée le 2 novembre 2000 en contrat à durée déterminée de 3 mois en qualité d'animatrice de magasin par l'EURL MAT DE MISAINE laquelle a renouvelé le contrat le 31 janvier 2001 pour une

durée de 11 mois d'une demande de re qualification de son contrat e...

COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2003 Huitième Chambre Prud'Hom R.G:02/07501 X... C/ S.A.R.L. MAT DE MISAINE COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ: Mme Francine SEGONDAT, Président, Mme Catherine LEGEARD, Conseiller, Monsieur François PATTE, Conseiller, ARRÊT:

Vu le jugement rendu le 9 octobre 2002 par le Conseil de Prud'hommes de NANTES qui, saisi par Madame Claudie X... embauchée le 2 novembre 2000 en contrat à durée déterminée de 3 mois en qualité d'animatrice de magasin par l'EURL MAT DE MISAINE laquelle a renouvelé le contrat le 31 janvier 2001 pour une durée de 11 mois d'une demande de re qualification de son contrat en contrat à durée indéterminée et de diverses demandes indemnitaires dont l'une fondée sur le harcèlement moral, l'a débouté de toutes ses demandes et condamné à payer 20 euros à l'EURL MAT DE MISAINE au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Vu l'appel formé le 22 octobre 2002 par madame X... et ses conclusions déposées le 21 juillet 2003 oralement reprises à l'audience tendant à l'infirmation du jugement, à la re qualification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et à la condamnation de la société MAT DE MISAINE à lui payer 3.049 euros au titre de l'article L. 122-3-13 du Code du Travail, 10.976,33 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.829,40 + 182,94 euros au titre du préavis, 1.829,10 euros pour irrégularité de procédure, 7.622,45 euros en réparation du préjudice moral subi, les intérêts légaux et 1.524,99 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Vu les conclusions déposées le 16 octobre 2003 oralement reprises à l'audience par la SA MAT DE MISAINE tendant à la confirmation du jugement, au débouté de toutes les demandes et à la condamnation de Madame X... à lui payer 3.000 euros au titre de l'article 700 du

Nouveau Code de Procédure Civile.

I - Sur la re qualification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

Considérant que la société MDM a pour activité la commercialisation de vêtements de prêt à porter au travers d'un réseau de magasins et de magasins d'usine ;

Considérant que suivant contrat à durée déterminée en date du 31 octobre 2000 elle a engagé Madame X... à compter du 2 novembre 2000 "en vue de répondre à la nécessité qui s'impose à l'entreprise de renforcer son personnel pour faire face à une surcharge de travail dans les magasins d'usine suite la réorganisation du magasin de TROYES" ;

Considérant que le contrat prévoyait qu'elle occuperait les fonctions "d'animatrice des magasins d'usine", que son lieu de travail principal serait à LA SEGUINIERE (49) et qu'elle pourrait être amenée à effectuer régulièrement des déplacements au magasin de PONT SAINTE MARIE (TROYES) dans l'AUBE (10) ;

Considérant que suivant avenant au contrat à durée déterminée en date du 31 janvier 2001, les parties ont décidé de renouveler le contrat pour une durée de 11 mois au motif que la surcharge temporaire de travail liée à la réorganisation du magasin de TROYES ne s'était toujours pas résorbée ;

Considérant que l'avenant prévoyait en outre que le lieu principal de travail de Madame X... se situerait à SAINT GILLES CROIX DE VIE au siège social de la SA MAT DE MISAINE et que, à raison de son rôle d'animatrice de magasins, Madame X... serait amenée à effectuer des déplacements dans tous les magasins existants ou à créer et qu'elle pourrait être amenée à se déplacer chez les clients ;

Considérant qu'aux termes d'un second avenant en date du même jour, les horaires de travail ont également été modifiés ;

Considérant que pour critiquer le jugement qui a refusé de re qualifier le contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée au motif que toutes les activités exercées par elle pendant la durée de son contrat (réorganisation du magasin de TROYES, mise en place de la manifestation du retour du VENDEE GLOBE, salon "Embarque à NANTES", vente exceptionnelle sous chapiteau à LA SEGUINIERE) ont un caractère temporaire et ne relèvent pas de l'activité normale et permanente de l'entreprise, Madame X... fait valoir que le motif invoqué dans le contrat ne correspond absolument pas aux missions confiées en fait puisqu'elle n'a consacré qu'une petite partie de son activité à la réorganisation du magasin de TROYES et qu'il lui a été demandé de se consacrer aux tâches normales et habituelles de l'entreprise, les missions confiées faisant partie intégrante de la politique commerciale de l'entreprise;

Considérant en fait que l'analyse du motif du recours au contrat à durée déterminée tel qu'énoncé dans le contrat et dans l'avenant au contrat montre que le contrat a été conclu pour faire face à un surcroît d'activité, ce qui constitue un motif autorisé par l'article L. 122-1-1-2ème du Code du Travail, surcroît consécutif à la réorganisation du magasin de TROYES, laquelle avait entraîné une surcharge d'activité non encore résorbée le 31 janvier 2001 ;

Considérant que la cause du recours au contrat à durée déterminée s'apprécie à la date de conclusion de celui-ci ;

Considérant qu'il n'est pas contesté par les parties qu'à la date de signature du contrat et de l'avenant, la surcharge d'activité due à la réorganisation du magasin de TROYES était patente ;

Considérant qu'il résulte du planning versé aux débats que Madame X... y a été affectée parmi d'autres taches au moins jusqu'au 13 janvier 2001 ;

Considérant par ailleurs que la possibilité donnée à l'employeur de conclure un contrat à durée déterminée pour accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise n'implique pas pour lui l'obligation d'affecter le salarié à des taches directement liées à ce surcroît d'activité ;

Qu'il s'ensuit que la société MDM pouvait parfaitement affecter Madame X... recrutée en qualité d'animatrice des magasins d'usine tant à des tâches de réorganisation du magasin de TROYES qu'à des tâches d'animation relevant de l'organisation de manifestations commerciales ou de la mise en place de boutique ou de vente sous chapiteau, sans que pour autant ses missions temporaires ne relèvent de l'activité permanente de l'entreprise ;

Que dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame X... de sa demande de re qualification.

II - Sur le harcèlement

Considérant que pour critiquer le jugement qui a estimé que les faits reprochés (retrait du téléphone portable, changement de bureau, obligation de se présenter chaque matin dans le bureau de son supérieur hiérarchique) ne caractérisaient pas un harcèlement moral et avaient été décidés dans l'intérêt de l'entreprise, Madame X... soutient qu'elle s'est vue à partir de mars 2001 confier des tâches sans rapport avec sa qualification d'animatrice de magasin, qu'elle n'est pas la première victime des agissements de Madame Y..., qu'elle a du faire face à ses attaques humiliantes, dégradantes et récurrentes, avoir recours aux antidépresseurs et n'a pu reprendre le travail, ce qui caractérise le harcèlement moral ;

Considérant qu'en cause d'appel Madame X... verse aux débats 5 attestations ou lettre d'anciens salariés de la société MDM qui affirment de manière concordante qu'ils ont été victimes de harcèlement moral de la part de la gérante Madame Y... et qui

décrivent de manière circonstanciée son attitude humiliante, vexatoire et pesante à leur égard ;

Considérant que s'il n'est pas disconvenu que ces documents n'apportent aucun éclairage sur la façon dont Madame Y... se comportait à l'égard de Madame X..., ils illustrent en revanche un comportement que celle-ci dénonce et sont de nature à accréditer ses déclarations ;

Considérant en effet que celles-ci sont corroborées non seulement par ces témoignages concordants mais encore par le certificat médical du 25 septembre 2001 dont il résulte que Madame X... a suivi un traitement antidépresseur du 30 avril 2001 au 30 juillet 2001 en raison de problèmes professionnels, par les arrêts de travail successifs qu'elle a subis et par le fait que la société MDM ne conteste pas les faits dénoncés par la salariée mais les justifie par l'intérêt de l'entreprise alors qu'on voit mal l'intérêt de lui reprendre son téléphone portable au motif qu'elle n'en avait pas besoin après lui en avoir confié un, l'intérêt de lui imposer brutalement de passer tous les matins au bureau de la gérante alors que ce n'était pas la pratique antérieure, l'intérêt de lui confier le suivi des chiffres d'affaires et heures travaillées à la comptabilité sous le regard de la gérante alors qu'elle était animatrice de magasin, l'intérêt pour Madame X... d'obtenir des arrêts de travail alors qu'elle était en contrat à durée déterminée ; Qu'en réalité le rapprochement de ces divers éléments qui établissent qu'il a été porté atteinte, par leur conjonction et leur répétition, à la dignité et à la santé psychique de Madame X... démontre que celle-ci a bien été victime de harcèlement moral ;

Considérant qu'il lui sera accordé de ce chef une somme de 1.500

euros à titre de dommages intérêts compte tenu du préjudice subi.

III - Sur les demandes annexes

Considérant que succombant sur le harcèlement moral, la société MDM supportera les dépens et ne peut bénéficier des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant que l'équité commande de faire partiellement droit à la demande de Madame X... fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

DECISION

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme le jugement déféré.

Condamne la société MAT DE MISAINE à payer à Madame X... 1.500 euros à titre de dommages intérêts et 1.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La déboute du surplus de ses demandes.

Déboute la société MAT DE MISAINE de sa demande fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile tant en première instance qu'en cause d'appel.

La condamne aux entiers dépens. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Numéro d'arrêt : 02/07501
Date de la décision : 27/11/2003

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Cas de recours autorisés - Accroissement temporaire d'activité

Eu égard à l'article L.122-1-1-2ème du Code du Travail, la surcharge d'activité due à la réorganisation de l'entreprise constitue un motif de recours à un contrat à durée déterminée. La cause de ce recours s'apprécie à la date de la conclusion du contrat.Par ailleurs, la possibilité donnée à l'employeur de conclure un contrat à durée déterminée pour accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise n'implique pas pour lui l'obligation d'affecter le salarié à des tâches directement liées à ce surcroît d'activité. En l'espèce, a été rejetée une demande de requalification d'un contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée dans la mesure où d'une part, à la date de la signature du contrat et de l'avenant, la surcharge temporaire d'activités liée à la réorganisation de l'entreprise était patente et où d'autre part, l'employeur peut parfaitement affecter son employée engagée sous contrat à durée déterminée à une tâche non directement liée au surcroît d'activité, sans que pour autant ces missions temporaires ne relèvent de l'activité permanente de l'entreprise.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2003-11-27;02.07501 ?
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